Idriss Aberkane
Idriss Aberkane, né le , est un conférencier et essayiste français.
Pour les articles homonymes, voir Aberkane.
Naissance | |
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Nom de naissance |
Idriss Jamil Aberkane |
Nationalité | |
Formation |
Université de Strasbourg Université Paris-Sud Université Paris-Descartes ComUE Université Paris-Saclay (d) |
Activité |
Membre de | |
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Dir. de thèse |
Éric Geoffroy, Pierre-Jean Benghozi, Patrick Laude, Paul Bourgine (d) |
Site web |
Médiatisé pour ses conférences de développement personnel, il publie en 2016 un essai à succès : Libérez votre cerveau !
Il fait l'objet de critiques, pour avoir artificiellement gonflé son CV et pour l'utiliser afin de traiter de sciences qui ne sont pas dans son domaine de compétence. La crédibilité scientifique de ses déclarations et de ses publications est également remise en question.
Dans les années 2020, il diffuse des thèses complotistes et des fausses informations sur la pandémie de Covid-19, devenant ainsi l'une des figures du mouvement antivax.
Biographie
Famille et origines
Idriss Jamil Aberkane[1], né le [2],[3] à Pithiviers (Loiret)[4], est le fils d'un couple de professeurs agrégés de mathématiques[5]. Son père Younés Aberkane, docteur en mathématiques, a été chercheur au Commissariat à l’énergie atomique[O 1],[6][source insuffisante] et enseigne à l'INSPE de l'Université Cergy-Paris[7]. Son grand-père maternel, d'origine italienne, était ouvrier à l'usine Renault de Boulogne-Billancourt. Son arrière-grand-père paternel, avocat algérien d'origine kabyle, fut assassiné par l'OAS[8].
Il est par ailleurs membre des Scouts musulmans de France, dont son père a été l'un des premiers dirigeants[9].
Universitaire
Il entame son cursus universitaire avec un DEUG mention « Sciences de la Vie » à l'Université Paris-Sud obtenu en 2005[10],[P 1].
En 2006, il suit les cours de l'École normale supérieure en tant qu'étudiant admis sur dossier à préparer le diplôme de l'ENS[10], où il valide une licence (L3) de biologie[P 2], puis un master 1 en sciences cognitives en 2008[P 3], il ne valide pas le « diplôme de l'ENS » pour lequel il était inscrit[10].
En 2009, il obtient un master 2 mention « Approches interdisciplinaires du vivant » à la faculté de médecine de l'université Paris-Descartes[11].
Doctorats
Idriss Aberkane affirme avoir obtenu, en 2013, un doctorat en relations internationales et diplomatie au Centre d'études diplomatiques et stratégiques (CEDS)[P 4]. Dans les faits, sa thèse doctorale[alpha 1] demeure introuvable dans la base de données de l'Agence bibliographique de l'enseignement supérieur (ABES)[O 2]. Thomas C. Durand affirme que ce doctorat n'est pas reconnu par l’État français car le CEDS ne serait pas habilité par le ministère de l'Enseignement supérieur[10].
En , Idriss Aberkane soutient une thèse de doctorat en littérature générale et comparée[alpha 2], sous la direction d'Éric Geoffroy et Patrick Laude, à l'Université de Strasbourg[O 3],[O 4]. Le jury était présidé par Pierre Collet, docteur en informatique à l'Université de Strasbourg et membre de l'équipe CSTB au laboratoire ICube de Strasbourg[O 4].
En , il obtient un doctorat en sciences de gestion[alpha 3], préparé à l'École polytechnique sous la direction de Pierre-Jean Benghozi et Paul Bourgine[P 5], et soutenu à l'Université Paris-Saclay (en partenariat avec le Centre de Recherche en Gestion de l'École polytechnique)[O 5], avec encore une fois Pierre Collet dans le jury. Thomas C. Durand précise qu'Idriss Aberkane le présente comme un doctorat en « Neurosciences cognitives et Économie de la connaissance » alors qu'il a été présenté en sciences de gestion (aucune de ces disciplines ne faisant d'ailleurs partie des compétences de l'école doctorale de l'École polytechnique)[10].
Médiatique
En 2015, Idriss Aberkane signe des chroniques dans le magazine Le Point[12] et sur le HuffPost et est enseignant vacataire à CentraleSupélec[13]. Parallèlement, il multiplie les conférences, dont il diffuse ensuite les vidéos sur les réseaux sociaux où ses interventions comptabilisent des dizaines de milliers de clics[5]. Il encadre par ailleurs des groupes d'élèves du lycée Ernest-Pérochon de Parthenay au cours de projets de conception de sites web et de développement de jeux éducatifs[14].
S'exprimant fréquemment sur l'économie de la connaissance, il participe à diverses émissions radio et télévisées. En 2016, Idriss Aberkane publie l'essai Libérez votre cerveau !, ouvrage mêlant vulgarisation sur les neurosciences et théories sur le potentiel de développement de l'esprit humain, dans lequel il plaide pour un épanouissement de l'homme grâce à la « neurosagesse ». Selon lui, « les sciences sont là pour épanouir l’homme et le libérer. Même s’il est vrai que, seules, elles ne peuvent le faire car, ce qui libère, c’est la sagesse […] Une civilisation qui produit beaucoup de connaissances, combien de sagesse produit-elle ? Si elle engendre trop de connaissances et pas assez de sagesse, elle est vouée à l’extinction ». L'ouvrage, qui se veut un « manifeste pour les neurodroits » mêlant concepts scientifiques, observations morales, récit personnel et conseils divers[5], est un succès de librairie : initialement tiré à 13 000 exemplaires, il est rapidement réimprimé à 40 000[5]. Sa parution vaut à Idriss Aberkane d'être invité à de nombreuses reprises dans les médias et de faire l'objet de plusieurs portraits dans la presse[5],[13].
Pour Aberkane, qui vante le biomimétisme, « la nature est le plus grand gisement de connaissances sur Terre. C’est une bibliothèque qui a 4 milliards d’années de recherche et de développement, donc il faut la lire plutôt que la brûler ! ». Afin d'améliorer l'accès au savoir et l'efficacité professionnelle, il prône ce qu'il appelle la « matrice » Love Can Do (« l'amour peut le faire »)[5], un concept selon lequel « Ce n'est pas le travail qui crée la valeur, c'est la passion »[O 6]. Il plaide par ailleurs pour la complémentarité des sciences et de la spiritualité, qui sont pour lui « deux besoins de notre identité », et souligne à ce titre que « les plus grands chercheurs de l’Histoire étaient profondément versés dans la spiritualité : Newton, Einstein… »[5].
Idriss Aberkane est intervenant dans le film documentaire Régénération réalisé par Alexandre Ferrini et sorti en 2018[15].
Lors de la pandémie de Covid-19, il a une posture hostile aux mesures sanitaires et apporte son soutien à des personnalités controversées comme Didier Raoult[16] ou Christian Perronne[17].
Entreprises
Idriss Aberkane possède plusieurs entreprises, Eirin International au Sénégal (une société de microcrédit agricole), Scanderia[18] (société de jeux éducatifs) et enfin la SASU Aberkane fondée en à Villejuif, société sans effectif au capital de 7 777,70 euros[19] qui a été liquidée au . Aucune de ces entreprises ne semble cependant avoir d'activité réelle en dehors de la promotion d'Idriss Aberkane[10].
Selon Thomas C. Durand, la société de jeux sérieux « Scanderia » fondée par Aberkane n'a pas produit le moindre jeu, et son site web est à l'abandon depuis . Par ailleurs, il serait impossible de trouver des informations sur l'activité de sa société de microcrédits agricoles, Eirin International, qui n'est mentionnée que sur des pages web liées à Aberkane[10].
La société General Bionics créée en 2018 et implantée à Neuchâtel est fermée et est placée en liquidation à l'automne 2019[20].
Prises de position politiques
Il prend position publiquement lors de l'entre-deux tours de l'élection présidentielle française de 2022 pour appeler à une « union sacrée » contre Emmanuel Macron en faveur de Marine Le Pen[21].
Critiques
Controverse sur son curriculum vitae
Le 24 octobre 2016, Le Monde affiche un portrait dithyrambique d'Idriss Aberkane dans sa rubrique « Science & Médecine » : on y découvrait un « jeune chercheur » d’à peine 30 ans, « bardé de diplômes » et « passionné de neurosciences, biologie, informatique, mathématiques, philosophie, géopolitique », qui s’est donné pour mission d’« ouvrir les sciences au grand public ». Alertés par des lecteurs, plusieurs chercheurs de ces institutions enquêtent sur lui, et réfutent en bloc l'essentiel des affirmations, aboutissant à un retrait de l'article sur le site du Monde, assorti d'un correctif[22].
Cependant, l'effet d'annonce était lancé, et en , Idriss Aberkane se présente encore comme « consultant International titulaire de trois doctorats ayant donné plus de 160 conférences sur quatre continents, dont cinq TEDx, et créé trois entreprises en France et en Afrique »[23]. La Une du Point le présente comme « chercheur à CentraleSupélec et à l'École polytechnique […] également affilié à l'université Stanford et au CNRS », précisant être « enseignant-chercheur à Paris-Saclay via CentraleSupélec »[13]. Ce CV « hors norme » est généralement mis en avant lors de ses interventions télévisuelles, par exemple dans l'émission Actuality du où Thomas Thouroude le présente comme « enseignant-chercheur à l'École polytechnique, docteur en neurosciences »[13]. Le il est présenté comme « professeur à Centrale-Supélec, chercheur à Polytechnique » lors de son audition officielle par le CESE[O 7] puis de nouveau en séance plénière lors de la restitution de l'avis du CESE[O 8].
Toutefois, l'existence de ces titres est démentie officiellement par Polytechnique, qui précise qu'il est titulaire d'un doctorat de l'université Paris-Saclay préparé à l'École polytechnique, mais qu'il n'est pas enseignant-chercheur chez eux[24]. CentraleSupélec indique qu'il travaille chez eux en qualité d'intervenant en mastère spécialisé Stratégie et développement d’affaires internationales, et non d'enseignant-chercheur titulaire[25]. Le , Le Monde, à la suite de « plusieurs alertes faisant mention d'erreurs » dans la description du parcours d'Idriss Aberkane, publie un article rectifié faisant un premier point sur le sujet, qui précise entre autres qu'Aberkane n'est pas « normalien » comme annoncé précédemment, mais a été prédoctorant à Normale Sup[5]. Lors d'une interview donnée dans l'Echo en 2017, Idriss Aberkane évoque son échec à Normale Sup ainsi que le refus de sa thèse[26].
En , c'est au tour d'articles de L'Express, de Marianne, et de Libération de mettre en cause la véracité de ce curriculum vitæ, « dopé » à des fins promotionnelles, confirmant après vérification auprès des divers établissements qu'Idriss Aberkane n'est ni normalien, ni enseignant-chercheur au CNRS ou à Polytechnique. Il a par contre bien été pendant un an chercheur associé (c'est-à-dire bénévole) au Centre de recherche en gestion de l'École polytechnique, lequel est affilié au CNRS[13],[27].
Par ailleurs, il est souvent présenté comme « neuroscientifique ». Son doctorat porte sur l'« économie de la connaissance » et il s'agit d'un diplôme en « gestion », non en biologie ni en neurosciences.
La version donnée par Idriss Aberkane de son parcours scolaire a fait l'objet d'enquêtes de vérification des faits qui ont révélé de nombreuses manipulations et exagérations[13]. Thomas C. Durand affirme que le fait que toutes ces thèses aient été effectuées dans des disciplines non étudiées par Idriss Aberkane, dirigées et évaluées par le même petit groupe de personnes dont presque aucune n'exerce dans les disciplines revendiquées suggère qu'il s'agit de « thèses de complaisance », sans réelle valeur universitaire, ce que semble confirmer l'absence de publications universitaires significatives issues de ces travaux[10].
Des trois doctorats revendiqués par Idriss Aberkane, deux seulement sont recensés sur la base de données françaises sur les thèses (theses.fr) : une thèse de doctorat en Littérature générale et comparée à l'université de Strasbourg, et une autre en sciences de gestion sur l'« économie de la connaissance »[O 2]. Selon Thomas C. Durand, aucun n'implique la moindre compétence en « neurosciences » et que la composition du jury de sa thèse en littérature est sujette à caution, les professeurs présents n'étant pas spécialistes du domaine abordé[10].
Par ailleurs, si cet empilement académique peut impressionner, les scientifiques sont plus critiques : Sebastian Dieguez, chercheur en neurosciences, résume par exemple « trois thèses en trois ans, si ça peut époustoufler des animateurs de télévision et des journalistes, c’est en principe quelque chose de complètement rédhibitoire pour un scientifique »[22]. Il ajoute « De fait, si un chercheur ou un chef de laboratoire voyait la présence de trois thèses sur le CV d’un candidat, dans la plupart des cas il le rejetterait immédiatement, d’autant plus si le candidat, sur toute la durée de ces « doctorats », n’a pas su produire la moindre publication scientifique. « Avoir » trois thèses n’est absolument pas un gage de compétence, bien au contraire, c’est la preuve qu’on a probablement affaire à un touriste académique, quelqu’un qui n’a ni projet, ni discipline, ni à vrai dire aucun sérieux. De plus, un employeur universitaire, constatant que les trois thèses ont été acquises en moins de trois ans, et sachant qu’une véritable thèse demande à peu près 4 ans de travail assidu dans un laboratoire, aurait à se demander si celles-ci ne sont pas, peut-être, des thèses de complaisance »[22].
Sur ses travaux
Les travaux d’Idriss Aberkane sont critiqués notamment en raison de ses études qu’il met en avant alors qu’il se présente en tant que chercheur, notamment ses trois doctorats obtenus entre 2013 et 2016[28] (« diplomatie », « littérature comparée » et « économie de la connaissance »). Midi libre indique par exemple que des chercheurs signalent la faible quantité des publications scientifiques d’Idriss Aberkane depuis 2016 et précise que CentraleSupélec n'a plus de contact professionnel avec ce dernier depuis 2017[16].
L'Express lui reproche de multiplier dans son livre Libérez votre cerveau ! les métaphores « qui rendent parfois sa lecture difficile » et d'abuser de mots — parfois de son invention — comme « neurodroits, neurochronologie, neuro-infirmité, neuro-inspiration, neurocybernétique, neuronaissance, neuropsychologie, neurophénoménologie, neurofascisme, neurodatasome » sans en expliquer le sens, au risque d'aller à l'encontre de ce que devrait représenter un travail de vulgarisation scientifique[13].
Ses talents de vulgarisateur et ses qualités transdisciplinaires sont défendus par des membres de ses jurys de thèse, tandis que d'autres chercheurs se montrent plus sceptiques sur ses compétences — allant même jusqu'à l'accuser de produire de la « poudre aux yeux » — et soulignent que ses publications sont peu nombreuses. Sur ce point, Aberkane répond : « Mes ennemis ne m’ont jamais rencontré et n’ont pas lu mes travaux. Je publie moins car je fais de la recherche industrielle, et l’on est tenu à la confidentialité »[5].
Dans un billet de blogue qu'il rédige avec plusieurs scientifiques, le journaliste Olivier Monod critique la chronique vidéo hebdomadaire Le biomimétisme selon Idriss Aberkane, diffusée sur le site du Point de janvier à . Il explique que la plupart de ces émissions sont basées sur des approximations voire des aberrations scientifiques que ne saurait justifier un souci de vulgarisation[29].
Nicolas Gauvrit, mathématicien français spécialisé en psychologie et en sciences cognitives, conteste la rigueur scientifique du travail d'Idriss Aberkane[30]. Ainsi, concernant l'affirmation d'Aberkane selon laquelle l’ensemble des connaissances est infini[O 9], Nicolas Gauvrit remarque que la seconde « démonstration » apportée par Aberkane est mathématiquement fausse, car impossible en vertu du théorème de Cantor[30]. Il analyse ensuite d'autres exemples, jugeant que l'approche d'Idriss Aberkane dans ses travaux sur l'économie de la connaissance consiste à agrémenter ses formules mathématiques de « phrases qui semblent profondes à certains, mais qui ne résistent pas à l’analyse ». Pour lui, « il y a un nom pour cette méthode qui permet d’avoir l’air futé en ne disant rien de profond : le baratin ou, version anglophone, le bullshit »[30].
Le chercheur en neurosciences Sebastian Dieguez, auteur du livre Total bullshit ! Au cœur de la post-vérité, s'attaque également aux écrits d'Idriss Aberkane. Jugeant que Libérez votre cerveau ! « ne fait que trimballer le lecteur d’une chose à l’autre sans que l’on sache jamais où l’auteur veut en venir », il conclut qu'« un fatras ininterrompu de faits isolés, de digressions sans but, d'anecdotes et d’opinions personnelles, d’erreurs grossières, de coq-à-l'âne inexpliqués, de « théories » bidon, de truismes, d'hyperboles et d’aphorismes péremptoires, ne font pas vraiment de la bonne vulgarisation »[22].
En , le site Arrêt sur images relate une vague de pressions à l'encontre des auteurs d'articles critiques envers Idriss Aberkane. Les auteurs, éditeurs et hébergeurs desdits articles ont reçu une mise en demeure de la part de l'avocat des Éditions Robert Laffont demandant le retrait et le déréférencement des articles[28]. Franck Ramus, qui dirige le master en sciences cognitives suivi par Aberkane, qualifie les concepts développés par ce dernier de « neurofoutaises » et de « pures inventions qui n’ont aucun fondement scientifique ». Pour lui, « ce que fait Idriss Aberkane n’est pas très différent de ce que font bien d’autres écrivains à succès et gourous médiatiques. Ce qui est désagréable pour les chercheurs du domaine, c’est qu’il revendique une crédibilité scientifique qu’il n’a pas »[31].
Suspicion de plagiat
Le site Fact and Furious rapporte qu'Idriss Aberkane est soupçonné d'avoir plagié sa thèse soutenue en février 2016. Il aurait copié de la documentation contenant des lignes de code publiées sur internet avant la soutenance de celle-ci. Le comité d'éthique de l'école polytechnique doit traiter ce dossier qui pourrait aller jusqu'à la suppression du doctorat associé[32].
Sur ses conférences sur le développement personnel
Dans ses conférences, Idriss Aberkane évoque la neuroergonomie. Cependant des neuroscientifiques interrogés par l'Express relèvent que celles-ci ne concernent pas en réalité ce sujet et ne sont constituées que d'« anecdotes et néologismes par dizaines, name dropping à foison. » dans le but unique d'impressionner les spectateurs. Selon l’hebdomadaire, l'aura d'Idriss Aberkane s’explique par un fort relais médiatique à travers des interviews dithyrambiques dont il a bénéficié en tant qu'ex-chroniqueur au Point jusqu'en 2021[33]. D'après Thomas Durand cette situation est l' « illustration de l'effet gourou, un mécanisme qui amène des individus à admirer et à juger profonds des énoncés qu'ils ne comprennent pas. » en séduisant « les curieux qui cherchent un sens caché dans ses banalités. ». Il précise qu'Idriss Aberkane est selon lui « grillé et se tourne vers la sphère complotiste »[33].
Accusation d'atteinte à la liberté de la presse
En 2022, dans le cadre d'une interview sur ses conférences sur le développement personnel, Idriss Aberkane enregistre l'entretien avec les journalistes de L'Express avec leur consentement en s'engageant à ne pas diffuser publiquement l’interview « pour un usage commercial ou non, sur les réseaux sociaux ou ailleurs ». Néanmoins, selon ces derniers, il rompt son engagement et l'hebdomadaire lui envoie alors une mise en demeure[33]. Les journalistes de L'Express rapportent que le conférencier a alors utilisé celle-ci pour « pour se victimiser et crier à la tentative de censure. » et qu'il « s'était autorisé des propos paranoïaques et méprisants » qui peuvent engendrer « la haine des journalistes dans les réseaux complotistes. »[33]. Après la diffusion de l'interview, la rédaction de L'Express affirme que ses journalistes ont été rapidement pris pour cible sur les réseaux sociaux et ont « reçu des dizaines de messages méprisants et insultants ». La rédaction estime que de telles pratiques d'exposition à la vindicte de milliers d'abonnés d'Idriss Aberkane avaient pour objectif de les intimider[33].
Selon L'Express, l'enregistrement est publié sur le site complotiste France Soir et serait « à l'encontre de ce qui avait été convenu »[34]. Le site de désinformation justifie son choix dans le but de « contribuer au débat d'intérêt général sur les pratiques du monde journalistique contemporain » en se reposant sur la Charte de Munich de 1971. Selon Rudy Reichstadt, cette charte écrite dans un contexte médiatique différent de l'époque actuelle est « suffisamment généraliste pour pouvoir prêter le flanc à ce genre d'utilisations fallacieuses » et précise qu' « à l'ère de la post-vérité, il devient donc aisé de dénoncer un manquement au premier devoir de "respect de la vérité", alors même que tout le monde ne s'accorde plus sur la notion même de "vérité" »[34].
Sur ses propos concernant la pandémie de Covid-19
Idriss Aberkane a relayé plusieurs informations erronées sur la pandémie de Covid-19 et est devenu l'une des figures de la complosphère anti-vaxx en relayant des infox sur les réseaux sociaux. Selon la RTBF, il se distingue « par la propagation de fausses informations »[35].
Le conférencier partage régulièrement des tweets et déclarations de nombreuses personnalités qui participent à la désinformation sur le Covid-19 tel que l'avocat Fabrice Di Vizio ou le collectif antivaxx Verity France[36],[37]. Selon Rudy Reichstad « Il essaye de trouver dans l'écosystème complotiste un nouveau public. Il s'est grillé partout avant, il ne lui reste plus que ça. »[37].
2020
Le , il publie une vidéo sur YouTube intitulée « Raoult est notre Rommel » où il compare le professeur Didier Raoult à Erwin Rommel, un général nazi de la Seconde Guerre mondiale n'ayant pas commis de crime de guerre ou de crime contre l'humanité. D'après Arrêt sur images, cette vidéo portant sur la chloroquine « a été vivement critiquée par d'autres chercheurs en neurosciences, estimant qu'il évoquait de manière trompeuse des éléments factuels disparates pour appuyer son opinion » en minimisant notamment le fait que la dose mortelle de ce médicament est « facilement atteignable » ou « que la décision de le retirer de la vente libre précède l’apparition du Covid-19 »[38].
Le de la même année, il publie une vidéo sur YouTube intitulée « Raoult avait raison ! Donc on essaye de l'abattre », dans laquelle il défend le traitement à l'hydroxychloroquine proposée par Didier Raoult. La source qu'il mentionne pour appuyer son argumentation, le site hcqmeta.com, est une supposée « méta-analyse la plus rigoureuse et approfondie jamais conduite sur les publications scientifique sur l'HCQ ». Or, selon Sciences et Avenir, hcqmeta.com ne présente pas une méta-analyse, puisqu'il ne fait que répertorier les études concernant l'hydroxychloroquine, et ne démontre pas l’efficacité du traitement[39].
2021
En juin 2021, Idriss Aberkane prétend sur Twitter que la chaîne de télévision américaine Fox news aurait finalement admis que « l'hydroxychloroquine fonctionne contre le SARS-Cov-2 ». En réalité, l'extrait diffusé accordait la parole à des intervenants qui avançaient des arguments controversés qui ne permettent pas de prouver l'efficacité de l'hydroxychloroquine contre le Covid[40].
En , Idriss Aberkane affirme sur Twitter que le PDG de Pfizer vient de pénétrer dans le territoire israélien sans être vacciné. L'essayiste fonde en réalité son propos sur un document de [41]. Le même mois, il certifie que les autorités de santé allemandes ont déjà préparé un scénario de rappel de trois autres doses de vaccin en s'appuyant sur un document prétendument issu de l'institut Robert-Koch. L'Institut affirme pourtant ne pas être à l'origine du fichier[42]. En décembre 2021, l'essayiste affirme à tort que le témoignage d'un patient en faveur du vaccin aurait été manipulé par les médias[43]. Durant la même période, il partage une information qui prétendait qu'un article publié dans le dictionnaire Vidal « déconseille catégoriquement le panachage des vaccins Pfizer et Moderna ». Cette affirmation fut contredite par l'auteur de l'article en question qui confirme que cette infox était en réalité une interprétation abusive d'un article non mis à jour[44],[45].
En décembre 2021, Idriss Aberkane affirme qu'un document interne de Pfizer dévoilait selon lui la liste des effets secondaires graves du vaccin contre la Covid. Il s'agissait en réalité d'une liste qui comprend tous les effets surveillés, mais pas nécessairement ceux liés au vaccin en particulier[37].
Le , il remet en cause le témoignage d'un patient atteint du Covid filmé en réanimation et décédé peu après en se prévalant de la présence de ce témoin au même moment dans deux hôpitaux différents, l'un à Montreuil et l'autre à Nice. Libération et d'autres sites de fact-checking réfutent ces allégations en prouvant que le malade en question est décédé quelques jours après son témoignage[46],[47],[16] et qu'en réalité il s'agissait d'une simple ressemblance entre les deux patients[48].
2022
En janvier 2022, il publie une vidéo intitulée « 18 mensonges contre Didier Raoult » et qui sera relayée par ce dernier. Le quotidien Midi libre précise que « ses arguments s'appuient sur des sources parcellaires » et utilise « une rhétorique abondamment utilisée par les complotistes »[16]. Le site de fact cheking Fact and Furious publie un article qui contredit l'ensemble des affirmations présentées dans la vidéo[49].
En février 2022, Idriss Aberkane relaie sur Twitter une infox affirmant qu'un enseignant italien s'était immolé après une suspension pour défaut de passe sanitaire[50]. En réalité l'enseignant était vacciné et ce geste n’était pas en protestation au passe sanitaire[51].
En août 2022, il affirme sur Twitter qu'une étude suédoise montrait que les vaccins Pfizer/BioNTech et Moderna basés sur la technologie de l'ARNmessager, modifient le génome humain, cependant La Libre Belgique remarque qu'aucune étude publiée depuis le début de la recherche sur le Covid ne démontre cette affirmation[52].
Autres
En décembre 2020, la RTS annonce que la justice du canton de Neuchâtel enquête sur Idriss Aberkane pour « gestion déloyale » (équivalent en droit pénal français d'abus de biens sociaux). Il est soupçonné d'avoir confondu ses comptes personnels et ceux de sa société General Bionics, notamment pour payer ses impôts en France[20]. L'enquête a été déclenchée par la dénonciation de créanciers de General Bionics, s'estimant lésés à hauteur de centaines de milliers de francs suisses. De son côté, Idriss Aberkane rejette la faute sur ses associés successifs, qui, selon lui, auraient notamment tenté de lui faire signer des reconnaissances de dettes infondées. Quant à la société General Bionics, elle est en liquidation, et ses avoirs en Suisse sont gelés[20].
En , Idriss Aberkane affirme sur Twitter que l'Arizona avait déclaré le bitcoin comme une monnaie légale. L'AFP précise que l'information est fausse et qu'elle se fonde sur une proposition de loi déposée par une sénatrice américaine qui n'a pas été approuvée ni débattue au niveau parlementaire[53].
Durant la même période, Aberkane affirme sur Twitter que des avocats américains auraient « obtenu 2 milliards de dollars de réparation » à la suite du « scandale du Gardasil », vaccin contre les infections à papillomavirus humain liées aux cancers du col de l'utérus. Après avoir contacté les avocats cités, l'AFP contredit les propos de l'essayiste et précise qu'à ce jour aucun procès n'a encore eu lieu. L'argent obtenu correspond en réalité à une indemnité exigée à Monsanto/Bayer lors d'un procès d'un cas de cancer causé par le Roundup en 2019. Le Centre National de Référence Papillomavirus précise par ailleurs « qu'il n'existe pas de preuves scientifiques d'effets indésirables sévères du vaccin »[54].
En février 2022, il relaie une infox qui prétend que Justin Trudeau avoue avoir payé la presse pour bénéficier d’un traitement médiatique favorable. L'infox relayée était une vidéo sciemment coupée afin de tromper les internautes[55].
En mars 2022, il diffuse une infox qui prétendait que l’OTAN avait fourni des ordinateurs à un groupe d’extrême droite ukrainien[35].
En mai de la même année, il affirme que l’État de New York a fait de la publicité pour du Fentanyl dans le métro alors qu'il s'agissait en réalité d'une campagne de prévention contre l'analgésique opioïde[56].
Ouvrages
- Économie de la connaissance, Paris, Fondation pour l'innovation politique, , 48 p. (ISBN 9782364080829) — a été traduit en anglais, chinois et coréen[57]
- Libérez votre cerveau ! : Traité de neurosagesse pour changer l'école et la société, Paris, Robert Laffont, coll. « Réponses », , 288 p. (ISBN 9782221187586) — préface de Serge Tisseron.
- L'Âge de la connaissance : Traité d'écologie positive, Paris, Robert Laffont, coll. « Réponses », , 374 p. (ISBN 978-2221202036)[58]
Notes et références
Notes
- On Noopolitik and the New Great Game
- Titre de thèse de doctorat en littérature générale et comparée : (Ballade de la conscience entre Orient et Occident : une perspective soufie sur la conscience occidentale, connectant The Kasidah de R.F. Burton et The Waste Land de T.S. Eliot)
- Titre de thèse en sciences de gestion : (Mind Ergonomy for the Knowledge Economy : software Neuroergonomics and Biomimetics for the Knowledge Economy. Why? How? What?)
Références
- Aberkane, Idriss Jamil (1986-....), fiche sur Idref.fr
- « Idriss ABERKANE - Dirigeant de la société Scanderia - BFMBusiness.com », sur dirigeants.bfmtv.com (consulté le )
- Idriss J. Aberkane, « Notice de personne », sur catalogue.bnf.fr (consulté le )
- « Idriss Aberkane - Who's Who », sur www.whoswho.fr (consulté le )
- « Idriss Aberkane, le cerveau qui veut libérer le nôtre », sur Le Monde, .
- Fondapol, « Rapport d'activité 2017 » (consulté le )
- « Younes Aberkane : Bien être, mathématiques et valeurs de la république », sur www.cafepedagogique.net (consulté le )
- « Idriss Aberkane, l'enfant terrible », Le Journal du dimanche, (consulté le ).
- Vladimir de Gmeline, « Scouts musulmans : Islam, B.A. et feux de camp », sur marianne.net, (consulté le )
- Acermendax, « Idriss Aberkane à l’épreuve des faits », sur La Menace Théoriste, (consulté le ).
- Admin M2 IESC, « L’inspiration du vivant peut il être en adéquation avec l’intelligence artificielle ? », sur Master Intelligence Economique et Stratégies Compétitives, (consulté le )
- Idriss J. Aberkane, « fiche auteur », sur Le Point.fr (consulté le )
- « Sciences et recherche: le CV dopé d'Idriss Aberkane », sur LExpress.fr, (consulté le )
- « Idriss Aberkane, l'accoucheur des « geeks » de Gâtine », La Nouvelle République du Centre-Ouest, .
- « Cazères. Projection débat du film « Régénération » avec le réalisateur Alex Ferrini », La Dépêche du Midi, .
- « Qui est Idriss Aberkane, cet essayiste français très controversé qui veut réhabiliter Didier Raoult ? », sur midilibre.fr, (consulté le )
- « [Vidéo] “C’est immonde” : Idriss Aberkane dénonce “l’acharnement” sur le professeur Raoult », sur Valeurs actuelles, (consulté le )
- Fiche entreprise sur societe.com
- ABERKANE : fiche entreprise, sur societe.com (consulté le 6 novembre 2016).
- « Le chantre du biomimétisme Idriss Aberkane sous enquête en Suisse pour gestion déloyale », sur rts.ch, (consulté le ).
- Pierre Plottu et Maxime Macé, « Présidentielle: les complotistes votent Marine Le Pen » , sur Libération, (consulté le )
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- [vidéo] « 09-09-2015 : Le biomimétisme : s'inspirer de la nature pour innover durablement - cese » sur YouTube par le CESE - Conseil économique social et environnemental, téléversé le 10 septembre 2015, consulté le 5 novembre 2016.
- Idriss J. Aberkane, A simple paradigm for nooconomics, the economy of knowledge, sur hal.archives-ouvertes.fr (consulté le 9 décembre 2016), p. 2, premier paragraphe.
Liens externes
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