Aufseherin

Aufseherin (allemand : « surveillante »[1]) est le terme utilisé dans la Lagersprache pour désigner une gardienne auxiliaire (SS-Gefolge) des SS dans les camps de concentration nazis.

Herta Bothe en attente de son jugement () - Bergen-Belsen.

Recrutement

Ces femmes provenaient généralement des classes sociales basse à moyenne et avaient souvent peu d'expérience professionnelle. Les premières étaient des gardiennes de prison débutantes, des coiffeuses, des contractuelles, des chanteuses d'opéra, mais aussi des enseignantes à la retraite, etc.. Ces volontaires avaient vu des petites annonces parues dans les journaux allemands qui demandaient des femmes voulant démontrer leur amour pour le Reich et rejoindre l'organisation féminine Gefolge (auxiliaire) des SS . Les jeunes Allemands intégrant la SS, à compter du déclenchement de la seconde guerre mondiale et la création officielle de la Waffen S.S. en mars 1940, pouvaient le faire au lieu d'intégrer l'armée régulière (Wehrmacht) dont la conscription était obligatoire depuis le rétablissement par Hitler en 1935 du service militaire, l'armée allemande après 1918 étant composée uniquement d'engagés volontaires de tous grades, selon les conditions prévues par le Traité de Versailles, signé le 24 juin 1919.

Carrières

Arrestation des Aufseherinnen de Bergen-Belsen, . Parmi les femmes figurent de gauche à droite: Hildegard Kanbach, Magdalene Kessel, Irene Haschke, la gardienne en chef, Elisabeth Volkenrath (partiellement cachée) et Herta Bothe.

Au début, en 1938, ces femmes furent formées à Lichtenburg puis, après 1939, au camp de Ravensbrück, près de Berlin. Le camp de Stutthof (Pologne) a également servi de centre de formation.

D'après un article de l'historien Philippe Aziz de 1982, « Selon les témoignages de rescapés, ces femmes SS — en fait « auxiliaires féminines » — ont eu quelquefois des comportements d'une brutalité inouïe et leur apparition semait la terreur parmi les détenues[2] ». Sur la transformation des nouvelles gardiennes en femmes sadiques, nous citons le témoignage, rapporté par Philippe Aziz, de la sociologue Germaine Tillon[3] qui est accablant : « Certaines gardiennes prenaient un plaisir évident à frapper les déportées et tout particulièrement les plus faibles, malades ou visiblement effrayées. Les autres frappaient les prisonnières « avec rudesse et simplicité, comme un paysan sur son âne ». Elles semblaient redoubler de zèle devant leurs collègues masculins comme si elles voulaient mériter une considération spéciale en se montrant particulièrement agressives. »

En quelques jours, des jeunes femmes dont certaines étaient issues de la bonne société, se transformaient, pour leur majorité, « en brutale geôlière d'un troupeau de prisonnières[4] ».

Affectations

Exécution de gardiennes du camp de Stutthof en Pologne, à Biskupia Gorka le 4 juillet 1946.

En 1942, les premières gardiennes provenant de Ravensbrück arrivèrent à Auschwitz et Majdanek. L'année suivante, les Nazis commencèrent la conscription de femmes en raison de la pénurie de gardiens. Plus tard, durant la guerre, des femmes furent également formées à une échelle moindre dans les camps de Neuengamme, Auschwitz (I, II et III), Plaszow, Flossenbürg, Gross-Rosen, Vught et Stutthof.

Le nombre d'Aufseherinnen était généralement bas. Des 55 000 gardiens qui servirent dans les camps, seules 3 600 furent des femmes. Et aucune gardienne n'a jamais servi dans les camps d'extermination de Belzec, Sobibór, Treblinka ou Chełmno.

Sept Aufseherinnen servirent à Vught, vingt-quatre servirent à Buchenwald, trente-quatre à Bergen-Belsen, dix-neuf à Dachau, vingt à Mauthausen, trois à Dora-Mittelbau, sept à Natzweiler-Struthof, vingt à Majdanek, 200 à Auschwitz et ses camps annexes, 140 à Sachsenhausen, 158 à Neuengamme, quarante-sept à Stutthof, à comparer aux 958 qui servirent à Ravensbrück, 561 à Flossenbürg et 541 à Gross-Rosen. Beaucoup de surveillantes travaillaient dans les camps annexes en Allemagne, quelques-unes en France, Autriche, Tchécoslovaquie et Pologne.

Promotions et avancements

La lecture des témoignages, tant dans la presse que dans les comptes rendus de procès, a largement prouvé que l'univers concentrationnaire nazi était un milieu brutal et sadique, dirigé par des SS masculins dont la mission est vite devenue l'extermination des déportés, dans un univers d'où la pitié était vite balayée.

Les commandants des camps jugeaient vite leurs auxiliaires féminines sur leurs capacités à brutaliser et même à tuer. Si une Aufseherin se montrait brutale, sadique et sans pitié, elle devenait une collaboratrice utile à leur mission et remplissait alors les conditions pour être promue aux grades supérieurs de Rapportaufseherin (gardienne-chef), Erstaufseherin (première gardienne), Lagerführerin (chef de camp, une haute position sociale) ou Oberaufseherin (inspectrice senior, une très haute position sociale).

Le plus haut rang jamais atteint le fut par deux femmes, Anna Klein et Luise Brunner, et c'était le rang de Chef Oberaufseherin (inspectrice senior en chef). Mais aucune gardienne ne pouvait donner des ordres à un homme, quelles que soient les circonstances. Et aucune gardienne n'a jamais atteint le grade de commandant dans le système concentrationnaire. Elles étaient soit de rang équivalent aux hommes, soit sous leur autorité. Ravensbrück fut le seul camp strictement féminin ; il était dirigé par beaucoup de SS qui étaient assistés par quelques surveillantes.

Camps, noms et grades

Arrestation et expiation

De nombreuses auxiliaires féminines de la SS ont été capturées par les troupes alliées ou les polices d'États libérés. D'anciens gardes SS et leurs auxiliaires (Kapos) ont aussi été capturés.

Au camp de Bergen-Belsen, c'est en que les Aufseherinnen sont arrêtées par l'Armée britannique, qui leur imposent, comme punition, d'enterrer de leurs propres mains les cadavres des victimes de l'épidémie du typhus dans des fosses.

Se constituent après la défaite de l'Allemagne nazies quatre zones d'occupation dans l'Allemagne vaincue : la française, la britannique et l'américaine, toutes trois bases de la future République fédérale d'Allemagne, apparue en mai 1949 et la zone soviétique, future République démocratique allemande, crée en octobre 1949. Des procès ont été tenus à l'encontre des gardiens et gardiennes de camps de tous grades. Des verdicts ont été prononcés à l'encontre de ceux reconnus coupables de crimes contre l'humanité ou de crimes de guerre.

À l'est

Le premier procès du Stutthof, à Gdańsk, en Pologne, eut à juger treize accusés. Il se termina par la condamnation à mort et la pendaison publique de cinq accusées et de la condamnation d'une sixième à une peine de prison de quinze ans. Une demande de grâce reçut un avis favorable de la cour mais fut rejetée par le Président polonais. Six hommes dont le commandant du camp et des kapos furent aussi condamnés et exécutés. Il y eut deux autres procès du Stutthof avec d'autres condamnations à mort, des peines d'emprisonnement et des relaxes.

À l'ouest

Les tribunaux anglo-américains furent moins sévères mais il y eut aussi des condamnations à mort et les exécutions ne furent pas publiques. Les condamnées furent inhumées dans des cimetières, au contraire de celle exécutées à l'est qui servirent à des étudiants en médecine comme spécimens de dissection.

Criminelles exécutées à l'ouest :

Dans la fiction

Le film La vie est belle (1997) présente plusieurs personnages secondaires qui sont des Aufseherin.

Notes et références

  1. Sie gehören zum Gefolge der Waffen-SS. Source : Institut für Zeitgeschichte, München.
  2. Philippe Aziz, 1982, p. 49.
  3. Philippe Aziz, 1982, p. 54.
  4. Philippe Aziz, 1982, « introduction », p. 48.

Annexes

Bibliographie

  • Historia: Les Femmes SS,
  • Wendy Lower, Les Furies de Hitler: Comment les femmes allemandes ont participé à la Shoah, Tallandier, 2015
  • Fabrice d'Almeida, Ressources inhumaines: La gestion des gardiens de camps de concentration, Pluriel, 2011

Articles connexes

Liens externes

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