École royale du génie de Mézières

L'École royale du génie de Mézières fut fondée en 1748 sur proposition du comte d'Argenson, secrétaire d'État à la Guerre et de Nicolas de Chastillon, commandant de la citadelle de Charleville-Mézières. 542 ingénieurs militaires y furent formés.

École royale du génie de Mézières
Histoire
Fondation
Dissolution
Statut
Type
publique, militaire
Fondateur
comte d'Argenson et général de Chastillon
Localisation
Pays
France
Ville
Mézières
Localisation sur la carte de France
L’Hôtel du Département des Ardennes occupe aujourd’hui les locaux de la prestigieuse école de l'Ancien Régime
L’hôtel du département des Ardennes.

Depuis 1800, l'édifice héberge les services de la préfecture des Ardennes.

Le bâtiment

Panneau d'information : Histoire de l'école.

Le bâtiment occupe l'emplacement du palais des Tournelles, résidence des gouverneurs de Mézières. Philippe le Bon, duc de Bourgogne, construisit le premier palais des Tournelles en 1409. Il avait été rebâti en 1566 par Louis de Gonzague, comte de Rethel. Le roi Henri III loge au palais des Tournelles, en 1583. Le palais des Tournelles a été en grande partie détruit par un incendie, en 1697. Une partie de l'édifice est reconstruit en 1732.

La décision d'installation de l'École royale du Génie à Mézières, en 1748, s’inscrivait dans un plan de modernisation de la place fortifiée de Mézières. La corne du faubourg Saint-Pierre est transformée pour devenir la couronne de Charlemagne, un bras de la Meuse est comblé.

L'Hôtel du Gouverneur est occupé en 1753 par l'école royale du Génie. Du palais construit par Louis de Gonzague il reste la grande salle voûtée au rez-de-chaussée du corps central. L'école devient école royale le . Le bâtiment actuel a été construit entre 1780 et 1789. Gaspard Monge a fait tracer la « méridienne du temps vrai, et courbe du temps moyen » qui se trouve sur le pilastre de la chaîne d'angle de l'aile ouest de la cour d'honneur[1].

En , les élèves ingénieurs reçoivent à Mézières la visite du général La Fayette. L’école est transférée à Metz en 1793 (École d'application de l'artillerie et du génie), avant d'être supprimée en 1794. Monge, qui y avait été professeur, s'inspira largement des méthodes en usage à l'École du Génie pour mettre au point l'enseignement[2] de ce qui allait devenir l'École Polytechnique.

Le Conseil général du nouveau département des Ardennes s'est installé dans l'aile ouest le . La préfecture s'y est installée le . Les locaux de l’école sont aujourd'hui occupés par l’Hôtel du Département (naguère préfecture des Ardennes).

En 1863 ont été édifiés les deux pavillons d'angle et la grille.

Le grand quartier général de l'armée allemande s'installe dans les locaux de la préfecture au cours de la Première Guerre mondiale.

Programme des études

Les élèves étaient recrutés sur concours, en principe uniquement dans le second ordre (la noblesse). Le concours portait sur une interrogation de mathématiques dont le programme recouvrait les cours de Camus et de Bézout, et l'on recrutait une vingtaine d'élèves. Les examinateurs au concours d'entrée furent Étienne Camus puis l'abbé Bossut. Chastillon fut le premier directeur de cet établissement.

Les études duraient deux années :

  • une année de théorie, qui se concluait par le concours de sortie, comprenant
    • des cours de mathématiques, de statique et d'hydraulique (assurés par Bossut) ;
    • des séances de dessin au lavis des trois systèmes de fortification de Vauban ;
    • des séances de dessin des ordres d'architecture selon Claude Perrault ;
    • des cours de stéréotomie et de coupe des bois ;
  • une année de pratique, pendant laquelle les élèves faisaient :
    • les exercices de l'école de siège à l'automne,
    • des exercices de levé à la toise et à la boussole de bâtiments de la ville
    • un levé de plan détaillé d'une place forte particulière, avec finition au lavis.

Selon l'ordonnance de 1776, après les deux années de service à l'école, les élèves prennent le titre d'aspirants au corps royal du génie et le rang de lieutenant en second d'infanterie et servent en cette qualité deux autres années, au sein du corps royal de l'artillerie, où ils sont attachés comme surnuméraires aux compagnies des mineurs et de sapeurs. Après ces deux années, les aspirants au corps royal du génie servent deux années au sein d'une brigade de ce corps avec le rang de lieutenant en premier. À la suite de ces deux années, les aspirants sont placés deux ans au moins auprès des régiments d'infanterie.

Réformes de l'école

Les fortifications de la ville, prétexte à de nombreux exercices de levé et de dessin au lavis...fossés, tour des lieutenants et tour Milard.
  • L'ordonnance du multiplie par cinq les promotions (une centaine d'élèves), changeant nécessairement la forme des cours : nécessité de supports écrits, diminution des travaux dirigés en plein air (demandant trop de temps et d'encadrement), augmentation des travaux en salle. Le recrutement se démocratise aussi : Coulomb, Monge sont admis à suivre les cours. Des leçons de physique, inspirées du cours de l'abbé Nollet, font leur apparition dans le cursus.
  • La mort de Chastillon en 1764 fait disparaître la scission entre les deux années (théorique et pratique).
  • L'ordonnance de 1776, réclamée à cor et à cri depuis une dizaine d'années par l'aristocratie, met un terme à l'ouverture du concours aux sujets du tiers état : les promotions diminuent à une dizaine d'élèves à partir de cette date.
  • Règlement-Instructions de 1777, largement inspirées par Gaspard Monge, qui donnent la primauté au dessin géométral (qui deviendra plus tard la géométrie descriptive) et à la mécanique dans les épreuves du concours de sortie.
  • Création d'un laboratoire de chimie en 1782.
  • Avec trop peu d'élèves-ingénieurs, le concours de sortie est de facto supprimé à partir de 1787. Le Comité de salut public, sur proposition de Lazare Carnot, transfère l'école en 1794 à Metz, puis elle fusionne en 1807 avec l'École d'artillerie de Châlons et devient l'École d'application de l'artillerie et du génie, la principale école d'application de la toute nouvelle École polytechnique. Après la défaite de 1870, l'école déménage à Fontainebleau. En 1912, la formation du génie est séparée et devient l'École militaire et d'application du génie de Versailles tandis que la formation de l'artillerie devient l'École militaire de Fontainebleau. En 1940, à la suite de l'invasion allemande, l'École militaire et d'application du génie déménage à Avignon. L'école est dissoute en 1942, puis recréée à Angers en 1945 comme École d'application du génie d'Angers. Une seconde école est créée à Versailles, l'école supérieure technique du génie qui devient en 1976 l'École supérieure du génie militaire. Les deux écoles fusionnent en 1995 pour donner l'École supérieure et d'application du génie.

Élèves de l'école de Mézières

Par ordre de promotion.

Dessin au lavis de la halle aux blés de Paris par Nicolas Le Camus de Mézières (1763). Source : BNF.
Plan de l'école.

Bibliographie

  • Bruno Belhoste, « Du dessin d'ingénieur à la géométrie descriptive : l'enseignement de Chastillon », In extenso, no 13,
  • Bruno Belhoste, « L'alliance entre théorie et pratique », La Recherche, no spécial 300 ans de science, , p. 40–45 (ISSN 0029-5671)
  • B. Belhoste, A. Picon, J. Sakharovitch, « Les exercices dans les écoles d'ingénieur sous l'Ancien Régime et la Révolution », Histoire de l'Éducation, no 46, , p. 53
  • Anne Blanchard, Les ingénieurs du roy de Louis XIV à Louis XVI : étude du corps des fortifications, Univ. de Montpellier, ESID, coll. « coll. Études Militaires », , 635 p.
  • « École du génie de Mézières », Cahiers du Centre d'étude d'histoire de la défense, sous la direction du chevalier de Chastillon, no 11, .
  • L. Tuetey, Les officiers sous l'ancien régime, nobles et roturiers, Paris, Éditions Plon, , p. 361
  • Roger Chartier, « Un recrutement scolaire au XVIIIe siècle : l’école royale de génie de Mézières », Revue d'Histoire moderne et contemporaine, XX, 1973, p. 369-375

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

Notes et références

  1. Jean-Marie Pérouse de Montclos (sous la direction de), Le guide du Patrimoine : Champagne-Ardenne, Paris, Hachette, 1995, p. 149 (ISBN 978-2-01-020987-1)
  2. Jean-Pierre Callot, Histoire de l'École polytechnique - Ses légendes, ses traditions, sa gloire, Paris, Stock, 1975, 234 p.
  3. D'après Louis Tuetey, Les officiers sous l'ancien régime, nobles et roturiers, Paris, , p. 361, et Archives Administratives de la Guerre, Carton des officiers du génie, n°183 ; Archives des Colonies, E 334, dossier Perrault, voir Paul Perrault, p. 377
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