Traite des Blanches
La traite des Blanches est un trafic de femmes consistant à entraîner ou détourner des femmes d'origine européenne ou autres (femmes « blanches ») pour les livrer à la prostitution forcée. Ce système est parfois défini comme esclavage sexuel.
Dans la Rome antique
La traite des blanches dans la Rome antique n'est pas distincte de l'esclavage sous la Rome des Empereurs[réf. nécessaire].
Au Proche et Moyen-Orient
La traite des esclaves blanches est essentiellement liée à la culture du harem, celle de l'ère ottomane en particulier. Dans l'Empire ottoman et en Perse, les femmes circassiennes, parfois vendues par leurs parents[1],[2], étaient particulièrement recherchées[3],[4],[5].
Les esclaves européennes proviennent de rafles lors d'expéditions en Europe, essentiellement des pays bordant la Méditerranée, des territoires sous domination ottomane et des pays voisins de ces territoires, mais aussi du Royaume-Uni et parfois d'Europe du Sud. Elles étaient ensuite exposées sur des marchés, excisées[réf. nécessaire], puis achetées par les trafiquants dans de lointains pays. La plupart du temps, il s'agissait de sultans qui approvisionnaient leurs harems en esclaves.
Au Xe siècle, le Perse Ibn al-Faqih écrit : « De la mer occidentale, arrivent en Orient les esclaves hommes, romains (italiens), francs, lombards et les femmes romaines et andalouses ». Le mouvement orientaliste a abordé par la peinture au XIXe siècle le thème de la femme blanche réduite à l'esclavage, en représentant des femmes blanches au harem.[réf. nécessaire]
Dans les réseaux de proxénétisme contemporains
Avant les années 1950, l'expression « traite des Blanches » désigne l'envoi régulier et organisé par des proxénètes de prostituées européennes vers les maisons closes d'Amérique latine à l'exemple de Marie Paoleschi. Aux États-Unis, des souteneurs attendant des femmes migrantes sur les ports pour les faire travailler dans la rue, ce qui donne naissance à la loi Mann qui interdit de faire passer des femmes d'un État à un autre « dans un but immoral »[6]. Ce phénomène débute vers 1890, est transatlantique et complexe mais il est comparable à la traditionnelle « remonte » limitée à la France. Ainsi les prostituées françaises insoumises étaient-elles envoyées dans des lupanars d'Afrique du Nord[réf. nécessaire]. Au-delà des femmes françaises, étaient concernées des Espagnoles, des Polonaises, des Russes, etc.[réf. nécessaire]
Après 1960, le milieu marseillais envoie des femmes françaises dans les maisons closes d'Allemagne. Au XXIe siècle, des réseaux analogues fonctionnent pour placer des Roumaines ou Ukrainiennes en Europe de l'Ouest. Le film de Léo Jonannon, le Désert de Pigalle évoque également le Liban.[réf. nécessaire]
Critiques de la traite blanche
Thèse de Jean-Michel Chaumont
Le philosophe Jean-Michel Chaumont, sociologue et auteur belge, attaché à l'Université catholique de Louvain, explique lors d'une interview accordée en 2009 au magazine Sciences humaines que la traite des blanches est un mythe qui repose sur « une escroquerie intellectuelle » qui daterait de la fin du XIXe siècle, période où des rumeurs d'enlèvements de jeunes filles françaises seraient organisés par des réseaux de prostitution qui les déporteraient dans d'autres pays. Les faits, qui furent confirmés par un rapport publié par un comité d’experts de la Société des nations en 1927, s'avèrent sans fondement selon Jean-Michel Chaumont, qui accuse ces experts d'avoir « manipulé les résultats de l’enquête pour prouver la réalité de la traite[7]. »
La Rumeur d'Orléans
Le thème de la traite des blanches est analysé en 1969 dans l'ouvrage sociologique La Rumeur d'Orléans d'Edgar Morin. Il apparaît en effet, au cœur de la rumeur fantaisiste qu'il a étudiée, selon laquelle des jeunes filles utilisant les cabines d'essayage des magasins du centre-ville orléanais tenus par des Juifs auraient été droguées et enlevées via les souterrains de la ville dans le but d'être revendues comme esclaves quelque part hors du territoire français.
Au cinéma
- La Traite des Blanches, un film danois muet de 1910 réalisé par August Blom ;
- La Traite des Blanches : un danger international, film muet allemand de 1927 réalisé par Jaap Speyer ;
- Le Chemin de Rio, un film français réalisé par Robert Siodmak et sorti en 1937 (film policier où une journaliste s'infiltre dans un réseau de traite de blanches vers Rio) ;
- Le Désert de Pigalle, un film français de 1958, réalisé par Léo Joannon qui évoque le monde de la prostitution, le proxénétisme et la traite des blanches dans le quartier Pigalle à Paris et de la lutte d'un prêtre qui s'oppose au milieu.
- La Vie nouvelle, film français de Philippe Grandrieux, 2002 ;
- Terre promise, film franco-israélien d'Amos Gitaï (2004) ;
- Matrioshki : Le Trafic de la honte, téléfilm belge de Guy Goossens et Marc Punt (2004) ;
- Sex Traffic, téléfilm de David Yates (2004) (deux sœurs roumaines partent, avec un petit ami, travailler à l'ouest. Il les vend à des proxénètes) ;
- Human Trafficking, film canadien de Christian Duguay, 2005. Une fiction qui plonge le spectateur dans le monde du proxénétisme et de la traite des blanches ;
- Esclaves sexuelles, documentaire canadien de Ric Esther Bienstock, qui retrace le cheminement des victimes depuis le départ de leurs pays, tout en apposant un visage sur cette réalité et en y exposant les conséquences (2005);
- Taken, film français de Pierre Morel, 2008 (titre québécois : L'enlèvement) ;
- Seule contre tous, film canadien de Larysa Kondracki (2010) qui dénonce l'esclavage sexuel après la guerre d'indépendance de Bosnie, inspiré de l'histoire de Kathryn Bolkovac ;
- The Price of Sex (en), documentaire de 2010 par Mimi Chakarova ;
Notes et références
- Les Femmes publiques, ou la vie des prostituées, par T. Q. N., Bruxelles, 1854, p. 21.
- Voyages en Europe par Walsh, Paris, 1855, p. 19.
- Léon Lamouche, Histoire de la Turquie : depuis les origines jusqu'à nos jours, Paris : Payot, 1953, p. 172.
- Georges Dorys, La femme turque, Paris : Plon-Nourrit et Cie, 1902, p. 258.
- Conrad Malte-Brun, Géographie universelle de Malte-Brun : revue, rectifiée et complètement mise au niveau de l'état actuel des connaissances géographiques par E. Cortambert, tome VIII, Paris : Dufour, Mulat et Boulanger, 1860, p. 316.
- (en) Françesco Cordasco et Thomas Monroe Pitkin, The White Slave Trade and the Immigrants, Blaine Ethridge Books, , 118 p.
- « La traite des Blanches, histoire d'une manipulation », Sciences humaines, no 207, août-septembre 2009.
Voir aussi
Bibliographie
- Ouvrages anciens
- René Cassellari, La Traite des blanches et le vice, étude sociale et révélations, avec une préface du détective René Cassellari, Détective Magazine, Paris, 1914, 32 p.
- L. Layrac, La traite des blanches et l'excitation à la débauche, V. Girard et F. Brière, Paris, 1904
- Vittorio Levi, La prostitution chez la femme et la traite des blanches, Imp. Castiglione, Naples, 1912, 128 p.
- Albert Londres, La Traite des blanches ; suivi de La Traite des noires, Union générale d'éditions, Paris, 1984, 438 p. (ISBN 2-264-00640-4)
- F. Tacussel, La traite des blanches, J. Bonhoure, Paris, 1877, 36 p.
- Clotilde Dissard, « La traite des blanches », in La Fronde, n° du .
- Ouvrages contemporains
- Marie Paoleschi, Marie La Jolie - De Marseille et de Pigalle à Buenos Aires, Rio, Caracas, Saïgon, Biskra... Sur les Chemins de la Traite des Blanches, Robert Laffont, 1979, 351 p.
- (en) Claudia Aradau, Rethinking trafficking in women : politics out of security, Palgrave Macmillan, Basingstoke, 2008, 225 p. (ISBN 978-0-230-57331-4)
- Jean-Michel Chaumont, Le mythe de la traite des blanches. Enquête sur la fabrication d'un fléau, La Découverte, Paris, 2009, 324 p. (ISBN 978-2-7071-5809-3)
Articles connexes
- Convention internationale relative à la répression de la traite des blanches de 1910
- Articles décrivant les phénomènes liés à l'esclavage sexuel :
Liens externes
- Portail de l’esclavage
- Portail des femmes et du féminisme
- Portail de la sexualité et de la sexologie
- Portail de la criminologie