Kateri Tekakwitha

Kateri Tekakwitha (Tekakwitha : « Celle qui avance en hésitant » en langue iroquoise ; aussi connue comme le « lys des Mohawks[1] »), née en 1656 à Ossernenon sur les rives de la rivière Mohawk (aujourd'hui située dans l'État de New York) et morte en 1680, est une jeune Mohawks convertie au christianisme.

Kateri Tekakwitha

Portait par le père Claude Chauchetière, 1690.
Sainte
Naissance 1656
Ossernenon (proche d'Auriesville), Iroquoisie
Décès   (24 ans)
Kahnawake, Nouvelle-France (aujourd'hui Québec)
Nationalité « Mohawk »
Béatification
par Jean-Paul II
Canonisation  Vatican
par Benoît XVI
Fête 17 avril
Attributs vêtements traditionnels, avec voile ou cape, tenant un crucifix ou un chapelet
Saint patron l'environnement, l'écologie, les autochtones

Après sa béatification par Jean-Paul II le , un décret portant sur un nouveau miracle a été signé en et a permis qu'elle soit déclarée sainte par l'Église catholique. Elle devient ainsi, le , la toute première autochtone d'Amérique du Nord à être canonisée, lors d'une cérémonie présidée par le pape Benoît XVI à Rome.

Biographie

Enfance

Sa mère, convertie au catholicisme, était algonquine alors que son père était agnier[2] ; ils venaient donc de deux tribus traditionnellement ennemies. Son lieu de naissance a vu le martyre d'Isaac Jogues, de René Goupil et de Jean de La Lande. Surnommée le « lys des Agniers », parfois on l'appelle tout simplement Catherine. Elle est une figure importante de l'histoire catholique canadienne et même nord-américaine.

À l'âge de quatre ans, elle perd toute sa famille (ses parents et son frère) à la suite d'une épidémie de petite vérole qui frappe la région de 1661 à 1663, sa vue est alors considérablement affaiblie et sa figure demeurera « grêlée » des suites de cette terrible maladie jusqu'à sa mort. C'est par ailleurs l'évènement qui est à l'origine de son nom : « Tekakwitha », traduisible en « celle qui avance en hésitant (ou péniblement)» ou « celle qui meut quelque chose devant elle»[3].

Conversion chrétienne

Kateri Tekakwitha.

Elle a dix ans quand son village déménage à Caughnawaga (l'actuelle ville de Fonda, dans l’État de New York). En 1667, ce village reçut la visite de missionnaires jésuites, les Pères Frémin, Bruyas et Pierron. C’est par eux que la jeune fille fait la connaissance de la religion catholique[4].

Lorsqu'elle en a l'âge, ses parents adoptifs (oncle et tante) ainsi que le chef amérindien l'obligent à choisir un mari mais, d'après les historiographes catholiques, elle souhaite ardemment conserver sa virginité afin de se consacrer à Jésus. Sa foi chrétienne serait largement due à l'arrivée de missionnaires catholiques dans son village[3]. Son refus de mariage la réduit quasiment à l'esclavage.

Elle exprime alors le vif désir de devenir chrétienne, d'être baptisée. Jacques de Lamberville, un jésuite, accède ainsi à sa demande mais seulement après six mois de catéchuménat : elle est baptisée par ce même prêtre le jour de Pâques, le . Elle reçoit du père Lamberville le nom de Kateri, en l'honneur de la sainte Catherine de Sienne[5].

Arrivée ensuite à la mission Saint-François Xavier, à La Prairie (cette mission est depuis 1716 établie sur le site de Kahnawake), en 1677, après un difficile voyage, elle désire alors se faire religieuse et ainsi entreprendre une démarche de conversion de la vallée iroquoise. La prière la transforme profondément à tel point que sa piété impressionne l'historien François-Xavier Charlevoix, en mission en Nouvelle-France sur les ordres du roi Louis XIV qui l'avait délégué. Elle ne vécut toutefois que trois années sur les bords du fleuve Saint-Laurent mais on lui attribue néanmoins d'avoir sauvé la colonie des attaques autochtones, la vue de sa tombe ayant effrayé et ainsi découragé les envahisseurs.

Mort

Elle rend l'âme le , à l'âge de vingt-quatre ans, en odeur de sainteté selon ses biographes jésuites. Au fil du temps, sa réputation se répand à travers le monde catholique, notamment grâce aux écrits dits relations des jésuites. Tout au long de sa courte vie, Kateri a beaucoup pratiqué le jeûne ainsi que la mortification, parfois même excessive par une naïve ignorance et réprouvée par son confesseur, souvent sous forme de sévices corporels.

Aujourd'hui, son tombeau est exposé à l'église Saint-François-Xavier de Kahnawake, à l'intersection de Church Road et River Road (45° 24′ 55″ N, 73° 40′ 37″ O).

Postérité

Kateri Tekakwitha est inconnue des catholiques nord-américains, si ce n'est son culte local autour de Kahnawake jusqu'à la fin du XIXe siècle qui voit le catholicisme en expansion sur le sol américain se chercher des figures autochtones en guise de légitimation. Exemple d'inculturation, elle est alors devenue, aussi bien dans l'hagiographie jésuite que dans le discours anti-hagiographique des femmes, un symbole catholique intertribal polyvalent[6].

Béatification

Les nombreuses guérisons lors de son enterrement, ainsi que la disparition des cicatrices de son visage sont considérés comme des miracles. En 1884, on introduit sa cause en béatification au Synode des évêques américains de Baltimore. Les Autochtones catholiques associés dans la Conférence de Tekakwitha (en) instituée en 1939, font de sa canonisation leur cheval de bataille[7].

Elle a été déclarée vénérable par Pie XII le . Mgr Gérard-Marie Coderre présida au transfert de ses reliques en 1972. Kateri est béatifiée par Jean-Paul II le [8]. C'est la première fois qu'une autochtone est béatifiée[9].

Canonisation

Statue de Kateri Tekakwitha à la basilique Sainte-Anne-de-Beaupré, près de la ville de Québec.

Le décret concernant ses miracles a été signé le 2011. Il s'agit, en 2006, de la guérison d'un jeune garçon, Jake Fink-Bonner, de Sandy Point, une petite ville située près de Seattle (Washington), de la fasciite nécrosante, également connue sous l'appellation populaire de « bactérie mangeuse de chair ».

Sa canonisation a eu lieu à Rome par le pape Benoît XVI, le [10],[11],[12]. Un sanctuaire lui est consacré à la Mission Saint-François-Xavier, à Kahnawake[13]. Il y a une église Katheri-Tekakwhita dans la communauté montagnaise de Mashteuiatsh, dans la région du Saguenay–Lac-Saint-Jean et dans la communauté de Uashat Mak Maliotenam. Un camp de vacances aux États-Unis, entièrement francophone, le camp Tékakwitha[14], a aussi été fondé et nommé en son honneur.

Surnommée « le lys des Mohawks », Sainte Kateri (Sa fête figure au calendrier liturgique de l'Église catholique le 17 avril) est la première sainte autochtone d'Amérique du Nord et la douzième canadienne[15]. Elle est également la sainte patronne de l'environnement, de l'écologie, des personnes en exil et des autochtones d'Amérique[16],[17],[18].

Autres hommages

Devise

« Qui est-ce qui m'apprendra ce qu'il y a de plus agréable à Dieu afin que je le fasse[21] ? »

Représentations

  • Kateri Tekakwitha, auquel le narrateur s'adresse fréquemment, est mentionnée dans le roman Beautiful Losers de Leonard Cohen.
  • La poète Rina Lasnier lui a consacré une pièce de théâtre intitulée Féérie indienne en 1939.
  • Kateri Tekakwitha est une figure de référence très importante dans le roman A Cry of Stone (2003) de l'écrivain canadien Michael D. O'Brien.
  • Kateri Tekakwitha est évoquée par Jacques Poulin dans son roman Volkswagen Blues (1984). Dans la première édition française, en 1988 chez Jean Picollec, l'éditeur lui a consacré une entrée dans l'«index des personnalités » ajouté au roman québécois pour les lecteurs français.
  • Kateri Tekakwitha est également présente dans les épisodes 18 & 19 de la série dessin-animée Clémentine.

Notes et références

  1. La Presse canadienne, « La Mohawk Kateri Tekakwitha sera canonisée à l'automne prochain », Le Devoir, (ISSN 0319-0722, lire en ligne).
  2. Jean-Christophe Laurence, « Kateri Tekakwitha décortiquée », La Presse, (ISSN 0317-9249, lire en ligne).
  3. Michelle Paquette, "Notre Kateri": un regard féministe sur l'imagerie canadienne-française de la première sainte autochtone dans la première moitié du 20e siècle, Mémoire de maîtrise (Histoire de l'art), Université du Québec à Montréal, 2015, p. 1.
  4. Site cccb.ca, page "SainteKateri Tekakwitha".
  5. (en) Margaret Bunson, Kateri Tekakwitha. Mystic of the Wilderness, Our Sunday Visitor Publishing (en), , p. 69.
  6. Allan Greer, « L'hagiographie en Nouvelle-France : le cas de Kateri Tekakwitha », dans Marta Dvorak, La Création biographique, Rennes : Presses universitaires de Rennes, 1997, p. 267-74.
  7. (en) Rosemary Guiley, The Encyclopedia of Saints, Infobase Publishing, , p. 201
  8. « Sainte Kateri Tekakwitha », sur nominis.fr
  9. « Kateri, la bienheureuse indienne »
  10. Site de Radio-Canada, « Un Torontois parmi les nouveaux cardinaux, une Autochtone parmi les saintes », 18 février 2012.
  11. Site ftsr.wordpress.com, « La canonisation de Kateri Tekakwitha (1656-1680) : à propos d’un geste symbolique ».
  12. Site news.va ; « Sept futurs nouveaux saints dont un français, le Bienheureux Jacques Berthieu »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogle • Que faire ?).
  13. maranatha.mmic.net.
  14. camp Tékakwitha.
  15. Site ici.radio-canada.ca, article "Kateri Tekakwitha, une sainte amérindienne".
  16. « Sainte Kateri Tekakwitha! | Actualités », sur www.international.gouv.qc.ca (consulté le )
  17. « Sainte Kateri (Kateri Tekakwitha) | l'Encyclopédie Canadienne », sur www.thecanadianencyclopedia.ca (consulté le )
  18. (en) Catholic Online, « St. Kateri Tekakwitha - Saints & Angels », sur Catholic Online (consulté le )
  19. Site diocesemontreal.org, article "Bénédiction d’une statue de sainte Kateri Tekakwitha dans la Cathédrale Marie-Reine-du-Monde", consulté le 19 janvier 2021.
  20. Site ustpaul.ca/, page "Dévoilement d’une nouvelle statue de sainte Kateri Tekakwitha à l’Université Saint-Paul", consulté le 19 janvier 2021.
  21. Évêché de Chicoutimi, « Activités entourant la canonisation de Kateri Tekakwitha » (consulté le ).

Voir aussi

Bibliographie

  • « Tekakouitha (Tagaskouïta, Tegakwitha), baptisée Kateri (Catherine) », dans Dictionnaire biographique du Canada, volume I, 1966 et 1986 [lire en ligne].
  • Robert Rumilly, Kateri Tekakwitha: le Lys de la Mohawk, la Fleur du Saint-Laurent, Bouasse-Jeune, 1934.
  • Henri Béchard, Richard Arès, Kateri Tekakwitha, Les Éditions Bellarmin, 1950.
  • Édouard Lecompte, Kateri Tekakwitha : le lis des missions iroquoises, 1948.
  • Agnès Richomme, Kateri Tekakwitha, Fleurus, 1995.
  • Allan Greer, Catherine Tekakwitha et les Jésuites : la rencontre de deux mondes, Boréal, 2007.
  • Jacques Gauthier, Sainte Kateri Tekakwitha, Le Livre Ouvert, Collection : Paroles de vie, 2012.
  • Jean-Michel Wissmer, Kateri Tekakwitha, L’entrée du Christ chez les Iroquois, Voyage au cœur de l’Amérique indienne et colonialiste, Canada, Éditions GID, 2017, (ISBN 978-2-89634-343-0)

Liens externes

Vatican

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