Invasion française d'Honolulu

L'Invasion française de Honolulu (aussi connue sous le nom de la Mise à la porte d'Honolulu ou l'Affaire Tromelin) fut une attaque contre Honolulu par Louis Legoarant de Tromelin en représailles à la persécution locale des catholiques et à la répression du commerce français, pour dénoncer le traité de 1846.

Invasion française de Honolulu
Vue du fort de Honolulu, intérieur, tableau de Paul Emmert (en) (vers 1853).
Informations générales
Date 22 août au 5 septembre 1849
Lieu Honolulu, Hawaï
Belligérants

République française

Royaume d'Hawaï
Commandants

Louis Legoarant de Tromelin

Kamehameha III
Forces en présence
1 Frégate
1 Corvette
140 Matelots
1 Forteresse

Contexte

Les intérêts que la France possédait à Hawaï étaient essentiellement religieux, avec l'implantation d'une mission catholique soutenue par la France dès 1827 (la première en Océanie). L'arrivée de cette mission provoqua dès le début des tensions avec le pouvoir local détenu par la régente Kaʻahumanu et les missions protestantes anglo-saxonnes déjà présentes sur place[1].

Les tensions s'exacerbèrent lors de l'expulsion des prêtres catholiques en 1831, ce qui provoqua l'envoi d'un navire de guerre français en 1836, La Bonite et l'obtention d'un accord avec le Roi Kamehameha III pour le maintien des citoyens français à Hawaï, à condition de ne pas convertir les autochtones au catholicisme[1].

Ces évènements ne mirent pas fin aux tensions. Le , le Roi interdit la religion catholique à Hawaï. Cela fut de trop pour le gouvernement français qui voyait là, non seulement une atteinte aux intérêts des catholiques sous la protection des Français, mais aussi une atteinte au commerce français et aux Européens qui n'étaient pas libres de commercer à cause de l'influence américaine[1],[2].

Face à la menace française, et sans moyen de défense, les Hawaiiens signèrent une convention le avec la France qui donnait à cette dernière des avantages conséquents en matière de commerce et garantissait la tolérance religieuse. Souhaitant renforcer sa souveraineté nationale face aux grandes puissances et aux « traités inégaux », Hawaï entreprit de nouvelles négociations avec la France et la Grande-Bretagne, et signa des traités en 1846 qui remplacèrent celui de 1839[1],[2].

Déroulement

Malgré ce nouvel accord, il demeurait des tensions entre la France et Hawaï en matières juridique, commerciale et religieuse, exacerbées par l'arrivée du nouveau Consul de France Guillaume Patrice Dillon[1].

Le , le contre-amiral français Louis Legoarant de Tromelin débarqua dans le port d'Honolulu, à bord de la corvette Gassendi avec la frégate La Poursuivante. Il découvrit avec l'aide du Consul de France la persécution passée des catholiques et les droits de douane élevés sur le cognac français. Avec l'aide des fusiliers marins français, il désarma le Fort d'Honolulu et saisit le yacht royal. Il adressa le un manifeste au Roi Kamehameha III avec dix demandes visant à améliorer les conditions des catholiques et les intérêts politiques et commerciaux français dans les îles[1],[3] :

  1. L'adoption complète et fidèle du traité du .
  2. La réduction de la taxe sur les spiritueux français à moins cinq pour cent ad valorem.
  3. La sujétion des écoles catholiques à la direction du chef de la Mission française et aux inspecteurs spéciaux, pas pour les protestants et un traitement rigoureusement égal accordé aux deux cultes et à leurs écoles.
  4. L'utilisation de la langue française dans toutes les relations d'affaires entre les citoyens français et le gouvernement hawaïen.
  5. Le retrait de l'exception alléguée par laquelle les baleiniers important des vins et spiritueux ont été touchés, ainsi que l'abrogation d'un règlement qui obligeait les navires français chargés de liqueurs à payer des douaniers placés à bord pour surveiller leur chargement et déchargement.
  6. Le retour de tous les droits perçus en vertu du règlement, la rétractation de ce qui a été demandé par le cinquième article.
  7. Le retour d'une amende de vingt-cinq dollars versés par la baleinière Général Teste outre l'indemnité de soixante dollars pour le temps qu'elle a été détenue dans le port.
  8. La punition de certains écoliers dont la conduite impie à l'église a occasionné des plaintes.
  9. Le déplacement du gouverneur d'Hawaï qui a autorisé l'effraction du domicile d'un prêtre par des policiers pour procéder à une arrestation ou l'ordre que le gouverneur indemnise le missionnaire.
  10. Le paiement, à un gardien d'hôtel français, des dommages commis dans sa maison, par les matelots du SMB [Sa Majesté Britannique] depuis le navire Amphitrite.

Tromelin fit tourner les canons de ses navires vers la ville d'Honolulu le pour appuyer ses demandes. Devant cette menace, le navire américain Le Prebble s'apprêta à livrer bataille aux vaisseaux français. Tromelin, sans attendre de réponse du Roi, quitta le territoire hawaïen le [3] en compagnie de Dillon.

Conséquences

Les ambitions de la France n'avaient jamais été d'envahir et d'annexer Hawaï[1]. Mais la menace française persistante sur les Îles Hawaï conduisirent les Américains, les Britanniques et les Français à signer de nouveaux traités avec Hawaï (dont celui avec la France en 1859-1860 qui réglait les conflits antérieurs) d'une part et à équilibrer leurs rapports de force concernant une éventuelle annexion[1].

Avec l'expansion des États-Unis vers le Pacifique, le territoire américain se approcha géographiquement des Îles Hawaï, et les liens entre les deux nations s'accrurent au point de terminer par l'annexion d'Hawaï par les États-Unis le .

Références

  1. Christian Huetz de Lemps, « La France et les Français aux îles Hawaii au XIXe siècle », Outre-Mers. Revue d'histoire, vol. 76, no 284, , p. 131–141 (DOI 10.3406/outre.1989.2746, lire en ligne, consulté le )
  2. Paul Huetz de Lemps, « Les Français acteurs et spectateurs de l’histoire de Hawaii (1837-1898) », sur theses.enc.sorbonne.fr (consulté le )
  3. Jean Charlot, « Le « Journal » du Picpucien Louis Maigret, 1804-1882, Évêque d'Arathie et Vicaire Apostolique des îles Sandwich. Notes et analyses », Journal de la Société des Océanistes, vol. 25, no 25, , p. 320–335 (DOI 10.3406/jso.1969.2271, lire en ligne, consulté le )

Bibliographie

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