Islamophobie

L'islamophobie est un terme polysémique qui se définit étymologiquement comme la peur ou la crainte de l'islam, mais dont le sens peut aussi désigner la notion d'une hostilité envers l'islam ou les musulmans, sans qu'un consensus ne soit aujourd'hui dégagé.

Manifestation islamophobe le à České Budějovice en Tchéquie, organisée par le mouvement anti-immigration « Nous ne voulons pas de l'islam en République tchèque (cs) »[1],[2].

En France, la Commission nationale consultative des droits de l'Homme (CNCDH) définit l'islamophobie comme : « l'attitude d'hostilité systématique envers les musulmans, les personnes perçues comme telles et/ou envers l'islam »[3]. Ainsi, l'islamophobie est dans cette définition acceptée comme un phénomène de stigmatisation et de xénophobie à l’encontre des musulmans[4]. Cette acception est utilisée par plusieurs institutions intergouvernementales telles que le Conseil de l'Europe, et organisations internationales de lutte contre les discriminations ainsi que par une bonne partie de la presse francophone. Cette définition est également partagée par le Canada[5],[6].

Pour certains critiques, l'islamophobie est un terme qui peut  en confondant la haine envers les musulmans et la critique de l'islam  mettre sur un même plan racisme envers les musulmans (un acte délictueux) et critique de la pratique religieuse (« autorisée dans une société laïque »[3]) ; « Ceux qui utilisent ce mot-là s'en servent pour empêcher de critiquer l'islamisme et le communautarisme que je dénonce » estime ainsi le ministre de l'intérieur français Christophe Castaner, en 2019[3],[7],[8],[9].

Après les attentats du 11 septembre 2001, des études montrent une augmentation des actes islamophobes[10], aussi bien aux États-Unis qu'en Europe. Des associations ont été créées dans différents pays pour en défendre les victimes. De nombreuses attaques et violences sont suscitées par l'islamophobie. Parmi les plus marquantes se trouvent l'attentat contre deux mosquées à Christchurch (51 morts et 49 blessés), l'attentat de la grande mosquée de Québec (six morts et plusieurs blessés) [11],[12],[13],[14].

À la suite d'une résolution de l'Assemblée générale des Nations unies, le 15 mars est la journée internationale de lutte contre l'islamophobie[15].

Étymologie

Le terme « islamophobie » est composé de islamo- , préfixe des mots en rapport avec l'islam, de l'arabe الإسلام, Alʾislām (« la soumission ») et de -phobie, suffixe [16] du grec ancien φόβος, phóbos effroi, peur »[17] ou « crainte angoissante »[18]).

Définition et sens

Définitions

  • Le Petit Robert introduit le mot dans son édition 2006. Dans celle de 2014, de même que dans Le Grand Robert dans son édition 2015[19], il le définit, comme le dictionnaire Larousse[20], comme l'« hostilité envers l'islam, les musulmans ».
  • La Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH) définit l'islamophobie comme : « l'attitude d'hostilité systématique envers les musulmans, les personnes perçues comme telles ou envers l'islam »[21],[3]. Ainsi, l'islamophobie est dans cette définition acceptée comme un phénomène de stigmatisation et de xénophobie à l’encontre des musulmans[4].
  • L'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) définit la notion comme : « une forme contemporaine de racisme et de xénophobie motivée par la peur infondée, la méfiance et la haine des musulmans et de l'islam. L'islamophobie se manifeste aussi par l'intolérance, la discrimination, l'inégalité de traitement, les préjugés, les stéréotypes, l'hostilité et le discours public défavorable. Différencier du racisme et de la xénophobie classique [sic], l'islamophobie est principalement basée sur la stigmatisation d'une religion et ses adeptes, et en tant que telle, l'islamophobie est un affront aux droits de l'homme et de la dignité des musulmans »[22].
  • Le Conseil de l'Europe présente l'ouvrage L'Islamophobie et ses conséquences pour les jeunes (2005), en résumant : « L'islamophobie peut se définir comme la peur, ou une vision altérée par des préjugés, de l'islam, des musulmans et des questions en rapport. Qu'elle se traduise par des actes quotidiens de racisme et de discrimination ou des manifestations plus violentes, l'islamophobie est une violation des droits de l'homme et une menace pour la cohésion sociale »[23].
  • L'Encyclopédie canadienne définit l'islamophobie comme « une hostilité systématique envers les personnes musulmanes ou d’apparence musulmane ou envers l'islam »[10].
  • Le Congrès du travail du Canada définit l'islamophobie comme la « peur, haine et hostilité envers l’Islam et les musulmans propagées par des points de vue bornés qui attribuent aux musulmans des stéréotypes et des convictions négatifs et dénigrants »

Le Conseil de l'Europe, l’OSCE et l’UNESCO  qui éditent une brochure destinée à aborder l'islamophobie en milieu scolaire  écrivent que les termes « islamophobie » et « racisme anti-musulman » renvoient à la même notion d’« intolérance et de discrimination envers les musulmans »  cette dernière expression étant la plus fréquemment employée par les organisations inter-gouvernementales. « Le mot “islamophobie” est très courant dans les ONG, et apparaît fréquemment dans les médias ; il évoque la peur, la haine ou les préjugés à l’encontre de l’islam et des musulmans. L’expression “racisme anti-musulman” place l’intolérance envers les musulmans dans le cadre plus large du racisme, et assimile implicitement la religion à une race ». Les rédacteurs précisent : « Ces désignations sont souvent utilisées l’une pour l’autre, bien qu’elles ne soient pas synonymes et fassent ressortir des aspects différents du phénomène »[24].

Pour le Collectif contre l'islamophobie en France (CCIF), dissout par décret en date du 2 décembre 2020[25], il s'agissait de : « l’ensemble des actes de rejet, de discrimination ou de violence perpétrés contre des institutions ou des individus en raison de leur appartenance, réelle ou supposée, à la religion musulmane »[26].

De nombreuses attaques et violences sont suscitées par l'islamophobie. Parmi les plus marquantes se trouvent l'attentat contre deux mosquées à Christchurch (51 morts et 49 blessés) et l'attentat de la grande mosquée de Québec (six morts et plusieurs blessés)[11],[12],[13],[14].

Des sens multiples

Le terme d'islamophobie recouvre de nombreuses significations suivant ses locuteurs et les milieux ou il est employé.

Dans les pays occidentaux, le terme peut désigner une attitude xénophobe, à l'encontre des musulmans (d'où le néologisme d'« islamalgame » inventé par de jeunes français d'ascendance nord-africaine[27]) et par amalgame, des résidents et nationaux d'origine arabe ou maghrébine, voire française comme les harkis[28]. En pratique, les concepts d'islamophobie et de racisme peuvent se trouver associés par une partie de la population et par suite difficiles à dissocier pour ces personnes.

Pour Doudou Diène, rapporteur spécial des Nations unies, le terme islamophobie se « réfère à une hostilité non fondée et à la peur envers l’islam, et en conséquence la peur et l’aversion envers ceux qui se réclament de cette mouvance. Il se réfère également aux conséquences pratiques de cette hostilité en termes de discrimination, préjugés et traitement inégal dont sont victimes des musulmans (individus et communautés) et leur exclusion de sphères politiques et sociales importantes. Ce terme a été inventé pour répondre à une nouvelle réalité: la discrimination croissante contre les musulmans qui s’est développée ces dernières années »[29].

Pour Thomas Deltombe, « en fonction des définitions possibles des mots utilisés, on doit bien distinguer deux positions : l'islamophobie de type raciste (« musulman » comme catégorie ethnique) ou « xénophobe » (l'islam comme élément « étranger ») et la critique légitime des dogmes religieux, quels qu'ils soient »[30]. Ainsi, d'après ce journaliste, l'islamophobie pourrait soit désigner un racisme soit la critique de la religion musulmane.

Origines et usages

Premières apparitions au début du XXe siècle

Plusieurs chercheurs ont montré que le mot « islamophobie » est attesté en France dès le début du XXe siècle[31],[32],[33],[8].

Le FASOPO (Fonds d'analyse des sociétés politiques) indique en avril 2020, dans une publication de sa revue Sociétés politiques comparées[31], signée de l'historien Jean-Louis Triaud, que le mot (et non la chose) apparaît bien, pour la première fois, dans une thèse de doctorat présentée le 25 mai 1910 à la faculté de droit de Paris par Alain Quellien, jeune docteur en droit et rédacteur au ministère des Colonies. Celle-ci sera publiée sous le nom de La Politique musulmane dans l’Afrique occidentale française[34]. Son auteur s'inspire largement des idées de Louis Gustave Binger, directeur des Affaires d'Afrique du même ministère, publiées en 1906 dans une brochure intitulée Le péril de l'islam[35] (d'abord publiée en 1891 sous le nom Esclavage, islamisme et christianisme).

Le terme islamophobie se retrouve dans d'autres publications de la même époque[note 1],[37], comme dans l'ouvrage Haut-Sénégal-Niger de 1912 de Maurice Delafosse[38],[note 2] ou dans un numéro de 1913 de la revue L'Évolution algérienne et tunisienne[40]. Dans tous ces ouvrages, il n'a pas le même sens. Il exprime parfois la peur et parfois l'hostilité, mais toujours à propos de l'islam et non des musulmans, due à une « méconnaissance des réalités de cette croyance » véhiculée par des préjugés négatifs[41].

Jean-Louis Triaud précise dans sa publication que ni Allain Quellien, ni Maurice Delafosse, même s'ils sont tous deux « colonialistes »[42], ne peuvent être « qualifié d'« islamophobe » »[43] dans le sens d'une hostilité à l'islam et/ou aux personnes de confession musulmane, à la différence d'autres acteurs de la Troisième République comme Gabriel Angoulvant, gouverneur de Côte d’Ivoire de 1908 à 1915, pour qui l'islamophobie est « un principe d’administration indigène »[44]. Il précise également que Maurice Delafosse ne peut pas être, non plus, taxé d'islamophilie car il est hostile à l'idée d'accorder une préférence aux musulmans par rapport aux animistes.

La thèse d'Alain Quellien

Dans son ouvrage paru en 1910[45], Alain Quellien définit l'islamophobie ainsi :

« L'islamophobie : il y a toujours eu, et il y a encore, un préjugé contre l'Islam répandu chez les peuples de civilisation occidentale et chrétienne. Pour d'aucuns, le musulman est l'ennemi naturel et irréconciliable du chrétien et de l'Européen, l’islamisme est la négation de la civilisation, et la barbarie, la mauvaise foi et la cruauté sont tout ce qu’on peut attendre de mieux des mahométans[46]. »

Convaincu de l'œuvre civilisatrice de la France en Afrique occidentale, il écrit : « L'influence et l'action européenne constitueront véritablement la cause déterminante du développement matériel, moral et intellectuel des races inférieures dont nous avons assumés l'éducation et l'accession à la civilisation »[47].

Il affirme également[48] que les valeurs morales de l'islam sont incontestables et que celui-ci sera « un des moyens favorables qui pourront améliorer les conditions d'existence des populations de ces régions ». La France devant tirer parti « des éléments islamisés de l'Afrique occidentale ».

L'islamophobie, à savoir la peur irrationnelle de l'islam d'une partie de la population française hexagonale qui ignorait tout de la vie et des cultures des populations vivant dans les colonies, est donc, pour Alain Quellien, un frein pour la France coloniale. Elle empêche celle-ci d'agir en concentrant l'attention sur des aspects incompris, peu analysés et/ou fantasmés de la religion musulmane (la guerre sainte, l'esclavage et notamment des « blancs », la polygamie, le fatalisme, le manque de fanatisme et la tolérance de l'islam soudanais). Il écrit, par exemple, dans le chapitre sur les reproches adressés à l'islam :

« La guerre sainte. Ce qui fortifie singulièrement le sentiment d'hostilité et de prévention à l'égard de l'islam, c'est que, dans ces dernières années, les européens ont eu très souvent des peuples islamisés qui les ont obligés à des luttes longues, pénibles et coûteuses. L'erreur vient du fait que l'on reporte la cause de ces guerres uniquement à l'islam[49]. »

Alain Quellien exprime également une condamnation sans appel des missions chrétiennes :

« À côté de ce succès incontestable de l’islamisme, le christianisme est remarquable par son échec presque absolu dans les mêmes régions. Les tentatives d’évangélisation des nègres donnent des résultats pitoyables et tout à fait disproportionnés avec les efforts considérables des missionnaires chrétiens[50]. »

L'objectif d'Alain Quellien était donc de rassurer, en développant un argumentaire positif sur l'islam et les musulmans et une analyse détaillées des rapports entre la France et les « populations islamisées », afin d'emporter l'adhésion des Français à la cause coloniale.

Avant la Seconde Guerre mondiale

Les sociologues Abdellali Hajjat et Marwan Mohammed[32], notent l'utilisation de l'expression « délire islamophobe » dès 1925 en France. Cette occurrence attestée du mot « islamophobe » se trouve dans l'ouvrage L’Orient vu de l'Occident, écrit par le peintre et essayiste Étienne Dinet et l'essayiste Sliman ben Ibrahim (Piazza-Geuthner, 1921, Paris). Les auteurs parlent alors de « délire islamophobe » au sujet d'une biographie de Muḥammad (traduit en Mahomet par les chrétiens au Moyen Âge) écrite par le père jésuite Henri Lammens.

Utilisation contemporaine

Son usage se répand dans le langage médiatique essentiellement à partir des attentats du 11 septembre 2001, à New York, des attentats de Madrid du 11 mars 2004 et des attentats des 7 et 21 juillet 2005 à Londres, qui, revendiqués par des islamistes, provoquent des réactions de rejet envers des musulmans dans plusieurs pays, principalement occidentaux[51],[52].

Pour les journalistes de L'Express, en  : « l'islamisme, comme hier le communisme, a ses aveugles et ses «idiots utiles» au sein des élites européennes. Leur machine de guerre idéologique est l' «islamophobie», terme avec lequel les mollahs iraniens dénoncent les femmes qui refusent le voile, et introduit en Europe, en 1998, par Tariq Ramadan. Destiné à soustraire l'islam au droit de critique que subissent depuis des siècles en Europe les autres religions, le mot sert surtout à culpabiliser tous ceux qui souhaitent réformer l'islam ou s'en émanciper »[53].

Contestation de la thèse du régime des mollahs iraniens

Caroline Fourest et Fiammetta Venner affirment, en 2003, que le mot a pour la première fois été utilisé en 1979 par les mollahs iraniens[54] pour justifier en 1990 la fatwa contre l'écrivain Salman Rushdie, pour condamner à mort Taslima Nasreen et plusieurs autres intellectuels musulmans pour des écrits jugés blasphématoires[55]. C'est ce qui leur fait dire que « [le] mot “islamophobie” a été pensé par les islamistes pour piéger le débat et détourner l’antiracisme au profit de leur lutte contre le blasphème. Il est urgent de ne plus l’employer pour combattre à nouveau le racisme et non la critique laïque de l’islam »[56],[57]. Cette affirmation, reprise par Manuel Valls, Pascal Bruckner et Valérie Boyer, a depuis été contestée par de nombreux travaux scientifiques et des vérifications indépendantes[58],[59].

Ainsi, les sociologues Marwan Mohammed et Abdellali Hajjat du CNRS mais aussi l'historien Alain Ruscio notent qu'il n'existe aucune preuve démontrant un usage du mot par des mollahs comme le prétend la thèse de Caroline Fourest : « Ces intellectuels médiatiques n’ont aucune preuve à l’appui de leur assertion. Il n’existe pas de réel équivalent à « islamophobie » en persan et en arabe, ce genre de néologisme étant très rare dans les deux langues ». La thèse de Caroline Fourest est ainsi une véritable « erreur factuelle [qui] a pourtant été reprise abondamment, comme s’il s’agissait d’une vérité historique » afin de rendre synonyme haine envers les musulmans et critique de la religion[8].

L'origine du mot remonte à 1910 avec Alain Quellien, Maurice Delafosse et Paul Marty. Le sociologue Vincent Geisser ajoute : « Mais il est vrai qu’après la révolution islamique de 1979, le régime iranien a joué de cette peur de l’islam, ou de cette prétendue peur de l’islam, de cette thématique de l’islamophobie, comme un outil de propagande, outil politique et géopolitique, mais comme la plupart des grands pays musulmans dont l’Arabie saoudite » et que son usage est du coup « contesté par des essayistes et intellectuels français qui y voient une opération de « manipulation logomachique » [manipulation verbale, NDLR] orchestrée par les mouvements islamistes pour faire taire toute critique à l’égard de la religion musulmane ». Selon l'AFP, la notion de « racisme antimusulman » est préférée par certains spécialistes[58].

Alice Géraud écrit, dans Libération, en 2013, que Caroline Fourest « balaie aujourd’hui cette histoire de référence aux mollahs iraniens »  elle leur avait précédemment attribué la première utilisation de l'expression en 1979 , et déclare :

« L’important, ce n’est pas de savoir si quelqu’un a parlé d’islamophobie il y a un siècle dans sa salle de bain, c’est le sens de ce mot. Elle concède cependant avoir l’impression d’avoir perdu la bataille sémantique. “Le mot va gagner parce qu’il est court, parce que personne ne prend le temps de réfléchir à son sens et que celui de 'racisme' est devenu ringard”. Elle regrette “qu’avec ce mot, les laïcs deviennent des racistes et les racistes passent pour des héros de la liberté d’expression”[60]. »

Critiques du terme

Critique du terme de « phobie »

La construction du néologisme à partir du suffixe « phobie » est critiquée car elle associe la notion d'idéologie  et son corollaire démocratique : le débat  à un concept de maladie mentale[61][source insuffisante].

Flemming Rose, rédacteur en chef du journal Jyllands-Posten qui a publié des caricatures de Mahomet déclare :

« Comme c'est astucieux qu’ayant créé le mot “islamophobie”, les pays musulmans puissent ainsi insinuer que critiquer l’islam — distincte de toute discrimination à l'encontre des personnes musulmanes — est une maladie, un fantasme malsain qui nécessite d'être soigné médicalement[62]. »

Caroline Fourest soutient que le mot homophobie n'a rien à voir avec le terme islamophobie (et donc par extension judéophobie) car le premier stigmatise une phobie envers des individus pour ce qu'ils n'ont pas choisi, ce qui constitue un racisme, et le dernier confond la haine de l'islam (et non des musulmans) avec le choix qu'il représente[63]. Sa position est donc la même que celle du HCI citée plus haut.

Confusion entre hostilité envers l'islam et les musulmans

Pour certains critiques, l'islamophobie est un terme confondant la haine envers les musulmans et la critique de l'islam, notamment en pouvant mettre sur un même plan racisme envers les musulmans et critique de la pratique religieuse[3]. Ainsi pour Régis Debray, l'usage du terme islamophobie s'apparente à un chantage qui amalgame la critique d'une religion avec l'injure faite aux fidèles de cette religion[64].

Didier Delaveleye, pour le Mouvement contre le racisme, l'antisémitisme et la xénophobie (MRAX), rappelle la construction du mot et le sens qui en découle : « En voilà un qui est au hit-parade des mots problèmes : l’islamophobie. Ce terme s’est imposé aujourd’hui pour désigner l’hostilité spécifique vis-à-vis de la population de religion ou d’origine musulmane. Toutefois, cette simple définition pose déjà un problème puisque littéralement, l’islamophobie ne désigne pas la crainte du musulman, mais la crainte d’une religion particulière, l’islam »[65].

Pour Meïr Waintrater, ancien directeur de la revue juive L'Arche, il ne faut toutefois pas se laisser « piéger par les mots » car « le terme d'islamophobie ne renvoie pas à une controverse au sujet de l'islam, mais à une mise en accusation systématique des musulmans, en tant que collectivité ou en tant que personnes – tout comme le terme d'antisémitisme a été inventé par des agitateurs antijuifs, dans le dernier quart du XIXe siècle, pour persécuter non pas d'hypothétiques “sémites” mais les Juifs et eux seuls. Islamophobie et antisémitisme, qui diffèrent par les conditions historiques de leur développement et par leurs logiques, ont ceci en commun que la mise en cause des individus y est dialectiquement liée à la représentation paranoïaque d'une collectivité »[66].

Le dessinateur Charb, assassiné dans l'attentat perpétré en janvier 2015 contre le journal Charlie Hebdo, dresse un « plaidoyer pour la laïcité, cet hymne aux combats contre le racisme et l’antisémitisme, un livre pédagogique qui devrait être lu dans toutes les écoles »[67], ou un « réquisitoire virulent » contre l'utilisation du mot « islamophobie » avec la « complicité des médias », dans un livre posthume intitulé Lettres aux escrocs de l'islamophobie qui font le jeu des racistes : « Si demain les musulmans de France se convertissent au catholicisme ou bien renoncent à toute religion, ça ne changera rien au discours des racistes : ces étrangers ou ces Français d'origine étrangère seront toujours désignés comme responsables de tous les maux. […] Les militants communautaristes qui essaient d'imposer aux autorités judiciaires et politiques la notion d'“islamophobie” n'ont pas d'autre but que de pousser les victimes de racisme à s'affirmer musulmanes »[68],[69].

Pour le politologue spécialisé de l'islam Gilles Kepel,

« [l'islamophobie] est un concept récent qui repose sur une ambiguïté dans la mesure où il se présente comme le symétrique de l’antisémitisme. Alors que la lutte contre l'antisémitisme criminalise ceux qui s'attaquent aux juifs sans empêcher pour autant la libre critique des textes sacrés, le combat contre l'islamophobie fait de toute réflexion critique sur l'islam un interdit absolu. L'ambiguïté entretenue par le CCIF et certaines associations antiracistes qui tendent à confondre antisémitisme et islamophobe est donc une imposture. La lutte contre l'islamophobie consiste à faire encore que la vision la plus rigoriste de l'islam ne puisse plus être mise à distance, y compris par les musulmans eux-mêmes, lesquels, le cas échéant, se font traiter d'apostats[70]. »

Pour l'essayiste Pascal Bruckner, le terme d'islamophobie relève de l’illusion et d'un « racisme imaginaire ». L'écrivain dénonce toutefois la haine envers les musulmans[71].

Pour l'universitaire Bernard Rougier, auteur des Territoires conquis de l'islamisme, « le terme islamophobie a précisément pour fonction d'empêcher de distinguer islam et islamisme »[72].

Islamophobie, synonyme de critique de l'islam ?

Selon l'intellectuel américain Edward Saïd, le terme « islam », tel qu'il est utilisé par les médias et les « experts », recouvre en effet des réalités politiques, sociales, géographiques extrêmement variées (et parfois contradictoires)[73].

Claude Imbert, membre du Haut Conseil à l'intégration (HCI), fondateur et éditorialiste de l'hebdomadaire Le Point, revendique être islamophobe[74] :

« Moi, je suis un peu islamophobe. […] Nous avons le droit de combattre le racisme, d’accepter une pratique paisible de l’islam. Et j’ai le droit, je ne suis pas le seul dans ce pays à penser que l’islam — je dis bien l’islam, je ne parle même pas des islamistes — en tant que religion apporte une débilité d’archaïsmes divers, apporte une manière de considérer la femme, de déclasser régulièrement la femme [et] en plus un souci de supplanter la loi des États par la loi du Coran, qui en effet me rend islamophobe[75]. »

Éric Conan, journaliste à L’Express, estime que le terme relève de la « guerre des mots »[76], qui serait prise dans une lutte idéologique, voire une guerre, au sein de l'islam lui-même, où l'islamisme en sous-main tendrait à imposer un point de vue contraire à la fois à la tendance strictement religieuse de l'islam et sa composante libérale.

Toutefois, la Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH) affirme qu'il est important d'utiliser le mot « islamophobie » pour désigner la haine envers les musulmans, comme elle explique dans son rapport annuel relatif à la lutte contre le racisme, l’antisémitisme et la xénophobie de l'année 2013[77] :

« La CNCDH est d’avis qu’il convient de nommer ce que l’on dénonce et souhaite combattre. C’est pourquoi, sans pour autant faire fi des impropriétés sémantiques ni occulter les risques d’instrumentalisation, elle a pris pour parti de désigner par le terme “islamophobie” ce phénomène rampant, dangereux, qui menace le “vivre ensemble” et appelle à toutes les vigilances[78]. »

Le Mouvement des musulmans laïques de France (MMLF) avec Kebir Jbil soutient qu’« en Iran et au Soudan, pour éliminer les musulmans progressistes, il suffit de les qualifier d’islamophobes. Ainsi, ce terme ne désigne pas un racisme, mais stigmatisme toutes celles et tous ceux qui résistent à l’islam radical et archaïque »[réf. nécessaire].

Pour le sociologue Jean-Pierre Le Goff, « tout un courant intellectuel gauchisant » aurait, au nom de la lutte contre l'islamophobie, accusé « la République, la laïcité et notre propre histoire de tous les maux, renforçant le sentiment victimaire et le ressentiment existant chez une partie de nos compatriotes musulmans ». De cette manière se serait créée « une police de la pensée et de la parole » traitant nombre d'intellectuels et de journalistes d'« islamophobie », « faisant pression et rendant plus difficile toute critique, toute réflexion et débat sur l'islam et son adaptation difficile à la civilisation européenne, réflexion et débat indispensables à son intégration »[79].

La chroniqueuse Sophia Aram, dans son billet du 26 octobre 2020 sur France Inter, va dans le même sens que le sociologue Jean-Pierre Le Goff. Elle déclare : « Franchement, à ce niveau de haine à l’égard du modèle laïc français, on pourrait presque parler de koufarophobie. Oui la koufarophobie, la haine de tous ceux qui défendent un autre modèle que l'islamisme »[80].

Blasphème

Selon le Bondy Blog, lors d'un colloque ayant eu lieu à l'École supérieure de gestion en mars 2009, Dominique Sopo explique que « le terme islamophobie […] n’est qu’un prétexte religieux tentant de nous retirer notre droit au blasphème[81]. »

Selon la revue Humanisme :

« La notion d’islamophobie — destinée à légitimer en France le retour d’un délit de blasphème aboli en 1791 — rassemble bien au-delà de la mouvance anticapitaliste[82]. »

Après l'attaque terroriste islamiste contre Samuel Paty en 2020, François-Xavier Bellamy déclare « L'islamophobie est un concept dangereux qui voudrait réinstaurer le délit de blasphème[83]. »

Islamophobie, manipulation idéologique ?

En 2019, dans son ouvrage Islamophobie. Intoxication idéologique[84], Philippe d'Iribarne, économiste et anthropologue, directeur de recherche du laboratoire « gestion et société »[85] du CNRS, développe l'idée que le mot islamophobie est une manipulation qui nuit à la paix civile et empêche d'exercer son esprit critique. Selon lui cette notion « est un leurre forgé pour empêcher la compréhension du réel et interdire à l’esprit critique d’exercer ses droits. Pour ses adeptes, rien ne doit être porté au crédit des Français d’ascendance européenne, cependant que les Français musulmans sont par principe exempts de tout reproche »[86]. Le journal La Croix juge la thèse d’Iribarne « intéressante. Selon lui, loin d’être le signe d’un rejet global de l’islam comme religion, les signes de méfiance qui s’expriment en France et ailleurs traduisent la conscience de la nature « duale » de l’islam : « Ce qui renvoie à une démarche spirituelle » (comme le jeûne du Ramadan) est « bien accueilli ». « Mais ce qui relève de l’emprise d’un ordre islamique est rejeté – au premier chef la ségrégation des sexes, la soumission des femmes et ce qui les symbolise ». […] Mais peut-on affirmer comme lui que « les sociétés occidentales portent en réalité un regard fort nuancé sur l’islam, distinguant clairement ses diverses manifestations » ? »[87].

Violences et attaques motivées par l'islamophobie

Des actes violents de haine contre les musulmans sont souvent motivés par l'islamophobie. Plusieurs sociologues, tels que Nonna Mayer ou le chercheur Vincent Tiberj, spécialiste de l'influence des attentats sur l'opinion publique[88], ont démontré que les violences islamophobes connaissent souvent une recrudescence à la suite d'attentats commis par des terroristes islamistes, particulièrement en France[89],[90].

Attaques et attentats terroristes islamophobes

Commémoration en la mémoire de Marwa El-Sherbini, assassinée le par un terroriste islamophobe sous les yeux de son fils de trois ans alors qu'elle était enceinte.
Commémoration en la mémoire des 51 victimes — âgées de 3 à 78 ans — mortes dans un attentat terroriste islamophobe commis à Christchurch, en Nouvelle-Zélande, le .
  • Le , dans la ville de Dresde, Marwa El-Sherbini, alors enceinte, est assassinée par un terroriste islamophobe en plein procès à la suite d'attaques islamophobes[91], sous les yeux de son mari et de son fils de trois ans. Le crime est qualifié de « clairement raciste et islamophobe »[92].
  • Dans la nuit du 18 au , la mosquée de Finsbury Park à Londres est la cible d'un attentat terroriste islamophobe[93]. Un terroriste fonce avec une voiture-bélier sur les civils musulmans en plein mois de Ramadan alors qu'ils sortaient du lieu de culte, tuant une personne et en blessant dix[94],[95]. L'assassin était « devenu obsédé par les musulmans » et « a prévu et conduit cette attaque en raison de sa haine des musulmans », d'après la sentence du tribunal qui le condamne à l'emprisonnement à perpétuité pour cette attaque terroriste islamophobe[94],[96].
  • Le , dans la ville de Christchurch en Nouvelle-Zélande, un terroriste ouvre le feu sur des civils dans deux mosquées. Fusillant toutes les personnes dans les lieux de culte, le terroriste fait 51 morts  âgés de 3 à 78 ans  et 49 blessés. Le procès réveléra l'adhésion de l'auteur de l'attentat à de multiples thèses islamophobes qu'il développe dans un long manifeste haineux[97]. Cet attentat terroriste amène plusieurs pays à combattre la propagation de l'islamophobie[98],[99]. À la suite de la tuerie, les violences islamophobes augmentent significativement, notamment à Londres où le nombre d'attaques islamophobes enregistré par la police double en un mois[100].
  • Le , une mosquée de la ville de Bayonne et victime d'un attentat terroriste dont l'auteur est reconnu pour son islamophobie[101]. Cette attaque mène à une multiplication des actes islamophobes en France les jours suivants[102].

En France

  • Le , une mosquée à Cholet est la cible de menaces de morts islamophobes taguées[103].
  • Le , la mosquée de Tarbes est la cible de tags islamophobes[104]. Le maire de la ville ainsi que le préfet se rendent sur place[105].
  • Le , une mosquée de Bordeaux a des vitres brisées et est recouverte de tags islamophobes[106],[107]. À la suite de cet acte islamophobe, Gérald Darmanin demande au préfet de renforcer la protection de ce lieu de culte[108],[109],[110].
  • Le , le centre culturel Avicenne à Rennes est peinte de tags islamophobes[111],[112]. Le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin annonce sa venue sur les lieux, tandis que plusieurs responsables condamnent ces actes haineux et expriment leur solidarité avec les musulmans[113].

Rapport entre islamophobie et racisme

Dans son rapport de mars 2008, l’observatoire de l’Organisation de la coopération islamique sur l’islamophobie estime que celle-ci a pris récemment de l'ampleur dans les pays occidentaux. Il se peut qu'il fasse référence à la période qui a suivi les attentats du 11 septembre 2001 à New York, du 11 mars 2004 à Madrid, du 7 juillet 2005 à Londres[114].

La raison de l'opposition à l'usage du terme est explicitement énoncée lors du désaccord entre le MRAP et le syndicat d'enseignants, Unsa-Education, qui comme d'autres syndicats et organisations laïques, telle la Ligue internationale contre le racisme et l'antisémitisme (Licra), ont refusé la demande du MRAP en faveur de l'usage du terme « islamophobie », et ce, à l'occasion de la « semaine d'éducation contre le racisme à l'école » (21-26 mars 2005).

En France, la Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH) remet en mars 2004 un rapport au premier ministre où on peut lire que « certains courants intégristes tentent d'obtenir la requalification du racisme anti-maghrébin en islamophobie pour mieux tirer bénéfice des frustrations, jouer sur les replis identitaires religieux de la population d'origine maghrébine et faire du religieux le critère absolu de différenciation, de partage. Il faut donc manier ce terme avec la plus grande précaution »[115].

Le Haut Conseil à l'intégration français rappelle qu'« en République, la critique de la religion, comme de toutes les convictions, est libre, est constitutionnellement garantie et fait partie de la liberté d’opinion et d’expression, et ne saurait être assimilée au racisme et à la xénophobie[116]. »

Certains refusent l'assimilation au racisme qui est parfois faite, expliquant que l'islam se choisit, à l'inverse des origines ethniques. Des observateurs et analystes, qui contestent l'emploi du terme, considèrent que cette notion contribue à propager un amalgame voulu entre religion, ethnie, et culture, amalgame qui contribue à transformer la crainte initiale en racisme. Entretenant la confusion dans les esprits et amalgamant la religion à l’origine ethnique, le concept d’islamophobie, sous couvert de lutte contre le racisme, sanctuarise l'islam[117].

Selon Anne-Marie Thiesse, le terme « musulman » aurait longtemps désigné, en France, durant la période coloniale, non pas une catégorie religieuse mais une catégorie ethno-raciale : les Arabo-Berbères d'Afrique du Nord, qu'ils soient ou pas de confession musulmane[118]. Cette définition ethno-raciale est encore parfois utilisée pour désigner des personnes qui ne sont pas de confession musulmane mais en référence à leur origine arabo-berbère. Ainsi, selon Vincent Ferry et Piero-Galloro, pour Nicolas Sarkozy, le terme « musulman » « n'a aucune connotation religieuse » mais une connotation ethnique[119].

Ce type de proposition, où la foi religieuse individuelle disparaît derrière une catégorisation ethnicisante, favorise les glissements sémantiques entre, par exemple, « arabes », « musulman » et, par suite, « islamistes ». Ainsi peut se développer, sous couvert d'une critique de la foi et des dogmes religieux, ce que le sociologue Saïd Bouamama appelle « un racisme respectable »[120].

Vincent Geisser, chercheur à l'Institut de recherches et d'études sur le monde arabe (IREMAM et CNRS) est l'auteur du livre La Nouvelle Islamophobie. L'ouvrage, plaidoyer en faveur de l'adoption du terme d'islamophobie en France. Selon lui, celle-ci « s'ancre très profondément dans la mémoire de l'Algérie coloniale ». Pour lui[121],[122], « l'islamophobie n'est pas une résurgence de la vieille problématique croisade/jihad - même si l'on peut relever ici ou la des traces théologiques - mais constitue bien un racisme antimusulman profondément moderne. » C'est dans ce sens qu'elle est dénoncée en France[123]. Tout comme l'antisémitisme, l'islamophobie inciterait à des profanations[réf. nécessaire].

Pour Élisabeth Badinter, « il ne faut pas avoir peur de se faire traiter d'islamophobe »[124]. Elle dénonce l'assimilation délibérée entre islamophobie et racisme : « On ferme le bec de toute discussion sur l'islam en particulier ou d'autres religions avec la condamnation absolue que personne ne supporte : “Vous êtes raciste ou vous êtes islamophobe, taisez-vous !” Et c'est cela que les gens ne supportent plus : la peur, pour des gens de bonne foi, qu'on puisse penser que vous êtes raciste ou anti-musulman fait que vous vous taisez. C'est la meilleure arme qu'on pouvait trouver à l'égard des gens de bonne foi ». La philosophe appelle à « combattre au maximum le racisme, l'antisémitisme, le racisme antimusulman, etc. » Mais elle insiste sur l'islamophobie : « Je me suis aperçue depuis quelques années que c'est la phrase clé qui arrête tout et je veux pouvoir, comme beaucoup d'autres, discuter d'une religion, de toutes les religions. Donc je ne veux pas qu'on me ferme la bouche avec ça ».

Organisations contre l'islamophobie et pour la défense des victimes

Manifestation contre l'islamophobie, le , à Belfort.

Des organisations, contre les discriminations ou le racisme en général, luttent contre l'islamophobie ; d'autres ont été créées spécifiquement dans ce but. Après les attentats du 11 septembre 2001, des études montrent une recrudescence d'agressions islamophobes, aussi bien aux États-Unis[125],[126] qu'en Europe[127]. Certaines associations ont été créées pour en défendre les victimes.

Canada

  • En 2013, le Collectif québécois contre l'islamophobie et le Conseil musulman de Montréal exigent du gouvernement du Québec des actions concrètes pour lutter contre l'islamophobie[128].
  • En 2017, en réaction à l'attentat de la grande mosquée de Québec, une coalition d’une quarantaine d’associations musulmanes a réclamé des mesures pour lutter contre l’islamophobie[129].
  • Des groupes ont demandé en 2018 et 2019 que le 29 janvier soit désigné Journée nationale de commémoration et d’action contre la haine et l’islamophobie : le Conseil national des musulmans canadiens, les Canadiens pour la Justice et la Paix au Moyen-Orient, et le Forum musulman canadien, soutenus par une centaine d'associations telles que l'Association des musulmans et des Arabes pour la laïcité au Québec, l'Église anglicane du Canada, le Centre culturel islamique de Québec et l'Église unie du Canada[130].
  • Le Collectif canadien anti-islamophobie, dirigé par l'imam controversé Adil Charkaoui, a été critiqué pour des liens avec des idéologies extrémistes[131].

États-Unis

L’association Council on American-Islamic Relations (en) (CAIR) a pour but, entre autres, de lutter contre la haine dont les musulmans peuvent être la cible aux États-Unis[132]. Le CAIR a été accusé de poursuivre un agenda islamiste[133],[134],[135], d'être lié au Hamas[136] et aux Frères musulmans[135],[137]. Ce que l'association a contesté et décrit comme une campagne de dénigrement[136],[138]. Cette association a été mentionnée en 2014 parmi une liste d'organisations terroristes par les Émirats arabes unis[139], ce qui n'a alors pas manqué de surprendre de « nombreux analystes » selon The Washington Post[140].

Europe

Belgique

  • Collectif contre l'islamophobie en Belgique (CCIB)

France

  • Collectif contre l'islamophobie en France (2003) ; dissous par décret en décembre 2020, en tant que « groupement de fait »[141],[142],[note 3]. Selon Mediapart : « Mettant à exécution sa menace du 19 octobre dernier, au lendemain de l’assassinat de Samuel Paty, Gérald Darmanin a obtenu la dissolution du Comité contre l’islamophobie en France (CCIF), prononcée ce mercredi en conseil des ministres. […] Trois reproches principaux [se dégagent du décret motivant la dissolution] : la façon dont le collectif définit et utilise le concept d’islamophobie ; ses fréquentations « radicales » ; son inaction dans la modération des commentaires suscités par ses publications »[143].
  • Coordination contre le racisme et l'islamophobie (2008)[144] ; organisation dissoute en octobre 2021[145] en raison d'appels « à la haine, à la violence et à la discrimination »[146].
  • Contre-attaques[147] (1er septembre 2015).

Royaume-Uni

  • Tell MAMA (en)
  • Forum Against Islamophobia and Racism (en) (FAIR), organisation caritative créée en 2001 pour combattre l’islamophobie et le racisme[148].

Organisations islamophobes

Il existe à travers le monde des organisations qui militent contre l'islamisation, créées selon des motivations diverses, avec des discours plus ou moins haineux, voire des actes de violence. Elles peuvent être qualifiées d'islamophobes.

Birmanie

Chine

États-Unis

Le CAIR (en) et l'université de Californie à Berkeley ont publié un rapport identifiant une trentaine d'organisations contribuant à la promotion de la haine envers l'islam et les musulmans aux États-Unis[154], parmi lesquelles :

Europe

  • Stop Islamisation of Europe (SIOE) (en)[155]. Organisation créée au Danemark en 2007.

Danemark

  • Stop Islamisation of Denmark (en)

Norvège

République tchèque

  • Nous ne voulons pas de l'islam en République tchèque (cs)[157],[158]

Sri Lanka

Perceptions mondiales

Selon le rapport spécial[29] du Conseil des droits de l'homme des Nations unies,  établi en 2008 par Doudou Diène  l'islamophobie, bien que le terme soit récent, a existé dès les « premiers contacts de l’islam avec les autres religions et cultures » et a augmenté sensiblement après certaines réactions aux attentats du 11 septembre 2001. L'islamophobie, dans l'acception de «racisme anti-musulman», est sous-jacente à l'utilisation du terme de « choc des civilisations », utilisé par Samuel Huntington, par nombre d'hommes politiques et d'intellectuels qui opposent un « islam global » respectant à la lettre les prescriptions de la charia, à un « Occident » mettant l'accent sur les droits de l'homme.

En 2004, une conférence des Nations unies[161] a eu pour thème les phénomènes de violence envers des musulmans et la recherche de moyens pour combattre l'islamophobie.

Australie

En 2006, le Sunday Herald Sun a publié un sondage commandé auprès de l'institut Gallup, publié le 30 juillet, indiquant que 40 % des Australiens interrogés estiment que l'« islam est une menace à leur mode de vie », et qu'un sondé sur trois craint davantage les musulmans depuis le 11 septembre 2001[162]. Un sondage similaire de mars 2006 établit qu'un quart des personnes interrogées voient l'islam comme « une croyance intolérante ou fondamentaliste ». Cependant, l'un des chercheurs à l'origine de cette étude, Kevin Dunn, de la New South Wales University, affirme que ces personnes se sentent moins menacées par l'islam quand elles ont des contacts directs avec les pratiquants de cette religion[163].

États-Unis

Le panneau au premier plan : « Aucune mosquée dans la zone du ground zero. Préservons la dignité de nos morts en ce lieu. »
Au second plan : « Qu'est-ce qui rendrait le terroriste Oussama ben Laden plus heureux qu'une mosquée bâtie sur les cendres de ses victimes ? »

L’islamophobie progresse aux États-Unis après les attentats du 11 septembre 2001. Les actes islamophobes se sont multipliés à travers les États-Unis, comme des magasins qui refusent de servir les clientes qui portent le voile islamique[164], ou encore des cas d'extrêmes violences allant parfois à la tentative de meurtre contre les musulmans à cause de leur religion[165],[166].

Une étude sortie en 2006 montre que l'islamophobie aux États-Unis était en expansion fulgurante, alors qu'avant le 11 septembre 2001, 24 % des Américains déclaraient avoir une attitude anti-islamique, c'est ensuite plus de 46 % d'entre eux qui, en 2006, déclaraient être anti-islamiques[167].

En 2015, 55 % des Américains ont une opinion défavorable des musulmans selon un sondage[168].

L'islamophobie se ressent à travers les actions médiatiques de pasteur Terry Jones, créateur en 2010 de la International Burn a Koran Day (journée internationale du brûlage de Coran)[169] qui consiste à brûler le Coran chaque 11 septembre[170],[171],[172].

Europe

La Commission européenne et l'Observatoire européen des phénomènes racistes et xénophobes (EUMC) ont organisé à l'automne 2003 une table ronde de réflexion sur l'antisémitisme, l'islamophobie et les possibilités de réconciliations entre les communautés[173]. Le terme est aussi utilisé par le Conseil de l'Europe[174] à la demande de la Turquie qui introduit le terme à la fin de la conférence[réf. nécessaire].

L'EUMC dans une étude intitulée « Les musulmans au sein de l'Union européenne: discrimination et islamophobie » et publiée courant décembre 2006, souligne que certains musulmans de l'Union européenne sont victimes de discrimination en matière d'emploi, de logement et d'éducation. Les actes islamophobes, allant d'insultes à des agressions physiques et incendies criminels[175].

Le sociologue Raphaël Liogier dénonce le mythe paranoïaque de l’islamisation, lequel conduit à une obsession collective qui voit « un complot musulman visant à détruire l’Europe, à faire disparaître sa culture », d'où des réactions islamophobes[style à revoir][176].

Le Conseil de l'Europe, l’OSCE et l’UNESCO publient une brochure destinée à lutter contre l’intolérance et les discriminations envers les musulmans dans le monde scolaire[177].

Allemagne

Selon un sondage réalisé en avril 2016, pour 43 % des Allemands interrogés, la présence d’une communauté musulmane est « plutôt une menace pour l’identité de l'Allemagne »[178]. En 2010, cette proportion était de 40 %[179].

Belgique

Dans ce pays où les questions relatives à la place de l'islam dans la société sont fréquemment abordées, le Mouvement contre le racisme, l'antisémitisme et la xénophobie (MRAX, homologue belge du MRAP français), fait de la lutte contre l'islamophobie une de ses priorités et a organisé en 2009 et en 2010 plusieurs colloques sur le sujet, les Assises sur l’islamophobie, dans le cadre des Assises de l'interculturalité voulues par le gouvernement fédéral[180],[181].

Espagne

Une enquête du Real Instituto Elcano en Espagne indique que 68 % des personnes interrogées considèrent les sociétés musulmanes comme « violentes », et 79 % comme « non tolérantes ». 74 % pensent également qu'il existe déjà un choc des civilisations entre les pays occidentaux et le monde musulman[182].

France

Dans son livre L'Islam imaginaire, la construction médiatique de l'islamophobie en France (1975-2005)[183], Thomas Deltombe pense que si le terme « islamophobie » était peu utilisé à l'époque, certains journalistes étaient conscients, dès les années 1980, de la montée du phénomène. Le patron du Nouvel Observateur, Jean Daniel, accusa par exemple en 1983 le gouvernement socialiste de

« nourrir cet anti-islamisme indistinct et de moins en moins honteux que l'on voit refleurir, surtout d'ailleurs, hélas !, dans les couches populaires, en France et en Europe[184]. »

De même, à la suite de l'affaire des « tchadors » de Creil en 1989, Jacques Julliard estima que :

« l'argument anti-islamique est de longue date un alibi commode qui habille de respectabilité la haine de l'Arabe et le refus de l'accueillir[185]. »

Thomas Deltombe décrit l'implication des médias français dans ce qu'il appelle « la peur, souvent haineuse » de la religion musulmane. Selon lui, il y a « trois éléments clés de la peur de l'islam : le traumatisme de la guerre d'Algérie, la visibilité de la religion musulmane et la crainte de l'islamisation des modes de vie »[186] qui auraient repris de la vigueur avec l'émergence du terrorisme islamiste dans les années 1990 en France (campagne terroriste des Groupes islamiques armés, ou GIA algériens) et après les attentats du 11 septembre 2001 aux États-Unis. Des personnalités telles que Alain Gresh[187] ou Jean Baubérot dénoncent l'islamophobie, qu'ils conçoivent comme un amalgame entre croyants et intégristes, fondée sur une interprétation belliciste du Coran[188], et qui sous prétexte de protection de la liberté d'expression, dégénère en xénophobie.

Le Front national diffuse sa première affiche islamophobe en 1987 à l'initiative de Jean-Pierre Stirbois ; celle-ci est cependant dépourvue du logo du FN. Le parti réinvestit la thématique à partir de 2010[189].

En 2003, Caroline Fourest estime que le terme d'islamophobie est instrumentalisé à des fins de prosélytisme en vue d'interdire le blasphème[190]. La même année, la Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH) publie une étude Intolérance et violences à l'égard de l'islam dans la société française :

« À travers cette étude spécifique aux phénomènes d'hostilité à l'égard de l'islam, la CNCDH s'attache à étudier en toute neutralité les rapports complexes entre racisme, xénophobie et islam. Il s'agit de faire la part des fantasmes et d'identifier, dans ce débat piégé, s'il existe une dimension spécifiquement religieuse qui permettrait d'isoler une réelle « islamophobie », notion qui ne semble pas avoir trouvé de définition précise et qui tend souvent à se confondre avec le racisme anti-maghrébin. Cette étude aborde successivement la question de la terminologie concernant l'islamophobie, celle de l'évaluation de l'hostilité française à l'égard de l'islam, celle de la liberté d'expression religieuse pour les musulmans, puis définit les causes et vecteurs de cette hostilité ainsi que les moyens de lutter contre elle[191]. »

À Alger, le 3 décembre 2007, le président français Nicolas Sarkozy fait un parallèle entre l'islamophobie et l'antisémitisme :

« En France comme en Algérie, nous devons combattre avec une détermination sans faille toute forme de racisme, toute forme d'islamophobie, toute forme d'antisémitisme. Il n'y a rien de plus semblable à un antisémite qu'un islamophobe. Tous deux ont le même visage : celui de la bêtise et de la haine. […] Le racisme, l'islamophobie et l'antisémitisme ne s'expliquent pas. Ils se combattent. Ce qui vaut pour la France vaut partout ailleurs dans le monde[192]. »

En 2008, dans l'affaire des caricatures de Mahomet par le journal Charlie Hebdo, la justice n'a pas retenu de caractère délictuel à cette publication que certains ont estimé « islamophobe ».

Jean-Paul Gourévitch définit en 2011, dans son ouvrage La Croisade islamiste : pour en finir avec les idées reçues[193], les « grands axes de la stratégie islamophobe » qui, selon lui, « s'apparente largement par ses procédés à la stratégie des islamistes » :

  • « la certitude de mener le bon combat pour l'avenir de la République et du monde tout entier » ;
  • « la dénonciation systématique de l'entrisme de l'islamisme dans les organisations musulmanes » ;
  • « la dénonciation systématique des complaisances des médias vis-à-vis de l'islamisme, quand ils passent sous silence des faits avérés, les maquillent, ou montent en épingle des anecdotes lourdes de symboles » ;
  • « la dénonciation systématique des complaisances que les politiques et les administrations auraient à l'égard des islamistes » ;
  • « la diabolisation de l'adversaire à qui on ne prête qu'un seul dessein, la domination du monde, et dont on grossit l'influence en amalgamant au noyau dur la constellation de ses satellites et la nébuleuse de ses réseaux » ;
  • « le refus du compromis. Il n'y a pas d'islamistes modérés. Ceux qui se prétendent tels font le jeu des radicaux. Islam et islamisme sont semblables et tous deux à combattre ».

Alain Finkielkraut déclare en 2013 :

« La haine ou le rejet des musulmans existent et doivent être combattus sans relâche. Mais le concept d'islamophobie relève de la terreur intellectuelle. Est aujourd'hui considéré comme islamophobe celui qui veut que les musulmans se soumettent aux lois de la République. Car il s'agit pour ceux qui manient ce vocable comme un gourdin de soumettre la République à leurs exigences[194]. »

Dans son essai de 2017, Un racisme imaginaire, Pascal Bruckner écrit :

« L'accusation d'islamophobie n'est rien d'autre qu'une arme de destruction massive du débat intellectuel. Nous sommes les témoins depuis vingt ans de la fabrication d'un nouveau délit d'opinion, analogue à ce qui se faisait, jadis, dans l'Union soviétique contre les « ennemis du peuple ». Les gardiens du dogme veillent de façon sourcilleuse sur la moindre transgression ou allusion. Le simple fait d'évoquer un « problème musulman » vous vaut les foudres des censeurs et des menaces de procès[195]. »

Une partie de l'extrême gauche rejette l'usage du terme « islamophobie ». C'est le cas du parti politique Lutte ouvrière[196],[197].

Sondages

Selon un sondage réalisé en 2012 par l'IFOP, 43 % des Français interrogés jugent que « la présence d’une communauté musulmane en France est une menace pour l’identité de la France »[198].

En 2013, selon un sondage Ipsos, 74 % des Français interrogés estiment que l’islam est une religion intolérante et incompatible avec les valeurs de la société française[199].

Selon un sondage réalisé en 2015 par l'IFOP, 41 % des Français interrogés considèrent que « même s'il ne s'agit pas de son message principal, l'islam porte malgré tout en lui les germes de violence et d'intolérance »[200].

Selon un sondage réalisé en avril 2016, pour 47 % des Français interrogés, la présence d’une communauté musulmane est « plutôt une menace pour l’identité de la France »[178].

Montée de l'islamophobie après les attentats

À la suite des attentats islamistes en France en janvier et en novembre 2015. Selon Gilles Clavreul, les actes racistes, antisémites et antimusulmans ont triplé par rapport à l’année 2014. Ils sont passés de 133 en 2014 à 429 en 2015. Le délégué interministériel à la lutte contre le racisme et l'antisémitisme rapporte dans son bilan le 21 janvier 2016 que les actes islamophobes ont augmenté de 281 % par rapport à l’année précédente[201].

Selon l'Observatoire national contre l'islamophobie, au premier semestre 2015, la France a connu 274 actes et menaces antimusulmans[202] ; ce qui selon certains aurait occasionné l’interdiction du port du burkini sur les plages en France notamment en Corse. Pour la Süddeutsche Zeitung, quotidien de Munich, par exemple :

« L’interdiction du burkini n’est pas le résultat d’un consensus forgé par un débat éclairé. Elle est le produit d’une islamophobie nourrie par les attentats terroristes […][203]. »

Les chiffres, désormais invérifiables[204], annoncés par l'ex-CCIF, corroboraient également cette corrélation entre attentats et augmentation des actes islamophobes mais s'avèrent supérieurs à ceux avancés par le ministère sachant que ce dernier ne comptabilise que les plaintes déposées et ne considère pas les actes discriminatoires comme étant des actes islamophobes. Ainsi, sur 588 discriminations, 42 agressions verbales et 55 agressions physiques recensées, seulement 20, 18 et 37 ont respectivement eu droit à des plaintes déposées. Par ailleurs, le collectif note qu'aussi bien les agressions verbales que physiques ont été 2,5 fois plus nombreuses en 2015 qu'en 2014. De plus, dans un graphique où le Collectif illustre l'évolution du nombre d'actes islamophobes en 2015, un grand nombre d'actes islamophobes est relevé après les attentats de janvier 2015.

Après une forte baisse, une nouvelle hausse est observée après les attentats du 10 avril 2015 à l'aéroport d'Orly et du 19 avril avec l'affaire Sid Ahmed Ghlam. On remarque alors un schéma répétitif : un attentat est commis, les actes islamophobes deviennent plus nombreux, pour ensuite revenir à leur chiffre habituel. En 2018, les actes islamophobes sont au plus bas niveau depuis 2010 avec 100 faits islamophobes recensés.[205]

Pays-Bas

Le premier personnage politique à dénoncer l'islam dans ce pays[réf. nécessaire], était Pim Fortuyn, leader d'un parti populiste et xénophobe, qui l'a qualifié de « culture arriérée »[réf. souhaitée], et a pointé du doigt plusieurs imams. Un de ses ouvrages s'intitule Contre l'islamisation de notre culture[206]. Il est assassiné le 6 mai 2002 par Volkert van der Graaf, un activiste de la cause animale, disant vouloir défendre les « groupes sociaux les plus vulnérables », notamment les musulmans et les demandeurs d'asile, qu'il considérait menacés par Pim Fortuyn[207].

La « question musulmane » devient un sujet de discussion et de remises en question d'une tradition libérale et de tolérance après l'assassinat de Theo van Gogh, le , par un islamiste maroco-néerlandais, Mohammed Bouyeri. Theo van Gogh était un adversaire déclaré de l'Islam radical et de la société multiculturelle[208]. Son assassinat fait reparler de l'islamisme dans les médias. Sylvain Ephimenco, éditorialiste au quotidien chrétien progressiste Trouw, publie un recueil de chroniques intitulé Contraint à la résistance où il développe l'idée d'une nécessaire résistance à ce que l'islamisme veut détruire dans la démocratie, et où il recommande :

« la résistance pour défendre des valeurs normalement de gauche comme la liberté de pensée, d'expression, l'égalité des hommes et des femmes, tout ce que le fondamentalisme islamique essaie de détruire ». Il énonce qu'« une partie de la gauche refuse la critique de l'islam, qu'elle assimile à de l'islamophobie et donc à du racisme. Cette gauche-là ne veut pas admettre que nous nous sommes trompés en nous battant pour la fraternité multiculturelle. Le multiculturalisme, c'est un instrument du repli sur soi et de la ghettoïsation voulue. Le laisser-faire des dernières décennies fait que, désormais, parler d'intégration, c'est proférer une insulte. »

Après l'assassinat de van Gogh, il s'est trouvé certains députés, dont Ayaan Hirsi Ali, pour demander au Parlement, d'instaurer une laïcité « à la française ». Les opposants à cette proposition ont protesté au nom de l'islamophobie.[réf. nécessaire]

Une contribution importante au débat est considérée d'être celle de Ayaan Hirsi Ali, chercheuse à l'American Enterprise Institute. Elle considère l'islam comme « gros problème » aujourd'hui, et recommande de lutter contre lui. Elle admet que le problème vient du radicalisme, mais s'inquiète que « trop de musulmans tolèrent l'islam radical »[209]. En 2006-2007 sa pensée était en phase avec celle du critique littéraire américain Bruce Bawer, auteur du livre While Europe Slept: How Radical Islam Is Destroying the West from Within. Elle se sert de sa comparaison avec le nazisme, où l'islam radical est le nazisme, et ceux qui cherchent la conciliation, commettent l'erreur de Chamberlain[209].

En 2017, Shirin Musa, militante associative hollandaise, musulmane voilée, est accusée d'islamophobie par des musulmans et des relativistes après une campagne d'affichage promouvant les mariages mixtes et métis envers les communautés musulmanes néerlandaises[210]

Sondages

En 2008, un sondage du TNS NIPO, a trouvé que 62 % des Hollandais interrogés favorisaient l'interdiction de construction de nouvelles mosquées. 55 % estimaient qu'il fallait interdire aux musulmans, résidents au pays, de faire venir leurs époux/ses de leur pays d'origine, pour s'y installer. 71 % de la population estime qu'il faut interdire le port, en public, de la burqa afghane[211].

En 2011, 44 % des Hollandais interrogés pensent que la présence d'une communauté musulmane aux Pays-Bas est une menace pour l'identité de leur pays, et 77 % estiment que les musulmans et les personnes d'origine musulmane ne sont pas bien intégrés dans la société[212].

Royaume-Uni

L'islamophobie n'est pas dénoncée en tant que telle avant 1997, date à laquelle l'organisation antiraciste Runnymede Trust (en) publie un document intitulé « Islamophobie, un défi pour nous tous » (« Islamophobia: A Challenge for Us All »)[213]. Dans la partie Nature de l'islamophobie, le rapport souligne huit points caractéristiques que cet institut associe à l'islamophobie. Les six premiers portent sur la perception de l'islam ou du discours critique que celui-ci tient sur l'Occident ; les deux derniers portent également sur l'hostilité envers les musulmans :

  • les critiques de l'Occident formulées par l'islam sont rejetées de but en blanc ;
  • l'islam est perçu comme une idéologie politique, utilisée à des buts politiques et militaires ;
  • l'islam est perçu comme inférieur à l'Occident. Il est perçu comme barbare, irrationnel, primitif et sexiste ;
  • l'islam est perçu comme violent, agressif, menaçant, soutenant le terrorisme et engagé dans un choc des civilisations ;
  • l'islam est perçu comme séparé et autre, sans valeurs communes avec les autres cultures, n'est pas affecté par celles-ci et lui-même n'ayant aucune influence sur celles-ci ;
  • l'islam est vu comme un bloc monolithique, statique et incapable de répondre aux changements ;
  • l'hostilité anti-musulmane est perçue comme naturelle et normale ;
  • l'hostilité envers l'islam est utilisée pour justifier des pratiques discriminatoires à l'égard des musulmans ainsi que leur marginalisation dans la société.

L'éditorialiste britannique Josie Appleton critique cette définition donnée par le Runnymede Trust :

« Ce rapport parle de l'augmentation du préjugé anti-musulman, qui doit être abordée politiquement. Mais la section intitulée “nature de l'islamophobie” suggère une définition très large du préjugé ; les exemples d'islamophobie donnés par ce rapport à savoir que la vision d'un islam inférieur à l'Occident, plutôt que simplement différent ; la vision d'un islam monolithique et statique plutôt que varié et progressiste, la perception de l'islam comme un ennemi plutôt que comme un partenaire. Tout cela semble relever d'une sensibilité exacerbée, d'une tentative de disqualifier toute critique de l'islam. Plutôt que d'inviter les musulmans au débat, les non-musulmans seraient supposés marcher sur des œufs de crainte de causer une offense. Depuis le 11 septembre 2001, nous avons vu comment cette attitude empêche toute discussion. »

En 2004, le Runnynede Trust a publié un autre rapport décrivant l'institutionnalisation de l'islamophobie dans plusieurs corps publics[214].

Kenan Malik, auteur d'une étude statistique des phénomènes de racisme envers les musulmans en Grande-Bretagne, tempère largement ce que soutiennent les partisans de cette dernière acception du terme. Selon cet auteur, l'existence d'une haine largement répandue envers les musulmans « est un mythe ». Ce qui amène l’auteur à conclure que « Les accusations d'islamophobie, sont destinées « à faire taire les critiques de l'islam, voire les musulmans qui luttent en faveur de réformes dans leurs communautés »[215]. Un point de vue proche est soutenu par le commentateur politique Douglas Murray qui juge que les accusations d'islamophobie « sont une tentative de faire passer l’Europe pour un continent raciste ». Soutenant qu'il s'agit avant tout d'un chantage moral, il affirme a contrario que « les personnes d’origine musulmane qui sont réellement en danger dans nos pays ne sont pas des salafistes, mais des libres penseurs comme Ayaan Hirsi Ali ou Hamed Abdel-Samad, qui vivent sous protection policière alors qu’eux croient réellement dans les principes des Lumières et exercent leur droit démocratique dans une société libre et laïque »[216].

La confédération syndicale la plus importante, la TUC, a mis en place un travail commun avec le Conseil musulman de la Grande-Bretagne visant explicitement à combattre l'islamophobie. Les deux organisations ont, par exemple, organisé un colloque commun en avril 2007.

En août 2007, parait un sondage selon lequel 59 % des Britanniques interrogés pensent qu'il est possible d'être à la fois musulman et citoyen britannique[217].

Après l'attentat du 22 mai 2017 à Manchester, la presse révèle que l'auteur de l'attentat-suicide, Salman Ramadan Abedi, faisait partie d'une « clique » parlant l'arabe à l'école qui avait accusé un professeur d'islamophobie après que celui-ci avait interrogé les élèves pour savoir ce qu'ils pensaient de quelqu'un qui s'attacherait une bombe et ferait sauter des personnes avec lui. Le groupe était allé se plaindre à leur enseignant d'éducation religieuse en disant qu'il était islamophobe[218].

Suède

En 2006, un sondage de Swedes by Demoskop, rapporté dans le Dagens Nyheter, montre que 33 % des personnes de plus de 65 ans pensent que les musulmans menacent la culture suédoise, 15 % des sondés de 15 à 27 ans répondent oui à la même question[219].

Notes et références

Notes

  1. Dahou Ezzerhouni cite par exemple : « la Revue du Monde Musulman en 1912 et 1918, la Revue du Mercure de France en 1912, Haut-Sénégal-Niger de Maurice Delafosse en 1912 et dans le Journal of Theological Studies en 1924 »[36].
  2. Maurice Delafosse y écrit : « Quoi qu'en disent ceux pour qui l'islamophobie est un principe d'administration indigène, la France n'a rien de plus à craindre des musulmans au Soudan que des non musulmans »[39].
  3. Le 19 novembre 2020, le collectif avait officiellement déclaré sa dissolution volontaire — décidée au cours d'un conseil d'administration extraordinaire réuni le 29 octobre 2020[141],[142].

Références

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    « Pourtant ces deux mots [islamophobie et homophobie] n'ont rien à voir. Le terme “homophobie” stigmatise une phobie envers des individus pour ce qu'ils sont, ce qui doit logiquement être dénoncé comme raciste. Tandis que “islamophobie” confond la haine envers les musulmans pour ce qu'ils sont (ce qui doit être dénoncé comme raciste) avec l'hostilité envers une croyance, une religion, une idéologie (ce qui relève de la liberté d'expression). »
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Bibliographie

 : Documents utilisés comme source pour écrire cet article.

Ouvrages

Articles

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Essais

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