Trêve de Douze Ans

La trêve de Douze Ans est une période de cessez-le-feu qui a eu lieu de 1609 à 1621 au cours de la guerre de Quatre-Vingts Ans (1568-1648), entre les Provinces-Unies, formées par les sept provinces septentrionales (Hollande, Zélande, Frise, etc.) des Pays Bas, révoltées contre le roi d'Espagne, maître des provinces du sud (Brabant, Flandre, Hainaut, etc.).

La trêve de Douze Ans promulguée à Anvers, gravure de Frans Hogenberg, 1616.

La trêve, au départ de durée non définie, est instituée par le traité d'Anvers, du 9 avril 1609.

Contexte

Les 17 provinces des Pays-Bas (de la Frise à la Flandre), qui faisaient partie des possessions du duc de Bourgogne Charles le Téméraire, ont échu, par le jeu des mariages et héritages, à la famille des Habsbourg (Charles Quint), puis à la famille des Habsbourg d'Espagne (Philippe II). Hostiles à la religion réformée qui se répand aux Pays-Bas, les rois d'Espagne (en même temps comtes de Flandre, etc.), suscitent la révolte des protestants en 1568, révolte qui débouche sur la sécession des sept provinces du nord, dont la population est majoritairement calviniste : Philippe est déchu de ses titres sur ces provinces (acte de la Haye, 1581) qui établissent la République des sept Provinces-Unies des Pays-Bas.

La révolte devient donc une guerre, mais les positions ne vont pas beaucoup varier dans les décennies suivantes. En 1600, l'armée des Provinces-Unies, conduite par Maurice de Nassau, remporte une victoire à Nieuport, assurant la tranquillité de facto des Provinces-Unies.

Celles-ci se lancent alors dans l'expansion maritime et coloniale, avec notamment la création en 1602 de la Compagnie néerlandaise des Indes orientales (VOC) et le gouvernement veut développer une puissante marine (commerciale et militaire) pour s'assurer la prédominance sur mer.

Les négociations et le traité d'Anvers

En 1608, des négociations sont entamées à La Haye entre les Provinces-Unies et l'Espagne avec la médiation de l'Angleterre et de la France, représentée par Jean Hotman, qui veulent stabiliser la région de la mer du Nord.

Ces pourparlers aboutissent le à la signature du traité d'Anvers, qui établit une trêve de durée indéterminée pendant laquelle existera la liberté du commerce maritime.

Les Provinces-Unies pendant la trêve

Les divisions politiques : arminiens et gomaristes

Durant la trêve, deux factions émergent dans le camp hollandais, divisées aussi bien sur le plan politique que sur le plan religieux. D'un côté, les remontrants ou arminiens, avec pour champion le grand-pensionnaire Johan van Oldenbarnevelt et Hugo Grotius[1], sont de grands bourgeois républicains ouverts à une interprétation de la Bible moins littérale que les calvinistes de stricte obédience. Leurs adversaires sont les extrémistes gomaristes, partisans d'une théocratie à la Calvin. Ils ont ouvertement fait allégeance au stathouder Maurice de Nassau en 1610[2].

En 1617, l'opposition entre ces deux partis tourne à la guerre civile avec le vote d'un « choix tranché » (en néerlandais scherpe resolutie) par lequel les villes sont autorisées à réprimer l'activisme des gomaristes. Le stathouder Maurice accuse lors du synode de Dordrecht le grand-pensionnaire van Oldenbarnevelt de haute trahison, le fait arrêter et exécuter le à La Haye. Hugo Grotius s'enfuit de la forteresse de Loevestein où il est détenu en attente de son jugement et quitte le pays[1]. Cette affaire ébranle la confiance des États généraux.

L'expansion en Asie

Les Hollandais mettent à profit cette période pour équiper et développer leur marine qui va ultérieurement jouer un rôle déterminant dans le cours de la guerre. La trêve de Douze Ans leur permet aussi de s’assurer le contrôle de l’Asie du Sud-Est face aux Anglais : la Compagnie néerlandaise acquiert des positions importantes : les îles Amboine et Banda sont occupées, un comptoir est installé à Banten. Des traités d’amitiés sont signés avec de nombreux princes locaux, dont celui de Makassar, des agents sont envoyés à Bornéo (diamants). La trêve garantit la paix dans les mers d’Europe et libère une partie de la flotte pour le contrôle des îles à épices. Les actionnaires touchent des dividendes substantiels (17 % en 1605, 75 % en 1606, 40 % en 1607, 20 % en 1609, 50 % en 1610). Le [3], la Compagnie néerlandaise des Indes orientales ouvre un comptoir à Hirado au Japon. L'épanouissement économique favorise le climat artistique. Les peintres, comme Pierre Paul Rubens et Antoine van Dyck, reçoivent de nombreuses commandes.

La fin de la trêve

En 1621, les exigences des Espagnols mettent fin à la trêve.

Ambrogio Spinola maintient le blocus de Bréda (1624) et Maurice de Nassau échoue à reprendre Anvers (1625).

À sa mort, le , c'est son demi-frère Frédéric-Henri d'Orange-Nassau qui lui succède, comme stathouder des provinces de Hollande, de Zélande, d'Utrecht, d'Overijssel et de Gueldre et comme capitaine et amiral de l'Union. Il remporte aussitôt de nombreux succès militaires.

Notes et références

(en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Twelve Years' Truce » (voir la liste des auteurs).
  1. John L. Motley, « The Life and Death of John of Barneveld », sur Projet Gutenberg, .
  2. (en) J. I. Israel, The Dutch Republic : Its Rise, Greatness, and Fall 1477-1806, Oxford University Press, (réimpr. 2nde (1re éd. 1995)), 431 p., paperback (ISBN 0-19-820734-4).
  3. « Van hier tot Tokio. 400 jaar handel met Japan » D’ici à Tokyo. 400 ans de commerce avec le Japon »] [archive du ], sur gahetna.nl, (consulté le ) : « Le premier poste de commerce néerlandais est situé à Hirado. Dans la lutte japonaise contre le christianisme, le Shôgun décide trente ans plus tard que le pays doit être protégé de toute influence étrangère. Seuls les Hollandais peuvent séjourner sur l’île isolée de Deshima. Chaque année, les principaux responsables néerlandais rendent visite au Shôgun. Ils surchargent le Shôgun des curiosités qu’il commande, comme des chevaux, un plongeur de perles et de la porcelaine bleue de Delft. Aucun effort n’est épargné pour plaire au Shôgun, tout cela pour préserver le monopole commercial [néerlandais]. »

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