Abbaye de Sozan

L'abbaye Saint-Michel-Archange de Sozań est une ancienne abbaye indépendante de Galicie orientale[réf. nécessaire] ou Ruthénie rouge (en ukrainien Червона Русь, en polonais Ruś Czerwona, en latin Ruthenia Rubra), jadis en Autriche-Hongrie et aujourd'hui en Ukraine, dans le raion de Staryi Sambir.

Abbaye Saint-Michel de Sozań

Église abbatiale du chapitre Saint-Michel de Sozań.

Abbaye mère rattachée directement au Saint-Siège
Fondation avant 1292
Diocèse archidiocèse de Lviv
Localisation
Pays Ukraine
Région historique Galicie
Subdivision administrative Staryi Sambir raion
Commune Sozan
Coordonnées 49° 26′ 27″ nord, 23° 02′ 09″ est
Géolocalisation sur la carte : Ukraine

Abbaye territoriale de Sozań
(la) Abbatia territorialis Sozanensis
Pays Ukraine
Église catholique
Rite liturgique Rite arménien de Léopol, dit "hiérosolymitain", romain
Type de juridiction abbaye territoriale
Création
Suppression jamais supprimée
Affiliation Saint-Siège
Siège Sozań en exil
Diocèses suffragants aucun
Titulaire actuel Maximilien de Sozań
Langue(s) liturgique(s) latin
Calendrier grégorien
Paroisses 2

L'archistratège Saint Michel Archange est le patron céleste de l'abbaye[réf. nécessaire], célébré le .

L'abbaye territoriale séculière (abbé et chapitre collégial) est en exil[Où ?] depuis l'occupation de ses bâtiments en 1945[réf. nécessaire].

Histoire

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Sozań a appartenu successivement aux entités qui se succédèrent à la tête de la région :

Fondation avant le XIIIe siècle

La plus ancienne mention de l'abbaye remonte au 8 octobre 1292[1][source insuffisante],[2][source insuffisante], en tant que monastère autonome de l'Église orthodoxe[3][source insuffisante] suivant la règle de saint Basile le Grand[2], soumis au droit grec et dépendant « directement de la juridiction du Trône Patriarcal » de Constantinople[2] ; il s'agit du plus ancien document en vieux slavon conservé aux archives de Pologne[réf. nécessaire].

La région ne cesse de changer de dominateur : Miezko Ier (Pologne), saint Vladimir Ier le Grand (Rus' de Kiev) en 981, Boleslas Ier le Vaillant (Pologne) en 1018, (Rus' de Kiev) en 1031, Casimir III le Grand (Pologne) en 1352. De 1370 à 1384, Pologne et Hongrie se trouvent unifiées sous par Louis Ier le Grand.

À la suite de l'Union de Krewo (14 août 1385), le grand-duc de Lituanie Jagellon se fait baptiser catholique (15 février 1386), épouse sainte Hedwige Ire, roi de Pologne (18 février). Couronné roi de Pologne sous le nom de Ladislas II, il devient une fois veuf (17 juillet 1399) l'unique souverain de Pologne, asseyant la dynastie Jagellon à la tête du double royaume jusqu'en 1572.

Plus d'un siècle après la fondation de Léopol (1256) par le roi Mstislav le Hardi, Ladislas II octroie aux villes voisines de Prémislia (1383) et Sambir (1390) les privilèges urbains (droit de Magdebourg)

[pertinence contestée]

.

Stavropégie de la famille de Sozań (1396)

Carte de la Pologne vers 1392.

Les ducs souverains chassés de Moldavie, devenus voïvodes de Marmatie, Balc et Drag de Bedeu par leur alliance avec le comte Dracula, résistent toutefois à la réorganisation de la Marmatie en s'appuyant sur le patriarcat de Constantinople : lors de leurs voyages de 1381 et 1390 à Constantinople, ils obtiennent respectivement des patriarches Nil de Constantinople et Antoine IV le titre de stavropégie (équivalent oriental de l'abbaye nullius) pour l'important monastère Saint-Michel de Peri[4], et la fondation d'un exarchat s'étendant sur les territoires familiaux dans les régions voisines.

À la toute fin du XIVe siècle, le voïvodat autonome de la Marmatie disparaît[5], remplacé par le comté (comitat, megye en hongrois) de Máramaros, simple division administrative du royaume magyar, sans autonomie. Il subsistera, dans les mêmes limites que le voïvodat, jusqu’en 1918.

Blason de Simon de Jarilowice.

Étienne, frère de Balc et Drag, s'installe quant à lui en Pologne, la Galicie-Lodomérie relevant de ce royaume depuis le milieu du XIVe siècle (1340), seules les années 1370-1384 voyant l'union des royaumes de Pologne et Hongrie.

« Près de la cité de Sambor, sur la rive droite du fleuve Dniestr habite la Maison des Sas de Sozań (descendants des ducs de Sas). A l'origine, ils habitaient près de la ville de Sambor dans le village appelé Jarylowcach, mais en 1392 ce village devint la nouvelle demeure des colons saxons pour les mines. A ce moment, le clerc diak Simon devint le nouveau propriétaire du monastère de Sozań [6] [à dix kilomètres de là]. »

Écu de la famille de Sozan.

Le , Simon (Senko) de Jarilowice, héritier d'Étienne et diak (équivalent d'acolyte), acquiert en effet le monastère Saint-Michel de Sozań et des privilèges en échange de plusieurs autres propriétés, par édit royal[7] de Ladislas II Jagellon, roi de Pologne de 1386 à 1434.

Il devient abbé nullius sous le nom de Simon de Sozań, et le titre est depuis transmis au sein de la famille. La plupart de ses successeurs seront prêtres et mariés, selon la discipline orientale. Il adopte alors l'écu de l'abbaye, portant de gueules à l'hamaïde d'argent[8].

En 1535, Sigismond Ier le Vieux, roi de Pologne de 1506 à 1548, confirme à Paul de Sozań ses privilèges[2], dans un édit contresigné par Mgr Jean Choienski, évêque de Przemyśl[9].

Mausolée de la famille des Sozań.

Unions avec Rome (1596 et 1630)

Le monastère stavropégique relève du patriarcat de Constantinople jusqu'à la fin du XVIe siècle. Membres de la famille de Sozań et religieux intègrent la communion de Rome, lors de l'Union de Brest-Litovsk entre l'Église ruthène avec le Siège Apostolique (1596).

L'abbaye passée au catholicisme remplace le rite constantinopolitain par le rite gréco-catholique en latin, grec et araméen (cf. l'Ordo divinæ Missæ Armenorum[10] de 1642), avec missel propre[11]. Tandis que l'Ordre de saint Basile tend à centraliser les abbayes autonomes, Sozań demeure indépendant[2].

« Les membres de la Maison de Sozań furent, avec l’abbaye, des Catholiques de la première heure »[2], tandis que l'éparchie de Przemyśl demeure dans le giron du patriarche orthodoxe de Constantinople jusqu'en 1610 ; elle se divise alors entre Catholiques et Orthodoxes, tous de rite grec, et deux évêques coexistent. « D’après une ancienne lettre de protection, datant de 1610 et du Roi de Pologne pour le premier évêque uniate de Przemyśl, Athanase Krupezki, plusieurs nobles de la Maison de Sozań furent choisis comme Protecteurs.[2] » L'Église arménienne rejoint ensuite l'Église catholique romaine, le .

En 1699 est fondée une confrérie de Saint-Michel, « pieuse Fraternité en l’honneur du saint Archange Michel. Elle est ouverte à tous les hommes de toutes les classes de la société »[2].

Partage de la Pologne

Entrée du mausolée et écu des Sozan.

À la fin du XVIIIe siècle, l’impératrice Marie-Thérèse d'Autriche fait valoir ses droits sur la région, hérités d'André II de Hongrie (1177-1235). En 1772, à la suite de la partition de la Pologne, Leopol (Lwów en polonais) devient, sous le nom allemand de Lemberg, la capitale de la province autrichienne nommée Royaume de Galicie et de Lodomérie, l'un des royaumes constitutifs, de 1172 à 1918, de l'empire d'Autriche, puis des royaumes et pays représentés à la Diète d'Empire au sein de l'Autriche-Hongrie (1867)[12]. En 1784, l'empereur Joseph II y fonde une université laïque.

Sécularisation en Chapitre noble (1786)

En 1786, sous l'abbatiat d'André Ier l'Ancien de Sozań (1759-1807)[2], face à la politique antireligieuse de l'empereur Joseph II, et à la vacance du siège abbatial depuis 1763, le monastère est sécularisé - passant du clergé régulier au clergé séculier - par privilège royal de Stanislas II Auguste, dernier roi de Pologne et grand-duc de Lituanie de 1764 à 1795.

Mgr Maximilien Rilo, évêque de Przemyśl, Sambor et Sanok.

Le chapitre noble de Saint Michel Archange, composé de chanoines séculiers[13], est fondé le 12 janvier 1786[14], et installé le 29 septembre par Mgr Maximilien Rilo, évêque de Przemyśl, Sambor et Sanok (1780-1794), éparchie gréco-catholique où se trouve l’abbaye ; c’est cet évêque qui ordonne les sujets de l’abbaye.

Le nom officiel est « Capitulum Ecclesiæ Collegiatæ Sancti Michaelis Archangeli Sozanensis »[2] (Chapitre de l’Église Collégiale de Saint Michel Archange de Sozań).

Des statuts capitulaires remplacent la règle monastique, et deux dignitaires sont institués[2] : l'abbé du chapitre séculier : André Ier l'Ancien de Sozań (1759-1807)[2], fils du dernier abbé du monastère, Hyacinthe (1720-1763) ; et un prévôt mitré et crossé - jouissant comme l'abbé des pontificalia[15] - à la tête du chapitre : Jean-Baptiste Ier de Sozań (1753-1822), son frère aîné et successeur.

L'admission au canonicat nécessite de justifier sa noblesse sur trois générations, avec dispense possible par l'abbé. Une croix est attribuée aux chanoines, en forme de croix de Malte, en émail bleu et argent doré, avec saint Michel au milieu d’un ovale en habits baroques portant lance et bouclier aux armes du chapitre, et au dos en émail blanc portant en lettres romaines : «CAPITULUM SOZANENSIS A.D. MDCCLXXXVI», surmontée d’une couronne princière ou royale de Pologne. Les chanoines non mariés habitent le monastère.

Carte militaire du district de Sambor (1877), au temps de l'Autriche-Hongrie. Au centre, l'église collégiale Saint-Michel (en blanc) et l'église grecque-catholique Saint-Michel (en noir).

L’abbaye passe bientôt sous le patronage de l’empereur d’Autriche puis d’Autriche-Hongrie, et relève directement de sa juridiction, les chanoines prêtres devenant chevaliers de l’empire autrichien comme tous les chapitres séculiers de l'empire. Tous les bâtiments sont confirmés propriété de la famille Sozań. L'abbaye de Saint-Michel-Archange demeure exempte, et sa juridiction s'étend sur les villages alentour, soit plusieurs hectares. Un propriétaire foncier de la mense sert de « représentant permanent de l'abbé et du chapitre dans ses territoires galiciens »[2].


L'abbatiale-collégiale Saint-Michel est de nouveau consacrée après sa reconstruction en 1806, tandis que l'église-fille gréco-catholique Saint-Michel est édifiée et consacrée en 1821. En 1842 a lieu une modification des statuts.

Après l’abolition des domaines galiciens, à partir du milieu du XIXème siècle, les mêmes droits furent accordés à une personne de la famille de Sozań, exercés en tant que membre de la Diète [...] jusqu'en 1918[2].

Le temps des honneurs

En 1859, dans le Supplément hebdomadaire de la Gazette de Léopol (Gazecie Lwowskiej), est publiée une "copie réalisée à partir de l'original le 10 juillet 1859" des différentes confirmations des privilèges royaux pour la terre et le monastère de Sozan, en date des 7 décembre 1396, du mercredi avant la Passion 1535 et du 12 janvier 1786.

En 1862, comme à de nombreux chapitres austro-hongrois tels celui de la cathédrale Saint-Adalbert d'Esztergom en Hongrie, le pape Pie IX accorde aux chanoines prêtres la mozette violette et la dignité ex officio de protonotaires apostoliques ad instar participantium[16].

Article sur Sozań dans le Dictionnaire géographique du royaume polonais et d'autres pays slaves (t. XI, 1890, p. 101).

En 1890, le Dictionnaire géographique du royaume polonais et d'autres pays slaves inclut Sozań dans son XIe tome[17] et évoque Antoine de Sozań comme le plus grand propriétaire. L'église Saint-Michel-Archange est mentionnée dans le village en majorité gréco-catholique.

Le 29 juin 1907, Henri-Adam de Sozań devient le nouvel abbé. Il se marie trois semaines avant sa bénédiction abbatiale le 29 septembre, et procède à plusieurs réformes des statuts, droit particulier de son abbaye[18] :

Stalles et iconostase du chœur de la cathédrale gréco-catholique de Przemyśl.
  • La Très Sainte Vierge Marie (sous le vocable de son Assomption) et saint Grégoire l'Illuminateur sont élevés au rang de patrons secondaires de l'abbaye.
  • La charge d’abbé devient héréditaire electus hered. »).
  • L’abbé de Sozań, déjà indépendant et exempt, est désormais appelé officiellement nullius[19], comme l'établira bientôt le Code de droit canonique de 1917 ; il commence ses décrets par « Nos Henricus Adamus de SOZAN, Dei Miseratione et Sanctæ Sedis Apostolicæ gratia Abbas Nullius de Sozań ».
  • Il choisit sa résidence principale en Hongrie[2].
  • L'abbé change pour lui-même et le chapitre le rite propre du chapitre, passant du rite grec (gréco-catholique) au rite léopol de tradition arménienne[2] Ritus Leopoli Armenorum »), en partie issu de la liturgie de saint Jean Chrysostome (byzantin ukrainien) et désormais appelé « rite hiérosolymitain » (Ritus hierosolymitanus), utilisant l’anaphore de saint Jacques (mozarabe) ; le latin est confirmé comme langue des documents officiels. L'abbaye de Sozań et l'archidiocèse de Léopol des Arméniens sont les deux seules Églises particulières célébrant le rite hiérosolymitain ; elles relèvent directement du Saint-Siège.

    Le changement de rite aboutit à un accord avec l’évêché gréco-catholique de Przemyśl, représenté par Monseigneur Constantin Czechowicz. Tous les futurs prévôts de Sozań, dans le cas où ils seraient de rite grec, deviendraient chanoines du chapitre cathédral de l’église cathédrale gréco-catholique de Saint-Jean-Baptiste de Przemyśl[2].

Mgr Philippe Camassei (1848-1921), patriarche latin de Jérusalem.

Le 4 décembre 1916, en pleine Guerre mondiale, le pape Benoît XV crée lors d'un consistoire douze cardinaux ; aux trois Français et sept Italiens, s'ajoutent deux nominations in pectore :

Armes de Mgr Adolf Bertram, prince-évêque de Breslau.

« Pour des raisons diplomatiques »[20], le prince-abbé de Sozań est créé cardinal extra numero, non à titre personnel mais par office, devenant ainsi cardinal-abbé nullius et jouissant désormais, lui et « ses successeurs masculins, sans autre confirmation »[20], du rang et des privilèges des cardinaux.

Mgr Joseph Theodorowicz, archevêque de Léopol des Arméniens (1864-1938).

Mgr Joseph Theodorowicz (1864-1938), archéparque (archevêque) catholique de Léopol des Arméniens, publiera le cardinalat du prince-abbé le 16 avril 1922 en ces termes :

Nous, Joseph Theodorowicz, par la Miséricorde divine et la grâce du Saint Siège Apostolique, Archevêque de Léopol du rite des Arméniens, etc. etc. etc. avons la joie et l'honneur de proclamer et de confirmer que Sa Sainteté le Pape Benoît XV a créé lors d'une audience en l'an 1916 le cardinalat pour Son Excellence l'Abbé Nullius de Sozan pour des raisons diplomatiques. Le présent Cardinalat s’applique à ses successeurs masculins [männlichen Amtsnachfolger], sans autre confirmation [Bestätigungen]. Son Excellence l'Abbé Nullius de Sozań appartient à la Gens Apostolica, et descend du saint Roi-Prophète David et de saint Gregoire l'Illuminateur. Il est maintenant présent en tant que [Son] Excellence Révérendissime Henri Adam, de la S.R.E. [Sanctæ Romanæ Ecclesiæ] Cardinal Abbé de Sozan. Donné dans Notre ville de Léopol [Lemberg] le 16 avril 1922. Signé ‡ Joseph, Archevêque. Sozań, copie faite le 22 septembre 1942. [en marge : Original in situ][20]

Il reconfirmera cette création le 5 avril 1923 :

Nous, Joseph Theodorowicz, par la Miséricorde divine et la grâce du Saint Siège Apostolique, Archevêque de Léopol du rite des Arméniens, etc. etc. etc. confirmons que Son Excellence l'Abbé Nullius de Sozań a le droit de porter depuis 1916 le titre de Cardinal de la Sainte Église Romaine [S.R.E., Sanctæ Romanæ Ecclesiæ], et qu'il est désormais le Seigneur Eminentissime [Son Excellence Eminentissime] Henri Adam, de la S.R.E. Cardinal Abbé de Sozań. Ses successeurs masculins ont droit au cardinalat, avec tous les droits et les privilèges d'un cardinal de la Sainte Église Romaine. Ce cardinalat est Extra Numero [hors du nombre des cardinaux participants, c'est-à-dire votants au conclave]. Donné dans Notre ville de Léopol [Lemberg] le 5 avril 1923. Signé ‡ Joseph, Archevêque. Sozań, copie faite le 21 septembre 1942. [en marge : Original in situ][21]

Ancien château Saint-Michel du prince-abbé de Sozań.

Principauté souveraine (1918-1945)

En 1918, à la chute de l'empire austro-hongrois à la fin de la Première Guerre mondiale, l'abbaye devient une principauté ecclésiastique souveraine ; le prince-abbé relève désormais au spirituel directement du Saint-Siège et non plus du patronage de l’empereur autrichien, et devient au temporel commandant en chef[2]. Le premier et unique souverain en exercice en est le prince-abbé Henri-Adam de Sozań (1878-1956), qui abolit la Loi salique pour sa Maison[2]. « Le territoire compte un domaine petit et compact, comprenant plusieurs villages (avec plusieurs milliers d'habitants) et le château de Sozań, siège de l'administration de la Principauté [...]. En raison de la dégradation de la situation économique après la désintégration de l’Empire Austro-Hongrois, une dignité ecclésiastique, Vidame, fut accordée en retour de la fourniture et de l’entretien du Chapitre collégial[2]. » Léopol devient la capitale de l’éphémère République populaire d'Ukraine occidentale () avec l'appui de l'armée autrichienne, avant d’être rattachée à la Pologne (victorieuse dès 1919) avec un statut d’autonomie ()[source insuffisante].

Occupation polonaise

En 1921, la Deuxième République de Pologne se voit attribuer la Galicie occidentale par le traité de Riga (18 mars 1921) et incorpore la Galicie orientale en 1923. Elle annexe les terres de l'abbaye[2] à la Voïvodie de Lwów ; les biens du prince-abbé sont confisqués en 1927, mais il n'est pas expulsé. Il n’abdique pas, demeure de jure prince souverain et confirme les statuts de son abbaye le .

Croix de collier et plaque de chevalier de l'Ordre suprême du Christ.

L'archevêque de Léopol des Arméniens, Mgr Theodorowicz, annonce même et confirme le que Benoît XV (mort le 22 janvier précédent) a fait Henri-Adam de Sozań chevalier jure sanguinis de l'Ordre du Christ, plus haute distinction pontificale, réservée aux chefs d'État chrétiens :

« Nous, Joseph Theodorowicz, par la Miséricorde divine et la grâce du Saint Siège Apostolique, Archevêque de Léopol du rite des Arméniens, etc. etc. etc. avons l'honneur d'annoncer et de confirmer que Son Excellence Henri Adam de Sozań a valablement accepté son droit légitime d’être chevalier de l'Ordre du Christ par l’ascendance légitime de Sa Majesté Denys Ier, Roi du Portugal, Fondateur et Grand-Maître de l'Ordre du Christ. Son Excellence en a hérité pour ses successeurs masculins en fonction. Sa Sainteté le pape Benoît XV l'a gracieusement accepté, lui et ses successeurs, comme chevalier de jure sanguinis de l’Ordre du Christ, sous la clause Extra Numero. Donné dans Notre ville de Léopol [Lemberg] le . Signé ‡ Joseph, Archevêque. Sozan, copie faite le . [en marge : Original in situ][22] »

Partition de la Pologne en 1945 (Sozań est au Sud-Ouest de Lviv).

Invasion soviético-nazie de la Galicie

Dès 1939, quand commence la Seconde Guerre mondiale, la partie orientale de la Pologne (dont la Galicie) est occupée par les troupes soviétiques et nationales-socialistes, annexée en 1939 par le IIIe Reich allemand et en 1945 par l'U.R.S.S.

Investie par la coalition allemande nazie et russe communiste[23], la garnison polonaise de Léopol se rend le 22 septembre 1939, et sera fusillée à Katyn en 1940. L'Armée rouge chasse la Wehrmacht de Léopol (27 juillet 1944) et la région est annexée par l'Union soviétique et incorporée à la République socialiste soviétique d'Ukraine selon une des clauses secrètes du pacte germano-soviétique Molotov-Ribbentrop[24]. La frontière prévue en 1919 par la « ligne Curzon » est dépassée au profit de l’U.R.S.S. aux accords de Yalta (février 1945).

La machinerie militaire soviétique communiste avec l’Armée rouge réussit l’occupation brutale de ce territoire. Depuis qu’existe une historiographie, jamais la Galicie n’a connu une telle défaite et toute la région, Sozań inclus, fut emportée dans la chute et souffrit d’une dévastation et désertification totales.[2]

Destruction et spoliation

Mgr François de Sozan (1887-ap.1945), prévôt de Sozan, envoyé au Goulag et disparu.

Cette même année, l'Armée rouge chasse la famille de Sozań ainsi que le chapitre, et saisit leurs biens. Des Ukrainiens pro-soviétiques dévastent entièrement les propriétés du chapitre et du prince-abbé, et dynamitent l'église paroissiale. Disparaissent alors le trésor, la bibliothèque et les archives du chapitre, de la famille Sozan et de la paroisse de Sozań[25][source insuffisante]. Le chanoine Anatole Sembratowicz est fusillé par les Communistes près de Przemyśl[réf. nécessaire].

Exil du chapitre

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Le prince-abbé Henri-Adam trouve asile en Tchécoslovaquie, où il est assigné à résidence et meurt en 1956[réf. nécessaire]. Le prévôt François de Sozan et plusieurs chanoines sont quant à eux envoyés au goulag où ils meurent martyrs du communisme, comme beaucoup de religieux de l'abbaye territoriale de Tokwon, en Corée du Nord, à la même époque, dont l'histoire est similaire[26][pertinence contestée].

Mgr Miron de Sozan (1921-1992), prévôt de Sozan.

L'exil des successeurs de l'abbé leur fait traverser l'Europe, et le chapitre subsiste dans la clandestinité : d'abord en Hongrie et Tchécoslovaquie[2]; un nouveau prévôt, de rite gréco-catholique, est finalement nommé en 1950 aux États-Unis.

Situation canonique

« Le statut juridique est celui d’une institution de droit pontifical Sanctæ Sedi immediate subjectum [...], ouverte à tout homme de tout rite catholique. [...] Tous les Abbés étaient dotés d’une juridiction territoriale et personnelle (Ordinarius loci et personarum) d’abbaye nullius et recevaient le titre d’Excellence.

Tous ces siècles durant, la base juridique pour l’abbaye et ensuite le chapitre collégial de Sozań fut le droit romain oriental (grec), fondé plus tard sur le droit arménien du code de Mekhitar Gosh. Le droit particulier y a également contribué. [...] Jusqu'aujourd'hui, la communauté n'a pas récupéré son ancien territoire originel et doit vivre en exil[2]. »

Le nouveau Code de Droit canonique appelle officiellement depuis 1983 les abbayes nullius : abbayes « territoriales », qu'il définit comme :

« une portion déterminée du peuple de Dieu, territorialement circonscrite, dont la charge, à cause de circonstances spéciales, est confiée à un Prélat ou à un Abbé qui la gouverne comme son pasteur propre, à l'instar de l'Évêque diocésain[27]. »

Les Églises particulières « une fois légitimement érigées, jouissent de plein droit de la personnalité juridique »[28]. Or, « la personne juridique est par sa nature perpétuelle » (can. 120 §1)[29]. Plusieurs entités ecclésiastiques de Léopol ont mis des décennies à être restaurées. L'archevêché de Léopol des Arméniens (Lviv), de même rite que l'abbaye de Sozan et relevant comme elle directement du Saint-Siège, est quant à lui toujours vacant[30] depuis 1938 mais encore mentionné dans l'Annuario Pontificio[31]. En Corée du Nord, l'abbaye territoriale de Tokwon se trouve dans une situation similaire.

Sozań aujourd'hui

Conformément à la politique antireligieuse des dictatures communistes, les bâtiments de l'abbaye sont aujourd'hui occupés par un établissement hospitalier neuropsychiatrique, et l'indépendance de l'Ukraine le n'a pas permis le retour des membres de l'abbaye.

Aucune des quatre conditions d'extinction[32],[29] n'étant remplie, « même s’il ne subsiste plus qu’un seul membre de la personne juridique collégiale, et si, selon les statuts, l’ensemble des personnes n’a pas cessé d’exister, l’exercice de tous les droits de l’ensemble revient à ce seul membre » (can. 120 § 2). Aussi l'actuel abbé de Sozań depuis 1995, S.Exc. Ém. Mgr Maximilien de Sozan, a-t-il reconstitué son chapitre en 2009[33].

Personnalités liées à l'abbaye

Liste des abbés

Liste des prévôts

Personnages importants

Parmi les chanoines de Sozan, plusieurs membres de la famille Sembratowicz s'illustrent, comme :

Le cardinal Sylwester Sembratovicz (1836-1898), chanoine de Sozan.
  • le cardinal Sylvestre Sembratowicz[34] (né le 3 septembre 1836 à Desznica en Pologne, et mort le 4 août 1898 à Lemberg). Fils d'un curé gréco-ruthène et neveu du métropolite Joseph Sembratovicz de l'archéparchie de Lviv, il étudie à Rome au collège grec-ruthène de Saint-Athanase et à l'Athénée Pontifical de la Propaganda Fide. Ordonné prêtre le 1er novembre 1860, il est successivement préfet des études au séminaire grec-ruthène de Léopol (1863-1865), professeur de théologie (1865-1879), évêque titulaire de Juliopolis[35] et auxiliaire du siège ruthène de Léopol, sacré le 20 avril 1879 par son oncle, l'archevêque Joseph Sembratowicz[36]. Promu archevêque métropolitain de Lviv et Halicz des Ruthènes grecs le 27 mars 1885, il réforme l'Ordre Monastique Basilien, célèbre un synode en 1891 et fonde une nouvelle congrégation des Sœurs Servantes de Marie réformée en Sœurs Basiliennes en 1897. Assistant au trône pontifical le 17 juillet 1894, il est créé cardinal-prêtre de Santo Stefano al Monte Celio au consistoire du 29 novembre suivant par le pape Léon XIII. Il meurt à Léopol deux ans plus tard à l'âge de 61 ans.
Mgr Léon Sembratowicz, portant le collier et la croix du chapitre de Saint-Michel de Sozan. (collection d'Ireny Biłas)
Mgr Léon Sembratowicz, en tenue de cérémonie. (collection d'Ireny Biłas)
  • Mgr Léon Sembratowicz[37] (né le 5 septembre 1844 à Królowa Ruska - mort le 12 juillet 1910), prêtre gréco-catholique, administrateur de Roztoka Wielka près de Krynica (1870) et de Dobra (1871), chanoine du chapitre de Sozan. Fils de Michel (1814-1884), vice-doyen de Muszyna, curé à Nowa Wieś et à Lubaczów, il était marié à Julia Myszkowska, qui lui donna treize enfants dont deux filles qui épousèrent des prêtres orientaux, et deux fils prêtres : Eugène et Anatole.
  • Mgr Anatole Sembratowicz[37] (né le 4 novembre 1884 à Desznica - mort le 23 février 1945 à Przemyśl), son avant-dernier fils. Marié à Maria Węgnowicz, dont il eut trois enfants, ordonné prêtre en la cathédrale grecque-catholique de Przemyśl le 18 décembre 1910, il est étudiant en théologie et philosophie au séminaire théologique gréco-catholique de Przemyśl, vicaire (1910) et administrateur (1924) de la paroisse de Krynica à Muszyna, administrateur (1924) et dernier curé (1925) de la paroisse gréco-catholique Bachów, administrateur du village de Babice (1939) et chanoine du chapitre de Sozan. Il est fusillé par les Communistes[38].
Mgr Anatole Sembratowicz (1884-1945). (collection d'Ireny Biłas)

Notes et références

  1. Acte de fondation de l'abbaye du Très Saint Rédempteur (jouxtant le territoire de Sozan) par le prince galicien Leo Danilowicz, le 8 octobre 1292 à Léopol (Lviv).
  2. (de) Mgr Norbert WEIS, Lettre explicative sur le Chapitre Collégial de Saint Michel Archange de Sozan, Spire, , 4 p.
    Archives de Sozan
  3. Édit royal de 1291 dans les archives d’État de Pologne, copié dans : Joseph Lewicki, Grammatik des kleinrussischen Sprache, Przemysl, 1834.
  4. Construit en 1391 et détruit en 1783 (donc quasiment l'exact contemporain du monastère de Sozan), il était le siège du diocèse roumain du Maramures. Il s'est relevé de ses cendres en 2004 de l'autre côté de la Tisa, à Sapanta en Roumanie.
  5. Celui de Transylvanie subsiste quant à lui jusqu’en 1867.
  6. (pl) Ludwik Wyrostek, Les descendants des Drag et Sas en Hongrie et Galicie, Cracovie, Annuaire des sociétés héraldiques de Pologne (Cracovie), t. I, r. 1931/2, , p. 53 (Les Sozan).
  7. Édit royal signé à Sambor le , conservé dans les archives d’État de Pologne à Varsovie, et cité dans le journal Gazeta Lwowska, Lemberg, 1859.
  8. (la) Collectanea ex Archivo Collegii Historici, Cracovie, Académie des Lettres, , t. XII, 1re partie, p. 187
  9. Édit royal signé à Vilnius le mercredi précédent le dimanche de la Passion de l'an 1535, conservé dans les archives d’État de Pologne à Varsovie, et cité dans le journal Gazeta Lwowska, Lemberg, 1859.
  10. Sacrée Congrégation de la Propagande de la Foi, Ordo divinae Missae Armenorum, Rome, (lire en ligne)
  11. R.P. Pierre Lebrun, de l'Oratoire, Explication littérale, historique et dogmatique des prières et des cérémonies de la Messe, suivant les anciens auteurs, et les monumens de toutes les Eglises du monde chrétien, avec des Dissertations & des Notes sur les endroits dificiles, & sur l'origine des Rits., Paris, Veuve de Florentin Delaulne, , p. 355 (exemple) 10e dissertation (Liturgie des Arméniens)
  12. Jacques Le Rider et Heinz Raschel, La Galicie au temps des Habsbourg (1772-1918), Presses Universitaires François-Rabelais, (ISBN 9782869063150, présentation en ligne)
  13. C.I.C./1917, « Can. 324 », sur https://www.droitcanonique.fr, .
  14. Édit royal signé à Varsovie par Stanislas II en la 22e année de son règne, et Hyacinthe (Jacek) Malachowski, prochancelier du royaume, conservé dans les archives d’État de Pologne à Varsovie, et cité dans le journal Gazeta Lwowska, Lemberg, 1859.
  15. C.I.C./1917, « Can. 325 », sur https://www.droitcanonique.fr, .
  16. Mgr Xavier Barbier de Montault, Analecta Juris Pontificii, Rome, Paris, Bruxelles, Victor Palmé (Paris), , 1148 col. (lire en ligne), p. 11e série, coll. 556-591.
  17. (pl) CHLEBOWSKIEGO (Bronislawa), WALEWSKIEGO (Wladyslawa) et SULIMIERSKIEGO (Filipa), Dictionnaire géographique du royaume polonais et d'autres pays slaves, Varsovie, Nakladem Wladyslawa Walewskiego, , 960 p. (lire en ligne), p. 101
  18. C.I.C./1917, « Can. 319 § 2 », sur https://www.droitcanonique.fr, .
  19. C.I.C./1917, « Can. 319 § 1 », sur https://www.droitcanonique.fr, .
  20. Décret (en allemand) signé le 16 avril 1922 à Léopol, et recopié le 22 septembre 1942 dans les Registres de Sozan. Fonds d'archives de l'actuel prince-abbé. Original aux archives de l'archevêché arménien de Léopol.
  21. Décret (en allemand) signé le 5 avril 1923 à Léopol, et recopié le 21 septembre 1942 dans les Registres de Sozan. Fonds d'archives de l'actuel prince-abbé. Original aux archives de l'archevêché arménien de Léopol. .
  22. Décret (en allemand) signé le à Léopol, et recopié le dans les Registres de Sozan. Fonds d'archives de l'actuel prince-abbé. Original aux archives de l'archevêché arménien de Léopol.
  23. « Le phénomène nazi en Ukraine : la Galicie », Les Crises, (lire en ligne).
  24. Jean-Paul Brunet, Michel Launay et Michel Margairaz, D'une Guerre mondiale à l'autre, 1914-1945, Hachette Supérieur (ISBN 2 01 018636 2, lire en ligne).
  25. Alexandre Sumpf et Vincent Laniol, Saisies, spoliations et restitutions - Archives et bibliothèques au XXe siècle, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, (ISBN 9782753519961, lire en ligne).
  26. Joannes Mahr, Die Märtyrer von Tokwon - Glaubenszeugen in Korea 1950-1952, , 505 p. (ISBN 978-3830675082).
  27. can. 370 § 1.
  28. can. 373.
  29. Codex Juris Canonici, Rome, (lire en ligne), Can. 120
  30. (en) « Vacant sees / Dioceses without Bishops », sur https://www.catholic-hierarchy.org, (consulté le )
  31. Annuario Pontificio, Rome, , p. 426
  32. can. 120 § 1.
  33. Capitulum Canonicorum Ecclesiae Collegiatae Sancti Michaelis Archangeli Sozanensis, « Page internet du Chapitre », sur www.stiftsozan.de, . archivé le 14 juillet 2019 par wayback machine
  34. http://www.catholic-hierarchy.org/bishop/bsembr.html
  35. http://www.catholic-hierarchy.org/diocese/d2i07.html
  36. http://www.catholic-hierarchy.org/bishop/bsembj.html
  37. (pl) « Site de la famille Sembratowicz », sur http://myszkowscy.pl (consulté le )
  38. (en) « WHITE BOOK, Martyrology of the Clergy - Poland, XX Century (1914-1989) », sur http://www.swzygmunt.knc.pl (consulté le )

Voir aussi

Bibliographie

  • Lewicki (Joseph) : Grammatik der Ruthenischen oder Klein Kuffischen Sprache in Galizien ; Przemysl, 1834.
  • Pr Piekosinski (Franciszek) : Studya, rozprawy i materyaly z dziedziny historyi polskiej i Prawa Polskiego, t. VII ; Cracovie, 1907.
  • Collectanea ex archivo collegii historici, t. XII, pars 1, Cracovie, Academia litterarum, 1919.
  • Pr Semkowiscza (Wladyslawa) : Rocznik, Polskiego towarzystwa heraldycznego, t. XI, r. 1931/2 ; Cracovie, 1932.
  • Wyrostek (Ludwik) : Rod Dragow-Sasow ; Cracovie, 1932.
  • Petrowicz (Gregorio) : La Chiesa armena in Polonia e nei paesi limitrofi : 1686-1954 ; Istituto degli studi ecclesiastici, 1971.
  • Wlasylaw Makarski : Nazwy miejscowosci dawnej ziemi przemyskie ; Lubli, 1999.
  • Aleksiun (Natalia) : Histoire de l'Europe du Centre-Est, P.U.F., 2004, 997 p.

Liens externes

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