Gotthard Heinrici
Gotthard Heinrici est un général allemand de la Seconde Guerre mondiale, né le à Gumbinnen[alpha 1] et mort le à Waiblingen.
Pour les articles homonymes, voir Heinrici.
Gotthard Heinrici | ||
Le général Heinrici en tenue de Generaloberst | ||
Naissance | Gumbinnen, province de Prusse-Orientale |
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Décès | Waiblingen, République fédérale d’Allemagne |
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Origine | Allemagne | |
Allégeance | Empire allemand (jusqu'en 1918), République de Weimar (jusqu'en 1933), Troisième Reich |
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Grade | Generaloberst | |
Années de service | 1905 – 1945 | |
Conflits | Première Guerre mondiale, Seconde Guerre mondiale |
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Faits d'armes | Bataille de Tannenberg, opération Barbarossa, bataille de Berlin |
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Distinctions | Croix de chevalier de la croix de fer avec feuilles de chêne et glaives | |
Il a tenu, durant tout le conflit, un journal dans lequel il a relaté de façon vivante ce dont il a été témoin[1].
Vie personnelle
Il y a peu de détails au sujet de la vie personnelle de Heinrici : fils d'un pasteur protestant à Gumbinnen, en Prusse-Orientale, Heinrici est né le jour de Noël 1886, il est cousin avec Gerd von Rundstedt ; il se marie à Gertrud Heinrici, à moitié juive. Dans les années 1930, sa famille reçoit un certificat de sang allemand de Hitler lui-même[réf. souhaitée].
Les Heinrici ont deux enfants : une fille et un garçon.
Heinrici est impopulaire au sein de la hiérarchie nazie en raison de son protestantisme pratiquant ; de plus, il refuse de rejoindre le parti nazi[réf. souhaitée].
Militaire de carrière, il fréquente essentiellement ses collègues militaires, aussi bien de façon professionnelle que personnelle[1]. Il reçoit de ses officiers le surnom de Unser Giftzwerg, « notre Nain Empoisonné », en raison de ses réussites dans les opérations défensives et de sa ténacité[2].
Carrière militaire
La famille de Heinrici compte des soldats depuis le XIIe siècle et Gotthard Heinrici a continué la tradition en rejoignant le 95e régiment d'infanterie le à l'âge de 19 ans. Il voit les combats de près sur les fronts orientaux et occidentaux durant la Première Guerre mondiale et y gagne de nombreuses récompenses, y compris l'Insigne des blessés en noir pour avoir été blessé au combat et la 2e et 1re classes de la croix de fer respectivement en 1914 et 1915. Heinrici participe notamment à la bataille de Tannenberg.
Parfait exemple de « l'officier prussien traditionnel », il se présente en 1945 comme le « vieux combattant » et porte toujours une pelisse en peau de mouton[3],[4]. Décrivant Heinrici lors d'une réunion dans le bunker de Hitler en 1945, l'un de ses adjoints, le colonel Eismann, écrit : « Tous [ Martin Bormann, Keitel, Jodl, Dönitz, Burgdorf ] nous accueillirent à grands cris. En les voyant, je me sentis très fier de mon chef. Avec sa froideur coutumière, son air sérieux, son ton mesuré, il était, de la tête aux pieds, un soldat perdu au milieu de bouffons de cour[5]. »
L'entre-deux-guerres
Il s'engage dans la Reichswehr dès 1919 où il est rapidement muté dans une école de guerre ; il y enseigne la tactique d'infanterie[2].
Il est un adversaire déclaré de la république de Weimar et soutient le putsch de Kapp. Dès , peu de temps après l'arrivée au pouvoir d'Adolf Hitler, il nourrit l'espoir « que l'on parviendra enfin à sortir de la cochonnerie marxiste juive »[6] et approuve l'expulsion des Juifs de la fonction publique.
La Seconde Guerre mondiale
Heinrici sert durant toute la Seconde Guerre mondiale sur les deux fronts. Il y gagne la réputation d'un des meilleurs tacticiens défensifs de la Wehrmacht et est renommé pour sa ténacité.
Campagne de France
Pendant le Blitzkrieg au cours de la bataille de France, Heinrici commande le 12e corps. Le 12 mai 1940, il attaque les 82e (général Armingeat) et 11e (général Arlabosse) divisions d'infanterie françaises, entre Sarreguemines et Merlebach[7]. Il réussit à percer la ligne Maginot le 14 juin 1940. Le , il est nommé à la tête du 43e corps d'armée.
Atteignant Lyon le , il est temporairement gouverneur militaire de la ville, avant de se replier au-delà de la ligne de démarcation selon les termes de la convention d'armistice[8].
Campagne contre l'Union soviétique
Au début de l'opération Barbarossa en , Heinrici est toujours à la tête du 43e corps d'armée, intégrée dans la 2e armée de panzers placée sous les ordres de Guderian. Pour ses faits d’armes, on lui attribue la croix de chevalier de la croix de fer le 18 septembre.
Le 22 décembre, après la contre-offensive soviétique, il note dans son journal : « la retraite dans la neige et la glace est tout à fait napoléonienne ; [...] l'état de la troupe est lamentable[9] ».
Le 26 janvier 1942, Heinrici est placé à la tête de la 4e armée, faisant directement face à Moscou. Il tient dix semaines, ses forces étant largement dépassées en nombre (parfois à 12 contre 1). Là, il développe une de ses tactiques les plus caractéristiques : il évacue ses troupes de la ligne de front avant la préparation d'artillerie puis il les redéploie indemnes après la fin du barrage d'artillerie.
Il exerce le commandement de la 4e armée jusqu'au 4 puis, le 15 août, il est appelé à la rescousse de la 1re armée de panzers, alors malmenée en Slovaquie. À ce poste, il contient sans difficulté le 4e front ukrainien[2]. Il bat en retraite en Tchécoslovaquie, mais combat avec tellement de ténacité que, le 3 , on attribue les glaives à sa croix de chevalier de la croix de fer.
Le groupe d'armées Vistule
Le , à la demande de Guderian[2], Heinrici remplace Himmler au commandement du groupe d'armées Vistule, chargé de défendre le Grand Berlin contre l'offensive soviétique lancée à partir de la rive occidentale de l'Oder. Rapidement, sa clairvoyance lui permet de localiser l'axe principal de la poussée soviétique en direction de Berlin et il alloue la majeure partie des effectifs à sa disposition à la 9e armée, chargée d'arrêter les pointes soviétiques[10].
Convoqué par Hitler le 6 avril pour exposer précisément ses préparatifs défensifs[alpha 2],[11], il doit non seulement voir ses exigences[alpha 3] refusées par Hitler, mais aussi affronter les objections de Hitler et de ses proches aux remarques qu'il formule à propos des capacités réelles de son groupe d'armées[12].
Rapidement cependant, le nouveau commandant obtient la fin des attaques meurtrières contre des positions soviétiques sans cesse renforcées au fil des jours[13]. Dans le même temps, il réorganise le dispositif défensif du groupe d'armées, octroyant 74 000 soldats à la 9e armée[10], afin d'obliger les Soviétiques à une guerre d'usure meurtrière pour les attaquants[14].
Approché par Speer pour participer à une tentative d'assassinat de Hitler[15], il décline la proposition : comme tout général de la Wehrmacht, il a prêté un serment d'allégeance à Hitler, commandant en chef dont l’assassinat pourrait être apparenté à un « coup de poignard dans le dos »[16] ; en tant que chrétien, il doit de plus se conformer à l'interdit de tuer son prochain, en dehors d’opérations militaires régulières[17].
Le , un million et demi de soldats soviétiques déferlent sur les positions de Heinrici le long des fleuves Oder et Neisse. Sans illusion sur ses chances de succès[18], Heinrici met en pratique sa tactique de retrait dans les collines puis de retour aux positions après les bombardements d’artillerie, mais les troupes soviétiques sont trop nombreuses et trop puissantes. En trois jours, malgré une vive résistance sur les hauteurs de Seelow, les lignes de Heinrici sont enfoncées. Il décide la retraite, allant à l'encontre des ordres de Hitler.
Le , alors que les Anglo-Américains sont arrêtés sur l'Elbe, Heinrici tente de faire passer un maximum de soldats et de civils vers l'Ouest, pour échapper aux Soviétiques. Mais il va contre les ordres de Hitler, ce dont s'est rendu compte le Generalfeldmarschall Keitel, chef du Haut Commandement de la Wehrmacht.
Disgrâce
Keitel et Heinrici échangent de vifs propos au bord de la route, alors que Heinrici est accompagné de son adjoint le général Hasso von Manteuffel, commandant de la 3e armée de panzers. Au cours de cet entretien, Keitel évoque la poursuite de la guerre pour le groupe d'armées Vistule dans le Nord du Reich, ce qui est jugé totalement impensable par Heinrici, pour des motifs politiques, militaires et économiques[19]. Keitel élève la voix, reproche sa « désertion » à Heinrici, lui dit qu'il aurait dû fusiller des déserteurs… Keitel lui ordonne alors de se rendre dans une caserne et d'y être mis aux arrêts. Dans les bois, des officiers de Manteuffel attendent l'arme au poing, prêts à intervenir pour protéger leur général et Heinrici pour le cas où ceux-ci seraient menacés.[20][réf. incomplète]
Heinrici est limogé par Hitler dans la nuit du 28 au à 23 h 30, pour s'être opposé aux ordres de Keitel[19].
Manteuffel se voit remettre le commandement du groupe d'armées Vistule, mais décline l'offre. Heinrici repart libre, mais après avoir entendu les avertissements d'un jeune officier, ancien aide de camp de Rommel, qui lui relate le dernier jour de son chef de l’époque, lorsque les généraux Burgdorf et Maisel sont venus lui demander de se suicider en , il décide de ne pas se rendre au lieu désigné pour être mis aux arrêts. Finalement, Heinrici est capturé par les forces britanniques le .
Opposant à la politique de terre brûlée
Heinrici avait été victime des gaz de combat pendant la Première Guerre mondiale et, vers la fin de 1943, Hermann Göring le place dans une maison de convalescence à Karlovy Vary au motif de « mauvaise santé ». Il s'agit en fait d’une sanction pour avoir refusé de mettre le feu à la ville russe de Smolensk selon les principes de la politique nazie de la « terre brûlée », ce lors de l'évacuation de la ville : tout au long de la guerre, Heinrici a été opposé à cette politique prônée par Hitler selon laquelle tout devait être détruit pour ne pas tomber aux mains de l'ennemi.
À l'été 1944, après huit mois de repos imposé[réf. souhaitée], il est placé aux commandes de la 1re armée de panzers et de la 1re armée hongroise en Hongrie.
Heinrici soutient aussi le ministre de l'Armement Albert Speer lorsqu'il souhaite sauvegarder Berlin de la destruction totale. Quand il est brièvement nommé responsable de la défense de Berlin, le premier ordre de Heinrici est de faire en sorte que « rien ne soit volontairement détruit ».
L'après guerre
Heinrici est envoyé à Island Farm au Pays de Galles où il est détenu[alpha 4] jusqu'au [I 1].
Durant cette période, il expose aux Britanniques sa vision de la stratégie allemande en mars et : « tenir à l'Est, ouvrir à l'Ouest »[21].
Après la guerre, les écrits et les lettres du journal intime de Heinrici sont rassemblés dans un livre intitulé Morals and behaviour here are like those in the Thirty Years’ War[22] en français : « La moralité et les comportements sont ici ceux de la guerre de Trente Ans ».
Il meurt en 1971, à proximité de Stuttgart, âgé de 84 ans.
Décorations
- Croix de fer de 2e classe (1914) : .
- Croix de fer de 1re classe (1914) : .
- Croix de chevalier avec épées, dans l’ordre de la maison royale de Hohenzollern : .
- Croix de guerre de Charles-Édouard de Saxe-Cobourg-Gotha.
- Médaille de Charles-Édouard de Saxe-Cobourg-Gotha de 2e classe avec épées et date.
- Chevalier de 2e classe avec épées de l’ordre de la Vigilance de la maison de Saxe-Weimar-Eisenach, ou ordre du Faucon blanc.
- Chevalier de 2e classe avec épées de l’ordre de la Maison Ernestine de Saxe.
- Croix d’honneur Reuß, 3e classe avec épées.
- Croix d’honneur de Schwarzburg, 3e classe avec épées.
- Croix hanséatique de Hambourg.
- Croix d’honneur des combattants de 1914-1918.
- Croix du mérite militaire autrichien, 3e classe avec décorations de guerre.
- Médaille du service de longue durée dans les forces armées, 2e classe (médaille des 12 ans de service).
- Médaille du service de longue durée dans les forces armées, 1re classe (croix des 25 ans de service).
- Barrette de 1939 pour la croix de fer prussienne de 2e classe (1914) : .
- Barrette de 1939 pour la croix de fer prussienne (1914) : .
- Médaille pour la campagne d’hiver en Russie, 1941-1942.
- Croix de chevalier de la croix de fer avec feuilles de chêne et glaives :
- croix de chevalier de la croix de fer : , en tant que General der Infanterie, commandant du 43e corps d’armée sur le front de l’Est ;
- 333e feuilles de chêne le , en tant que Generaloberst, commandant en chef de la 4e armée sur le front de l’Est ;
- 136e glaives le .
Résumé de sa carrière militaire
Entre parenthèses, sont mentionnés les grades équivalents en France.
- Fahnenjunker (élève-officier), le
- Fähnrich (aspirant),
- Leutnant (sous-lieutenant), le
- Oberleutnant (lieutenant), le
- Hauptmann (capitaine), le
- Major (commandant), le
- Oberstleutnant (lieutenant-colonel), le
- Oberst (colonel), le
- Generalmajor (général de brigade), le
- Generalleutnant (général de division), le
- General der Infanterie (général de corps d’armée), le
- Generaloberst (général d’armée), le
Notes et références
Notes
- Alors en Prusse-Orientale.
- Hitler se fait expliquer, quatre heures durant, le dispositif de Heinrici, kilomètre par kilomètre.
- Des renforts et le changement de statut de la forteresse de Francfort, ce qui aurait permis le redéploiement des troupes qui la défendent.
- Mis à part un transfert de trois semaines dans un camp aux États-Unis en .
Liens internet
- (en) « Some of the prisoners held at Special camp 11 » [« Quelques-uns des prisonniers détenus au camp spécial n° 11 (biographie du Generaloberst Heinrici détenu à Island Farm) »], sur specialcamp11.co.uk (consulté le ).
Références
- Evans 2009, p. 579.
- Lopez 2010, p. 450.
- Beevor 2002, p. 246-247.
- Ryan 1966, p. 113 et suivantes.
- Ryan 1966, p. 210.
- Baechler 2012, p. 199.
- Bruge 1973, p. 186.
- Veyret 2008, p. 13.
- Baechler 2012, p. 213.
- Lopez 2010, p. 451.
- Lopez 2010, p. 458.
- Kershaw 2012, p. 396.
- Lopez 2010, p. 449.
- Lopez 2010, p. 457.
- Kershaw 2012, p. 590, note 32.
- Kershaw 2012, p. 399.
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- Lopez 2010, p. 454.
- Kershaw 2012, p. 432.
- Cornelius Ryan, La Dernière Bataille : la chute de Berlin, éditions Robert Laffont, 1966
- Lopez 2010, p. 456.
- Hürter 2000, p. 329-403.
Annexes
Bibliographie
- Notices d'autorité :
- Fichier d’autorité international virtuel
- International Standard Name Identifier
- Bibliothèque nationale de France (données)
- Bibliothèque du Congrès
- Gemeinsame Normdatei
- Bibliothèque royale des Pays-Bas
- Bibliothèque nationale de Pologne
- Bibliothèque nationale de Pologne
- Bibliothèque nationale d’Israël
- Bibliothèque universitaire de Pologne
- WorldCat
- Christian Baechler, Guerre et extermination à l'Est : Hitler et la conquête de l'espace vital. 1933-1945, Paris, Tallandier, , 524 p. (ISBN 978-2-84734-906-1).
- Antony Beevor, La Chute de Berlin, Livre de poche, .
- Roger Bruge, Faites sauter la ligne Maginot, Fayard, .
- Richard J. Evans (trad. de l'anglais), Le Troisième Reich, 1939-1945, Paris, Flammarion, coll. « Au fil de l'Histoire », , 1102 p. (ISBN 978-2-08-120955-8).
- (de) Johannes Hürter, « "Es herrschen Sitten und Gebräuche, genauso wie im 30-jährigen Krieg". Das erste Jahr des deutsch-sowjetischen Krieges in Dokumenten des Generals Gotthard Heinrici » [« « La moralité et le comportement ici sont comme ceux de la guerre de Trente Ans ». La première année de la guerre russo-allemande décrite dans les documents personnels du général Gotthard Heinrici »], Vierteljahrshefte für Zeitgeschicht, München-Berlin, Institut für Zeitgeschichte, vol. 48, no 2, , p. 329-403 (ISSN 0042-5702, résumé, lire en ligne).
- Ian Kershaw (trad. de l'anglais), La Fin, Allemagne, 1944-1945, Paris, éditions du Seuil, , 665 p. (ISBN 978-2-02-080301-4).
- Jean Lopez, Berlin : les offensives géantes de l'Armée rouge. Vistule - Oder - Elbe (12 janvier-9 mai 1945), Paris, Economica, , 644 p. (ISBN 978-2-7178-5783-2).
- Cornelius Ryan, La Dernière Bataille : la chute de Berlin, éditions Robert Laffont, .
- Patrick Veyret, Lyon 1939-1949 : De la collaboration industrielle à l'épuration économique, Châtillon-sur-Chalaronne, La Taillanderie, , 255 p. (ISBN 978-2-87629-398-4), p. 13.
Articles connexes
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