Fusion de communes en Belgique

En Belgique, on désigne par fusion des communes, le processus qui a conduit à la réduction du nombre de communes, le , où le pays est passé ce jour-là de 2 359 à 596 communes autonomes. Une nouvelle modification du nombre de communes a eu lieu le , avec la fusion anversoise, portant à 589 le nombre de communes. Après une pause dans le processus de fusion des communes, la Région flamande a pris, avec le décret du , des mesures pour inciter à des fusions volontaires[1]. Ces nouvelles dispositions aboutissent à une nouvelle réduction du nombre de communes au . La Belgique compte désormais 581 communes[2].

Pour les articles homonymes, voir Fusion de communes.

Historique

Période française et hollandaise (1796-1830)

L'annexion, par la France, des Pays-Bas autrichiens, des principautés de Liège et de Stavelot et du duché de Bouillon le 4 brumaire an IV (26 octobre 1795)[3] entraîne une réorganisation territoriale avec la commune comme unité territoriale de base. En 1800, le territoire de l'actuelle Belgique compte 2 741 communes[a 1]. Le pouvoir français souhaite cependant réduire le morcellement communal dans les départements belges et poussent les préfets à prendre des mesures pour réduire ce nombre. 127 communes sont ainsi supprimées pendant cette période dans les départements de Jemmapes, de la Dyle et celui de Sambre-et-Meuse[a 2]. La période hollandaise ne met pas fin à ce processus et il continue dans une moindre mesure pour atteindre 2 492 communes en 1830[a 3].

De l'indépendance à l'entre-deux-guerres (1830-1940)

Avec l'indépendance de la Belgique, le mouvement s'inverse avec la création de nouvelles communes pour atteindre son maximum en 1928, où le pays recense 2 675 communes après avoir connu sur la même période la création de 153 communes tandis que 7 ont été supprimés[a 4]. Ainsi, en 1896, le hameau appelé La Bretagne se sépare de Landelies pour prendre son autonomie sous le nom de Goutroux. L'article 3 de la constitution (actuellement l'article 7) et la loi provinciale de 1836 codifient d'ailleurs les modalités des fusions ou des créations de nouvelles communes en Belgique[a 5].

Pendant cette période la Belgique a connu deux changements dans ses limites territoriales. En 1839, le traité des XXIV articles conduit la Belgique à céder une partie de son territoire, qui formera d’une part la province néerlandaise de Limbourg et d’autre part le grand-duché de Luxembourg. En effet, depuis 1830, la Belgique administrait l'ensemble du Limbourg et du Luxembourg. En 1831, le traité des XVIII articles le reconnut mais celui-ci ne fut jamais signé par les Pays-Bas. Les communes correspondantes seront donc perdues en 1839. Après la Première Guerre mondiale, les communes des Cantons de l’Est furent prises à l’Allemagne.

Les mouvements de population, l'exode rural, et les bouleversements économiques du XIXe siècle et du début XXe siècle entraînent de nouvelles réflexions sur l'organisation de la carte communale et surtout à Bruxelles où la volonté de créer un « Grand Bruxelles » existe[a 6]. Deux solutions sont avancées à la veille de la Première Guerre mondiale, celle d'un regroupement des communes périphériques avec Bruxelles, ou bien la création d'une structure intercommunale pour gérer certaines compétences[a 7]. Au lendemain de la guerre, le bourgmestre de Bruxelles, Adolphe Max, propose, en 1921, d'ailleurs la création d'un district métropolitain pour l'agglomération bruxelloise[a 8]. D'ailleurs, la même année, les communes de Laeken, de Neder-Over-Heembeek et de Haren ont fusionné avec celle de Bruxelles pour former la commune de Bruxelles-ville. Des publications sur la gestion communale pendant l'entre-deux-guerres, esquisse des idées pour l'avenir des communes et notamment la fusion des communes[a 9].

La Seconde Guerre mondiale

L'occupation allemande va bouleverser la structure communale du royaume. Les Allemands souhaitent que les communes périphériques autour de grandes agglomérations forment une seule et même commune avec une administration et une organisation policière[a 10]. De cette volonté de l'occupant, des communes sont regroupées et entraîne la naissance de sept grandes communes entre 1941 et 1942 : Anvers, Bruges, Bruxelles, Charleroi, Gand, La Louvière et Liège[a 11]. Le pouvoir juridique s'oppose à ces créations et la Cour de cassation confirme le l'illégalité de la création du Grand Anvers, malgré l'insistance des autorités d'occupation[a 12]. La fin de l'occupation met fin radicalement à ces fusions de communes et un retour au statu quo d'avant-guerre, mais l'idée n'est pas abandonnée.

La Loi unique

Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, quatre communes sont supprimées entre 1945 et 1961[a 13]. Au , on recense 2 663 communes en Belgique[a 14],[4]. Dès 1957, la réflexion sur la fusion des communes se déclenche avec une circulaire ministérielle de 1957 et la déclaration gouvernementale du gouvernement Eyskens III en pour favoriser le regroupement de petites communes[a 15]. Cela aboutit à la Loi unique du , où elle introduit de nouvelles dispositions pour faciliter les fusions des communes en donnant le droit au gouvernement d'effectuer ces regroupements pour une durée de dix ans. Ces nouvelles dispositions entraînent une première réduction du nombre de communes. En 1964, la Belgique compte 2 585 communes[4], dont 110 communes ont été regroupées dans 37 nouvelles entités. En 1970, la Belgique est ainsi passée à 2 379 communes puis l'année suivante à 2 359 communes[4].

À la fin de cette durée de dix ans, en 1971, Lucien Harmegnies, ministre de l’Intérieur sous le gouvernement de Eyskens IV (19681972), décide de procéder au remembrement du territoire et fait adopter une nouvelle loi le [5],[6]. Elle élargit le champ d’application de la Loi unique afin de la rendre applicable dans le cas des grandes agglomérations, initialement exclues de ces dispositions[a 16]. Aucune nouvelle proposition de fusion n'est cependant proposée avant juin 1974.

Le plan Michel et la fusion de 1977

Le ministre de l’Intérieur, Joseph Michel, du gouvernement de Tindemans II annonce en le lancement du remodelage de la carte communale qui doit être abouti pour les élections communales d'octobre 1976[a 17]. Plusieurs critères ont été utilisés pour regrouper les communes comme les éléments financiers, géographiques, linguistiques, économiques, sociaux ou culturels sans retoucher les limites des arrondissements administratifs et des provinces sauf si elles sont justifiées selon la loi du [a 18]. Après avoir consulté les provinces et les communes entre septembre 1974 et janvier 1975 sur les propositions de fusions, un projet de fusion est écrit et soumis à deux comités ministériels régionaux, l'un pour la Wallonie et l'autre pour la Flandre[a 19]. Ce projet aboutit à l'arrêté royal du , découpant la Belgique en 589 communes pour le , mais elle est repoussée de six ans pour Anvers et sept communes de sa périphérie[7],[8]. Celui-ci est ratifié par la loi du [9]. Le , la Belgique passe ainsi de 2 359 à 596 communes.

La fusion anversoise et les rectifications des limites communales (1977-1983)

Après l'adoption de la loi de décembre 1975, une commission spéciale est mise dès 1976 dans chaque province pour effectuer les rectifications des limites administratives de l'ensemble des 596 communes[a 20]. Après des discussions avec les communes, les particuliers et des organismes privés, des arrêtés royaux sont publiés en 1982 pour finaliser les rectifications[a 21].

Ayant obtenu un sursis de six ans, au cours de l'année 1982, deux arrêtés et deux lois règlent les modalités de la fusion des communes d'Anvers, de Berchem, de Borgerhout, de Deurne, de Ekeren, de Hoboken, de Merksem et de Wilrijk pour le [10],[a 22]. La Belgique passe à 589 le , comme prévu par la loi du  : 308 en Région flamande, 262 en Région wallonne et 19 en Région bruxelloise.

Nouvelles fusions au XXIe siècle

En 2001, avec la cinquième réforme de l'État, la tutelle des communes est passée de l'état fédéral aux régions. Elles peuvent décider de l'organisation de la carte communale.

La fusion de 1977 a exclu, dans ce mouvement de fusion, les communes de la Région bruxelloise et des communes à facilités linguistiques, ne pouvant se regrouper avec des communes d'un régime linguistique différent[11]. La commune la moins peuplée du royaume, Herstappe, dans la province de Limbourg, n'a pas pu être regroupée avec Tongres en raison de son régime de facilité linguistique[12].

Dans la Région bruxelloise, Didier Reynders, chef de file du MR, demande une réflexion sur la fusion des communes en [13] comme le demandent des partis flamands ou des groupes de réflexions locales[14]. La commune d'Auderghem a d'ailleurs proposé en octobre 2017 à sa voisine de Watermael-Boitsfort de fusionner même si cette dernière a refusé[15]. Entre 1975 et 1979, plusieurs projets de fusion ont d'ailleurs eu lieu pour les communes de la Région de Bruxelles-Capitale avec une réduction à six communes par exemple, mais elles n'ont pas abouti à une loi en raison de la réaction négative des partis politiques[16].

En Région wallonne, l'idée d'une nouvelle fusion des communes ne fait pas l'unanimité[2],[17], même si les communes d'Ath et de Brugelette ont évoqué en 2017 une fusion volontaire entre les deux communes[18].

La Région flamande a décidé de relancer le processus de fusion des communes en mettant en place, avec le décret du [1], des incitations fiscales comme un allègement de la dette de la commune et une taxe communale allégée pour la commune fusionnée[19]

Nouvelles fusions en Flandre en 2019

À la suite du décret du du gouvernement flamand, sept nouvelles fusions ont eu lieu le [20], juste après les élections communales belges de 2018.

Dans chaque commune, la décision a été prise dans le courant de l'année 2017. La liste ci-dessous résume les nouvelles communes :

  • le , les communes de Aalter et Knesselare ont décidé de fusionner sous le nom d'Aalter, pour former une commune d'environ 30 000 habitants[21]. La fusion a été définitivement entérinée le [22].
  • Le , les communes de Deinze et Nevele ont décidé de fusionner[23]. La nouvelle commune portera le nom de Deinze.
  • En , les communes de Waarschoot, Zomergem et Lovendegem ont entériné leur projet de fusion. La nouvelle commune portera le nom de Lievegem. Lievegem aura environ 26 000 habitants[24].
  • En , Kruishoutem et Zingem ont commencé à négocier une fusion. Ils ont annoncé leurs intentions de fusionner en décembre[25]. Le choix du nom s'est porté sur Kruisem, nom du village fictif des romans de Marc de Bel, auteur originaire de Kruishoutem[26].
  • Les communes de Opglabbeek et Meeuwen-Gruitrode ont été les premières communes à annoncer leur intention de fusionner en 2019[27]. Le , cette fusion a été officiellement acceptée par les conseils communaux. La nouvelle commune aura 23 000 habitants et portera le nom de Oudsbergen[28].
  • En 2017, Neerpelt et Overpelt et éventuellement Hamont-Achel ont commencé à discuter d'une éventuelle fusion. Hamont-Achel a pour finir décidé de ne pas fusionner, mais Neerpelt et Overpelt ont décidé de continuer la procédure de fusion. Les habitants ont choisi comme nouveau nom pour la commune : Pelt[29].
  • Les communes anversoises de Saint-Amand et Puers vont fusionner en Puers-Saint-Amand[30],[31].

Dès 2019, la Flandre compte donc huit communes de moins que l'année précédente soit 300 communes au lieu de 308 en 2018. La Belgique compte au total 581 communes.

Nouvelles fusions en Flandre en 2025

Des nouvelles fusions pour les élections 2024 qui seraient effectives à partir du premier janvier 2025 sont discutées[32] notamment :

Projets abandonnés


Nouveau décret-fusion en Wallonie pour 2025

Un avant-projet de décret créant un cadre pour de nouvelles fusions en 2025 est en cours de rédaction[45]. Celle-ci se ferait sur base volontaire mais avec une reprise de la dette comme incitant à la fusion[45].

Section

On désigne par le terme « section », « commune avant fusion » ou « ancienne commune » les communes indépendantes au (en néerlandais : deelgemeente (nl)) ainsi que les quatre communes de la ville de Bruxelles d’avant la fusion de 1921[48],[49],[réf. à confirmer]

En pratique, une section peut comprendre un ou plusieurs villages, hameaux ou autres lieux habités. Tout comme les communes actuelles, son nom est souvent le même que celui de la localité principale en faisant partie, mais peut être également le même que celui d’un hameau constitutif, ou être sensiblement ou complètement différent de ceux de ses localités constitutives. Elle est géographiquement bien définie, contrairement aux localités qui la composent ; il se peut cependant que cette définition géographique ait été modifiée depuis sa création, entre autres lors des fusions, certaines localités ayant parfois changé de section.

Pour faire clairement la distinction avec sa section homonyme, on désigne souvent une commune actuelle sous le terme d’« entité » ou de « commune fusionnée ». Ainsi, on parlera par exemple de l’entité ou de la commune fusionnée de Mons (on dit aussi « le Grand Mons ») pour la différencier de la section de Mons qui n’est qu’une partie de la commune.

Voir aussi

Articles connexes

Bibliographies

 : document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.

  • S. Soyez, Inventaire des archives du Ministère de l'Intérieur. Administration des affaires provinciales et communes : Fonds "Fusion des communes", 1832-1988, Archives de l'État en Belgique, , 585 p. (lire en ligne [PDF]).
  • « Les fusions de communes : vers l’application de la loi du 23 juillet 1971 », Courrier hebdomadaire du CRISP, no 679, , p. 32 (lire en ligne, consulté le )
  • « Les fusions de communes : vers l’application de la loi du 23 juillet 1971 (II) », Courrier hebdomadaire du CRISP, nos 697-698, , p. 43 (lire en ligne, consulté le )
  • « Les fusions de communes : vers l’application de la loi du 23 juillet 1971 (III) », Courrier hebdomadaire du CRISP, no 708, , p. 28 (lire en ligne, consulté le )
  • « Les fusions de communes : vers l’application de la loi du 23 juillet 1971 (IV) », Courrier hebdomadaire du CRISP, no 714, , p. 25 (lire en ligne, consulté le )
  • « Les fusions de communes : vers l’application de la loi du 23 juillet 1971 (V) », Courrier hebdomadaire du CRISP, no 726, , p. 30 (lire en ligne, consulté le )
  • « Les fusions de communes : vers l’application de la loi du 23 juillet 1971 (VI) », Courrier hebdomadaire du CRISP, no 735, , p. 34 (lire en ligne, consulté le )
  • « Les projets de fusions de communes dans la région bruxelloise (1975-1979) », Courrier hebdomadaire du CRISP, no 885, , p. 28 (lire en ligne, consulté le )

Notes et références

  • S. Soyez, Inventaire des archives du Ministère de l'Intérieur. Administration des affaires provinciales et communes : Fonds "Fusion des communes", 1832-1988, Archives de l'État en Belgique, , 585 p. (lire en ligne [PDF]).
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  2. Marc Sirlereau, « La fusion de communes a la cote en Flandre, pas du côté francophone », sur rtbf.be, (consulté le ).
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  8. Robert Sevrin, « Les fusions de communes en Belgique », Hommes et Terres du Nord, no 4, , p. 8 (lire en ligne, consulté le )
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  10. « 23 décembre 1982. - Loi ratifiant l’arrêté royal du 29 octobre 1982 complétant l’arrêté royal du 26 mars 1982 réglant certaines modalités et conséquences de la fusion des communes d’Anvers, Berchem, Borgerhout, Deurne, Ekeren, Hoboken, Merksem et Wilrijk en une nouvelle commune d’Anvers », Moniteur belge, .
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  48. « Le policier n’a pas pété un mot de français alors qu’on était à Haren », sur lavenir.net, (consulté le ).
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