Programme Viking

Le programme Viking est un programme spatial de la NASA qui a posé les premiers engins américains sur le sol martien. Dans le cadre de ce programme, deux sondes spatiales identiques, Viking 1 et Viking 2, ont été lancées en 1975 par une fusée Titan équipée d'un dernier étage Centaur à un mois d'intervalle. Chacune de ces missions comprenait un engin destiné à se placer en orbite autour de la planète et un module qui devait se poser sur le sol et mener des investigations en restant fixe. Les objectifs scientifiques étaient de réaliser des images à haute résolution de la surface de la planète, de déterminer la structure et la composition de l'atmosphère et d'identifier éventuellement la présence de la vie sur Mars.

Pour les articles homonymes, voir Viking (homonymie).

Programme Viking
Données générales
Site www.nasa.gov/mission_pages/viking
Caractéristiques techniques
Décollage de Viking 1 à bord d'une fusée Titan-III-Centaur.

Le programme Viking a remplacé le programme Voyager Mars qui avait été planifié dans le cadre du programme Apollo et qui fut abandonné. Le programme Viking reste à ce jour la plus ambitieuse et la plus coûteuse des missions envoyées vers Mars avec un budget de 3,8 milliards US$ (actualisé à 2014). Les différents modules composant le programme Viking ont fonctionné selon le cas durant 1 à 6 ans. Les sondes spatiales Viking ont permis de découvrir que de nombreuses formations géologiques à la surface de Mars avaient été formées par l'action de l'eau. Par contre, malgré l'emport d'instruments d'analyse sophistiqués, elles n'ont pas permis de déterminer si des formes de vie étaient présentes dans le sol martien.

Historique

Maquette du module d'atterrissage Viking (Musée de la Villette, Paris).

Le début du programme Viking s'inscrit dans la continuité du Programme Mariner et de ses sondes qui ont visité Mars. C'est ainsi que dès 1969, le Jet Propulsion Laboratory (JPL), responsable du programme Mariner, envisage d'effectuer un atterrissage sur le sol martien[1].

De son côté, dès 1964, la NASA envisage d'envoyer un engin atterrir sur Mars, ce programme appelé Voyager n'a strictement rien à voir avec le programme Voyager (qui, lui, avait pour objectif d'envoyer deux sondes spatiales étudier les planètes du système solaire les plus éloignées). En raison d'un coût trop élevé, le programme Voyager martien est abandonné en 1967.

Le programme Viking tel qu'il a été réalisé démarre officiellement en décembre 1968. Le centre de la NASA de Langley, à Hampton en Virginie, est responsable de la gestion globale du projet et de la supervision du module d'atterrissage. Sa conception sera confiée à une entreprise privée, Martin Marietta Aerospace à Denver dans le Colorado. Le JPL sera quant à lui responsable de l'orbiteur, du module de navigation jusqu'à Mars, de l'acquisition des données et de la gestion de la mission à compter de son départ vers la planète rouge. La réalisation du lanceur sera confiée au centre de recherche Lewis de la NASA, à Cleveland dans l'Ohio.

Difficultés budgétaires

Quand il fut présenté devant le Congrès américain en mars 1969, le projet Viking était estimé à 364,1 millions de dollars. En août de la même année, il était estimé à 606 millions avec un coût additionnel de 50 millions pour la fusée de lancement. Ces dépassements dans un contexte budgétaire sévère allaient inciter les divers acteurs du projet à arbitrer en permanence leurs dépenses.

Le 29 mai 1969, le Dr Paine, administrateur de la NASA, annonça que la NASA avait alloué un budget complémentaire pour un montant de 280 millions de dollars[2]. Les ingénieurs de Langley commencèrent l'évaluation du système d'atterrissage proposé par les contractants afin d'identifier les modifications qui pourraient être réalisées avant que les négociations en vue de l'établissement d'un contrat définitif entre la NASA et Martin Marietta ne débutent. Ces modifications furent documentées dans une liste d'achat qui consistait en 18 points de négociation entre les parties.

L'été 1969 fut à la fois exaltant et difficile pour le projet : Apollo 11 avait atterri sur la Lune mais, dans le même temps, le budget de la NASA était sévèrement réduit. Bien qu'ardent supporter du projet Viking, Thomas O. Paine, administrateur depuis le mois de mars, commença à militer pour une réduction des coûts du programme Viking dès juin 1969[3].

On chercha pendant tout le programme à inciter les contractants à réduire leurs coûts de développement. Ainsi le montant final du contrat de Martin Marietta fut fixé à 299,1 millions de dollars et approuvé par Paine le 20 octobre. Les coûts supportés à ce stade par Martin Marietta furent évalués à 14,53 millions de dollars, mais le budget complémentaire alloué permettait à l'entreprise de gagner plus d'argent si le coût de développement final était d'un montant inférieur aux 299,1 millions prévus. Des pénalités étaient également prévues en cas de dépassement : chaque dollar de coût non prévu devait entraîner 15 cents de pénalité (15 %), et inversement, chaque dollar économisé rapportait à l'entreprise un bonus de 15 cents[4].

Le coût total du projet Viking fut d'environ 915 millions de dollars américains[5].

Lancement des sondes

Lancement de Viking 2.

À l'origine, le lancement des sondes devait être effectué en 1973, mais à la suite de problèmes de budget, la NASA recula de deux ans le projet. Cette décision s'avéra finalement une aubaine pour les différentes équipes techniques du programme. Une maquette de sonde Viking sert de charge utile pour le premier essai du lanceur Titan E Centaur le . La fusée doit être autodétruite à cause d'une déviation de trajectoire lors de son lancement. Finalement, c'est en 1975 que les deux sondes s'envolent vers Mars, le 20 août pour Viking 1 et le 9 septembre pour Viking 2. Après un voyage d'un peu moins d'un an, Viking 1 se place en orbite le , elle est rejointe par Viking 2 le 9 août sur son orbite. Les deux atterrisseurs se posent sur le sol martien le 20 juillet pour Viking 1 et le 3 septembre pour Viking 2. Viking 1 fonctionnera pendant plus de six ans, jusqu'au . Viking 2 durera un peu moins longtemps, mais continuera tout de même de fonctionner pendant un peu moins de quatre ans, jusqu'au .

Bilan final de la mission

Outre l'objectif principal, à savoir la détection de la présence ou non de vie sur la planète, les missions Viking ont permis de fournir une couverture photographique complète de la surface de Mars avec une résolution variant de 150 à 300 mètres. Certaines des zones ont même été photographiées avec une résolution de 8 mètres. Les missions Viking nous ont fourni la plus complète vision de la planète Mars. Les images prises par les orbiteurs ont permis notamment de découvrir des volcans, des plaines de lave, des canyons immenses, des formations géologiques créées par le vent, et des preuves de la présence d'eau en surface. La mission Viking a également permis de fournir des photographies précises des deux satellites orbitant autour de la planète, Phobos et Déimos.

Les atterrisseurs ont fourni pour leur part des images de la surface. Ils y ont prélevé, pour la première fois, des échantillons, étudié le climat, analysé la composition atmosphérique ainsi que la sismicité de la planète. Les deux sondes ont également fourni près de 1 400 images de leurs deux sites d'atterrissage.

Objectifs

Le projet Viking consiste en un lancement de deux vaisseaux spatiaux vers Mars en vue de mener des expérimentations scientifiques. Les expériences biologiques étaient conçues pour détecter de la vie dans le sol martien. Les expériences étaient conçues par trois équipes différentes.

Chaque vaisseau était composé d'un orbiteur et d'un atterrisseur. Après s'être mis en orbite autour de Mars et avoir renvoyé les images permettant de sélectionner le site d'atterrissage, l'atterrisseur se séparait de l'orbiteur. L'atterrisseur entrait dans l'atmosphère martienne et se posait sur le site sélectionné. À ce stade de la mission, les deux objectifs scientifiques du programme Viking à remplir étaient :

  • pour l'orbiteur : cartographier le plus précisément possible la surface de Mars ;
  • pour l'atterrisseur : détecter une éventuelle présence de vie au stade élémentaire.
Le Space Flight Operation Facility (SFOF) à l'époque des missions Viking (photo de 1976).

L'infrastructure de contrôle de la mission

Le Viking Mission Control Center (VMCC) incluait un centre de contrôle terrestre pour la centralisation des informations, les zones de support de la mission (Mission Support Areas) et le Système de simulation Viking[6].

Le centre de contrôle terrestre de la mission Viking était le Space Flight Operation Facility (SFOF) du Jet Propulsion Laboratory, à Pasadena en Californie. Le SFOF était le lieu de gestion de la mission, et de suivi et réception des données transmises par Viking, et reçues depuis le Deep Space Network (DSN), réseau de transfert de données spatial du JPL. Le SFOF a été construit en 1963. Il est toujours actif aujourd'hui pour les missions du JPL. C'est un immeuble de trois étages, équipé de sa propre centrale électrique. Dès 1963, l'immeuble était équipé d'un système d'air conditionné sophistiqué pour permettre le bon fonctionnement des systèmes électroniques et informatiques de l'époque, très sensibles aux conditions de l'air ambiant[7].

L'orbiteur

Dispositif orbital de la mission Viking.

Le premier objectif de l'orbiteur Viking était de transporter l'atterrisseur sur Mars. Il devait également assurer en préambule une reconnaissance du terrain depuis l'espace pour localiser et valider un site d'atterrissage. Il servait pour finir de relais de communication entre le vaisseau posé sur Mars et la Terre afin que ce dernier puisse transmettre ses résultats scientifiques. La conception de l'orbiteur était fondée sur celle de la précédente sonde Mariner 9.

L'orbiteur, de forme octogonale, avait un diamètre d'environ 2,5 m. La masse totale au lancement était de 2 328 kg, dont 1 445 étaient consacrés au propergol et à l'azote utilisé par les moteurs du contrôle d'attitude. Les huit faces de la structure mesuraient 0,457 2 m de haut et avaient une largeur comprise entre 1,397 à 0,508 m. La hauteur totale de l'ensemble constitué par l'orbiteur et le l'atterrisseur était d'environ 3,29 m depuis les points d'amarrage de l'atterrisseur sur le lanceur, jusqu'au sommet du véhicule orbital.

L'orbiteur était équipé de 16 compartiments modulaires, 3 disposés sur chacune des 4 faces longues de la structure, et un sur chaque face courte. Quatre panneaux solaires étaient déployés perpendiculairement à l'axe de l'orbiteur. L'envergure de l'ensemble avec les panneaux solaires déployés était de 9,75 m. L'énergie était produite par 8 panneaux solaires de 1,57 par 1,23 m installés par groupes de deux sur chaque support. Les panneaux solaires étaient composés de 34 800 cellules photovoltaïques, capables de produire 620 watts de puissance lorsque la sonde se trouvait en orbite autour de Mars. L'énergie était stockée dans deux batteries au cadmium-nickel de 30 ampères heures.

Le système de propulsion principal était monté au-dessus du bus électrique du vaisseau. La propulsion principale était assurée par un moteur-fusée utilisant un propergol liquide. Les ergols étaient le méthylhydrazine et le peroxyde d'azote. Les moteurs étaient montés sur cardan avec un débattement de 9 degrés.

Le moteur était capable de fournir 1 323 newtons de poussée, ce qui permettait de fournir un delta-v de 1 480 mètres par seconde. Le contrôle d'attitude était réalisé par un ensemble de 12 petits propulseurs utilisant de l'azote sous pression. L'orientation et la stabilisation sur les trois axes étaient réalisées en utilisant les données fournies par un senseur solaire, un capteur de déplacement du Soleil, un traceur de position de l'étoile Alpha Carinae, et une centrale inertielle composée de six gyroscopes permettait une orientation et une stabilisation sur trois axes. Trois accéléromètres étaient également embarqués.

Les communications étaient assurées par un émetteur de 20 watts, sur Bande S à 2,3 gigahertz et deux tubes à ondes progressives. Une voie descendante en bande X à 8,4 gigahertz fut ajoutée pour des expérimentations de communications radio. La voie montante utilisait un récepteur en bande X sur la Bande S (8,4 gigahertz). Une antenne parabolique à fort gain sur deux axes orientables d'un diamètre approximatif d'1,5 m était attachée sur l'un des bords de la base de l'orbiteur. Une autre antenne à faible gain était attachée au sommet du support. Deux enregistreurs à bande magnétique, d'une capacité de 1 280 mégabits chacun, servaient à l'archivage temporaire des données. Un relais radio à 381 MHz était également installé.

Charge utile de l'orbiteur

Plateforme scientifique de l'orbiteur avec ses deux télescopes situés devant les systèmes d'acquisition vidéo, de mesure thermique et de détection d'eau dans l'atmosphère.

Les instruments scientifiques embarqués sur l'orbiteur comprenaient des appareils de prises de vue de Mars, de mesure de vapeur d'eau dans l'atmosphère et de cartographie en infra-rouge. Les équipements nécessaires étaient contenus dans un réceptacle orientable dont la température était régulée, situé à la base de l'orbiteur. Les instruments scientifiques pesaient environ 72 kg[8]. Les expériences scientifiques de nature radiologique étaient menées avec les éléments de transmission de l'orbiteur.

Caractéristiques des caméras

Chaque orbiteur était équipé de 2 caméras. Les caméras de la sonde orbitale Viking étaient dérivées de celles des sondes Mariner. Il s'agit de caméras vidéo noir et blanc hautes performances de type vidicon, semblables à celles utilisées à l'époque dans les studios de télévision. Elles étaient équipées d'un téléobjectif à lentille. Le compartiment dans lequel les caméras étaient montées pouvait être orienté sur 2 axes pour viser avec précision la zone à observer.

Le téléobjectif était à focale de 475 mm, avec un champ de vision de 1,54° × 1,69°. Depuis une altitude de 1 500 km, chaque prise de vue couvrait une surface minimum de 40 × 44 km. Six filtres pouvaient être activés, autorisant l'acquisition d'images couleurs (après assemblage de prises de vue filtrées avec les composants de couleur rouge, verte et bleue). Le délai entre deux photos était imposé par la vitesse de l'enregistreur à bande. Une image pouvait être acquise par chaque caméra alternativement toutes les 4,48 secondes. La résolution était de 1 056 lignes horizontales, divisées en 1 182 pixels chaque. La luminosité de chaque pixel pouvait être modulée sur 7 bits (127 niveaux de gris)[9].

Ordinateur de bord de l'orbiteur

La gestion du module et le contrôle des expériences étaient dévolus à deux ordinateurs redondants, chacun équipé d'une mémoire de 4 096 mots. Cette mémoire était utilisée pour le stockage des séquences de commandes et des données acquises. Toutes les opérations liées au pilotage de l'orbiteur telles que les manœuvres de corrections, allumages moteurs, pointages de l'antenne haut-gain et le lancement d'expériences scientifiques étaient gérés par ces ordinateurs [10],[11],[12].

Les transmissions numériques étaient réalisées via l'émetteur en bande S de l'orbiteur. La vitesse de transmission variait de 8,3 à 33,3 bits par seconde pour les opérations de commande, et de 2 000 à 16 000 bits par seconde pour les mesures scientifiques. Deux enregistreurs numériques à bande 8 pistes servaient à stocker les données. Les sept premières pistes étaient destinées au stockage des images, et la huitième piste aux données infrarouges. Chaque enregistreur pouvait conserver 640 mégabits de données[13].

L'atterrisseur

Atterrisseur de la mission Viking.

L'atterrisseur[14] construit par Martin Marietta consiste en une structure à six pans réalisée en aluminium. Ces pans ont une longueur alternée de 1,09 m et 0,56 m. Ils reposent sur les trois jambes du train d'atterrissage, attachées aux côtés les plus courts. Lorsqu'on les regarde du dessus, les jambes d'atterrissage forment les côtés d'un triangle équilatéral de 2,21 m de côté. Les instruments étaient attachés au sommet de l'atterrisseur, et surplombaient ainsi la surface du sol, une fois les jambes d'atterrissage déployées.

L'énergie électrique était fournie par deux générateurs thermoélectriques à radioisotope. Ces systèmes à base de plutonium-238 utilisent des matériaux radioactifs (comme le plutonium 238), qui génèrent de la chaleur en rayonnant dans des matériaux non radioactifs. La chaleur est alors convertie en électricité par des thermocouples en utilisant l'effet thermoélectrique. Ils étaient fixés sur les faces opposées de la base de l'atterrisseur, et protégés du vent par des écrans. Chaque générateur avait une taille de 28 cm, 58 cm de diamètre, et une masse de 13,6 kg. Il pouvait fournir 30 watts d'énergie en continu, sous une tension de 4,4 volts. Quatre piles électriques rechargeables au cadmium-nickel de 8 ampères/h sous une tension de 28 volts étaient également présentes afin de prévenir les baisses de puissance.

Pour amorcer sa descente vers le sol martien, l'atterrisseur utilisait un moteur-fusée fonctionnant avec un monergol à l'hydrazine (N2H4). Douze tuyères regroupées en trois grappes de quatre fournissaient une poussée de 32 newtons, produisant un delta-V de 180 m/s. Ces moteurs étaient également utilisés pour les manœuvres d'orientation. La phase finale de la descente et l'atterrissage étaient assurés par trois propulseurs utilisant de l'hydrazine. Ces trois propulseurs étaient fixés sur chaque section longue de la base du vaisseau, avec un pas de 120 degrés. Chaque propulseur était équipé de 18 tuyères pour disperser les gaz éjectés et réduire le souffle sur le sol martien. La poussée de ces propulseurs était modulable de 276 à 2 667 N.

L'hydrazine embarquée était préalablement purifiée pour éviter toute contamination de la surface martienne. L'atterrisseur emportait 85 kg de carburant, contenus dans deux réservoirs sphériques en titane, accrochés sur deux faces opposées de l'atterrisseur, au-dessous des écrans de protection contre le vent. La masse totale du vaisseau avec tous ces équipements était de 657 kg. Le contrôle de la navigation était assuré grâce à des centrales inertielles, quatre gyroscopes, un accéléromètre, un altimètre radar, un radar de descente et d'atterrissage, agissant sur la puissance des propulseurs de contrôle.

Le bouclier de protection thermique de l'atterrisseur.

Chaque atterrisseur était recouvert depuis le lancement jusqu'à la rentrée atmosphérique sur Mars, par un bouclier de protection thermique utilisé pour freiner le vaisseau pendant la rentrée atmosphérique, mais aussi pour prévenir la contamination de la surface martienne par une vie microbienne d'origine terrestre qui aurait pu survivre au voyage dans le vide[15]. À titre de protection antibactériologique complémentaire, chaque atterrisseur, après la phase d'assemblage et de montage sur le bouclier de protection, séjournait pendant une durée de 7 jours dans une salle portée à la température de 120° c. À l'issue de cette période, une protection biologique était posée par-dessus le bouclier. Cette protection était larguée après que l'étage Centaur eut fait quitter l'orbite terrestre à la sonde Viking. Ces méthodes de protection des planètes mises au point dans le cadre des missions Viking sont toujours en vigueur pour les nouvelles missions interplanétaires[16].

Ordinateur de bord

Préparation d'un module atterrisseur Viking en environnement stérile.

L’atterrisseur Viking utilisait un système de guidage, contrôle et de planification (Control and Sequencing Computer dit GCSC) constitué de deux calculateurs embarqués Honeywell HDC 402 de 24-bits équipés de mémoire à fil plaqué de 18 000 mots de capacité. Cet ordinateur commandait la totalité des éléments de l'atterrisseur avec des logiciels embarqués qui pouvaient être mis à jour par téléchargement depuis la Terre. La conception de l'ordinateur de bord fut l'un des principaux problèmes posés aux ingénieurs du programme. Il consistait en un système redondant (voir Tolérance aux pannes) double, équipé de mémoires. Le système était prévu pour qu'un ordinateur soit en réserve pendant que l'autre était actif. Parmi les programmes chargés dans l'ordinateur, figurait un logiciel capable de gérer entièrement la mission pendant les 22 premiers jours passés sur Mars, sans avoir à contacter la Terre. Ce logiciel était modifié et mis à jour dès que l'atterrisseur avait pris contact avec le centre de contrôle sur Terre[17].

Bien qu'il soit largement rapporté dans diverses publications en ligne que les ordinateurs de la sonde Viking étaient basés sur des systèmes de marque RCA Cosmac 1802, retenus notamment pour leurs capacités de résister aux rayonnements spatiaux, cette affirmation ne repose en réalité sur aucune source primaire[18].

Système de communication

Les communications transitaient par un émetteur de 20 watts en Bande S et deux émetteurs à tube à ondes progressives de 20 watts. Une antenne parabolique grand gain, orientable sur deux axes, était montée sur un mât près de la base de l'atterrisseur. Une antenne omnidirectionnelle faible gain émettant en Bande S était également montée près de la base de l'atterrisseur. Cette antenne était utilisée pour les communications radio directes avec le centre de contrôle sur Terre. Une antenne UHF d'une puissance de 30 W et émettant sur 381 MHz était également installée pour jouer le rôle de relais half duplex avec l'orbiteur.

Système de stockage de données

Les données pouvaient être stockées sur un enregistreur à bande de 40 Mégabits, dans une mémoire de 8 200 mots[note 1] ou expédiées instantanément par l'antenne en Bande S. La mémoire était utilisée en tampon d'entrée provisoire pour stocker les données expérimentales pendant de courtes périodes. Les données à conserver pour de longues périodes étaient transférées sur l'enregistreur à bande[19]. L'atterrisseur pouvait conserver ses données sur bande pour les transmettre dès qu'un module Viking orbiteur le survolait ou lorsque ses dispositifs de communication pouvaient entrer en communication directe avec la Terre.

Instrumentation

L'atterrisseur transportait les instruments indispensables pour l'objectif principal du programme Viking, à savoir l'étude scientifique de la planète Mars. Les instruments devaient permettre l'étude de la biologie, la composition chimique organique et inorganique, la météorologie, la sismologie, les propriétés magnétiques, l'apparence et les propriétés physiques de la surface de Mars et de son atmosphère.

Gros plan sur le bras de collecte d'échantillon du module d'atterrissage.

Deux caméras numériques cylindriques à 360° étaient montées sur le côté long de la base du vaisseau. Un bras d'expérimentation muni d'un réceptacle pour collecter les échantillons était implanté du même côté que la caméra, au centre. Une centrale météorologique avec capteur de température, de direction et vitesse du vent était située à l'extérieur du vaisseau, sur le dessus de l'une des jambes d'atterrissage. Un senseur de pression était attaché sous le corps de l'atterrisseur.

Un détecteur de champ magnétique, ainsi que des cibles de mise au point et de test des caméras, accompagnés d'un miroir d'agrandissement étaient situés à l'opposé des caméras, à proximité de l'antenne à fort gain. Au sein de l'atterrisseur, un compartiment dont l'environnement était contrôlé, contenait les expériences biologiques et le chromatographe à gaz et spectrométrie de masse. Le spectromètre à rayons X à fluorescence était lui aussi monté à l'intérieur de la structure du véhicule. Le poids des appareillages pour l'expérimentation scientifique était d'environ 91 kg.

Les deux atterrisseurs emportent également des sismomètres dans le but de détecter les séisme sur Mars mais leurs caractéristiques reflètent le fait que l'objectif principal de ces missions porte sur la recherche de traces de vie passée ou actuelle sur la planète. Le sismomètre, qui pèse 2,2 kg et consomme 3,5 watts, est peu sophistiqué avec une sensibilité de l'ordre du nanomètre dix fois inférieure à celle des instruments installés sur la Lune par les équipages du programme Apollo. Les géophysiciens concepteurs de l'expérience ont été contraints d'accepter que l'instrument soit installé sur le pont de l'atterrisseur au lieu d'être en contact direct avec le sol. Les données collectées doivent être fortement compressées et donc dégradées avant d'être transmises vers la Terre car le débit de la liaison avec la Terre est réduit[20].

Déroulement de la mission

Diagramme d'une mission Viking, du départ à la phase d'atterrissage.

Les expériences de missions interplanétaires en étaient à cette époque à leurs prémices. On avait certes posé des hommes sur la Lune, avec leurs équipements, mais de nombreuses missions automatisées avaient échoué. L'atterrisseur représentait l'élément principal de la mission. C'était autour de lui et de son service qu'était architecturée toute la mission. Chaque étape de la mission pendant le voyage jouait un rôle dans l'arrivée à destination puis le fonctionnement du module parvenu à la surface. On peut schématiquement décomposer une mission Viking comme suit :

  • la préparation du vaisseau, et notamment sa stérilisation, puis son installation au sommet du lanceur sur le pas de tir ;
  • le transit Terre-Mars avec les corrections de trajectoire ;
  • la mise en orbite autour de Mars ;
  • le repérage de la zone d'atterrissage par l'orbiteur de manière à s'assurer que la zone n'est pas encombrée par des rochers ou trop accidentée ;
  • la mise sur l'orbite définitive qui permettra de larguer l'atterrisseur dans les conditions optimales ;
  • le largage de l'atterrisseur ;
  • la mise en route des expériences scientifiques et la transmission des données recueillies.

La sonde Viking avait été conçue pour réaliser une part importante de ces étapes de manière automatisée pour de nombreuses raisons : la première étant que les communications avec la Terre étaient difficiles sur la distance considérée. Il n'existait qu'une fenêtre de communication de 20 minutes half-duplex entre la Terre et Mars depuis le processus de séparation de l'orbiteur et de l'atterrisseur et jusqu'à l'atterrissage. Toute la navigation depuis l'obtention d'une référence inertielle jusqu'à la localisation d'un point de référence sur la zone d'atterrissage devait donc être gérée par l'ordinateur de bord.

Une fois sur place, l'atterrisseur ne pouvait communiquer avec la Terre que durant la moitié de chaque jour martien. Les limitations électriques restreignaient encore ces possibilités de communications qui ne pouvaient finalement avoir lieu que pendant un très court laps de temps chaque jour. Il était possible au centre de contrôle de donner des instructions et reprogrammer le vaisseau sur Mars, mais finalement la majorité du contrôle des opérations fut réalisée de manière autonome, au jour le jour[21].

On notera que sur les missions récentes, la phase de repérage qui était réalisée par le module Viking en orbite n'est plus nécessaire. Ainsi, le programme Pathfinder n'en a pas eu besoin. Les modules d'atterrissage sont immédiatement mis sur une orbite leur permettant d'atterrir.

Missions Viking 1 et Viking 2

Seconde photo transmise depuis le sol de mars, par Viking 1 le 23 juillet 1976.

Viking 1 fut lancé du Kennedy Space Center à Cap Canaveral le et arriva près de Mars le après une navigation de dix mois. Durant le premier mois, Viking 1 fut exclusivement utilisé depuis l'orbite pour chercher et certifier le site d'atterrissage le plus sûr. L'atterrissage initialement prévu le fut reporté au 20 juillet. La séparation eut lieu à 08:51 UTC et l'atterrissage à 11:53:06 UTC, dans la zone ouest de Chryse Planitia. Il fut le premier vaisseau d'origine humaine à réaliser puis transmettre une prise de vue depuis le sol de Mars (le premier vaisseau à se poser étant Mars 3 après le crash de Mars 2).

Le , l'orbite de Viking 1 fut modifiée pour permettre un survol de Phobos, la plus grande des lunes martiennes. Au plus près, l'orbiteur de Viking 1 survola Phobos à 90 km de distance de sa surface[22].

Viking 2, peu après son atterrissage.

Viking 2 fut lancé le . Après une navigation de 333 jours, il atteignit Mars le . L'atterrisseur se sépara de l'orbiteur le à 22:37:50 UTC et se posa dans la zone d' Utopia Planitia. La différence principale entre l'orbite de Viking 2 et celle de Viking 1 réside dans le haut degré d'inclinaison. Cette inclinaison permit à Viking 2 d'observer les régions polaires à une distance relativement proche.

Plus tard, lors de sa mission, l'orbiteur de Viking 2 se rapprocha de Déimos, la plus petite des deux lunes martiennes. Il survola cette lune à une distance de 22 km seulement. Des images particulièrement spectaculaires de ce satellite furent prises. Viking 2 a fourni plus de 16 000 images de Mars et ses satellites avant de s'éteindre le [22].

Durée de vie des sondes

La durée d'une mission de cette nature est extrêmement variable et très dépendante, quels que soient les objectifs initiaux, de la durée de vie des équipements et de leurs éventuels dysfonctionnements. La durée des éléments de Viking 1 et 2 fut la suivante :

VaisseauDate d'arrivéeDate de fin d'opérationDurée de vie de la missionCause de la fin de mission
Viking 1 orbiter4 ans, 1 mois, 19 joursExtinction après l'épuisement du propergol utilisé pour le contrôle d'altitude.
Viking 1 atterrisseur6 ans, 3 mois, 22 joursUne erreur humaine durant une mise à jour du logiciel entraîna la mise hors service de l'antenne, entraînant la fin des communications entre l'atterrisseur et la Terre.
Viking 2 orbiter1 an, 11 mois, 18 joursExtinction après l'épuisement du propergol utilisé par le système de propulsion.
Viking 2 atterrisseur3 ans, 7 mois, 8 joursDéfaillance de la batterie.

Bien que trois des appareils fussent hors service[23], l'atterrisseur Viking Lander 1 resta actif jusqu'au [note 2]. Il continuait de transmettre des informations à la Terre, et chaque semaine l'équipe du JPL réceptionnait des données météorologiques et des images de la surface de Mars prises par celui-ci. Finalement, le programme Viking fut arrêté le . Les deux orbiteurs Viking 1 et 2 devraient tourner autour de Mars jusqu'à ce que leur orbite se dégrade et les précipite sur la planète, vers 2025[24].

Résultats scientifiques

Vue sur les tranchées creusées par le godet équipant le bras articulé de Viking 1.

Détection de la présence de vie présente ou passée

Les instruments utilisés pour détecter la présence de vie dans le sol martien fournirent des résultats ambigus. Dans un premier temps, les résultats furent positifs et le résultat d'une des expériences remplit les conditions fixées par la NASA pour affirmer que la vie avait bien été détectée. Ces premiers résultats positifs furent contredits par un second test qui ne parvint pas à révéler l'existence de molécules organiques dans le sol. La plupart des scientifiques furent alors convaincus que les résultats initiaux était le fruit de réactions chimiques de nature non biologique, créées par les conditions particulières d'oxydation du sol sur Mars[25].

Il existe aujourd'hui un consensus général pour affirmer que les sondes Viking démontrèrent finalement l'absence de micro-organismes dans le sol des deux sites d'atterrissage. Pourtant, les résultats des tests menés et leurs limites expérimentales font encore l'objet de discussions. La validité du principal résultat positif repose intégralement sur l'absence d'agents oxydants dans le sol de Mars. Or, il a été découvert récemment par le vaisseau Phoenix qu'il existait des perchlorates de sels dans ce même sol[26],[27]. La question de la vie microbienne sur Mars reste donc encore à ce jour sans réponse.

Études sismiques

Le sismomètre embarqué à bord de Viking 1 reste inopérant car les opérateurs ne parviennent pas à débloquer le verrou qui protège sa partie mobile des vibrations durant le vol : ce sismomètre sera le seul instrument non opérationnel de tout le programme Viking. Le sismomètre de Viking 2 peut être activé mais les scientifiques constatent rapidement que les données collectées n'ont rien à voir avec des mouvements sismiques. Solidaire du pont de l'atterrisseur, l'instrument enregistre tous les mouvements mécaniques affectant celui-ci : rotation de l'antenne grand gain orientable, déplacement du bras robotique, fonctionnement du magnétophone et surtout action du vent qui fait vibrer la plateforme. Seules les mesures faites de nuit, caractérisée par une diminution du vent et l'absence d'activité des instruments, sont éventuellement exploitables. Mais la faible sensibilité de l'instrument conjuguée avec les doutes sur l'origine des mouvements enregistrés ne permettent pas d'en tirer des données réellement utilisables[20].

Notes et références

Notes

  1. La documentation ne précise pas la taille de ces mots, mais on sait que les imageurs produisaient des données sur 7 bits. Par ailleurs, le système de calcul embarqué Cosmac était de type 8 bits. On peut donc envisager qu'il s'agit de mots de 1 octet (soit 7 bits de données et 1 bit pour la vérification mémoire)
  2. Selon ce document la dernière transmission de Viking Lander 1 eut lieu le , et les opérateurs de JPL cherchèrent à contacter le module pendant encore six mois et demi

Références

  1. Histoire du programme Viking, livre en ligne SP-4212 On Mars: Exploration of the Red Planet. 1958-1978 sur le site historique de la Nasa
  2. NASA, "Viking Contract Award" news release 69-82, 29 mai 1969
  3. Money problem at Nasa Livre historique de la Nasa sur le programme Viking
  4. David B. Ahearn, interview téléphonique par Eze11. Le 22 novembre 1978 et audit NASA "Report on Audit of Viking Program Project Initiation to Contractor Selection. Langley Research Center, Hampton, Virginia," rpt. LR-DU: 33-70, 18 décembre 1969, p. 17
  5. Table des coûts dans: On Mars: Exploration of the Red Planet. 1958-1978, SP-4212, site historique Nasa
  6. Viking Mission Support, archives du JPL
  7. La description du SFOF sur le site des monuments historiques de la Nasa
  8. description de l'équipement scientifique de l'orbiteur
  9. The Viking Orbiter imaging system sur La documentation historique de la Nasa sur l'imageur
  10. James Tomayko, « Computers in Spaceflight: The NASA Experience », NASA, (consulté le )
  11. Neil A. Holmberg, Robert P. Faust, H. Milton Holt, « NASA Reference Publication 1027: Viking '75 spacecraft design and test summary. Volume 1 - Lander design », NASA, (consulté le )
  12. Neil A. Holmberg, Robert P. Faust, H. Milton Holt, « NASA Reference Publication 1027: Viking '75 spacecraft design and test summary. Volume 2 - Orbiter design », NASA, (consulté le )
  13. Description de la mission Viking, page 3
  14. Description de l'atterrisseur Viking 1 sur le site de la Nasa
  15. Spacecraft sterilization standards and contamination of Mars, Journal of Astronautics and Aeronautics, Carl Sagan et S Coleman, 1965, p22-27
  16. « voir le site de la Nasa sur la protection des planètes »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogle • Que faire ?) (consulté le )
  17. Description du système informatique page 5 du document du JPL sur le site de la Nasa
  18. (en) Informations sur les RCA Cosmac embarqués dans des sondes spatiales
  19. description du JPL sur le site JPL de la Nasa, page 6
  20. P. Labrot, « Viking fut la première (et la seule) mission à déposer un sismomètre sur Mars », Institut de physique du globe de Paris (consulté le )
  21. On Mars: Exploration of the Red Planet. 1958-1978, chapitre 8, VIKING LANDER: BUILDING A COMPLEX SPACECRAFT
  22. NASA SP-441: VIKING ORBITER VIEWS OF MARS, Chapitre 1
  23. [NASA, 'Transminer Switched Off on Viking Orbiter 1," communiqué numéro 80-129, 8 août. 1980; et JPL, "Viking Facts" du 4 août 1980]
  24. Section Viking sur SpaceFaq
  25. Journal Astrobiology, août 2007, LUTHER W.A Concept for NASA's Mars 2016 Astrobiology Field Laboratory
  26. Perchlorate found in Martian soil, daté du 6 août 2008
  27. Martian Life Or Not? NASA's Phoenix Team Analyzes Results, daté du 6 août 2008,

Voir aussi

Bibliographie

NASA
  • (en) NASA, Viking, (lire en ligne)
    Dossier de presse fourni par la NASA pour le lancement des sondes Viking
Autre
  • (en) Paolo Ulivi et David M Harland, Robotic Exploration of the Solar System Part 1 The Golden Age 1957-1982, Chichester, Springer Praxis, , 534 p. (ISBN 978-0-387-49326-8)
  • (en) Edward Clinton Ezell et Linda Neuman Ezell, On Mars : Exploration of the Red Planet. 1958-1978 (NASA SP-4212), NASA History Office, (lire en ligne [PDF])
    Histoire du programme Viking.

Articles connexes

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