Communauté Saint-Martin

La Communauté Saint-Martin est une association publique cléricale de droit pontifical rassemblant des prêtres et de diacres séculiers vivant leur apostolat en petites communautés au service des diocèses. Elle fut fondée par l’abbé Jean-François Guérin en 1976. Considérée comme très conservatrice et comme proposant un projet de restauration identitaire[1], elle se veut fidèle à l'Église catholique.

Pour les articles homonymes, voir CSM.

Communauté Saint-Martin

Repères historiques
Fondation 1976
Fondateur(s) Père Jean-François Guérin
Lieu de fondation Gênes, Italie
Siège Évron, France
Fiche d'identité
Église Catholique
Type Association cléricale publique de droit pontifical, ayant la faculté d'incardiner
Dirigeant Abbé Paul Préaux
Membres 168 prêtres et 87 séminaristes
Localisation France, Italie, Allemagne et Cuba
Site internet communautesaintmartin.org

Elle compte, en 2022, plus de 160 prêtres et diacres dans plus de 41 paroisses et plus de 100 séminaristes.

Sa maison-mère et sa maison de formation (séminaire et école de philosophie et de théologie) sont situées depuis 2012 au sein de l'ancienne abbaye Notre-Dame d'Évron.

Historique

Les premiers membres de la Communauté Saint-Martin furent accueillis en 1976 au couvent capucin de Gênes-Voltri par le cardinal Giuseppe Siri, archevêque de Gênes et figure conservatrice[2],[3], où ils menaient la vie commune autour du fondateur, l'abbé Jean-François Guérin. Ils suivaient les cours au séminaire interdiocésain de Gênes. En 1983, la Communauté reçut son premier ministère paroissial dans le diocèse de Fréjus-Toulon. En 1993, l'occasion se présenta d'implanter la maison-mère en France, près de Blois, à Candé-sur-Beuvron[4]. La maison-mère est aussi maison de formation pour les futurs prêtres et diacres de la communauté. La partie intellectuelle de la formation est assurée par une École supérieure de théologie, affiliée depuis 2007 à l'Université pontificale du Latran, à Rome. L'École publie une revue semestrielle, Charitas.

La communauté connaît une forte croissance depuis 2000, et représente en 2014 un quart des entrées en séminaire des diocèses français[4].

La maison-mère, et maison de formation, était située à Candé-sur-Beuvron, près de Blois de 1993 à 2014.

En septembre 2014, le siège de la maison-mère et de la maison de formation a été déménagé à Évron, en Mayenne, où la Communauté Saint-Martin a acquis l'abbaye Notre-Dame d'Évron. Cette dernière voit quotidiennement évoluer, en son sein, plus d'une centaine de membres (sept formateurs et cent quatre séminaristes). Louis Hervé Guiny, prêtre depuis 2000, est le responsable du séminaire[5],[6].

Caractéristiques

Des prêtres et des diacres en communauté au service de la mission

La Communauté Saint-Martin met ses membres au service des évêques désireux de leur confier des missions apostoliques variées : paroisses, aumôneries de collège et d’internat, sanctuaires, maisons de retraite[2]. Ses prêtres et diacres servent en France et à l’étranger. La formation, au sein de la Communauté, est d'ordinaire d'une durée de huit ans, jusqu'à l'ordination sacerdotale. Certains membres choisissent la vocation de diacre permanent.

Vie commune et mobilité sont les deux principales caractéristiques de la vie martinienne. Envoyés à la demande des évêques au service de leurs diocèses en France et dans le monde, les prêtres et diacres prient, vivent et travaillent ensemble, dans de petites fraternités spirituelles et pratiques.

Selon Le Monde, l'accent est mis sur « une évangélisation franche, voire démonstrative »[2].

Les prêtres vivent en communauté d'au moins trois[3] La formation dure huit ans au lieu de sept car les séminaristes doivent passer une année d'apostolat dans une paroisse[7]. La formation au séminaire d'Évron coûte, en 2022, 16 000 euros par an pour un séminariste[8].

Le recrutement des séminaristes provient de façon très majoritaire de familles pieuses, avec de nombreux enfants, et aisées[9]. L'Ouest parisien et Versailles y sont surreprésentés, ainsi que les enfants des familles de militaires ou d'ascendance aristocratique[n 1],[9],[8].

Ils revendiquent la formation au sein de leurs séminaires comme étant basée sur ce modèle "intense vie communautaire, richesse de la liturgie, exigence des études, souci de mobilité et humour"[10].

Les prêtres se donnent entre eux le titre de « Don », en raison de l'histoire italienne de la communauté[4].

Statut canonique

D'abord reconnue comme pieuse union de fidèles en 1979 par le cardinal Siri, archevêque de Gênes[réf. nécessaire], la Communauté Saint-Martin devint en 1993 une association cléricale publique, érigée dans le diocèse de Gênes par le successeur du cardinal Siri, le cardinal Giovanni Canestri. En l'an 2000, elle fut reconnue par le Saint-Siège comme association cléricale publique de droit pontifical, dépendant de la Congrégation pour le Clergé. Cette reconnaissance fut confirmée en 2008, et complétée par l'octroi de la faculté d'appeler aux ordres les futurs prêtres et diacres, ainsi que de les incardiner au sein de la Communauté. Le modérateur général, Jean-Marie Le Gall, premier successeur du fondateur, élu en 2004, devient Ordinaire des membres de la Communauté en recevant les pouvoirs d’appeler aux ordres et d’incardiner. Lui succède, le 26 avril 2010, Paul Préaux.

Le code de droit canonique de 1983 ne prévoyant pas de cadre particulier pour l'incardination des membres des associations cléricales, c'est le pape qui peut concéder cette faculté. Le 11 janvier 2008, le pape Benoît XVI a concédé à la Congrégation pour le Clergé le privilège de pouvoir concéder en son nom aux associations publiques la faculté d'incardiner ses membres. Outre la Communauté Saint-Martin, à l'heure actuelle, quatre autres associations cléricales ont bénéficié de l'octroi de cette faculté. Il s'agit de l'Œuvre de Jésus Souverain Prêtre (O.J.S.S.), de la Société Jean-Marie-Vianney (S.J.M.V.), de la Fraternité des prêtres ouvriers diocésains du Sacré-Cœur de Jésus (S.O.D.) et les Prêtres de la Communauté de l'Emmanuel (Association Cléricale de la Communauté de l'Emmanuel).

Tradition du chant grégorien auprès de la communauté

À Lourdes, la communauté est chargée de célébrer la messe en grégorien le samedi matin à la crypte.

Fondée par un prêtre originaire du diocèse de Tours et oblat de l'abbaye Notre-Dame de Fontgombault, fille de l'abbaye Saint-Pierre de Solesmes, la Communauté de Saint-Martin possède une excellente connaissance du chant grégorien et peut effectuer correctement la célébration en grégorien selon le missel de Paul VI.

À la suite de l'installation des prêtres de la Communauté de Saint-Martin au sein des sanctuaires de Lourdes en 2015 à la demande de l'évêque de Tarbes et de Lourdes, ceux-ci y célèbrent, le samedi matin, la messe officielle[Quoi ?] accompagnée de chants grégoriens[11].

La communauté achève en 2008 la publication d'un livre de chant en grégorien, en trois tomes et comptant 6 388 pages. Il s'agit de la première édition des Heures grégoriennes. Pour cela, il aura fallu huit ans de préparation, une collaboration étroite avec l'atelier de Paléographie de Solesmes et un ajout de 1 700 notations[réf. nécessaire].

Insertion dans la société séculière

La communauté a un style de vie propre : « le fondateur a posé le cadre de son œuvre : rigueur des études et soin de la liturgie, largement en latin mais fidèle au concile Vatican II, néoclassique et non traditionaliste » dixit AFP dans l'Express [3] ainsi que le port de la soutane, dixit Ghislain de Montalembert dans le Figaro[12]. Comme se rappelle Hervé Giraud, évêque de Soissons en 2011 qui appela la communauté, « les prêtres prenaient des initiatives et participaient à toutes les assemblées presbytérales. Au bout d'un moment, on oubliait la soutane. »[13]. Laurent Le Boulc'h, évêque de Coutances et Avranches, qui a appelé la Communauté au Mont Saint-Michel, indique en 2021 qu'elle « est présente dans 33 diocèses et je n’ai que des échos positifs »[14]. Les journalistes Samuel Lieven dans La Croix et Jean-Marie Guénois dans Le Figaro ont également souligné la souplesse et l'obéissance de la communauté ce qui leur permet d'être de plus en plus accepté par les évêques[15],[16]. Un article signé AFP de l'Express décrit ainsi cette ascension de la communauté : « Arborant la soutane et une foi décomplexée, les prêtres de la communauté Saint-Martin se mettent au service d'évêques qui, d'abord méfiants, sont chaque année plus nombreux à les accueillir »[3].

Pour Bernadette Sauvaget dans Libération, la communauté, « connue pour son catholicisme identitaire », est ultraconservatrice[17], et « symbolique de la dérive du catholicisme français, résistant de moins en moins aux sirènes de l’extrême droite »[18]. Toujours selon Bernadette Sauvaget, dans Témoignage chrétien, elle est le « fer de lance d’une restauration identitaire » : « Les Saint-Martin considèrent les catholiques comme une minorité menacée et sont hostiles à l'accueil des homosexuels dans l'Église, limitent la place des femmes, rejettent les débats autour du mariage des prêtres »[19]. Christine Pedotti, directrice de Témoignage chrétien, estime que « cette communauté ressemble à un gentil conservatoire des nostalgies. Mais derrière la façade joviale et folklorique de ces dons Camillo séduisants et sympas, il y a un fond très réactionnaire et une bataille d'identités qui se joue, notamment face à la religion musulmane »[9]. Pour Marie Bordet dans Le Point, la communauté Saint-Martin, proche de Philippe de Villiers et de Patrick Buisson incarne un virage conservateur et identitaire[9]. En 2014, « l'aile gauche de l’Église s'inquiète de ce qu'elle estime être une contamination de l'intérieur par l'esprit réactionnaire », selon Benoît Hopquin du quotidien Le Monde[2]. Louis Hervé Guiny, alors responsable du séminaire, est considéré comme « l'éminence grise » de personnalités politiques « très à droite » ou d'« ultra-droite », relations qu'il refuse d'évoquer publiquement, car, selon Claudia Calmel de France Bleu, il « ne tient pas à endosser le rôle du conseiller de l'ombre de l'ultra-droite française »[6],[20].

La communauté se finance notamment avec le fonds Proclero, agréé par l'autorité des marchés financiers, créé par le groupe Meeschaert et don Pascal-André Dumont, trésorier, et habitué des conférences du Cercle de l'Union interalliée[9].

Ministères

En 2022, la communauté Saint-Martin comptait plus de 168 prêtres et diacres et plus de 109 séminaristes (dont 19 en propédeutique).

Elle est chargée de 47 paroisses ou secteurs inter-paroissiaux dans vingt-sept diocèses de France, aussi bien dans des paroisses de centre-villes (Laval, Dijon, Agen, Soissons) que dans des paroisses rurales (Mortagne, Font-Romeu, Fayence, Cellettes) et des paroisses de quartiers populaires (Sarcelles, Garches les Gonesse, Oullins)[21]. L'épiscopat français a d'abord été méfiant envers la communauté, qui bénéficiait surtout du soutien de son aile conservatrice, puis lui a progressivement ouvert les portes de ses paroisses[22]. Selon Jean Mercier dans le magazine La Vie : "ses prêtres en soutane sont devenus incontournables dans le paysage ecclésial. La Communauté Saint Martin, fondée en 1976, perçoit désormais les dividendes d'une lente et patiente progression, après avoir été longtemps marginalisée, en raison de son style traditionel."[22] De même La Croix souligne la confiance croissante des évêques[23].

De nombreux diocèses font appel à la communauté, principalement en raison du vieillissement et de la diminution du nombre de prêtres dans les diocèses[13],[22]. La CSM a également fondé des internats à Ponlevoy et Laval et de nombreux patronages à Meyzieu, Mortagne, Amiens ou Brive. Elle est également présente à Cuba, en Italie et en Allemagne.

Une visite apostolique[24] est demandée, au Vatican, par Paul Préaux, modérateur général[25],[26]. Elle est conduite en 2022 par l'évêque de Mende Benoît Bertrand, assisté d’André Marceau, ancien évêque de Nice, et de la provinciale pour la France des religieuses de l’Assomption, Anne Descours[27],[28].

Évêques issus de la Communauté

Quatre évêques ont été prêtres de la Communauté Saint-Martin[29]:

Liste des modérateurs généraux de la communauté

Notes et références

Notes

  1. Pour Timothée de Rauglaudre, « la sociologie de ces prêtres est très liée à la bourgeoisie catholique conservatrice, en déclin mais toujours très pratiquante. Beaucoup des séminaristes sont d’abord passés par des écoles militaires, de commerce, ou d’ingénieurs. Ils viennent souvent de lignées ayant du patrimoine, parfois issues de la vieille aristocratie ».

Références

  1. Guillaume Cuchet, « Identité et ouverture dans le catholicisme français », Études, vol. 2, , p. 65-76 (lire en ligne).
  2. Benoît Hopquin, « La communauté Saint-Martin, un commando en soutane », Le Monde.fr, (lire en ligne, consulté le )
  3. AFP, « Prêtres en soutane, séminaire plein: la visible ascension de la communauté Saint-Martin », L'Express, (lire en ligne)
  4. Samuel Lieven, « La France adopte peu à peu la communauté Saint-Martin », La Croix, (lire en ligne, consulté le ).
  5. Samuel Pruvot, « Don Louis-Hervé Guiny : « Le prêtre est là pour bousculer les âmes » - Initiatives et engagements - Église | Famille Chrétienne famillechretienne.fr », sur web.archive.org, (consulté le )
  6. Claudia Calmel, « Evron : une éminence grise de la droite ultra-catholique au séminaire ? », sur France Bleu, (consulté le )
  7. « Au cœur des ordinations de la communauté Saint-Martin », sur Aleteia, (consulté le )
  8. Timothée de Rauglaudre, « Le curé prend le terminal de carte bleue : “J’ai besoin de 450 000 euros” », sur Les Jours, (consulté le )
  9. Marie Bordet, « Soutanes, latin et CAC 40… », sur Le Point, (consulté le )
  10. « Qui sommes nous ? », sur Communauté Saint-Martin (consulté le )
  11. « Sanctuaire de Lourdes - Communauté Saint-Martin », sur Communauté Saint-Martin (consulté le ).
  12. Ghislain de Montalembert, « Don Paul Préaux: «Le rôle des prêtres est plus essentiel que jamais» », Le Figaro, (lire en ligne)
  13. Gauthier Vaillant, « Comment les prêtres de la communauté Saint-Martin s’implantent dans les diocèses de France », La Croix, (lire en ligne)
  14. Christophe Leconte, « Mont Saint-Michel. L’évêque du diocèse s’explique sur l’arrivée d’une nouvelle communauté en soutane », Ouest France, (lire en ligne, consulté le )
  15. Samuel Lieven, « La France adopte peu à peu la communauté Saint-Martin », La Croix, (lire en ligne)
  16. Jean-Marie Guénois, « Former des prêtres qui soient des hommes debout », Le Figaro, (lire en ligne)
  17. Bernadette Sauvaget, « Le Mont-Saint-Michel bientôt dans les mains des cathos identitaires », sur Libération, (consulté le )
  18. Bernadette Sauvaget, « Les cathos identitaires de la communauté Saint-Martin à la conquête de la France », sur Libération (consulté le )
  19. Bernadette Sauvaget, « Mont-Saint-Michel : le grand remplacement ? », sur Témoignage Chrétien, (consulté le )
  20. Mathias Destal et Marie Huret, « Le prêtre qui inspire la droite », Marianne, (lire en ligne, consulté le )
  21. « Nos ministères en France et dans le monde », sur communautesaintmartin.org (consulté le ).
  22. Jean Mercier, « Les séminaristes à l'heure du choix », La Vie, (lire en ligne, consulté le ).
  23. Mikael Corre, « Communauté Saint-Martin, l’avenir de l’Église de France ? », La Croix, (lire en ligne)
  24. Céline Hoyeau, « Que sont les visites canoniques ? », La Croix, (lire en ligne, consulté le )
  25. Bernadette Sauvaget, « Une mission d’inspection du Vatican chez les cathos identitaires de la communauté Saint-Martin », sur Libération (consulté le )
  26. Cécile Chambraud, « Le Vatican suspend l’ordination de prêtres dans le diocèse de Fréjus-Toulon », Le Monde, (lire en ligne, consulté le )
  27. Christophe Henning, « « Nous avons besoin d’aide » : la communauté Saint-Martin fait l’objet d’une visite pastorale », La Croix, (lire en ligne, consulté le )
  28. Camille Lecuit et Antoine-Marie Izoard, « Fausses rumeurs à propos d'une visite d'inspection de la communauté Saint-Martin », Famille chrétienne, (lire en ligne)
  29. Mikael Corre, « Communauté Saint-Martin, l’avenir de l’Église de France ? », sur La Croix, (consulté le )

Voir aussi

Bibliographie

  • Paul Préaux et Thierry Paillard, Les Prêtres, don du Christ pour l'humanité, Artège, (BNF 46633566).

Liens internes

Liens externes

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