Inspection générale des affaires sociales

L’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) est un service administratif français créé en 1967. Il est chargé d’un champ très large de compétences qui s’étend à l’ensemble des questions relatives aux affaires sociales, à la santé, à la solidarité (protection sociale), à l’emploi, au travail, à la politique de la ville, à la formation professionnelle et à la modernisation de l’État. L’inspection générale assure ainsi « le contrôle et l’évaluation de la mise en œuvre des politiques publiques de la sécurité sociale et de la prévoyance sociale, de la protection sanitaire et sociale, du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle ». Elle est en outre chargée de contrôler les associations faisant appel à la générosité du public (OFAG). Le , l’IGAS a également été chargée par le ministre de la Santé de réduire les inégalités en matière de santé.

Ne doit pas être confondu avec Inspecteur de l'action sanitaire et sociale.

Inspection générale des affaires sociales
Logo de l'Inspection générale des affaires sociales.
Histoire
Fondation
Cadre
Sigle
IGAS
Type
Forme juridique
Domaine d'activité
Administration publique générale
Pays
Organisation
Direction
Nathalie Destais (d) (depuis )
Organisation mère
Site web
Identifiants
SIREN
Annuaire du service public

Compte tenu du statut interministériel de l’IGAS, elle est placée sous l’autorité directe des ministres chargés du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle, des affaires sociales et de la santé. Le Premier ministre peut faire appel à elle. Mais d’autres ministres peuvent la saisir : par exemple, sur certains aspects de la politique de la ville, du logement social, de l’immigration, de la fonction publique (cf. décrets d’attribution ministériels d’avril et de ). Elle est considérée comme un grand corps de l’État.

Histoire

L’inspection générale des affaires sociales a été créée par le décret no 67-390 du . Elle regroupe alors trois services créés antérieurement : l’inspection générale du ministère de la santé publique et de la population, l’inspection générale de la sécurité sociale et les inspecteurs généraux du travail et de la main d’œuvre, alors chargés d’encadrer l’inspection du travail.

Elle est actuellement régie par la loi n°96-452 du 28 mai 1996 (art 42), qui donne compétence à l’IGAS, indépendamment de l’organisation gouvernementale, en vigueur sur l’ensemble des institutions du champ social, qu’elles soient publiques (État, collectivités territoriales, agences, organismes paritaires…) ou privées (entreprises, associations…), dès lors qu’elles bénéficient de fonds publics ou qu’elles font appel à la générosité du public.

Le statut de l’IGAS est établi par le décret no 2011-931 du 1er août 2011[1], qui fait suite au décret no 90-393 du .

Composition

Au , l’inspection est composée de 94 inspecteurs en service (83 sont en détachement, exercent ailleurs), dont 55 % sont d’anciens élèves de l’École nationale d’administration (ENA), sortis en général dans le premier quart du classement, ou intégrés par voie interne à l’administration en cours de carrière (mécanisme des tours).

L’inspection s’enrichit de membres nommés en cours de carrière. Sont ainsi recrutés d’anciens directeurs de services (caisses de sécurité sociale, administrateurs civils, directeurs généraux et cadres supérieurs d’agence régionale de santé, de DIRECCTE), inspecteurs du travail, médecins inspecteurs, praticiens hospitaliers ou directeurs d’hôpital, militaires, magistrats…

De jeunes inspecteurs, en mobilité professionnelle pour deux ans, sont aussi régulièrement accueillis : administrateurs de l’Insee, sous-préfets, administrateurs territoriaux de l’INET, administrateurs civils, spécialistes des statistiques, du droit ou de l’actuariat éventuellement. Ils sont intégrés à toutes les activités de l’IGAS et bénéficient des mêmes pouvoirs d’investigation conférés par la loi.

En outre, un certain nombre de fonctions font appel à des membres de l’IGAS comme membres de jurys ou de conseils d’administration ou d’évaluation internes à l’administration. Elles ne sont pas comptabilisées comme des missions de l’IGAS, malgré le poids du temps qui leur est consacré.

À la tête de l’IGAS est placé un inspecteur général, chef du service de l’inspection qui assure la gestion du corps, répartit les missions entre les inspecteurs et assure le lien entre les ministres et les membres de l’inspection.

Missions

L’IGAS conduit environ 170 missions par an (chiffres 2014), qui sont de trois types :

  • Le contrôle des institutions (administrations, organismes publics, parapublics et privés ou faisant appel à de l’argent public) qui interviennent dans le champ social (emploi, travail, formation, sécurité sociale, santé publique, offre de soins, famille, enfance, intégration, politique de la ville). Elles ont pour objet la vérification approfondie du respect de la réglementation, du bon usage des fonds publics, de l’efficacité et de l’efficience de l’organisation. Le contrôle peut également porter sur des fonds privés lorsqu’ils sont récoltés par appel à la générosité publique. l’IGAS intervient aussi à la demande de la Commission européenne (pour le contrôle des fonds structurels européens) et du comité interministériel d’audit des programmes (CIAP, chargé de l’audit des programmes des ministères dans le cadre de la loi organique relative aux lois de finances du ).
  • Des missions d’enquête générale et d’évaluation, qui peuvent viser un organisme particulier ou un dispositif national, une loi ou l’ensemble d’une politique publique. Elles intègrent de façon croissante des démarches d’administration comparée. Elles sont destinées à être publiées, sauf avis contraire du ministre sur Internet (site de la direction de l’information légale et administrative).
  • Des missions d’appui, à la demande des ministres, qui prennent la forme de missions de conseil (aide à la modernisation, à la mise en œuvre de réformes) ou de concours individuels temporaires d’un inspecteur (rapporteur auprès d’un parlementaire notamment ou en appui auprès d’un cabinet ministériel).

Par ailleurs, l’IGAS intervient dans de très nombreuses missions interministérielles (audits CIAP, RGPP, audits de modernisation…). Plus d’un tiers des missions de l’IGAS sont réalisées dans le cadre de missions conjointes, essentiellement avec l’inspection générale des finances.

Toutes les missions donnent lieu à la rédaction de rapports. Une commission des suites examine régulièrement ce qu’il est advenu des recommandations formulées. Depuis 2006, l’IGAS a choisi de renforcer la démarche qualité dans l’élaboration de ses rapports, afin de faciliter leur appropriation par les décideurs et le public intéressé.

Quelques exemples de rapports de l’IGAS aux suites marquantes

Le taux de suivi des recommandations de l’IGAS est relativement élevé, autour de 80 %. Ce taux se situe dans le même registre que celui de la Cour des comptes, mais à la différence de rapports de magistrats, les préconisations des membres de l’IGAS doivent être discutées avec les organismes et responsables concernés. Elles font donc l’objet d’échanges contradictoires et/ou d’une démarche de persuasion qui vise à la prise de conscience par les acteurs des changements nécessaires. Le mode opératoire de l’IGAS, qui est une administration et non une juridiction, n’est donc pas le même – mais il est complémentaire – que celui de la Cour des comptes sur le même champ.

  • le contrôle de l’Association pour la recherche contre le cancer (ARC), enquête menée en 1993-1994 par le chef de l’IGAS à la frontière des compétences d’alors de l’inspection générale au vu des doutes et suspicions sur la gestion du directeur général de l’association, Jacques Crozemarie. Les conclusions remises à la justice ont conduit à des investigations puis à des sanctions pénales des membres dirigeants.
  • la fusion des guichets ANPE-Assédic pour l’inscription du demandeur d’emploi réalisée à l’Assédic dans un premier temps (rapport annuel 1993, mis en œuvre quatre ans plus tard, première étape du rapprochement ayant progressivement et irrémédiablement conduit à la création de Pôle emploi).

Plus récemment :

  • le rapport sur la prise en charge des enfants et des adolescents par les services sociaux (2005) met en évidence une absence de suivi des interventions au préjudice des jeunes en détresse[2].
  • l’interdiction du tabac (2006) : rapport d’études sanitaire et administrative complémentaire ayant conforté le ministre chargé de la santé dans la nécessité d’interdire la consommation de tabac dans tous les lieux publics (restaurants et cafés compris)
  • le contrôle du conseil départemental de l’ordre des médecins de Paris (2007), ayant conduit à la première dissolution par le préfet de Paris d’un organisme ordinal de ce type et la mise en place d’une nouvelle direction rénovée, et de procédures réglementaires nationales réorganisant le modes d’élections, de fonctionnement et de contrôle financier des instances ordinales de médecins et de pharmaciens.
  • le rapport sur la commercialisation du benfluorex (nom commercial : Mediator) et ses conséquences (2011), préconisant une réforme de la pharmacovigilance.
  • Le rapport « Évaluation des politiques d’aménagement – réduction du temps de travail dans la lutte contre le chômage »[3]. Il évalue « les politiques de réduction de la durée légale du travail ». Ce rapport indique que ces politiques, dites « loi des 35 heures » ou « loi Aubry », qui font polémique depuis une quinzaine d’années, permettent de créer, au moins à court terme, de l’emploi, à « condition de respecter des conditions strictes », à savoir « la maîtrise de l’évolution des coûts salariaux » et « le financement de ce type de politique »[4]. Néanmoins, l'économiste Stéphane Carcillo, spécialiste des réformes du marché du travail, dénonce les conclusions de ce rapport. Selon lui, le chiffre de 350 000 emplois crées repose sur de premières études datées. Celles-ci n'ont jamais été publiées dans les revues académiques de niveau international pour la raison qu'elles comparent des entreprises qui sont volontairement passées aux 35 heures, comme les y incitait la loi Aubry I, à celles qui sont d'abord restées aux 39 heures. Cette comparaison souffrirait d'un effet énorme de sélection[5]. Celui-ci s’étonne d’ailleurs que les auteurs du rapport de l'Igas critiquent les « hypothèses fragiles » des études sur le sujet alors qu’« ils ne sont pas chercheurs » et « se permettent de se substituer au processus de contrôle par les pairs ». Selon lui, toutes les objections que les auteurs l'Igas soulèvent « ont évidemment été vues par les chercheurs qui ont évalué et critiqué les papiers avant de les publier. »[5]

Chefs

Depuis sa création, plusieurs chefs de corps se sont succédé[6] :

  • 2022- : Thomas Audigé[7].
  • 2017-2022 : Nathalie Destais.
  • 2009-2017 : Pierre Boissier, ancien directeur général de l’Association pour la formation professionnelle des adultes (AFPA), de 2003 à 2008[8].
  • 2006-2009 : André Nutte.
  • 2000-2006 : Marie-Caroline Bonnet-Galzy, une des plus jeunes femmes nommées directrice d’administration centrale (direction financière et ressources humaines du ministère du Travail), secrétaire générale des ministères chargés de la santé, des solidarités, du travail, de l’emploi sous les gouvernements Raffarin et Villepin, directrice générale des services de la communauté urbaine de Lille métropole.
  • 1993-2000 : Christian Rollet.
  • 1982-1993 : Michel Lucas, nommé directeur général de l’Association pour la recherche sur le cancer (ARC) pour redresser l’association après le « scandale Crozemarie» dans les années 1990 (1996-2005).
  • 1977-1982 : Dominique Ceccaldi.
  • 1967-1977 : Jacquelin Bardeau.

Quelques membres célèbres de l’IGAS

  • Éric Aubry : ancien conseiller du Premier ministre François Fillon, ancien sous-directeur à la direction de la sécurité sociale, ancien directeur de cabinet adjoint de François Fillon lors de la préparation de la réforme des retraites de 2003, directeur de cabinet de Gérard Larcher, alors ministre des Relations de travail, expert des problématiques de gestion des âges, de financement de la sécurité sociale, de droit du travail, et de négociation collective avec les partenaires sociaux.
  • Hélène Dorlhac de Borne secrétaire d’État à la Condition pénitentiaire du au dans le gouvernement Jacques Chirac (1) et ministre de la Famille dans le deuxième gouvernement Michel Rocard (2). Elle a été inspectrice générale des affaires sociales de 1991 à 2000.
  • Raphaël Radanne : ancien conseiller de Nicolas Sarkozy à l’Élysée.
  • Rose-Marie Van Lerberghe : ancienne directrice générale de l’Assistance publique - Hôpitaux de Paris et actuelle directrice générale de Korian, groupe d’établissements médico-sociaux privés de France, ancienne directrice des ressources humaines de Danone et dirigeante d’Altedia, entreprise de consultants en emploi et insertion professionnelle
  • Emmanuelle Jeandet-Mengual : actuelle vice-présidente du conseil régional de Haute-Normandie chargée de la formation professionnelle et adjointe aux finances à la mairie de Rouen, présidente du comité des carrières de l’assurance maladie, ancienne directrice régionale des affaires sanitaires et sociales, chargée du suivi de la loi sur le respect du droit à l’IVG en 2001, ancien membre du Haut Comité à la santé publique.
  • Louis-Charles Viossat : actuellement ambassadeur de France pour la lutte contre le SIDA, ancien conseiller de Dominique de Villepin, alors Premier ministre, ancien directeur général de l’ACOSS (agence tête de réseau des URSSAF, chargées du recouvrement des cotisations sociales) auparavant responsable des conférences de questions sociales à l’Institut d’études politiques de Paris.
  • Marie-Thérèse Join-Lambert : haut fonctionnaire retraitée, chargée en 1988-1990 de la préparation et de la mise en œuvre de la loi créant le RMI, ancienne président de l’Observatoire national de la pauvreté et de l’exclusion sociale, auteur de l’ouvrage de référence Politiques sociales aux Presses de Sciences Po, institut dans lequel elle a supervisé l’enseignement en questions sociales des années durant.
  • Daniel Lenoir, ancien directeur général de la Mutualité Sociale Agricole (MSA), de la Mutualité française, de la Caisse nationale de l'assurance maladie (Cnam) et de la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf) ; également président de Démocratie & Spiritualité et de l'Institut pour le développement de l'information économique et sociale (Idies).
  • Michel Yahiel : conseiller de François Hollande à l’Élysée. Ancien directeur des ressources humaines de la mairie de Paris (40 000 agents), ancien directeur de cabinet des ministres des Affaires sociales (années 1990), ancien directeur du fonds d’aide aux étrangers, à l’intégration et à la lutte contre les discriminations,
  • François Chieze : ancien directeur de cabinet de Nadine Morano, secrétaire d’État chargée de la famille et de la solidarité
  • Thomas Fatome : directeur de la sécurité sociale. Ancien conseiller de Nicolas Sarkozy à l’Élysée, ancien directeur de cabinet de Laurent Wauquiez, secrétaire d’État chargé de l’emploi.
  • Dominique Méda : directrice du centre d’études pour l’emploi, également chercheur, spécialiste des questions d’égalité professionnelle hommes-femmes, des politiques de l’emploi et des questions de compatibilité entre vie familiale et vie professionnelle.
  • Hayet Zeggar : ancienne conseillère de François Hollande à l’Élysée. Ancienne DRH de France 4. Ancienne responsable de l’inspection de la mairie de Paris.
  • Fadela Amara : secrétaire d’État chargée de la politique de la ville du deuxième gouvernement François Fillon (2007-2010) ; la présidente de l’association Ni putes ni soumises a été nommée au tour extérieur en .
  • François Chérèque : ancien secrétaire général du syndicat CFDT, nommé le [9].
  • Dominique Voynet : ministre de l'Aménagement du Territoire et de l'Environnement du gouvernement de Lionel Jospin (1997-2001), sénatrice de la Seine-Saint-Denis (2004-2011), maire de Montreuil (2008-2014), nommée le . Actuellement directrice générale de l'agence régionale de santé de Mayotte.
  • Dominique Barella : ancien magistrat, ancien président de l’Union syndicale des magistrats (USM), syndicat majoritaire de la magistrature.
  • François Toujas : actuel président de l'Établissement français du sang.

Affaire du Mediator

Lors de l'affaire du Mediator, le rapport de l’IGAS ne souligne que la dissimulation par Servier de la nature amphétaminique du Mediator, les autorités sanitaire n’étant, selon lui, que les victimes de l’industriel[10]. Xavier Bertrand, ministre de la Santé au moment où éclate le scandale, en 2010, avait choisi Aquilino Morelle comme inspecteur Igas pour cette mission. Celui-ci est un « vieil ami de Didier Tabuteau », directeur général de l'Agence du médicament (actuelle Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé) de 1993 jusqu'en 1997, avec qui il a écrit un ouvrage intitulé La Santé publique (2010) et tous les deux enseignent à Sciences Po au sein de la chaire santé, dont le responsable est Didier Tabuteau. C’est le rapport Igas qui servira de canevas à l’information judiciaire concernant l'affaire du Mediator[10]. Selon Le Figaro, le rapport de l’Igas rendu public le 15 janvier 2011 fait l’impasse sur la période Tabuteau à l’Agence[10].

Dans la fiction

Le film Hors normes montre des inspecteurs de l'IGAS.

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

Notes et références

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