Desmond Tutu

Desmond Tutu, né le à Klerksdorp en Afrique du Sud et mort le au Cap, est un archevêque anglican et militant des droits de l'homme sud-africain. Il reçoit le prix Nobel de la paix en 1984 pour son combat pacifique contre l'apartheid.

Pour les articles homonymes, voir Tutu (homonymie).

Desmond Tutu
Desmond Tutu en février 2004.
Fonctions
Archevêque du Cap (en)
-
Philip Russell (en)
Njongonkulu Ndungane (en)
Évêque de Johannesbourg (d)
-
Timothy Bavin (en)
George Buchanan (en)
Secrétaire général
Conseil des Églises d'Afrique du Sud
-
Évêque anglican (d)
Diocese of Lesotho (en)
-
Biographie
Naissance
Décès
(à 90 ans)
Le Cap
Sépulture
Nom de naissance
Desmond Mpilo Tutu
Surnom
The Arch
Nationalité
Formation
Activités
Conjoint
Normalizo Leah Shenxane
Enfant
Autres informations
A travaillé pour
Religion
Distinctions
Prix Nobel de la paix ()
Liste détaillée
Docteur honoris causa de l'université de Cambridge
Docteur honoris causa de l'université Columbia‎
Docteur honoris causa de l'université de Varsovie
Docteur honoris causa de l'université de Fribourg
Docteur honoris causa de l'université de Tromsø
Docteur honoris causa de l'université Pompeu Fabra
Docteur honoris causa de l'université de Groningue
Docteur honoris causa de l'université Harvard‎ ()
Prix Nobel de la paix ()
Personnalité humanitaire de l'année (d) ()
Albert Schweitzer Prize for Humanitarianism (en) ()
Ordre de Jamaïque ()
Prix Pacem in Terris ()
Membre de l'Académie africaine des sciences ()
Bishop John T. Walker Distinguished Humanitarian Service Award (en) ()
Archbishop of Canterbury's Award for Outstanding Service to the Anglican Communion (en) ()
Prix des quatre libertés de Roosevelt - liberté de culte ()
Grand officier de la Légion d'honneur‎ ()
Order for Meritorious Service (en) ()
Prix Monismanien ()
Grand-croix de l'ordre du Mérite de la République fédérale d'Allemagne ()
Prix Sydney de la paix ()
Prix Delta ()
Médaille d'honneur du Parlement de Catalogne ()
Prix Jamnalal Bajaj ()
Docteur h.c. de l'université de Washington ()
Prix James Parks Morton Interfaith (d) ()
Golden Plate Award ()
Prix Gandhi pour la paix ()
Osgar ()
Prix Lumière de la vérité ()
Médaille Giuseppe-Motta (en) ()
Prix Fulbright ()
Prix René-Cassin ()
Médaille présidentielle de la Liberté ()
Docteur honoris causa de l'université de Portland ()
Docteur honoris causa de l'université de Vienne ()
Commandeur de l'ordre d'Orange-Nassau ()
Prix Templeton ()
Prix international de Catalogne ()
Compagnon d'honneur ()
Bailli grand-croix de l'ordre de Saint-Jean ()
Titre honorifique
Révérendissime (en)
Signature

Auteur d'une théologie ubuntu de la réconciliation et proche de Nelson Mandela, il fut ensuite le président de la Commission de la vérité et de la réconciliation, chargée de faire la lumière sur les crimes et les exactions politiques commis, durant l'apartheid, au nom des gouvernements sud-africains, mais également les crimes et exactions commis au nom des mouvements de libération nationale.

Biographie

Origines

Desmond Tutu est né à Klerksdorp, dans le Transvaal, le deuxième des trois enfants de Zacheriah Zililo Tutu et de son épouse, Aletta. La famille Tutu déménage à Johannesbourg quand Desmond a douze ans. Son père est enseignant et sa mère est femme de ménage et cuisinière dans une école pour les aveugles. À 4 ans, il est victime de la poliomyélite : il en conserve toute sa vie une gêne au bras gauche[1].

Études

Desmond Tutu fait ses études dans la ville de Johannesbourg. Il veut dans un premier temps devenir médecin, mais de telles études coûtant trop cher pour sa famille, il se destine à devenir instituteur, tout comme son père. De 1951 à 1954, il étudie et commence à enseigner en 1954 au Johannesbourg Bantu High School. En 1955, il se marie à Nomalizo Leah Shenxane, une enseignante ; ils auront quatre enfants. Mais il démissionne en 1957, pour protester contre la mauvaise qualité de l'enseignement donné aux Noirs[2].

Il décide alors de s'orienter vers la théologie. De famille méthodiste, il se tourne vers l'Église anglicane et est ordonné prêtre en 1961, à 30 ans[1]. Il devient l'aumônier de l'université de Fort Hare. Fort Hare est à l'époque une des seules universités de qualité pour les Noirs d'Afrique du Sud et d'Afrique australe ; les principaux dirigeants actuels du pays y ont étudié. En 1962, il s'installe avec sa femme et ses enfants à Londres, et obtient en 1966 une maîtrise en théologie au King's College de Londres. Il retourne en 1967 en Afrique du Sud, où il travaille comme professeur de théologie[2].

De 1972 à 1975, il revient en Angleterre, où il est le vice-directeur du Theological Education Fund (TEF) du Conseil œcuménique des Églises, à Bromley dans le Kent. Il est nommé doyen du diocèse de Johannesbourg en 1975, à la cathédrale anglicane Sainte-Marie de Johannesbourg. Il est le premier Noir à occuper ce poste. Il refuse le logement de fonction luxueux, en « zone d’habitation blanche », réservé aux Blancs - il lui faudrait demander officiellement un statut dérogatoire de « Blanc honoraire » - et s’installe dans un des quartiers de Soweto, le ghetto des Noirs, où éclatent, en 1976, de sanglantes émeutes[1].

Il est évêque du Lesotho de 1976 à 1978, puis est secrétaire général du Conseil œcuménique d'Afrique du Sud de 1978 à 1985. Il devient une personnalité publique, et élève la voix contre les injustices du système politique de ségrégation raciale, l'Apartheid.

Militantisme contre l'apartheid

En 1977, Desmond Tutu fait le prêche des funérailles de Steve Biko, fondateur du Mouvement de conscience noire et co-organisateur des émeutes de Soweto, assassiné[3]. Il rend par la suite hommage à Biko et au Mouvement de conscience noire, qui avait attiré l'attention sur la dimension performative du langage et non simplement descriptive, conduisant ainsi les Noirs à se mésestimer eux-mêmes[3],[4]. Desmond Tutu participe aux réunions clandestines du Black consciousness movement[5]. Au sein du TEF, il participe aussi au mouvement de Black theology (théologie noire) et s'initie à la théologie de la libération venue d'Amérique latine[5].

Desmond Tutu avec Ronald Reagan (Maison-Blanche, 12 juillet 1984).

Au cours de plusieurs années de sermons et de prédications, il fait passer « un message de paix et de non-violence ». Il critique aussi bien l'apartheid que les Noirs qui réclament vengeance. Ses prédications contribuèrent à la lutte pacifique menée contre les gouvernements afrikaners[6], et c'est pour ce combat pacifiste contre le système de l'apartheid, qu'il reçoit le , le prix Nobel de la paix[7]. Pour lui, la paix entre les peuples est la seule voie possible.

Auréolé de sa nouvelle stature internationale, il est nommé évêque de l'Église anglicane d'Afrique du Sud en 1985, à Johannesbourg, puis nommé archevêque au Cap le , devenant le premier Noir à occuper cette fonction. Cette nomination est critiquée par ses opposants. Il organise alors des protestations contre la ségrégation raciale et des campagnes de boycottage, dont celle du charbon d'Afrique du Sud. Il milite également pour des écoles communes, qui représentent pour lui une étape essentielle dans la réconciliation de l'Afrique du Sud. Il milite aussi contre la réglementation des déplacements des Noirs, les « pass-laws ».

Il s'élève en 1986 contre le refus de Ronald Reagan d'adopter des sanctions contre le régime sud-africain[8].

Le président de la Commission de la vérité et de la réconciliation

Desmond Tutu devient en 1995 président de la Commission de la vérité et de la réconciliation créée par le président Nelson Mandela. Après trois ans d'enquêtes et des milliers d'auditions, il rend publiques les conclusions de la Commission en 1998. Ce dossier est aujourd'hui considéré comme l'une des pierres angulaires de la réconciliation sud-africaine[9].

Rôle en Afrique du Sud

Il est à l'origine de l'expression « nation arc-en-ciel » qu'il emploie pour la première fois en 1993 lors de son discours prononcé aux obsèques du dirigeant communiste assassiné Chris Hani[8].

Desmond Tutu avec le ministre indien des Affaires étrangères K. Natwar Singh (Le Cap, 11 mars 2005).

Il dénonce, entre autres, le montant des salaires des députés du Parlement sud-africain qu'il juge exorbitants, la politique de vente d'armes, qui rapporte beaucoup d'argent au nouveau pouvoir sud-africain[10].

En ce qui concerne la politique étrangère de l'Afrique du Sud, il dénonce le silence de son pays envers le régime de Robert Mugabe, le président du Zimbabwe voisin. Il compare d'ailleurs Robert Mugabe à « une sorte de Frankenstein »[11].

Lors des élections générales sud-africaines de 2009, il refuse d'apporter son soutien à Jacob Zuma et critique les dérives, selon lui, « d'une démocratie sous la coupe d'un parti ultramajoritaire »[12]. Il est nommé en 2005, par le secrétaire général des Nations unies Kofi Annan, membre du Haut Conseil pour l'Alliance des civilisations.

En , il propose aux ministres noirs de vendre leurs voitures luxueuses ainsi que de taxer les Blancs pour avoir bénéficié de l'apartheid. Ces propos provoquent une polémique dont la réprobation de la fondation de Frederik de Klerk, le mettant en garde contre « la dangereuse idée de culpabilité raciale » et l'accusation par d'autres de s'aligner sur les positions du chef de la ligue de Jeunesse de l'ANC, Julius Malema, parfois accusé de 'racisme', pour avoir entre autres suggéré d'exproprier sans dédommagement les fermiers blancs de leurs terres[13],[14].

Initiatives internationales

Le , à l'initiative du milliardaire Richard Branson et du musicien Peter Gabriel, Nelson Mandela, Graça Machel et Desmond Tutu convoquent à Johannesbourg une assemblée de dirigeants influents du monde entier qui veulent contribuer, « à l'aide de leur expérience et de leur sagesse », à résoudre les problèmes les plus importants de la planète. Nelson Mandela annonce la formation de ce conseil des Global Elders (les anciens, ou sages, universels) dans un discours lors de son 89e anniversaire[15]. Desmond Tutu est président du conseil et ses membres fondateurs incluent également Kofi Annan, Ela Bhatt, Gro Harlem Brundtland, Jimmy Carter, Li Zhaoxing, Mary Robinson et Muhammad Yunus[16].

Il écrit en juin 2016 au comité Nobel pour proposer « la nomination de Marwan Barghouti, dirigeant palestinien emprisonné, pour le prix Nobel de la paix ». Il rappelait qu’ « en 2013, une campagne internationale pour la libération de Marwan Barghouti et de tous les prisonniers palestiniens fut lancée à Robben Island (…) depuis la cellule du symbole universel de paix qu’est Nelson Mandela »[8].

Tutu soutient en 2008 le pasteur Jeremiah Wright, figure de la théologie de la libération noire qui avait lui-même apporté son soutien au candidat à la présidentielle Barack Obama, avant que celui-ci ne rompe ses liens avec Wright[17]. Tutu lui-même s'est pourtant éloigné de la théologie de la libération, en définissant une éthique au-delà de la théologie de la libération[18]. Concernant Wright, il déclare ainsi que ce dernier a dit sans fioritures « ce que presque n'importe lequel Afro-Américain aurait envie de dire », c'est-à-dire que « la race est un enjeu central », appelant aussi à un « forum de réconciliation » aux États-Unis[19].

Il se joint fréquemment à d’autres lauréats du prix Nobel de la paix et inaugure des actions pour soutenir Aung San Suu Kyi, et le 14e dalaï-lama. Au mois de mars 2009, il a été rejoint par plus de 40 célébrités et 10 000 signataires dans une lettre sur thecommunity.com exhortant les officiels chinois à « cesser de nommer, blâmer et abuser verbalement » le dalaï-Lama, et en appela au Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme à visiter le Tibet et faire un rapport à la communauté internationale[20],[21].

Desmond Tutu au Forum économique mondial (2009).

Desmond Tutu est membre de la fondation PeaceJam, membre d'honneur du Club de Budapest[22] et fait partie du groupe des Global Elders, anciens dirigeants à la retraite qui tentent de contribuer à des solutions pacifiques aux problèmes de la planète. Il dénonce en 2010 le comportement du gouvernement russe durant la guerre en Tchétchénie[23].

En 2012, il a refusé de participer à une conférence en Afrique du Sud à laquelle avait été invité l’ancien Premier ministre britannique Tony Blair : « la décision immorale des États-Unis et de la Grande-Bretagne d’envahir l’Irak en 2003, basée sur le mensonge selon lequel ce pays possédait des armes de destruction massive, a déstabilisé et polarisé le monde plus qu’aucun autre conflit dans l’histoire », explique Desmond Tutu qui à l'époque, en 2003, avait appelé Condoleezza Rice, la conseillère de George Bush pour la sécurité, quelques jours avant le déclenchement de la guerre, pour lui demander qu’on laisse plus de temps aux inspecteurs chargés de trouver les armes de destruction massive irakiennes. « Selon quel critère devons-nous décider que Robert Mugabe [le Président du Zimbabwe, ndlr] doit être traduit devant la justice internationale, mais que Tony Blair doit participer au circuit des conférences, que Ben Laden doit être assassiné, mais que l’Irak doit être envahi, non pas parce qu’il possède des armes de destruction massive, comme Blair, le premier supporter de Bush, a fini par l’admettre, mais pour se débarrasser de Saddam Hussein ? » Conclusion : « Why I had no choice but to spurn Tony Blair, I couldn't sit with someone who justified the invasion of Iraq with a lie (Pourquoi je n'avais pas d’autre choix que d’éconduire Tony Blair, je ne pourrais pas siéger à côté de quelqu'un qui a justifié l'invasion de l’Irak par un mensonge) », titre choisi par The Observer du pour l’entretien dans lequel Desmond Tutu a fait ces déclarations.

Par ailleurs, en juillet 2007, il est l'un des premiers à répondre au programme « les Ambassadeurs d'Oxfam » lancé par l'ONG pour accroître sa popularité et améliorer son action[24].

Opposition à l'homophobie

Desmond Tutu est publiquement engagé dans la lutte contre l'homophobie, ayant comparé l'homophobie au racisme durant l’apartheid en Afrique du Sud[26]. Et déclare en 2013 être « aussi dévoué envers cette campagne [contre l'homophobie] que lors de celle contre l'apartheid[26] ». Il a également indiqué qu'il ne pourrait pas vénérer un Dieu homophobe, déclarant : « Je ne vénérerais pas un Dieu homophobe. (…) Je refuserais d’aller dans un paradis homophobe. Non, je dirais : “Désolé ! Je préfère de loin aller de l’autre côté” »[27],[8].

En février 2014, il s'insurge contre la ratification par le président ougandais Yoweri Museveni d’une loi qui pénalise les relations homosexuelles dans ce pays et qu’il compare aux lois de Nuremberg (Allemagne nazie) et à l’apartheid[28].

En juin 2016, aux Pays-Bas, il bénit le mariage de sa fille, le pasteur anglican Mpho Andrea Tutu, avec une autre femme, Marceline van Furth[29].

Sur la fin de vie et le suicide assisté

En 2016, à 85 ans, bousculant un des principes les plus sacrés : le respect de la vie, il déclare dans une tribune être favorable à ce que les malades incurables et les mourants puissent décider eux-mêmes de l'heure de leur mort[30],[31].

Le changement climatique

Lors du sommet de Copenhague en 2009, il prend une part active au mouvement « Justice climatique », qui réunit plusieurs ONG, célébrant une « messe pour le climat » dans la capitale danoisfe[32]. Le , il publie dans The Guardian[33] l'article : « Pour sauver le climat, il faut boycotter les compagnies d’énergie fossile »[34].

Rencontres avec le dalaï-lama

Le 14e dalaï-lama et Desmond Tutu à Vancouver (Canada) en 2004.

Desmond Tutu rencontra son ami de longue date le 14e dalaï-lama en 2004 lors d'une conférence organisée par Victor Chan à Vancouver, et ayant pour thème la paix et la réconciliation[35],[36].

Faute de visa, le dalaï-lama ne put se rendre aux célébrations des 80 ans de Desmond Tutu en octobre 2011. La justice sud-africaine qualifia d'illégal le retard dans la décision de délivrer ce visa. Desmond Tutu a rendu visite au dalaï-lama le 10 février 2012 sur son lieu de résidence à Dharamsala en Inde[37].

Desmond Tutu déclare « remercier Dieu d'avoir créé le dalaï-lama », et justifie son attachement à celui-ci, en expliquant que selon lui, « Dieu n'est pas un Chrétien »[38].

En 2014, il appelle le pape François à rencontrer le dalaï-lama, mais à la suite de son refus, il se dit « profondément attristé et bouleversé »[39].

En 2017, le dalaï-lama ne peut se rendre à son anniversaire, mais s'adresse à Desmond Tutu par une vidéo où il le qualifie de précieux dans ce monde troublé[40].

Mort

Desmond Tutu meurt le 26 décembre 2021 au Cap en Afrique du Sud à l'âge de 90 ans. Le président Cyril Ramaphosa loue un « patriote sans égal », tandis que la Fondation Nelson-Mandela salue la disparition d'un « penseur, leader et berger »[41].

Juste après l'annonce publique de sa mort, la reine Élisabeth II, le secrétaire général de l'Organisation des Nations unies António Guterres, Emmanuel Macron, Barack Obama, le dalaï-lama qui envoie un message de condoléances à sa fille Mpho Tutu[42], d'autres chefs d'État, personnalités publiques et politiques de premier plan ont eu un mot en mémoire de l'archevêque sud-africain[43],[44],[45].

À la suite de son décès, le deuil national a été décrété en Afrique du Sud pendant une semaine avec la mise en berne du drapeau national des institutions officielles tout au long de cette période[46],[47]. Ses funérailles nationales, qui rassemblent des milliers de personnes, ont lieu le 1er janvier 2022, en présence du président sud-africain Cyril Ramaphosa, l’ancienne présidente d’Irlande Mary Robinson et du roi du Lesotho Letsie III[48],[49].

Desmond Tutu a choisi que sa dépouille soit réduite en poussière par aquamation[50],[51]. Ses cendres reposent désormais dans la cathédrale Saint-Georges du Cap[52].

Controverses

Desmond Tutu en 2011.

Accusations d'antisémitisme

Desmond Tutu a de nombreuses fois fait des remarques jugées « racistes » et offensantes à l'égard du peuple juif[53]. Reconnaissant avoir été souvent accusé d'antisémitisme, il a rétorqué qu'il faudrait « avoir de la chance » pour le prouver et que son « dentiste s'appelle docteur Cohen »[54][réf. à confirmer].

D'après le Jewish Herald-Voice, il aurait minimisé la souffrance qu'ont endurée les victimes du génocide nazi : il aurait déclaré faussement que les chambres à gaz était faites pour « une mort plus propre » que les crimes de l'apartheid, en se plaignant d'un « monopole de l'Holocauste » ainsi qu'en demandant aux victimes de « pardonner les nazis pour l'Holocauste »[55][réf. à confirmer]. Des remarques jugées par le centre Simon-Wiesenthal comme étant « des insultes aux Juifs et aux victimes des nazis »[56]. Il a également déclaré que les Juifs « pensent avoir le monopole de Dieu », et les accusent d'avoir « combattu » et de s'être « opposés à Dieu »[57]. En 1987, il aurait menacé de « punir » les Juifs Sud-africains si Israël ne participe pas au boycott du régime d'Apartheid. En 1989, au mémorial de Yad Vashem pour le génocide de six millions de Juifs, Desmond Tutu aurait adressé une prière pour les responsables nazis du génocide[58].

Il met en avant la contribution des Juifs dans la lutte contre l’apartheid : « Le peuple juif était l'important soutien de notre combat contre l'apartheid » et reconnaît qu'Israël a le droit de vivre en paix au sein de ses frontières. Mais il déclare également qu'Israël n'aura jamais une véritable sûreté et une sécurité alors qu'il opprime un autre peuple. C'est pourquoi il milite pour la création d'un État palestinien[59]. En 2002, il provoque une controverse en qualifiant la situation en Palestine d'« apartheid » et en déclarant : « Cela me rappelle tellement ce qui nous est arrivé au peuple noir en Afrique du Sud »[60].

Desmond Tutu avec Barack Obama (Le Cap, 30 juin 2013).

Il a également accusé les Juifs de faire souffrir de la même manière les Palestiniens. Lors d'une autre déclaration, il compare le « système » du Temple juif avec l'apartheid et se plaint que « critiquer Israël vaut l'accusation d'antisémitisme », justifiant son propos : « comme si les Palestiniens n'était pas des Sémites ». Il décrit le nationalisme juif comme ayant « beaucoup de parallèles avec le racisme »[61], des propos condamnés par l'Anti-Defamation League[62]. Accusant aux côtés de Yasser Arafat et du Hamas les dirigeants israéliens de « terrorisme »[63] tout en le comparant à des régimes totalitaires, dont l'Allemagne nazie et l'Afrique du Sud sous l'apartheid : « des régimes très puissants ». Desmond Tutu se dit être en faveur « du boycott des universitaires et commerçants Juifs israéliens »[54][réf. à confirmer].

Il accuse de même les Juifs de ce qu'il qualifie de « lobby juif », reprochant d'« effrayer les Américains de reconnaître [ce qui est] le mal, [comme étant] le mal. Car le lobby juif est puissant, très puissant »[54].[réf. à confirmer] Il taxe les Juifs d'« arrogance, l'arrogance du pouvoir parce que les Juifs forment un puissant lobby dans ce pays »[54].[réf. à confirmer]

En 2009, l'universitaire Alan Dershowitz accuse Desmond Tutu de « racisme et d'intolérance ». Il est à nouveau accusé d'antisémitisme après avoir déclaré dans le Tampa Bay Times que les Juifs devraient « être jugés selon des normes différentes des autres peuples »[64].

En 2014, dans le South African Jewish Report, Desmond Tutu est comparé à Adolf Hitler et accusé de vouloir « tuer les Juifs »[65].

Critiques

Desmond Tutu avec Lakhdar Brahimi, Gro Harlem Brundtland et Henry Bellingham (Londres, 10 janvier 2011).

À la suite de sa critique de Jacob Zuma, celui-ci, l'accuse de « double standard » et d'amnésie sélective. Le congrès des étudiants sud-africain condamne ses actions, le décrivant comme étant une « personne scandaleuse »[66].

Desmond Tutu a également été critiqué pour avoir refusé de participer à un événement en la compagnie de Tony Blair, estimant que ce dernier et George W. Bush devraient être jugés devant la Cour internationale de justice pour avoir « déstabilisé et polarisé le monde à un degré jamais atteint par aucun autre conflit dans l’histoire avec le spectre de la Syrie et de l’Iran devant nous. La question n’est pas de savoir si Saddam Hussein était gentil ou méchant, ou combien de personnes de son peuple il a massacré »[67]. Il a fini par affirmer que le simple décompte du nombre des victimes enregistrées pendant et après la guerre d’Irak justifierait amplement leurs arrestations[68].

En décembre 2013, n'ayant reçu aucune accréditation officielle, on pense qu'il sera absent de l'enterrement de Nelson Mandela[69]. « Si mon bureau ou moi-même avions été informés que j'étais le bienvenu, pour rien au monde je n'aurais manqué ça », a-t-il réagi. Il faut dire que Desmond Tutu, 82 ans, pourfend régulièrement les dérives du gouvernement du président Jacob Zuma, notamment les scandales de corruption et l'échec à réduire les inégalités. En 2013, il a assuré qu'il ne voterait plus pour le Congrès national africain (ANC), le parti de la lutte contre l'apartheid au pouvoir depuis l'avènement de la démocratie en 1994. Cependant, il sera finalement présent[70].

En 2014, le parti démocratique chrétien (CDP) sud-africain s'oppose aux positions de Desmond Tutu, le critiquant pour son hypocrisie et le qualifiant de « fils de Satan »[71].

Distinctions

Statue de Desmond Tutu au Cap.

Décorations

Prix

Honneurs

  • 1986 : le trompettiste Miles Davis rend hommage à Mgr Desmond Tutu en lui dédiant Tutu, son avant-dernier album studio. C'est le premier morceau qui donne son titre à l'album.

Doctorats honoris causa

Desmond Tutu recevant son doctorat honoris causa de l'université de Vienne.

Il a obtenu plus d'une centaine de doctorats honoris causa :

Publications

  • (en) Michael Jesse Battle (préf. Desmond Tutu), Reconciliation: The Ubuntu Theology of Desmond Tutu, Pilgrim Press, .
  • (en) Essays on Leadership (avec Boutros Boutros-Ghali, George H. W. Bush, Jimmy Carter et Mikhaïl Gorbatchev), Washington, Carnegie Commission on Preventing Deadly Conflict, 1998
  • Croire ubuntu inspirations et paroles de Desmond Tutu, Acropole, 2007.
  • Prisonnier de l'espérance, 1983.
  • Il n'y a pas d'avenir sans pardon, 2000
    Récit de la Commission de la vérité et de la réconciliation.
  • Dieu fait un rêve (2008), éditions Novalis.
  • Dalaï Lama, Desmond Tutu, Douglas Abrasm, Le Livre de la joie : Le bonheur durable dans un monde en mouvement (en), Flammarion, 2016. (ISBN 2081393964 et 9782081393967).

Notes et références

  1. Patrice Claude, « Desmond Tutu, l’infatigable voix des opprimés », Le Monde.fr, (lire en ligne, consulté le )
  2. Edouard Pflimlin, « Desmond Tutu, Prix Nobel de la paix, icône de la lutte contre l’apartheid, est mort », Le Monde.fr, (lire en ligne, consulté le )
  3. (en) Desmond Tutu, « Steve Bantu Biko Memorial Lecture Delivered By Archbishop Emeritus Desmond Tutu », University Of Cape Town, 26 septembre 2006.
  4. « Afrique du Sud : Le symbole de l'arc-en-ciel comme héritage, c'est vraiment du pur Desmond Tutu », sur rfi.fr, .
  5. Paul Yange, Desmond MpiloTutu (né en 1931), prix Nobel de la paix 1984 (1/2), 19 novembre 2007.
  6. Voir le volume Institution de la parole en Afrique du Sud (Philippe-Joseph Salazar (dir.)), numéro spécial de Rue Descartes, 17, 1997, 178 p. (ISBN 2-13-048336-4).
  7. (en) « Desmond Tutu : Biographical », sur nobelprize.org, .
  8. Pierre Barbancey, « Disparition. Desmond Tutu a rejoint l’arc-en-ciel des nations », sur L'Humanité,
  9. Se reporter aux deux ouvrages suivants : Philippe-Joseph Salazar (dir.), Amnistier l’Apartheid. Travaux de la Commission Vérité et Réconciliation sous la présidence de Desmond Tutu, traduction française, Paris, Le Seuil, coll. « L’Ordre philosophique », 2004, 352 p. (ISBN 2-02-068604-X) ; et Barbara Cassin, Olivier Cayla et Philippe-Joseph Salazar (dir.), Vérité, réconciliation, réparation, Paris, Le Seuil, Le Genre humain, vol. 43, 2004, 365 p. (ISBN 2-02-062886-4) ; ce dernier comporte un texte écrit par Jacques Derrida.
  10. « Desmond Tutu, Prix Nobel de la paix, icône de la lutte contre l’apartheid, est mort », sur lemonde.fr, .
  11. Dépêche de l'AFP intitulé « Robert Mugabe est une sorte de Frankenstein » repris par franceinfo.com le 25 juin 2008.
  12. « Desmond Tutu dénonce un pays sous la coupe d'un parti », arib.info, 6 octobre 2008.
  13. Sabine Cessou, Slate Afrique, 16 août 2011.
  14. Article AFP du 15 août 2011.
  15. (en) « Mandela joins ‘Elders’ on turning 89 », MSNBC, .
  16. (en) « Mandela launches The Elders », sur southafrica.info, .
  17. (en) Desmond Tutu, « Black Theology Seeks the Liberation of All », Newsweek & Washington Post, mai 2008.
  18. (en) L. D. Hulley, « Liberation theology and beyond: The contextual ethics of Desmond Tutu », Anglican theological review, vol. 79, no 3, 1997, p. 327-340.
  19. (en) Storer H. Rowley, « Desmond Tutu: Equality of U.S. blacks an 'illusion' », The Chicago Tribune, .
  20. (en) « Tutu to China: Stop Abusing Dalai Lama », ABC News.
  21. (fr) « Dalaï lama : Nobel de la paix et Hollywood disent stop à la Chine », inventerre.canalblog.com.
  22. (en) « Desmond Tutu, membre d'honneur du Club de Budapest ».
  23. « Desmond Tutu n’hésitait pas à prendre à partie les puissants », Le Monde.fr, (lire en ligne)
  24. (fr) .
  25. Source=http://blip.tv/file/4309715.
  26. (en) « Archbishop Tutu 'would not worship a homophobic God'», BBC News, [lire en ligne].
  27. (en) « Desmond Tutu: 'I would not worship a God who is homophobic' », The Independent, 27 juillet 2013 [lire en ligne].
  28. (en) Maev Kennedy, « Desmond Tutu condemns Uganda's proposed new anti-gay law », The Guardian, (lire en ligne, consulté le ).
  29. (en) « Big buzz around Mpho Tutu’s wedding », Citizen, (lire en ligne, consulté le ).
  30. (en) « When my time comes, I want the option of an assisted death », sur The Washington Post, .
  31. Ariane Bonzon, « L'archevêque Desmond Tutu veut décider du jour de sa mort et tant pis si ça choque (les curés) », sur slate.fr, .
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Voir aussi

Bibliographie

  • (en) M. Battle, « A theology of community: The Ubuntu theology of Desmond TuTu », Interpretation, 2000. (Une théologie de la communauté : La théologie ubuntu de Desmond Tutu)

Liens externes

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