Langues sino-tibétaines

Les langues sino-tibétaines, aussi appelées langues trans-himalayennes sont une famille de langues originaires d'Asie (Asie de l'Est, Asie du Sud-Est, Asie centrale, Asie du Sud). Elle regroupe les langues chinoises (10 langues et 1,35 milliard de locuteurs) et les langues tibéto-birmanes (330 langues pour 70 millions de locuteurs).

Langues sino-tibétaines
Région Asie de l'Est, Indochine
Classification par famille
Codes de langue
ISO 639-1 sit
Glottolog sino1245
Carte

Langues Sino-tibétaines (en couleur) :

L'idée de ce groupement date de la fin du XIXe siècle et les recherches sont encore balbutiantes. Le rapprochement se fait surtout entre les langues tibéto-birmanes et le chinois archaïque.

Le terme de « langues sino-tibétaines » est sujet à controverse par l'absence d'accord sur la structure de l'arbre (Van Driem), et par le manque de références écrites du tibétain ancien, car si l'écriture chinoise a plus de 3 500 ans, les écritures tibétaines n'en ont que 1 500, l'écriture tibétaine ayant été créée au VIIe siècle, par une adaptation du devanagari, alphasyllabaire indien.

Histoire

L'origine et la diffusion des langues sino-tibétaines. L'ovale rouge représente la fin des cultures Cishan et les premières cultures de Yangshao. Les flèches noires représentent les voies présumées de l'expansion non sinitique. Après avoir appliqué la méthode comparative linguistique à la base de données de données linguistiques comparatives développée par Laurent Sagart en 2019 pour identifier des correspondances sonores et établir des apparentés, des méthodes phylogénétiques sont utilisées pour déduire des relations entre ces langues et estimer l'âge de leur origine et de leur patrie[1].

Au début du xxie siècle, deux théories contradictoires avaient cours[2] :

  • (majoritaire) la langue ancestrale (le proto-sino-tibétain) aurait son origine dans le nord de la Chine il y a 4 à 6 milliers d'années[3],[4] ;
  • (minorité) elle serait apparue dans le sud-ouest de la Chine ou le nord-est de l'Inde il y a environ 9 000 ans[5],[6].

En 2019, une étude associant la linguistique, la génétique des locuteurs actuels, la bio-informatique, l'archéologie, l'anthropologie et l'histoire de l'agriculture conclut que les langues sino-tibétaines sont nées dans le nord de la Chine il y a environ 5 900 ans[2],[7]. Un autre étude suggère l'expansion des langues sino-tibétaines au néolithique depuis une communauté de cultivateurs de mil du nord de la Chine, il y a environ 7200 ans[8].

Classification

Langues sinitiques

Langues tibéto-birmanes

Langues arunachales

Ces langues, parlées dans l'Arunashal Pradesh (en Inde), sont traditionnellement considérées comme faisant partie de la famille sino-tibétaine. Cependant, il se peut que les ressemblances soient le résultat d'influences mutuelles (Sprachbund), donc ces langues pourraient constituer des familles de langues et des isolats linguistiques indépendants. Blench (2011) a proposé 4 isolats (Hruso, Miji, Miju, et Puroik) et 3 familles linguistiques (langues mishmiques, kamengiques, et siangiques)[9], tandis qu'Anderson (2014) (entre autres) soutient qu'elles appartiennent bien aux langues sino-tibétaines[10].

  • langues grand-siangiques
  • langues hrusiennes?
    • hruso
    • langues miji
      • bangru
      • miji oriental
      • miji occidental
  • langues kho-bwa
    • puroik
    • bugun
    • langues kho-bwa occidentales
      • langues mey-sartang
        • langues mey
          • shergaon
          • rupa
        • sartang
      • langues chug-lish
        • lish
        • chug
  • langues miju

Vocabulaire comparé

Adjectif numéraux sino-tibétain
gloss chinois archaïque[11] tibétain ancien[12] Birman ancien[12] Jingpho[13] Garo[13] Limbou[14] Kinnauri (en)[15]
un *ʔjitacid
*tjek seulgcigtacthik
deux *njijsgnyisnhacgin-inɛtchiniš
trois *sumgsumsumḥmə̀sūmgit-tamsumsisum
quatre *sjijsbzhiliymə̀lībrilisipə:
cinq *ŋaʔlngaṅāḥmə̀ŋāboŋ-anasiṅa
six *C-rjukdrugkhrokkrúʔdoktuksițuk
sept *tsʰjitkhu-nacsə̀nìtsin-inusištiš
huit *pretbrgyadrhacmə̀tshátcetyɛtchirəy
neuf *kjuʔdgukuiḥcə̀khùskusgui
dix *gjəpkip[16]gip
bcuchayshīci-kuŋsəy

Connexions proposées

Le chercheur Laurent Sagart propose d'inclure dans un ensemble « sinotibétain-austronésien (en) » (STAN) les langues sinotibétaines d'une part, et les langues austronésiennes (dans lesquelles il propose d'inclure les langues tai-kadai) d'autre part. Les langues austronésiennes, dont l'aire d'extension est exceptionnelle (de Madagascar jusqu'à l'île de Pâques) sont toutes originaires de Taïwan.

Des langues telles que le vietnamien (austroasiatique) ont acquis des mots communs, par emprunt, du fait de sa proximité et de son intégration temporaire à l'empire chinois ; au-delà de ces emprunts, une origine commune a été avancée, mais reste hypothétique (conjecture « est-asienne » de Starosta-Sagart).

Notes et références

  1. (en) Laurent Sagart, Guillaume Jacques, Yunfan Lai et Robin J. Ryder, « Dated language phylogenies shed light on the ancestry of Sino-Tibetan », Proceedings of the National Academy of Sciences, vol. 116, no 21, , p. 10317–10322 (ISSN 0027-8424 et 1091-6490, PMID 31061123, DOI 10.1073/pnas.1817972116, lire en ligne, consulté le ).
  2. (en) Randy J. LaPolla, « The origin and spread of the Sino-Tibetan language family », Nature, vol. 569, , p. 45-47 (DOI 10.1038/d41586-019-01214-6).
  3. (en) R. J. LaPolla, « The role of migration and language contact in the development of the Sino-Tibetan language family », dans A. Y. Aikhenvald et R. M. W. Dixon, Areal Diffusion and Genetic Inheritance: Problems in Comparative Linguistics, Oxford University Press, , p. 225-254.
  4. (en) D. Bradley, « Subgrouping of the Sino-Tibetan languages », 10th International Conference on Evolutionary Linguistics, Université de Nanjing, (lire en ligne).
  5. (en) G. van Driem, « Trans-Himalayan », dans T. Owen-Smith et N. W. Hill, Trans-Himalayan Linguistics. Historical and descriptive linguistics of the Himalayan area, de Gruyter, (lire en ligne [PDF]), p. 11-40.
  6. (en) R. J. LaPolla, « Once again on methodology and argumentation in linguistics. Problems with the arguments for recasting Sino-Tibetan as “Trans-Himalayan” », Linguistics of the Tibeto-Burman Area, vol. 39, , p. 282-297 (DOI 10.1075/ltba.39.2.03lap).
  7. (en) Menghan Zhang, Shi Yan, Wuyun Pan et Li Jin, « Phylogenetic evidence for Sino-Tibetan origin in northern China in the Late Neolithic », Nature, vol. 569, , p. 112-115 (DOI 10.1038/s41586-019-1153-z).
  8. Laurent Sagart et al., Dated language phylogenies shed light on the ancestry of Sino-Tibetan DOI:10.1073/pnas.1817972116
  9. https://web.archive.org/web/20130526230734/http://www.rogerblench.info/Language/South%20Asia/NEI/General/Lingres/Declassifying%20Arunachal.pdf
  10. Anderson, Gregory D.S. 2014. On the classification of the Hruso (Aka) language. Paper presented at the 20th Himalayan Languages Symposium, Nanyang Technological University, Singapore.
  11. Baxter (1992).
  12. Hill (2012).
  13. Burling (1983), p. 28.
  14. van Driem (1987), p. 32–33.
  15. Sharma (1988), p. 116.
  16. Yanson (2006), p. 106.

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

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