Église Saint-Sylvestre de Jailly
L'église Saint-Sylvestre de Jailly (Nièvre), est une église romane datant du XIIe siècle. Présentant une architecture clunisienne sobre avec une construction en gradins compensant la déclivité du terrain, elle fait l’objet d’un classement au titre des monuments historiques par la liste de 1840[1].
Pour les articles homonymes, voir église Saint-Sylvestre.
Église Saint-Sylvestre de Jailly | |
Vue d'ensemble de l'édifice. | |
Présentation | |
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Culte | Catholique |
Type | Église paroissiale |
Rattachement | Diocèse de Nevers |
Début de la construction | XIe siècle |
Fin des travaux | XIIe siècle |
Style dominant | Art Roman |
Protection | Classé MH (1840) |
Géographie | |
Pays | France |
Région | Bourgogne-Franche-Comté |
Département | Nièvre |
Ville | Jailly |
Coordonnées | 47° 05′ 48″ nord, 3° 28′ 44″ est |
Dans le Folklore de France, Paul Sébillot écrit : « Plusieurs églises ont été construites en un espace de temps prodigieusement court, par des personnages légendaires [...] Ce sont surtout les fées qui bâtissent les églises [...] Les fées n'ont pas réussi à terminer avant minuit l'église de Jailly, et depuis on a vainement essayé de reprendre leur œuvre[2]. »
Architecture
Relevé de 1876
Un architecte M. Massillon-Rouvet (1847 - 1914) a effectué en 1876 un relevé de cette église de Jailly.
L'étude de M. Massillon-Rouvet, délégué de la Société académique du Nivernais, sur l'Église de Jailly au point de vue architectonique, est une rapide esquisse des curiosités que présente dans son architecture cette église de village. Toutefois, la façade de ce monument est restée inachevée depuis de longs siècles, M. Massillon-Rouvet rappelle à ce propos une légende populaire qui a cours dans le Nivernais et à laquelle a donné naissance l'interruption des travaux de l'église de Jailly.
II convient de savoir gré à M. Massillon-Rouvet, de la Société académique du Nivernais, des termes dans lesquels il a décrit l'église de Jailly[3].
Jailly est une petite commune de la Nièvre qui renferme une église merveilleuse. D'aucuns supposent qu'elle peut dater du douzième siècle, d'autres veulent qu'elle ait été construite par des fées, et les fées ressemblent assez aux dynasties égyptiennes dont les antiquaires ne parviennent pas sans peine à fixer la chronologie, C'est bien sous la plume de M. Massillon-Rouvet que j'ai surpris cette phrase :
« S'il faut en croire la tradition, l'église de Jailly n'est point une œuvre humaine, mais celle des fées. On montre, près de Saint-Bénin des Bois, la fontaine ou elles ont pris leur eau» et on assure que leurs pas sont encore marqués dans les prés par des trainées de verdure qui tranchent sur le reste par leur vivacité. Mais vainement s'empressèrent-elles au travail : le jour Vint trop tôt, et, suivant la loi qui régie leurs destinées, elles durent laisser le portail inachevé : il l'est en effet, et, disent les paysans, on a bien essayé de le parfaire depuis; mais les maçons n'ont jamais pu faire tenir leur ciment ni leurs pierres. »
La construction de l’église
La construction même mérite qu'on s'y arrête. Quoique la pierre soit belle et homogène, elle est toute posée sur son lit et taillée sur chantier, avant sa mise en place. Au douzième siècle, on ne connaissait pas ces constructions sculptées dans la masse, au mépris de la structure. L'appareilleur était le maitre des œuvres lui-même ; à chaque pierre, à chaque claveau, on sent sa présence. II n'y a rien de compassé, de guindé ; nulle raideur ou sècheresse : il semble que l'imagination de l'artiste se soit fait un jeu de la difficulté même[4].
Dans l'appareil, les pierres n'ont pas des assises égales en hauteur et en longueur; de plus, leurs tailles varient, les laéures[5] sont plus ou moins inclinées, plus ou moins accentuées; toutes se contrarient, afin que les rayons du soleil s'y accrochent, ou que les ombres les rehaussent.
Si les futs des colonnettes sont en délit et monolithes, c'est qu'elles servent de points d'appui rigides; mais leurs bases et leurs chapiteaux sont toujours pris dans une autre assise. Tous les claveaux sont inégaux et dissemblables, suivant qu'ils ont plus ou moins d'épaisseur, qu'ils sont lisses, moulurés ou sculptés.
Ainsi, au portail, le cintre extérieur est composé de dix claveaux d'environ soixante centimètres de joint a joint; au contraire, le troisième rang, qui a seize claveaux, n'a que des épaisseurs variant entre dix-huit et vingt-six centimètres. Les second et le quatrième.
Les cintres ont de fines moulures; vingt-six claveaux au quatrième, vingt au second, étalent utiles pour rapprocher les coupes et permettre à l'œil de saisir leur galbe dans une impression multiple ; mais par contraste, le cintre intérieur, qui forme tympan, a seulement dix claveaux, car il n'y a ni sculpture ni moulures. Et pour tous les cintres, superposés en véritables arcs de décharge, non seulement ils satisfont l'œil par leur harmonieuse disposition, mais ils témoignent, à simple vue, d'une solidité égale à celle que les Romains obtenaient par un système différent de construction[6].
Une dernière particularité complétera la description. Le linteau qui forme ici une partie du tympan a été, au quinzième siècle, décoré d'une peinture aujourd'hui presque effacée et représentant l'Annonciation ; il devait être d'un seul morceau et, pour avoir sa portée, s'engager sur les pied-droit jusque derrière le premier rang de claveaux. C'est ce qui a été fait du côté droit, sur des hauteurs. Mais à gauche, soit que la dimension de la pierre ait été trop grande, soit par suite d'un accident a la pose, on a coupé le linteau en ne lui laissant qu'une maigre assise sur trois hauteurs; puis on a ajouté un morceau à joint dissimulé. Sur ces portées utiles, on a continué la décharge du linteau, en gravant de faux joints de claveaux qui font pour l'œil reposer la décharge sur les pied-droit mêmes[7].
Histoire
Bâtie à flanc de coteau, l’église s’adosse au massif de Saint-Saulge et domine la vallée de la Canne.
Un prieuré assez discret a été érigé au sud de l’église par les moines bénédictins de la Charité. Une partie des terres de la commune leur avait été donné vers 1050. Les travaux de la priorale commencent au XIe siècle pour se perpétuer jusqu’au XIIe. Cette dépendance était plutôt bien établie : non loin d’une fontaine autrefois vénérée qui existe toujours, elle se situait de plus sur le « Grand chemin » de Saint-Jacques de Compostelle allant à Nevers, en provenance de Vézelay.
Voisinant le prieuré de Saint-Saulge qui par son influence entrava son développement et suivant le déclin du prieuré de La Charité à la fin du Moyen Âge, le prieuré de Jailly est décrit aux XIVe et XVe siècles comme étant « de faible valeur » et ayant « un revenu modeste ». Plus tard, François Gabriel du Verne prieur du lieu des 1731 constate : « par défaut d’entretien et de couverture, l’église se trouve dans un état de très grande pauvreté ».
À partir de 1773, un nouveau curé, Jean-Baptiste Laproye arrive à Jailly et alerte sur la vieille église qui est au bord de la ruine : la nef a été détruite par un incendie et le cloché est sérieusement en souffrance.
Il contacte alors l’intendant de la généralité de Moulins à deux reprises en 1778 et en 1787 : « les habitants dudit lieu, sont exposés à périr en l’église pendant les offices par son mauvais état, n’ayant aucune couverture ni charpente, les pluies, les neiges et les gelées ayant si fort endommagé les voûtes que chaque jours il en tombe partie ».
Arrive alors la Révolution et la reprise des biens du clergé comme biens nationaux, le curé achète l’église et les anciens bâtiments du prieuré. Pour solder son achat il aurait fait démolir ce qu’il restait de la nef et en aurait vendu les débris. Cette partie que l’on voit découverte sera utilisé comme cimetière jusqu’en 1829.
À sa mort, Jean-Baptiste Laproye légua l’église à la commune, les anciens bâtiments prieuraux revenant à son domestique. Vers 1833, la commune de Jailly qui avait récupéré l’ancien prieuré le détruisit.
En 1840 à la suite de l’intervention de Prosper Mérimée, l’église est inscrite sur la première liste des monuments historiques, elle est classée définitivement en 1886. Plusieurs campagnes de travaux et de sauvetage vont alors se succéder tout au long des XIXe et XXe siècles, jusqu’à la dernière en 1995.
Notes et références
- Notice no PA00112903, base Mérimée, ministère français de la Culture
- Cité par Paul Sébillot, Le folklore de France. Tome 4. Le peuple et l'histoire, Volume 4, 1968, Page 124
- Réunion des sociétés des beaux-arts des départements, rapport général page 41
- Réunion des sociétés des beaux-arts des départements, l'église de jailly page 161. Cet extrait est lui-même repris de l'ouvrage Le Nivernois, album historique et pittoresque (1838, t. II, p. 204)
- LAEUR, laéure: Largeur, étendue;latitudo voir glossaire de la langue romane
- Réunion des sociétés des beaux-arts des départements, l'église de Jailly page 769
- Massillon Rouvet, Voir la source des textes précédents
Annexes
Bibliographie
- Joseph-Napoléon Morellet, Jean-Claude Barat et Edmond Bussière, Le Nivernois, album historique et pittoresque, 2 volumes in folio, Nevers, E.Bussière,
- Réunion des sociétés des beaux-arts des départements..., Volume 12, Nevers, Ministère de l'éducation nationale, Direction générale des beaux-arts,
- Jean Martin-Demézil et la Société française d’archéologie, Nivernais : 125e session du congrès archéologique de France, Paris, 1967.
- Odile Bloin et la Camosine, Jailly église Saint-Sylvestre, Les églises romanes du Nivernais, tome 1, Nevers, 2018.
- Jean-William Hannoteau et la Camosine, la Nièvre, Vert pays des eaux vives, Nevers, 2000.
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