Biafra

Le Biafra, en forme longue république du Biafra (en igbo : Bịafra ; en anglais : Republic of Biafra), est entre 1967 et 1970 un État sécessionniste d'Afrique de l'Ouest situé dans la partie sud-est du Nigeria, la plus riche en réserves de pétrole. Le nom Biafra vient du golfe du Biafra situé au sud, sur la côte atlantique, lui-même nommé d’après le nom  Biafara  de la capitale d'un État resté mystérieux mais localisé par les marins portugais au XVe siècle en retrait de la côte, entre l'ancien royaume du Bénin et le Loango.

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République du Biafra
(en) Republic of Biafra

1967–1970

Hymne Land of the Rising Sun
Localisation du Biafra, en rouge.
Informations générales
Statut République sécessionniste
Capitale Enugu
Langue(s) igbo, anglais
Religion Catholicisme, protestantisme, animisme
Monnaie Livre du Biafra
Fuseau horaire UTC+1
Indicatif téléphonique n/a
Démographie
Population environ 13 500 000 (1967)
Superficie
Superficie 76 364 km2 (revendiqué)
Histoire et événements
Création
Réintégration dans le Nigeria

Entités précédentes :

Entités suivantes :

Géographie

Carte des territoires revendiqués par la république du Biafra.

La superficie revendiquée et contrôlée au début de la guerre du Biafra était celle de la région de l'Est (en) soit 76 364 km2.

La majorité du territoire est composée de plaines et du delta marécageux du Niger à l'ouest où le palmier à huile, l'hévéa et le cacaoyer étaient cultivés. Des gisements de pétrole avaient été trouvés dans la région. Des collines, début de la chaîne volcanique de la ligne du Cameroun, s'élèvent à la frontière est avec le Cameroun et le fleuve Niger marque la frontière ouest. Le Biafra s'ouvre au sud sur le golfe du Biafra de l'océan Atlantique.

Histoire

Le Nigeria obtient son indépendance totale en 1960. Le pays est alors divisé en trois régions disposant d'une large autonomie.

En , un coup d'État fomenté par différents groupes militaires installe au pouvoir le général Johnson Aguiyi-Ironsi, d'origine igbo. Lors du coup d'État, plusieurs hauts dignitaires originaires du Nord, dont le Premier ministre Abubakar Tafawa Balewa et Ahmadu Bello, le sultan de Sokoto, sont assassinés. Dans les mois qui suivent, le fait que le coup d'État ait été dirigé par des Igbos et que le pouvoir soit principalement entre leurs mains nourrit une haine grandissante contre cette ethnie et les discours racistes se multiplient. Surtout, le général Ironsi propose d'abolir la régionalisation au profit d'un gouvernement unitaire, ce qui est interprété comme une volonté d'asseoir la domination igbo sur les autres ethnies nigérianes.

Le 29 juillet 1966, un second coup d'État se produit, mené cette fois-ci par des militaires du Nord du Nigeria. Celui-ci est extrêmement violent : 240 militaires (dont le général Ironsi), pour la plupart igbos, sont assassinés[1], ainsi que des milliers de civils originaires du Sud[2]. À la suite de cela, un homme du Nord, le colonel Yakubu Gowon, prend la tête du gouvernement militaire. Une extermination physique des Igbos et des populations originaires du Sud vivant au Nord est alors programmée. Entre et , a lieu une série de terribles massacres dirigés contre les Igbos et d'autres populations originaires du Sud du Nigeria, mais installées dans le Nord[3]. Toute cette partie de la population est systématiquement assassinée. En représailles, des milliers de civils haoussas, idomas, tivs, et autres populations originaires du Nord sont assassinés par des Igbos à l'est, causant un exode massif. Les médias nationaux et internationaux ont une responsabilité dans le déferlement de violence : de fait, les élites du Nord créent de toutes pièces de fausses informations, exagérant les attaques menées contre les populations du Nord dans l'Est, pour les diffuser sur Radio Cotonou et par le biais du service Hausa de la BBC, dans le but d'exciter la haine[4]. Selon la presse britannique, ce sont près de 30 000 Igbos qui ont été exterminés en [5].

Ce sont ces exterminations, non reconnues par ceux qui les ont perpétrées, qui mènent à la guerre civile. Les Igbos décident de s'affranchir du régime fédéral aux mains des deux autres ethnies majoritaires du Nigeria, déclenchant la guerre civile avec la déclaration d'indépendance de la république du Biafra par son chef Odumegwu Emeka Ojukwu le . L'une des raisons de la sécession était que l'ethnie igbo, en majorité chrétienne et animiste souhaitait s'affranchir de la tutelle fédérale des Haoussas, en majorité musulmans. Cette guerre politique, religieuse et ethnique, très meurtrière, s'achève le . La guerre du Biafra a été racontée de manière romancée par l'écrivaine Chimamanda Ngozi Adichie dans son second roman, L’Autre Moitié du soleil, paru en 2006.

Les frontières du nouvel État n’étaient pas originales : elles étaient celles de la région de l'Est (en) du Nigeria, une région administrative créée par les Britanniques en 1939. Certes, elles regroupaient des populations igbos mais aussi des populations non igbos comme les Ijaws dans le delta du Niger[6]. Tout comme pour le Katanga, le Somaliland, l'Érythrée ou le Soudan du Sud, les sécessionnistes ont revendiqué la création d'un État dans des frontières coloniales et non dans des frontières pré-coloniales.

La sécession ne remettait pas en cause les concessions déjà accordées à des compagnies pétrolières existantes concernant le sous-sol du Biafra. Toutefois, il a été suggéré (notamment dans des récits mettant en cause le rôle de la France en Afrique à partir des années 1960) que les belligérants étaient soutenus par des puissances européennes en fonction des avantages escomptés sur des exploitations de type pétrolier.

Quatre pays africains (Tanzanie, Gabon, Côte d'Ivoire, Zambie) et Haïti reconnurent la jeune république du Biafra. La France l'aida de façon discrète par des envois comprenant des armes et des mercenaires. Le Nigeria réagit en décrétant le blocus et en déclenchant la guerre, aidé par le Royaume-Uni, l'Union soviétique et les États-Unis. Les hostilités feront plus d'un million de morts, notamment du fait de la famine. Au cours du blocus, au moins un avion de la Croix-Rouge a été abattu par le Nigeria, en violation des conventions internationales.

Selon Rony Brauman[7], « À l'automne 68 […] le gouvernement français mobilisait la Croix-Rouge et mettait en place, dans un même mouvement, un dispositif clandestin d'assistance militaire. Sous la direction d'un mercenaire américain, des pilotes français, rhodésiens, sud-africains et portugais, convoyaient des armements depuis le Portugal jusqu'au réduit biafrais via Sao Tomé où ils embarquaient équipes humanitaires, médicaments et vivres. La France et l'Afrique du Sud finançaient conjointement ce pont aérien. »

Le Biafra est réintégré dans le Nigeria le .

Population

Les habitants du Biafra sont majoritairement des Igbos (de langue igbo) qui formaient environ 70 % de la population du Biafra et 18 % de celle du Nigeria. L'écrivain Kurt Vonnegut les présente comme plus avancés dans l'éducation que les autres ethnies du pays (il mentionne le nombre d'Igbos effectuant des études supérieures internationales) et selon lui détestés du reste des Nigérians pour cette raison.

Les autres groupes ethniques importants sont les Ibibios, Ijaws, Ogojas, Ekois, Efiks

La majorité de la population est catholique, protestante, ou animiste.

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

Sources

Références

  1. Charles Nixon, « Self-Determination: The Nigeria/Biafra Case », World Politics vol. 24 no 4, juillet 1972, p. 473–497. JSTOR 2010453.
  2. Michael Vickers, « Competition and Control in Modern Nigeria: Origins of the War with Biafra », International Journal, vol. 25 no 3, 1970, p. 630. JSTOR 40200860.
  3. Charles Keil, « The Price of Nigerian Victory », Africa Today, Indiana University Press, vol. 17 no 1, janvie 1970, JSTOR 4185054.
  4. Charles Abbott, Douglas A. Anthony, « Poison and Medicine: Ethnicity, Power, and Violence in a Nigerian City, 1966-86 », The International Journal of African Historical Studies, vol. 36 no 1, p. 133, 2003, doi:10.2307/3559324.
  5. A.B. Akinyemi, « The British Press and the Nigerian Civil War », African Affairs, Oxford University Press, vol. 71 no 285, p. 408–426, octobre 1972, JSTOR 720847.
  6. (fr) Vincent Hiribarren, Les frontières du Biafra, de la colonisation à 1970, mémoire de Master 2 sous la direction de Pierre Boilley, de l’université Paris I Panthéon-Sorbonne, , 179 pages.
  7. « Rony Brauman, Biafra - Cambodge : un génocide et une famine fabriqués », sur Médecins sans frontières
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