Transformation de Nielsen
En mathématiques, et notamment dans le domaine de l'algèbre, les transformations de Nielsen sont un outil important dans la théorie combinatoire des groupes. Ce sont certains automorphismes d'un groupe libre et elles sont très utiles dans l'étude des groupes libres[1]. Elles portent le nom du mathématicien danois Jakob Nielsen, qui les a introduites en 1921 pour prouver que tout sous-groupe d'un groupe libre est libre (le théorème de Nielsen-Schreier), et elles sont maintenant utilisées dans une variété de domaines mathématiques.
Définition
Soit un groupe et soit un -uplet d'éléments de . Une transformation de Nielsen élémentaire est une substitution de l'un des trois types suivants :
- remplacement de par pour un ;
- échange de et pour deux ;
- remplacement de par pour deux .
Une transformation de Nielsen est une suite finie de transformations de Nielsen élémentaires. Deux uplets sont dits Nielsen-équivalents s'ils résultent l'un de l'autre par une transformation de Nielsen.
Applications
Systèmes générateurs de groupes libres
Soit le groupe libre à générateurs . Alors tout ensemble minimal de générateurs a éléments, et un -uplet est générateur si et seulement s'il est Nielsen-équivalent à [2],[3].
Systèmes générateurs de groupes fondamentaux
Soit le groupe fondamental d'une surface de genre . Alors tout système de générateurs minimal a éléments et un -uplet est générateur si et seulement s'il est Nielsen-équivalent à [4].
Théorème de Nielsen-Schreier
Nielsen donne, dans son article de 1921[3], une preuve combinatoire directe du fait que tout sous-groupe de type fini d'un groupe libre est libre. L'article montre que tout ensemble générateur fini d'un sous-groupe d'un groupe libre est Nielsen-équivalent à un ensemble générateur réduit de Nielsen, et qu'un ensemble générateur réduit de Nielsen est une base libre pour le sous-groupe, donc que le sous-groupe est libre[5].
Groupes d'automorphismes
Nielsen montre[6] que les automorphismes définis par les transformations élémentaires de Nielsen engendrent tout le groupe d'automorphismes d'un groupe libre de type fini. Nielsen, et plus tard Bernhard Neumann, ont utilisé ces idées pour donner des présentations finies des groupes d'automorphismes des groupes libres[7].
Problème de mots
Un cas particulièrement simple du problème du mot pour les groupes et du problème de l'isomorphisme pour les groupes est de savoir si un groupe de présentation fini est trivial. Ce problème est connu pour être intraitable en général, même s'il existe une suite finie de transformations de Tietze élémentaires amenant la présentation à la présentation triviale si et seulement si le groupe est trivial. Un cas particulier est celui dit des « présentations équilibrées », qui sont des présentations finies avec un nombre égal de générateurs et de relateurs. Pour ces groupes, il existe une conjecture selon laquelle les transformations requises sont beaucoup plus simples (en particulier, elles n'impliquent pas l'ajout ou la suppression de relateurs). Si l'on permet de prendre les relateurs de n'importe quel ensemble Nielsen-équivalent et de conjuguer les relateurs, alors on obtient une relation d'équivalence sur les sous-ensembles ordonnés des relateurs d'un groupe finiment présenté. La conjecture d'Andrews-Curtis est que les relateurs de toute présentation équilibrée du groupe trivial sont équivalents à un ensemble de relateurs triviaux, où chaque générateur est l'élément d'identité.
Les transformations de Nielsen permettent[8] de résoudre le problème du mot généralisé pour les groupes libres, aussi connu sous le nom de problème d'appartenance aux sous-groupes donnés par les ensembles finis de générateurs.
Notes et références
- (en) Benjamin Fine, Gerhard Rosenberger et Michael Stille, « Nielsen transformations and applications: a survey », dans A. C. Kim et D. L. Johnson (éditeurs), Groups – Korea '94 : Proceedings of the International Conference Held at Pusan National University, Pusan, Korea, August 18-25, 1994, Walter de Gruyter, (ISBN 978-3-11-014793-3, Math Reviews 1476950, lire en ligne), p. 69-105.
- (de) Jakob Nielsen, « Über die Isomorphismen unendlicher Gruppen ohne Relation », Math. Ann., vol. 79, no 3, , p. 269-272 (DOI 10.1007/BF01458209).
- (da) Jakob Nielsen, « Om regning med ikke-kommutative faktorer og dens anvendelse i gruppeteorien », Math. Tidsskrift B, , p. 78-94 (zbMATH 48.0123.03).
- (de) Heiner Zieschang, « Über die Nielsensche Kürzungsmethode in freien Produkten mit Amalgam », Invent. Math., vol. 10, , p. 4-37 (DOI 10.1007/BF01402968, zbMATH 0185.05203, lire en ligne).
- Cette preuve est détaillée dans (en) Wilhelm Magnus, Abraham Karrass et Donald Solitar, Combinatorial Group Theory, Dover Publications, , xii+444 (ISBN 978-0-486-43830-6, Math Reviews 0207802), chap. 3.2.
- (de) Jakob Nielsen, « Die Isomorphismengruppe der freien Gruppen », Math. Ann., vol. 91, nos 3-4, , p. 169-209 (DOI 10.1007/BF01556078, zbMATH 50.0078.04).
- Magnus, Karrass et Solitar (2004), p. 131, Th 3.2.
- Magnus, Karrass et Solitar (2004), p. 131-132.
- Magnus, Karrass et Solitar (2004), chap. 3.4.
Bibliographie
- (en) Daniel E. Cohen, Combinatorial Group Theory: a topological approach, Cambridge University Press, coll. « London Mathematical Society Student Texts » (no 14), (ISBN 978-0-521-34133-2, DOI 10.1017/CBO9780511565878, Math Reviews 1020297, lire en ligne)
- (en) Roger Lyndon et Paul E. Schupp, Combinatorial Group Theory, Springer-Verlag, (ISBN 978-3-540-41158-1, Math Reviews 0577064, lire en ligne)
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