Paul III

Alexandre Farnèse (Alessandro Farnese en italien), né le à Rome ou à Canino, devient le 220e pape de l’Église catholique le sous le nom de Paul III (en latin Paulus III, en italien Paolo III) et règne jusqu'à sa mort, le à Rome.

Pour les articles homonymes, voir Alessandro Farnese et Cardinal Farnèse.

Paul III

Portrait de Paul III peint par Titien. 1543. Musée Capodimonte de Naples.
Biographie
Nom de naissance Alexandre Farnèse
Naissance
Canino,  États pontificaux
Décès
Rome,  États pontificaux
Pape de l'Église catholique
Élection au pontificat (66 ans)
Intronisation
Fin du pontificat
(15 ans et 28 jours)
Cardinal de l'Église catholique
Créé
cardinal
par le pape Alexandre VI
Titre cardinalice Cardinal-évêque d'Ostie
Évêque de l'Église catholique
Consécration épiscopale par le
pape Alexandre VI
Doyen du Collège des cardinaux

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Avec son soutien est créée la compagnie de Jésus (jésuites), dont l'un des membres est son représentant au concile de Trente (dit aussi « concile de la Contre-Réforme catholique ») qu'il convoqua.

Il réorganisa l'Inquisition, mettant en place l'Inquisition romaine et autorisant la création de l'Inquisition portugaise.

On lui doit également la condamnation officielle par l'Église catholique de l'esclavage des Indiens « ou de tout autre peuple qui viendrait à être découvert » en 1537.

Biographie

Jeunesse

Alexandre Farnèse est le fils de Pier Luigi Farnèse et de Giovanelle Gaetani, sœur du seigneur de Sermoneta et descendante de la famille du pape Boniface VIII.

Il reçut la meilleure éducation que son époque pouvait offrir, d'abord à Rome, où il eut comme tuteur Pomponio Leto, puis à Florence au palais de Laurent le Magnifique, où naquit son amitié avec le futur Léon X, de sept ans son cadet. Ses contemporains louent son érudition dans toutes les disciplines de la Renaissance, particulièrement sa maîtrise des lettres classiques latines et italiennes. Avec de tels avantages de naissance et de talent, son avancement dans la carrière ecclésiastique fut rapide.

Carrière curiale

Le , à peine âgé de 25 ans, il fut élevé au rang de cardinal-diacre de SS. Côme et Damien par Alexandre VI. Certains ironisent sur la rapide consécration et surnomment Alexandre Farnèse, il cardinale della Gonnella, avec une allusion évidente aux avantages obtenus grâce à la faveur de sa sœur Giulia Farnèse, maîtresse d'Alexandre VI. Il porta la pourpre pendant plus de quarante ans, traversant tous les grades jusqu’à devenir doyen du Sacré Collège. En phase avec les abus de son temps, il accumula nombre d’opulents bénéfices, mais dépensait son immense revenu avec une générosité qui lui valait la louange des artistes et l’affection du peuple romain. Ses capacités naturelles et son habileté diplomatique, acquise de longue expérience, lui valaient un grand prestige parmi ses collègues du Sacré Collège, d’autant plus que son Palais Farnèse excédait en magnificence toutes les autres places de Rome[1]. Qu’il continuât de grandir en faveur sous des pontifes de caractères aussi opposés que les Borgia, Della Rovere et Médicis, est une preuve suffisante de son habileté.

Évêque de Montefiascone et Corneto de 1499 à 1519, et de Saint-Pons-de-Thomières de 1514 à 1534, il était déjà, en deux occasions précédentes, passé à deux doigts de la tiare quand le conclave de 1534, presque avec la formalité d’un plébiscite, le proclama successeur de Clément VII. Il est à mettre au crédit de sa réputation et à la bonne volonté des cardinaux, que les factions qui divisaient le Sacré Collège s’entendirent sur son élection. Il était universellement reconnu comme l’homme du moment, et la piété et le zèle qui l’avaient caractérisé depuis sa prêtrise permirent d’oublier les extravagances de ses jeunes années.

Pendant l'époque des beylerbeys à Alger, en 1541, le pape Paul III joint les galères de la papauté à la flotte de Charles Quint contre les Turcs d'Alger lors de l'Expédition d'Alger. Les Espagnols débarquent dans la région d'Alger le . La tempête détruit la moitié de leur flotte, les troupes sont paralysées, une intervention des soldats du bey oblige les Espagnols à rembarquer à la fin du mois[2].

Pape

Le peuple de Rome se réjouit de l’élection à la tiare du premier citoyen de leur ville depuis Martin V. Paul III fut couronné le et ne perdit pas de temps pour s’atteler aux réformes. L’élévation au cardinalat de ses petits-fils, Alessandro Farnese, âgé de quatorze ans, et Guido Ascanio Sforza, âgé de seize, déplurent au parti de la réforme et entraînèrent les protestations de l’empereur Charles Quint, mais cela fut pardonné, quand peu après, il introduisit au Sacré Collège des hommes de la trempe de Reginald Pole, Contanini, Sadoleto et Caraffa.

Les atrocités commises sur la place Maubert à Paris finirent par émouvoir le pape Paul III qui écrivit à François Ier[3] en  : « Adverty de l'exécrable et horrible justice que le roy François Ier faisoit en son royaume sur les luthériens, Paul III luy manda qu'il pensoit bien qu'il le fist en bonne part, néanmoins que Dieu, le créateur, a usé de plus de miséricorde que de rigoureuse justice, et que c'était une cruelle mort de faire brusler vif un homme; donc, le requéroit de vouloir apaiser sa fureur et rigueur de justice, en leur faisant grâce et pardon. »[4],[5]

Le concile de Trente

Peu après son élévation, le , Paul III convoqua un concile œcuménique à Mantoue pour le mois de mai suivant ; mais l’opposition des princes protestants et le refus du duc de Mantoue d’assumer la responsabilité du maintien de l’ordre contrecarrèrent le projet. Il publia une nouvelle bulle, convoquant un concile à Vicence pour le  ; l’obstacle majeur y fut le regain d’hostilité entre Charles Quint et François Ier. Le vieux pontife parvint à les convaincre de tenir avec lui une conférence à Nice et de conclure une trêve de dix ans. Comme gage de bonne volonté, une petite-fille de Paul fut mariée à un prince français, et l’empereur donna sa fille, Marguerite, à Octave (Ottavio), le fils de Pierre Louis (Pier Luigi), fondateur de la dynastie Farnèse de Parme.

Bien des causes contribuèrent à retarder l’ouverture du concile. L’accroissement de puissance qu’une Allemagne réunifiée aurait mis entre les mains de Charles était si intolérable à François Ier, que lui, qui persécutait dans son propre royaume l'hérésie avec tant d'acharnement, au point que le pape dut l’appeler à réfréner sa violence, devint l’allié fidèle de la ligue de Smalkalde et la poussa à rejeter toutes les offres de réconciliation. Charles-Quint lui-même n’était pas à blâmer car, favorable à la tenue d'un concile, il s'imaginait que les différends religieux en Allemagne pouvaient être réglés par des conférences réunissant les deux parties. Ces conférences, comme toute tentative de ce genre en dehors des cours normales de l’Église, entraînaient des pertes de temps, et faisaient beaucoup plus de mal que de bien. Charles se faisait aussi une idée fausse de l'objet d’un concile œcuménique. Dans son désir d’unir toutes les parties, il croyait possible l'adoption de formulations larges auxquelles tous auraient pu souscrire.

Pendant ce temps, Paul III s’occupait de la réforme de la cour papale avec une vigueur qui pavait la voie des canons disciplinaires de Trente. Il nomma des commissions pour relever les abus de toutes sortes ; il réforma la cour apostolique, le tribunal de la Rote, la pénitencerie apostolique, et la chancellerie apostolique. Il renforça le prestige de la papauté en faisant lui-même ce que ses prédécesseurs confiaient à un conseil. Dans la querelle permanente entre François Ier et Charles-Quint, Paul III garda une stricte neutralité, bien que Charles le pressât de soutenir l’Empire et de soumettre François aux censures de l’Église. L’attitude de Paul III, comme patriote italien, suffit à empêcher l’Empereur d'être le seul arbitre en Italie. C’est autant pour préserver les territoires pontificaux que pour promouvoir ses intérêts familiaux que Paul exhorta Charles et ses cardinaux affidés à consentir à l’érection de Plaisance et Parme en un duché pour son fils Pier Luigi Farnese. Une querelle survint avec Gonzague, le gouverneur impérial de Milan, qui se termina plus tard par l’assassinat de Pier Luigi et la perte définitive de Plaisance pour les États pontificaux.

Quand la trêve de Crépy-en-Laonnois négociée par le duc François Ier de Lorraine () mit fin aux guerres entre Charles-Quint et François Ier, Paul III relança énergiquement le projet de tenue d’un concile œcuménique.

Charles Quint (1548).

Pendant ce temps, l’Empereur avait développé son propre programme, sur plusieurs points essentiels en porte-à-faux avec celui du pape. Puisque les protestants répudiaient un concile présidé par le Pontife romain, Charles était résolu à soumettre les princes par les armes. Paul ne s’y opposa pas et il promit de l’aider avec trois cent mille ducats et vingt mille hommes de pied ; mais il ajouta sagement la condition que Charles ne devrait conclure aucun traité séparé avec les hérétiques et ne passer aucun accord préjudiciable à la Foi et aux droits du Saint-Siège. Charles souhaitait alors que le concile fût prolongé jusqu’à la victoire des catholiques. De plus, prévoyant que la lutte avec les prédicateurs de l’hérésie serait plus obstinée que le conflit avec les princes, il pressa le pontife d’éviter de formuler des dogmes de foi pour le présent et de confiner les travaux du concile au renforcement de la discipline. Le pape ne pouvait souscrire à aucune de ces demandes.

Finalement, après d’incessantes difficultés, il fut décidé que le concile se tiendrait en terre impériale et le , le concile tint sa première session à Trente. En sept sessions, la dernière ayant eu lieu le , les Pères s'attaquèrent avec vigueur aux questions les plus importantes de la foi et de la discipline ecclésiastique. Sans écouter les menaces ni les protestations du parti impérial, ils formulèrent pour tous les temps la doctrine catholique sur les Écritures, le péché originel, la justification et les sacrements. Le concile avait bien entamé ses travaux quand l'irruption de la peste à Trente obligea à un ajournement : le concile fut transféré dans les États pontificaux à Bologne. Le pape Paul n'en fut d'ailleurs pas l’instigateur, il entérina seulement la décision des Pères. Cependant, quinze prélats dévoués à l’Empereur refusèrent de quitter Trente et Charles exigea le retour du concile en territoire allemand. Néanmoins, les délibérations se poursuivirent à Bologne jusqu’à ce que, finalement, le , le pape, dans le but d’éviter un schisme, ajournât le concile pour une durée indéterminée. La pertinence de la résolution du concile à proclamer les vérités fondamentales du credo catholique devint bientôt évidente quand l’Empereur et ses conseillers semi-protestants infligèrent à l’Allemagne leur religion intérimaire : elle fut méprisée par les deux parties. Le pape Paul, qui avait apporté à l’Empereur une aide essentielle dans la guerre smalcaldique, mesurait maintenant l’amateurisme théologique de Charles-Quint, et leurs dissensions durèrent désormais jusqu’à la mort du pontife.

Condamnation formelle de l'esclavage

Dès 1537, Paul III condamne solennellement, par la lettre apostolique Veritas ipsa et la bulle pontificale Sublimis Deus, la pratique de l'esclavage en général, et des Indiens en particulier, y mettant le poids de son autorité papale. Dans ces deux actes apostoliques, Paul III déclare que les Indiens sont de « véritables êtres humains », « capables de comprendre la foi catholique » et qui ont le droit d'être libres et de posséder des biens, et cela « même s'ils demeurent en dehors de la foi de Jésus Christ ». Il y ajoute que, grâce à une évangélisation responsable, beaucoup d'Indiens « accourent avec hâte » vers la foi chrétienne. Paul III y déclare encore que ceux qui présentent les Indiens comme des bêtes, devant être utilisés sous prétexte qu'ils ne connaissent pas la foi catholique, sont des « suppôts de Satan » dont le but est d'« empêcher que la parole de Dieu soit annoncée pour le salut de ces nations ». Le pape Paul III ne cesse de dénoncer fortement la façon dont les Indiens sont maltraités : « Ils les réduisent en esclavage, leur imposant des corvées telles qu'ils oseraient à peine en infliger à leurs propres animaux domestiques ». Le problème ne se posant pas encore nettement de son temps, Paul III ne mentionne pas dans ces documents solennels le cas futur des peuples africains. Il sera peu écouté par les gouvernements européens de l'époque, qui feront plus ou moins la sourde oreille à ses condamnations, en raison de la concurrence économique entre leurs États et de la diminution manifeste de l'influence politique de la papauté, notamment à la suite de la sécession anglicane. Seul Charles Quint l'écouta et avait, sur recommandation de sa Commission des Indes, interdit l'esclavage[6] avant que l'Église ne prît position.

Cependant cette interdiction pontificale fut respectée quelque temps par l'Espagne[7], ce qui ne fut toutefois pas le cas pour le Portugal.

En 1550, peu de temps après son décès, la controverse de Valladolid traite et parle de la manière dont devaient se faire les conquêtes dans le Nouveau Monde.

Fin de vie

La fin de Paul III survient subitement. Après l'assassinat de Pier Luigi, il se bat pour retenir Plaisance et Parme dans le giron de l'Église et prive Ottavio, le fils de Pier Luigi et beau-fils de Charles Quint, de ces duchés. Ottavio, confiant dans la générosité de l'empereur, refuse d'obéir, ce qui brise le cœur du vieil homme lorsqu'il apprend que son petit-fils favori, le cardinal Farnèse, est partie prenante dans la transaction.

Il est pris d'une fièvre violente et meurt au Quirinal, le , à l'âge de quatre-vingt-un ans.

Il repose à la basilique Saint-Pierre, dans la tombe dessinée par Michel-Ange et érigée par Guglielmo della Porta[8].

Descendance

Au début du XVIe siècle, encore diacre, et avant de devenir prêtre, Alexandre Farnèse avait eu avec Sílvia Ruffini quatre enfants :

  • Costanza (en) (-) mariée à Bosio II Sforza
  • Pier Luigi (-), duc de Parme et de Plaisance et premier duc de Castro, il épouse Gerolama Orsini en 1519.
  • Paolo (1504-1512)
  • Ranuccio (1509-1529)

Les deux premiers enfants seront légitimés par Jules II[9].

Postérité

La jeunesse d'Alexandre Farnèse, encore dans la vie civile, relatée de manière tumultueuse et romancée dans un manuscrit italien anonyme, a inspiré à Stendhal (1783-1842) l'action du héros de La Chartreuse de Parme (1839) : Fabrice Del Dongo[10].

Paul III donne son nom à la chapelle Pauline, qu'il fait construire au palais du Vatican de 1537 à 1539 et orner, par Michel-Ange, de deux fresques célèbres, ses dernières œuvres peintes.

Les Quinze tableaux de Sebastiano Ricci

Le peintre du XVIIIe siècle Sebastiano Ricci réalisa entre 1687 et 1688, quinze huiles sur toiles sur le thème de son histoire. Elles sont conservées au palais Farnèse à Plaisance : Paul III approuve la compagnie de Jésus ; Paul III approuve l'ordre des capucins ; Paul III parmi les cardinaux ; Paul III bénit une flotte partant contre les Sarrasins; Paul III avec une statue de la Madone ; Paul III et les cardinaux se rendant à Trento ; La Foi pointe vers une statue de Paul III ; Apothéose de Paul III ; Paul III approuve le projet du château de Piacenza[11].

Notes et références

Sources

  • P. Sforza Pallavicini (trad. H. Migne), Histoire du concile de Trente, imp. Migne, 1844.
  • O. Ponvinio, Pontificorum Romanorum vitæ.

Bibliographie

  • M. Artaud de Montor, History of the Popes, New York, 1867.
  • L. Pastor, Histoire des papes, Plon, Paris, 1892-1938.
  • L. Von Ranke, Histoire de la papauté, Fayard, Paris, 1986.
  • Fred Bérence Les Papes de la Renaissance Éditions du Sud & Albin Michel, Paris, 1966.

Notes et références

  1. Sur le palais Farnèse et la famille Farnèse en général, voir Ferdinand de Navenne, Rome. Le palais Farnèse et les Farnèse, Paris, Albin Michel, 1914 et 1923.
  2. Cf. Pierre Mesnard, "Charles Quint et les Barbaresques", Revue hispanique, 1959, (vol. 61, 2-3), p. 232.
  3. Aspects de la propagande religieuse de G. Berthoud.
  4. Visite du Paris protestant au temps de la Réforme.
  5. voir Dictionnaire historique des rues de Paris de Jacques Hillairet.
  6. Qu'il avait lui-même réinstauré dix ans plus tôt.
  7. Si l'on en croit le film Mission.
  8. Tous les papes ne reposent pas dans un monument en rapport avec leur rôle historique.
  9. (de) Roberto Zapperi, Die Vier Frauen des Papstes. Das Leben Pauls III. zwischen Legende und Zensur,, Munich, Beck Verlag,
  10. Mickaël Pouteau, Quand François côtoyait Léonard, , 114 p. (ISBN 978-2-9537260-0-8).
  11. Collection du Palais

Voir aussi

Articles connexes

À la télévision

  • Le pape Paul III est interprété par Peter O'Toole dans la série télévisée Les Tudors.
  • Borgia, série télévisée franco-allemande créée par Tom Fontana et diffusée sur Canal+ à partir d'octobre 2011. Alessandro Farnese est interprété par Diarmuid Noyes.

Liens externes

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