Corps des ingénieurs de l'armement
Les ingénieurs de l’armement constituent un des quatre grands corps techniques de l’État, le seul à statut militaire. Ils ont vocation à travailler dans tout l’écosystème de la défense, et peuvent plus généralement accomplir toute mission scientifique, technique, industrielle ou administrative, au sein de ministères français et d'organismes publics ou internationaux[1].
Les ingénieurs de l’armement jouent un rôle clé à la Direction générale de l’armement, premier investisseur de l’État, et plus généralement au ministère des Armées. Dotés d’une expertise technique reconnue, ils pilotent en particulier la réalisation des grands systèmes de sécurité et de défense de la France, notamment au profit des forces armées, depuis la sphère étatique ou privée.
Le corps de l’armement est composé de 85 % d’hommes et de 15 % de femmes pour les ingénieurs de moins de quarante ans[2].
Histoire
Le corps est issu de la fusion[3], le , des anciens corps d'ingénieurs militaires :
- ingénieurs du génie maritime et de l'artillerie navale ;
- ingénieurs militaires de l'air ;
- ingénieurs militaires des poudres ;
- ingénieurs militaires des fabrications d'armement ;
- ingénieurs militaires des télécommunications.
En 1970, le corps des ingénieurs hydrographes a été également fusionné dans celui des ingénieurs de l'armement.
Depuis 1968, les ingénieurs de l'armement, très présents au sein de la direction générale de l'armement et des grandes entreprises de défense françaises et européennes, ont largement contribué au développement de la dissuasion nucléaire française et de l'aéronautique civile et militaire.
Au sein de la haute fonction publique française, le corps des ingénieurs de l'armement est le seul grand corps de l'État ayant un statut militaire - les autres corps techniques de niveau équivalent (ingénieurs des mines, ingénieurs des ponts, des eaux et des forêts, administrateurs de l'Insee) étant des corps de fonctionnaires civils.
Il s'agit également de l'un des quatre corps d'ingénieurs de l'État à statut militaire, avec ceux des ingénieurs des études et techniques de l'armement, des ingénieurs militaires d'infrastructure de la défense et des ingénieurs des essences.
Activités
Les ingénieurs de l'armement sont majoritairement en activité au sein de la Direction générale de l'armement mais également :
- au cabinet du ministre des Armées[4],
- dans les services de renseignement (Direction du renseignement militaire[5], Direction générale de la sécurité extérieure, Direction générale de la sécurité intérieure[6]),
- à l'Armée de l'air et de l'espace, l'Armée de terre et la Marine nationale,
- à la Direction générale des relations internationales et de la stratégie et en ambassade,
- au Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (Direction des applications militaires),
- au Secrétariat général de la Défense et de la Sécurité nationale et à l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information[7].
- au sein des ministères économiques et financiers (Agence des participations de l'État[8], Direction générale du Trésor[9], Direction générale des entreprises[10]).
De nombreux ingénieurs de l'armement choisissent également de rejoindre le secteur privé. Ils sont alors en position de détachement, en position de non-activité, ou démissionnaires.
En 2018, sur 889 ingénieurs de l'armement dans le corps, près de 480 sont en poste à la DGA, 160 au ministère des Armées hors DGA, une trentaine dans les autres ministères, 120 en service détaché et une centaine en congés pour convenances personnelles[11].
Recrutement et formation
Recrutement sur classement de sortie de l'École polytechnique
Les ingénieurs de l'armement sont recrutés principalement parmi les élèves français de l'École polytechnique (communément appelée « X »), sur classement de sortie, comme les membres des autres grands corps techniques de l'État.
Le décret no 2008-941 du portant statut particulier du corps militaire des ingénieurs de l'armement précise, par ailleurs, que la proportion d'ingénieurs issus de l'École polytechnique ne peut pas être inférieure à 67 %[1].
Les ingénieurs de l'armement issus de l'École polytechnique effectuent, après la fin de leur cursus à l’X, une formation professionnalisante dans un établissement ayant des liens avec la défense, comme l'ISAE-SUPAERO ou l'ENSTA Paris ou d'autres écoles et universités, françaises ou étrangères. Pour certains, cette formation peut prendre la forme d'une thèse de doctorat[12].
Recrutement sur concours sur titres (ou concours externe)
Certains ingénieurs sont recrutés via un concours sur titres [13] parmi les ingénieurs diplômés des écoles suivantes [14] :
- Mines ParisTech,
- CentraleSupélec,
- École des Ponts ParisTech,
- ISAE (cursus SUPAERO),
- ENSTA ParisTech,
- Telecom ParisTech,
- École polytechnique.
Le concours est également ouvert aux élèves et anciens élèves des Écoles normales supérieures de Paris, Cachan et Lyon (section sciences), titulaires d'un master[14].
Recrutement sur concours interne
La direction générale de l'armement recrute également des ingénieurs de l'armement sur concours interne parmi les ingénieurs des études et techniques de l'armement mais également parmi les ingénieurs civils du ministère de la défense : ingénieurs civils de la défense (ICD) et ingénieurs contractuels (ICT)[1].
Nombre d'ingénieurs de l'armement recrutés
Chaque année, un arrêté fixe le nombre de postes offerts au recrutement dans le corps des ingénieurs de l'armement.
Année | 2015[15] | 2016[16] | 2017[17] | 2018[18] | 2019, 2020, 2021, 2022[19],[20],[21],[22] |
---|---|---|---|---|---|
Classement de sortie de Polytechnique | 18 | 18 | 18 | 20 | 22 |
Concours externe | 1 | 1 | 2 | 4 | 4 |
Concours interne au grade d'ingénieur | 2 | 2 | 2 | 2 | 3 |
Concours interne au grade d'ingénieur principal | 3 | 2 | 2 | 2 | 3 |
Concours interne au grade d'ingénieur en chef | 1 | 0 | 0 | 0 | 0 |
Formation
Les ingénieurs de l'armement issus de l'École polytechnique et du concours externe effectuent, avant leur prise de poste, sept mois de formation administrative et militaire. Il s'agit de deux mois de conférences et de visites, organisées par la DGA et le Conseil général de l'armement avec le soutien de l'ENSTA ParisTech, de quatre mois de stage militaire, et d'un temps de navigation à bord d'un bâtiment de la Marine nationale[23]. Les ingénieurs de l'armement issus de l'École polytechnique suivent cette formation à l'issue de leur année d'école d'application[24].
Grades et rémunération
Grades
Les grades des ingénieurs de l'armement équivalent aux grades des officiers des armées. Néanmoins, eu égard à leurs compétences interministérielles et leurs liens avec l'industrie, ils exercent régulièrement sans porter d'uniforme.
Fourreau d'épaule | Grade | Exemples d'emploi | Equivalent dans l'armée de terre | Contingentement pour l'année 2020[25] |
---|---|---|---|---|
Ingénieur général de classe exceptionnelle (IGCEA) | Délégué général pour l'armement (ou son adjoint[26])
Inspecteur général des armées - Armement |
général d'armée | 52 | |
Ingénieur général hors classe (IGHCA) | Chef de l'inspection de l'armement
Emplois de directeurs d'administration centrale :
|
général de corps d'armée | ||
Ingénieur général de première classe (IG1A) | Emplois de chefs de service[28] et de directeurs d'unité de management (UM) de la direction des opérations | général de division | ||
Ingénieur général de seconde classe (IG2A) | Directeur de DGA Essais en vol[29] (et de certains autres centres de la direction technique)
Emplois de sous-directeurs |
général de brigade | 67 | |
Ingénieur en chef (ICA), après deux ans de grade | Directeur d'un programme d'armement | colonel | 473 | |
Ingénieur en chef (ICA), ayant moins de deux ans de grade | Architecte technique au sein d'un programme d'armement | lieutenant-colonel | ||
Ingénieur principal (IPA) | commandant | 136 | ||
Ingénieur (à partir du 4e échelon de solde) | Jeune ingénieur de l'armement en poste | capitaine | 166 | |
Ingénieur (au 2e ou au 3e échelon de solde) | Ingénieur de l'armement issu de l'École polytechnique, en école d'application | lieutenant | ||
Ingénieur (au 1er échelon de solde) | Ingénieur de l'armement stagiaire recruté par concours externe[30] | sous-lieutenant |
Rémunération
Un ingénieur de l'armement débutant est placé au 4e échelon du grade d'ingénieur[1]. Il touche une rémunération brute d'environ 4 200 € (en 2020). En effet, il perçoit une solde indiciaire d'indice brut 617[31], soit 518 d'indice majoré (2 427 € mensuels), à laquelle il faut ajouter la part fonctionnelle de la prime de performance de 1 426 € mensuels[32] et des indemnités pour charges militaires de 353 € mensuels pour un célibataire sans enfant[33]. A cette rémunération s'ajoute la part variable de la prime de performances, d'au plus 13 718 € annuels.
La rémunération progresse ensuite en fonction du grade, des fonctions occupées, et de la situation familiale.
Quelques ingénieurs de l'armement
- Liste d’ingénieurs de l’armement, classés par promotion croissante, avec l'indication des fonctions qu'ils ont exercées[N 1]
- Henri Ziegler X 1926, SupAéro 1931, pilote d'essai, grand résistant (il fut chef d'état-major des FFI), directeur général d’Air France, directeur de Breguet et de la SNIAS, responsable du programme Concorde, considéré comme l'un des pères fondateurs d'Airbus, il fut le premier gérant du GIE Airbus ;
- Jacques Maillet, X1931, grand résistant, compagnon de la Libération ;
- Roger Béteille X 1940, initiateur puis directeur technique du programme Airbus A300 après avoir dirigé les essais en vol de la Caravelle ; membre fondateur de l'Académie de l'air et de l'espace.
- Serge Dassault X 1946, SupAero 1951, président du groupe Dassault, sénateur, propriétaire de journaux, maire de Corbeil-Essonnes de à , fils de Marcel Bloch dit Dassault (SupAero 1913), fondateur du groupe du même nom ;
- Henri Martre X 1947, Délégué général pour l'armement de 1977 à 1983, puis président de l'Aérospatiale ;
- René Audran X 1950, assassiné en 1985 par le groupe terroriste anarchiste Action directe dans ses fonctions de directeur des relations internationales de la délégation générale pour l'Armement ;
- Michel-Henri Carpentier X 1950, ENSA 1955 et ESE 1956, ingénieur et scientifique ;
- Michel Carayol X 1954, ingénieur au CEA, acteur clé de la mise au point de la « bombe H » en France ;
- Yves Sillard X 1955, SupAero 1960, directeur général du CNES de 1976 à 1982, président de l'IFREMER de 1982 à 1988, Délégué général pour l'armement de 1988 à 1993 ;
- Serge Tchuruk X 1958, président du groupe Total puis d'Alcatel Lucent ;
- Frédéric d'Allest X 1961, responsable du programme Ariane, directeur général du CNES et président d'honneur d'Arianespace ;
- Jean-Paul Gillybœuf X 1962, Supaéro, Inspecteur général des armées
- François Lureau X 1963, SupAero 1968, premier directeur du programme d'hélicoptère de combat Tigre, directeur général « opérations » de Thales, Délégué général pour l'armement de 2004 à 2008 ;
- Pierre-Henri Gourgeon X 1965, SupAero 1970, ancien directeur général de l'Aviation civile, puis président du groupe Air France-KLM ;
- Laurent Collet-Billon SupAero, Délégué général pour l'armement de 2008 à 2017 ;
- Jean-Paul Herteman X 1970, SupAero 1975, ancien président du directoire du groupe Safran et président du GIFAS ;
- Hervé Guillou, X1972, président directeur général de Naval Group de 2014 à 2019, vice-président du Conseil général de l'armement depuis 2020 ;
- Joël Barre, X1974, Supaéro, directeur général délégué du Centre national d'études spatiales en 2012 et délégué général pour l'armement en 2017
- Olivier Zarrouati, X 1977, SupAéro 1982, président du directoire de Zodiac Aerospace ;
- Yves Demay, X 1977, docteur en physique, directeur général de l'École polytechnique jusqu'en 2016 ;
- Jean-François Clervoy, X 1978, SupAero 1983, spationaute de l'ESA ayant effectué trois missions sur la navette spatiale américaine, président de Novespace ;
- Michel Bouvet, X 1978, ENSTA ParisTech, directeur général du groupe Yncréa ;
- Laurent Giovachini, X1980, numéro 2 de Sopra Steria depuis 2015, vice-président du Conseil général de l'armement entre 2016 et 2020 ;
- Bernard Fontana, X1981, ENSTA ParisTech, président directeur général de Framatome depuis 2015 ;
- Monique Legrand-Larroche, X 1982, première femme à accéder au grade de général quatre étoiles, directrice de la maintenance aéronautique depuis 2018 ;
- Marwan Lahoud, X 1983, SupAéro, directeur de la stratégie du groupe Airbus jusqu'en 2017, président du directoire d'ACE Management depuis janvier 2020 ;
- Pierre Eric Pommellet, X1984, président-directeur général de Naval Group depuis mars 2020 ;
- François Bouchet, X1986, directeur général de l'École polytechnique à partir de 2017 ;
- Guillaume Faury, X1987, président d'Airbus Avions commerciaux après avoir été président d'Airbus Helicopters ;
- Bruno Even, X1987, président d'Airbus Helicopters après avoir été président de Safran Helicopter Engines ;
- Guillaume Poupard, X1992, directeur-général de l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information ;
- Virginie Rozière, X1997, ENSTA ParisTech, députée européenne et conseillère régionale d'Occitanie ;
- Anne Ducarouge, X1998, championne du monde de vol à voile ;
- Morgane Riou, X2006, docteur en neurosciences, triple championne d'Europe de cross-triathlon, cross-duathlon et XTERRA ;
Notes et références
Notes
- Si les fonctions sont actuellement exercées, il sera possible d’ajouter la mention « actuel » ou bien de préciser « depuis le » avec la date correspondante. Sinon, aucune mention ne sera reportée sauf si les dates de début et de fin de fonction sont connues, auquel cas il sera précisé « de » (exemple : 1950) « à » (exemple : 1955). La mention « ancien » est par conséquent à proscrire, car elle alourdit inutilement le texte. Les abréviations concernant les titres seront également évitées : ainsi, « président-directeur général » ou plus simplement « président » seront par exemple préférés à « PDG ».
Références
- Décret n° 2008-941 du 12 septembre 2008 portant statut particulier du corps militaire des ingénieurs de l'armement, (lire en ligne)
- « Ingénieurs de l'Armement | Orientation 4A », sur portail.polytechnique.edu (consulté le )
- https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/JORFTEXT000000504461/
- https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?dateTexte=&categorieLien=id&cidTexte=JORFTEXT000034811144&fastPos=10&fastReqId=938089344&oldAction=rechExpMesuresNominatives
- https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000541148
- Décret du 29 mai 2019 portant promotion et nomination (lire en ligne)
- https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000028786923/
- https://www.legifrance.gouv.fr/eli/arrete/2015/12/17/FCPA1528772A/jo
- https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000031128012
- Décret du 6 juillet 2018 portant nomination du directeur général des entreprises - M. COURBE (Thomas) (lire en ligne)
- Magazine des ingénieurs de l'armement, no 114 - , page 20
- Les chercheurs parlent aux chercheurs, Le Magazine des ingénieurs de l'armement, no 111
- https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000030820515&dateTexte=&categorieLien=id
- https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000029359483&dateTexte=&categorieLien=id
- JORF no 0069 du , texte no 14.
- JORF no 0049 du , texte no 59.
- Arrêté du 28 février 2017 fixant le nombre de places offertes au recrutement en 2017 dans le corps des ingénieurs de l'armement et des ingénieurs des études et techniques de l'armement (lire en ligne).
- Arrêté du 28 février 2018 fixant le nombre de places offertes au recrutement en 2018 dans le corps des ingénieurs de l'armement et des ingénieurs des études et techniques de l'armement (lire en ligne)
- JORF no 0051 du , texte no 9.
- JORF no 0053 du , texte no 5.
- « JORF n° 0054 du 4 mars 2021, texte n°13 », sur www.legifrance.gouv.fr (consulté le )
- Arrêté du 24 janvier 2022 fixant le nombre de postes offerts au recrutement en 2022 dans les corps des ingénieurs de l'armement et des ingénieurs des études et techniques de l'armement
- La Mission Jeanne d'Arc des ingénieurs de l'armement, Le Magazine des ingénieurs de l'armement, no 110
- Le Magazine des ingénieurs de l'armement, no 109, page 76
- https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000039666907&categorieLien=id
- « Décret du 31 août 2022 portant nomination d'un officier général - Légifrance », sur circulaire.legifrance.gouv.fr (consulté le )
- Décret du 20 juillet 2016 portant maintien dans la 1re section et dans l'emploi, affectations et élévations, promotions et affectations, promotions dans la 1re et la 2e section, nominations et affectations, nominations dans la 1re et la 2e section et affectation d'officiers généraux (lire en ligne)
- Décret du 2 janvier 2020 portant affectations d'officiers généraux (lire en ligne)
- Décret du 2 juillet 2018 portant affectations d'officiers généraux (lire en ligne)
- Décret n° 2008-941 du 12 septembre 2008 portant statut particulier du corps militaire des ingénieurs de l'armement, (lire en ligne)
- https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000024631765&categorieLien=cid
- https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000044517215
- https://www.legifrance.gouv.fr/eli/arrete/2017/3/2/DEFH1623469A/jo
Annexes
Articles connexes
Liens externes
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