Hyperhidrose

L'hyperhidrose est le terme médical désignant une sudation excessive. Touchant 1 à 3 % de la population, il en existe deux types : l'hyperhidrose primaire (d'origine génétique et localisée à seulement certaines parties du corps) et l'hyperhidrose secondaire (due à d'autres pathologies ou addictions et qui peut être localisée ou généralisée à l'ensemble du corps).

Hyperhidrose
Traitement
Médicament Hyoscyamine et aluminum chlorohydrex propylene glycol (d)
Classification et ressources externes
CISP-2 A09
CIM-10 R61
CIM-9 705.21
OMIM 144110
DiseasesDB 6239
MedlinePlus 007259
MeSH D006945
Patient UK Hyperhidrosis

Mise en garde médicale

L'hyperhidrose entraîne presque toujours des conséquences aussi bien psychologiques que physiques et sociales. Elle est ainsi responsable de plus de ¼ des cas de phobie sociale. De plus, les malades qui en sont atteints présentent des difficultés dans le cadre professionnel (20 % d'entre eux n'ont pu suivre la carrière qu'ils désiraient en raison de celle-ci) et la moitié sont sujets à des dépressions.

Classification et causes

Par définition, l'hyperhidrose (du grec ἱδρώς qui signifie « sueur »[1]) désigne les cas où la production de sueur dépasse les quantités nécessaires à la thermorégulation[2]. Les régions anatomiques les plus souvent concernées sont les mains, les aisselles, les pieds et le visage[3].

La médecine reconnait généralement deux types différents d'hyperhidrose : l'hyperhidrose localisée primaire et l'hyperhidrose secondaire (généralisée ou localisée et régionale)[4].

Hyperhidrose primaire

L'hyperhidrose primaire est définie généralement par une transpiration excessive sur une durée de plus de 6 mois et sans présenter de cause. Elle apparait le plus souvent avant l'adolescence (la plupart du temps dès la naissance), avec des crises de sudation au minimum hebdomadaires et avec des zones touchées presque toujours symétriques (elle peut donc être palmaire, plantaire ou cranio-faciale)[4],[5].

On la retrouve aussi sous le nom d'hyperhidrose localisée primaire (car, contrairement à l'hyperhidrose secondaire, elle n'est pas généralisé à tout le corps mais se concentre seulement sur certaines parties), d'hyperhidrose « essentielle » (c'est-à-dire, sans cause retrouvée[2]) ou d'hyperhidrose focalisée (en anglais focal hyperhidrosis). À cause des nombreux problèmes sociaux, psychologiques, émotionnels et professionnels qu'elle peut entraîner (voir la partie sur l'impact social, psychologique et professionnel), elle est parfois connue comme « le handicap silencieux » (The Silent Handicap en anglais ou Det Tysta Handikappet en suédois)[6].

Causes de l'hyperhidrose primaire

L'origine de l'hyperhidrose primaire est presque toujours génétique (elle s'exprime souvent sous des formes familiales)[7].

En , une étude réalisée par des chercheurs japonais de l'Université de Saga et publiée par l’American Journal of Medical Genetics a montré que le gène responsable de l'hyperhidrose palmaire primaire était probablement situé au niveau du locus 14q11.2‐q13 (c'est-à-dire sur le bras long du chromosome 14, entre les locus q11.2 et q13). L'hyperhidrose est alors dite à transmission autosomique dominante, c'est-à-dire que le gène muté responsable de celle-ci est présent sur un chromosome non sexuel et que la présence d'un seul allèle atteint sur deux est suffisant pour que la maladie s'exprime[8].

Hyperhidrose secondaire

L'hyperhidrose secondaire est, quant à elle, soit généralisée (elle touche toutes les parties du corps) soit localisée et régionales mais elle est alors le plus souvent asymétrique contrairement à l'hyperhidrose primaire. Elle est alors due à des facteurs externes le plus souvent des maladies ou des infections[4].

Causes de l'hyperhidrose secondaire

Elle peut être favorisée par une fièvre, une intoxication à certains produits, ou, au contraire, un sevrage à d'autres (alcool, héroïne…), une anxiété, une obésité.

Elle peut être vue dans certaines affections endocriniennes : diabète sucré, hyperthyroïdie, syndrome carcinoïde, phéochromocytome, acromégalie… Certains lymphomes ou leucémies peuvent se manifester ainsi[9].

Les glandes sudoripares, qui sécrètent la sueur, semblent être en nombre normal mais produisant un volume plus important de liquides[9].

Localisations et quantification

Répartition dans la population mondiale

Ce symptôme toucherait environ 3 % de la population aux États-Unis[10], de 1 à 3 % en Allemagne[11], environ 1 % au Royaume-Uni[12] et près de 5,5 % au Brésil (étude menée sur des étudiants en médecine et qui peut être relié à la température équatoriale du pays). Enfin, d'après certaines études, les populations d'Asie du Sud-Est seraient plus touchées par l'hyperhidrose que les autres[5]. Il n'existe pas de chiffres concernant sa prévalence en France toutefois on peut l'estimer aux alentours de 3%.

Au niveau mondial, le nombre de personnes atteintes d'hyperhidrose varie entre 178 millions et 220 millions de personnes et représente environ entre 1 % et 3 % de la population mondiale[13],[14].

L'hyperhidrose est plus rare chez la personne âgée[9].

Impact social, psychologique, professionnel et vie courante

Des effets délétères sur les relations sociales, les activités de la vie quotidienne et certaines activités professionnelles ont été mis en évidence ; ils conduisent à une moindre qualité de vie pour les patients atteints[15],[16],[17].

Conséquences sur les relations sociales

L'hyperhidrose est responsable de plus de ¼ des cas de phobie sociale (aussi nommé anxiété sociale, elle correspond à une timidité exagérée, gênante et handicapante). En effet, la sueur excessive étant vécue de manière gênante, cela provoque de l'anxiété qui elle-même est responsable d'une augmentation de la sudation en enclenchant ainsi un cercle vicieux[5]. L'hyperhidrose touche ainsi entre 25 % et 32 % des personnes atteintes de phobie sociale[18].

Les patients atteints d'hyperhidrose palmaire éprouvent souvent une forme d'anxiété lorsqu'elles doivent serrer la main d'autres personnes (en effet, leurs mains sont souvent humides ou mouillées). Dans certains cas, certaines personnes refusent même de serrer la main de la personne en face, par peur de la réaction de celle-ci. Cela peut ainsi être responsable d'une forme de stigmatisation ou de discrimination envers les personnes atteintes de cette pathologie[19].

L'hyperhidrose palmaire entraîne souvent des difficultés dans la réalisation d'activités sportives ou musicales (par exemple, jouer d'un instrument devient bien plus compliqué).

Conséquences sur les relations intimes

Plus de la moitié (environ 59 %) des patients atteints d'hyperhidrose rapporte que cette pathologie a affecté considérablement leurs possibilités de développer des relations sentimentales ou intimes[19].

D'après cette même étude, environ 34 % rapporte que l'hyperhidrose a affecté leur activité et leur vie sexuelle[19].

Conséquences sur la santé mentale

Presque la totalité des patients atteints d'hyperhidrose (environ 90 % d'entre-eux) rapportent que cette pathologie affecte leur état émotionnel dans leur vie quotidienne[19].

L'hyperhidrose augmente aussi les risques de dépressions (presque la moitié des malades sont déprimés) et le manque de confiance (jusqu'à 71 % d'entre eux)[20]. Toutefois, des différences existent aussi entre les différents types d'hyperhidrose. Ainsi, les personnes atteintes d'hyperhidrose axillaire semblent être plus touchées par la dépression que celles atteintes d'hyperhidrose palmaire[19].

Conséquences sur la vie professionnelle

L'hyperhidrose est également handicapante aussi bien pour la vie sociale que professionnelle du patient. Ainsi, 48 % en sont très dérangés dans le cadre professionnel et 20 % n'ont pu suivre la carrière qu'ils désiraient en raison de celle-ci[20]. En effet, celle-ci au stade sévère handicape à plusieurs niveaux : impossibilité d'utiliser des objets numériques tactiles, incompatibilité avec le port de chaussures militaires et difficultés de préhension de l'armement (pour palmo-plantaire). De plus, les objets bureautique (souris, clavier) sont vite hors d'usage pour cause de rouille des composants (se rapporte également aux consoles de jeux dans la vie privée).

La difficulté de serrer des mains handicape fortement lors des entretiens, car il est impossible de s'essuyer les mains sur les costumes, leur matière n'étant pas très absorbante à contrario des jeans et t-shirts. L'examinateur peut aussi considérer à tort que la personne est très stressée ou qu'elle cache quelque chose. De plus, mettre les mains sur ses genoux durant l'entretien est mal vu, mais les mettre sur la table laissera à la sortie une trace/flaque d'eau, selon le stade de la maladie.

Conséquences sur la vie courante

La plupart des simples actions deviennent un vrai calvaire pour les personnes atteintes de cette maladie, suivant son stade, allant jusqu'à sévère. Par exemple : ouvrir une bouteille d'eau, tourner une poignée de porte ronde, mettre des gants de jardinage (l'eau s'accumule dans les gants et s'écoule le long des bras). De plus, à l'ère de la technologie, il est très difficile pour ces personnes de s'adapter. Il est par exemple impossible d’utiliser un écran tactile pour le téléphone, les consoles de jeux rouillent, les souris d'ordinateur posent problème, etc.

Trouver un/une conjoint(e) ou l'on peut lui tenir la main, ou le/la prendre dans nos bras sans lui détremper son haut (lors de danse ou simple étreinte) est rare. L'isolement social est donc réel et mal vécu.

Le fait de changer de chaussettes plusieurs fois par jour, surtout en été pour éviter des cloques d'eau, des brûlures et la peau qui s'arrache est également handicapant. Mais rester pied nu est dangereux même chez soi, principalement sur les sols carrelés qui causent de nombreuses chutes et blessures. Pour les voyageurs dans l'âme, il y a une autre difficulté : la réalisation d'un passeport. En effet, si l'empreinte est prise via de l'encre, il est impossible de la réaliser. Et par moyen de scan, elle est possible mais il faut réitérer de nombreuses fois avant que cela fonctionne, ce qui augmente la gêne de la personne.

De nombreux sports et même la conduite sont compliqués ou impossibles (ou alors avec des gants, de type intérieur en cuir et le reste en néoprène, pour une bonne préhension et un bon séchage).

A ceci s'ajoute le regard et le dégoût des gens, souvent mal informés sur la maladie et la sudation en général.

Il convient d'éviter les plats épicés, l'alcool et les situations stressantes, et d'utiliser des vêtements larges avec des tissus aux propriétés absorbantes[9].

Traitements existants

Il existe des recommandations publiées par le National Institute for Health and Care Excellence (Grande-Bretagne) mise à jour en 2013[21]. Il existe des traitements différents en fonction de la localisation de la transpiration excessive. Il est admis par l'ensemble de la communauté médicale que l'on devra toujours commencer par le traitement le moins agressif pour passer au suivant, si le premier n'est pas assez efficace.

Certains médicaments, à effet anticholinergique, ont été essayés avec une bonne efficacité mais avec un taux d'effets secondaires importants : oxybutynine[22], glycopyrrolate[23] ou méthanthéline[24].

Pour le traitement des aisselles :

  • en première intention, commencer par des traitements locaux antitranspirants à base de sels d'aluminium hexahydratés en solution alcoolique, en général suffisants pour régler les problèmes les plus communs[2]. ces sels sont absorbés par les cellules des canaux sudoripares qui se gonflent par effet osmotique, bouchant ces derniers[9] ;
  • si c'est insuffisant, il est possible de traiter ce symptôme avec des injections de toxine botulique[2], qui nécessitent une anesthésie locale. Ce produit inhibe la sécrétion d'acétylcholine responsable de la stimulation des glandes sudoripares. Les résultats sont bons, sans effets secondaires notables[25]. L'injection peut agir jusqu'à neuf mois[26] ;
  • une autre solution consiste à utiliser des protections axillaires qui seront collées sur la peau ou sur les vêtements. Il ne s'agit pas dans ce cas de traiter la transpiration excessive, mais de prévenir une partie des effets indésirables ;
  • il existe également une solution pour obtenir une réduction de la transpiration ainsi que des odeurs sous les aisselles, basée sur la diffusion de micro ondes[27].

Pour les mains et pieds :

  • il est parfois proposé un traitement détranspirant à base de chlorure d'aluminium relativement efficace ;
  • un traitement souvent proposé par les dermatologues pour l'hypersudation des pieds est à base d'acide borique, soit sous forme de poudre (de couleur blanche) à saupoudrer sur la semelle, soit sous forme de semelle qui diffuse à la chaleur du pied l'acide borique ;
  • c'est dans ces localisations que la iontophorèse donne ses meilleurs résultats[2],[28]. Cette technique consiste à plonger une extrémité (main ou pied) dans un bac d'eau et de faire passer un courant électrique d'intensité très modérée. le mode d'action n'est cependant pas clair. il existe des systèmes permettant d'utiliser cette technique à domicile avec une amélioration chez 85 % des patients traités[29]. Des essais, portant sur un très petit nombre de patients ont été faits en rajoutant une toxine botulique à l'eau du bain avec des résultats positifs[30] ;
  • en cas d'échec, les injections de toxine botulique peuvent être essayées, en sachant qu'en France pour ces localisations, cette pratique est hors AMM (non remboursée) et que, douloureuse[2], elle doit être effectuée sous la responsabilité du médecin, qui la pratique en milieu hospitalier et sous anesthésie générale ou loco-régionale.

Dans les cas les plus résistants et les plus désespérés, avant de recourir à la chirurgie, les radiologues interventionnels proposent la sympatholyse chimique[31]. Pour les membres supérieurs cette technique consiste à placer une aiguille au contact de la troisième vertèbre dorsale à droite et à gauche. Et à injecter un produit neurolytique (alcool ou phénol) ; même technique pour les membres inférieurs, cette fois au niveau de la 2e et de la 4e vertèbre lombaire. Les effets secondaires possibles (moins fréquents que dans la chirurgie) sont le syndrome de Claude Bernard-Horner et l'hypersudation compensatrice.

En dernier lieu le recours à la chirurgie est envisageable. On pratique une sympathectomie, c'est-à-dire la section des fibres sympathiques qui contrôlent la transpiration au niveau de la zone considérée. Cette technique se fait par voie endoscopique, par ouverture de la plèvre, le lieu de la section dépendant de la zone que l'on veut traiter[32]. Cette opération donne de bons résultats immédiats qui sont définitifs[33]. Elle est malheureusement accompagnée d'effets secondaires dans plus de 70 % des cas. Parmi ces effets secondaires le plus fréquent est l'hyperhidrose compensatrice (jusqu'à 85 % des cas[34]), qui peut être grave, plus invalidante que la localisation d'origine (soit ventre, dos, pubis, fesse, visage, genou) et irréversible.

Le laser ne semble pas efficace[35].

Critiques des traitements existants

La technologie par la société Miradry, bien que proposée par de nombreux professionnels de santé en France, a un intérêt limité dans le traitement de l'hyperhidrose axillaire. Des effets secondaires rares mais graves existent et sont rapportés dans la littérature : paralysie des membres supérieurs et du plexus brachial[36].

Reconnaissance de la maladie

L'International Hyperhidrosis Society ou IHHS (Société Internationale de l'Hyperhidrose) est une organisation indépendante, non-gouvernementale et sans but lucratif basée aux États-Unis, plus précisément dans la ville de Charleston, et consacrée à la lutte contre l'hyperhidrose. Elle a été fondée en 2003 notamment par David Pariser, aussi président de l'Académie américaine de dermatologie[13],[37],[38].

Aux États-Unis, un patient prouvant que l'hyperhidrose impacte sa vie quotidienne et professionnelle peut être reconnu comme handicapé par la Sécurité sociale américaine[39].

En France, les séances de ionophorèse pratiquées chez des professionnels de santé (kinésithérapeutes et dermatologues) sont remboursées par la sécurité sociale et les mutuelles complémentaires. L'achat de l'appareil ou sa location ne l'est cependant pas.

Notes et références

  1. d'après le TLFi :
  2. Campanelli A, Salomon D, « Hyperhidrose localisée : clinique et traitements [Focal hyperhidrosis: disease characteristics and treatments] », Rev Med Suisse, vol. 5, no 200, , p. 870-5. (PMID 19438086, lire en ligne [html])
  3. (en) Lear W, Kessler E, Solish N, Glaser DA. « An epidemiological study of hyperhidrosis » Dermatol Surg. 2007;33:S69-75 PMID 17241417
  4. H. Maillard et M. Lecouflet, Prise en charge d'une hyperhidrose, Annales de dermatologie et de vénéréologie, (lire en ligne).
  5. « L'hyperhidrose (Transpiration excessive) », sur Passeport Santé (consulté le ).
  6. Carl Swartling et al., Hyperhidros - det tysta handikappet, Suède, Läkartidningen, .
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  8. « Primary palmar hyperhidrosis locus maps to 14q11.2‐q13 », sur Wiley Online Library, (consulté le ).
  9. (en) Benson RA, Palin R, Holt PJE, Loftus IM. « Diagnosis and management of hyperhidrosis » BMJ 2013;347:f6800. PMID 24277380
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  11. http://www.aestheticum-praxisklinik.de
  12. http://www.hyperhidrosisuk.org
  13. « Hyperhidrose, une maladie orpheline ? », sur Transpiration excessive, (consulté le ).
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  16. (en) Kuo CH, Yen M, Lin PC. « Developing an instrument to measure quality of life of patients with hyperhidrosis » J Nurs Res. 2004;12:21–30. PMID 15136960
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  37. (en) « International Hyperhidrosis Society », sur National Organization for Rare Disorders (NORD), États-Unis (consulté le ).
  38. (en) International Hyperhidrosis Society (IHHS), « About the International Hyperhidrosis Society », sur Sweathelp.org (consulté le ).
  39. (en) « Hyperhidrosis and filing for disability », sur Social Security Disability Resource Center.

Voir aussi

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