Jean de Brébeuf

Saint Jean de Brébeuf, naissance à Condé-sur-Vire (France) le et martyrisé (brulé vif) par les Iroquois près de la baie Georgienne le , est un prêtre jésuite français, missionnaire en Nouvelle-France (aujourd'hui États-Unis et Canada). Il est surnommé Échon par les Hurons.

Pour les articles homonymes, voir Brébeuf et Saint Jean.

Jean de Brébeuf
Saint chrétien
Premier martyr du Canada
Naissance
Condé-sur-Vire,  Royaume de France
Décès   (à 55 ans)
près de la baie Géorgienne, Nouvelle-France
Ordre religieux Compagnie de Jésus
Vénéré à Canada
Béatification 1925
Canonisation
par Pie XI
Vénéré par l'Église catholique, Communion anglicane
Fête 16 mars (seul)
19 octobre (avec les martyrs canadiens)
26 septembre (au Canada)
Saint patron du Canada (avec saint Joseph)

Reconnu comme martyr de la foi chrétienne, il a été canonisé en 1930. Liturgiquement, il est commémoré le .

Enfance

Le lieu précis de naissance de Jean de Brébeuf n'est pas connu de manière certaine. Il serait né à Bayeux, ou à La Boissée (Condé-sur-Vire) où se trouvait le manoir seigneurial de ses parents, Gilles II de Brébeuf et Marie Le Dragon.

M. Béziers (d’abord curé de l’une des paroisses de Bayeux - où il serait né - et ensuite chanoine de la collégiale du Saint-Sépulcre de Caen) écrit en 1773 : « le P. Jean de Brébeuf, jésuite missionnaire, naquit à Bayeux au faubourg Saint-Jean vers les dernières années du XVIe siècle, d’une ancienne famille noble ».

En 1848, François Boisard, biographe du Calvados, dit de M. Béziers : « il savait puiser à plus d’une source », ce que reprend l’abbé Faucon en 1869 dans La semaine religieuse de Bayeux, en ajoutant que M. Béziers écrivait : « son histoire à une époque plus rapprochée de l’événement » pour lui donner plus de poids. L’abbé Faucon poursuit en disant que la naissance de Jean de Brébeuf eut lieu « paroisse de Saint-Exupère » qui faisait partie du faubourg Saint-Jean, que selon une tradition orale venant corroborer ce qui précède, « la mère de cet enfant était venue passer quelque temps à Bayeux, au sein de sa famille, accoucha dans cette ville pendant le séjour qu’elle y fit », et que « notre futur martyr serait né à quelques pas de l’église dans un vieux manoir féodal ». Les anciens registres de Saint-Exupère attestent la présence de Brébeuf, mais les lacunes empêchent d’en savoir plus.

Statue de Jean de Brébeuf, parc Brébeuf, Gatineau, Québec.

Quant au jour de naissance, sont avancés le (Lebreton), (Faucon) et même 1592 (Boisard).

Les Archives générales de la Compagnie de Jésus, à Rome, portent la mention : Joannes de Brebeuf, natus in oppide Condaei, 25 martii an. 1593. Natus signifie né, mais pourrait simplement vouloir dire aussi originaire ; c’est une confusion que l’on rencontre souvent dans les régistres paroissiaux, du moins en français. Ceux-ci ne commençant qu’en 1596 à Condé-sur-Vire, toute recherche s’avère impossible. Avec ceux des nombreuses paroisses de Bayeux, consultables mais incomplets, le doute existe.

Un contrat passé devant notaires le , mis au jour 415 ans après la naissance de Jean de Brébeuf, donne un éclairage que l'on peut considérer comme déterminant. Cet acte indique qu'une chapelle a été construite par Joachim de Brébeuf, écuyer sieur de Balençon (un neveu du martyr) et qu'il verse en sa faveur une rente hypothèque à perpétuité. La chapelle y est située à Condé-sur-Vire dans le village de La Boissaye. Il est précisé qu'elle a été bâtie «au lieu de naissance du très heureux serviteur de Dieu, le digne père Jean de Brébeuf, oncle paternel du sieur donateur ». (Fonds Bosquet - arch. privées)

Missionnaire en Nouvelle-France

Carte de Nouvelle France des Jésuites de 1657, avec la représentation de la mise à mort de Jean de Brébeuf et de Gabriel Lalemant par les Iroquois.

Jean de Brébeuf est entré chez les Jésuites en 1617. Ses ennuis de santé à l’âge de vingt-huit ans l’ont empêché d’acquérir une connaissance théologique étendue. Il est arrivé le en Nouvelle-France où il est resté malgré la menace du capitaine de vaisseau huguenot de le ramener en France.

Surmontant l’aversion qu'ont les colons pour les jésuites, Brébeuf choisit un emplacement pour une résidence sur la rivière Saint-Charles, à l’endroit même d'un ancien campement de Jacques Cartier. Il adopte le mode de vie amérindien, s'installant dans un tipi où il passe l’hiver. Au printemps, il s’embarque avec les Amérindiens pour un voyage en canoë sur le lac Huron.

Le , il retourne en France après la reddition de la colonie aux Anglais par Champlain. Quatre ans plus tard, il repart le pour le Canada à sa restitution à la France. Dès son arrivée, il tente de retourner au lac Huron mais les Amérindiens refusent de l’emmener. L’année suivante, il réussit à atteindre son ancienne mission. En 1640, il tente sans succès d’évangéliser les Neutres, une tribu au nord du Lac Érié. En 1642, il est envoyé au Québec où il a la charge des Amérindiens de la réserve de Sillery. Au plus fort du conflit entre Hurons et Iroquois, après deux tentatives infructueuses, il parvient à pénétrer en territoire huron. Bien que les Iroquois aient fait la paix avec les Français, leur guerre avec les Hurons se poursuivait.

Ethnographe hors pair

Plaque de plomb Jean de Brébeuf 1649, dessin
Plaque de plomb Jean de Brébeuf 1649, photo

Brébeuf, fondateur de mission jésuite et mystique, est par ailleurs un ethnographe et un écrivain. Ses écrits dont plusieurs sont perdus comprennent un dictionnaire, une grammaire, et deux textes hurons. Il est réputé avoir écrit en langue wendat le plus ancien cantique de Noël canadien Jesous Ahatonhia.

Brébeuf contribua de précieuses données à l'ethnographie amérindienne. Ayant vécu quinze ans chez les Hurons, il connut intimement leurs mœurs et leurs coutumes. Brébeuf décrit les Hurons au moment du contact avec les Européens, avant que ceux-ci ne soient presque anéantis par des épidémies, des guerres et des massacres.

Décès

Scène du martyre par Bressani (1657).

Le , il est capturé au cours d’une attaque. Il préfère demeurer avec ses fidèles au lieu de prendre la fuite. Il est traîné au village huron de Saint-Ignace où il est accueilli par une pluie de pierres, bastonné et lié au poteau de torture. On lui verse de l’eau bouillante sur la tête dans une parodie de baptême, on lui passe autour du cou un collier de cognées de tomahawks chauffées à blanc et on lui enfonce un fer rouge dans la gorge et dans l'anus. Il est brûlé vif et son corps est lacéré à coups de couteaux. Après sa mort, son cœur est arraché et mangé.

Les Écrits en Huronie mentionnent qu'il était de coutume pour les Iroquois de tuer immédiatement la victime si elle se mettait à pleurer ou à crier. Le rituel de manger le cœur était leur façon de s'approprier la force de l'ennemi, et indiquerait qu'à aucun moment, Jean de Brébeuf n'a succombé à la souffrance.

En 1954, au cours d'excavations au site de Sainte-Marie-au-pays-des-Hurons, le Père Denis Hegarty s.j., l’un des pères au service du sanctuaire, découvrit une plaque de plomb dans la chapelle des indiens. L'inscription se lit : Père Jean de Brebeuf bruslé par les Iroquois le 17 de mars l'an 1649.

Vénération et souvenir

Corps et statue (ci-dessous) de saint Jean de Brébeuf au sanctuaire des Martyrs, Midland, Ontario.

Relique

Une petite relique de Jean de Brébeuf fut déposée dans le reliquaire sur l'autel devant la statue du Christ dans la Basilique-cathédrale Notre-Dame de Québec (à gauche de l'autel principal près de la Porte Sainte) avec des petites reliques de tous les autres martyrs, Saints et béatifiés canadiens[4].

Reconnaissance

René Latourelle écrit dans la fiche du Dictionnaire biographique du Canada :

« Avec Champlain et Sagard, Brébeuf reste le témoin le plus important de la période de contact. Pour sa part, il insiste sur la vie sociale, politique et religieuse des Hurons ; en cela il complète Champlain et enrichit Sagard. Sur ces trois aspects, la Relation de 1636 demeure un document unique, cité en première place dans toutes les monographies concernant les Hurons. »

Joseph Boyden

Dans son roman Dans le grand cercle du monde[5], Joseph Boyden, écrivain canadien, mêle trois voix : celle d'un grand chef huron Oiseau, celle de Chutes-de-Neige, jeune prisonnière iroquoise et celle du Corbeau, le père Christophe, missionnaire jésuite français. Le témoignage et la vie de ce dernier sont inspirés directement des écrits et de la vie du père J. de Brébeuf.

Sources bibliographiques

  • M. Béziers: Histoire sommaire de la ville de Bayeux, Académie Royale des belles Lettres de Caen, MDCCLXXIII, p. 199.
  • Notices biographiques, littéraires et critiques sur les hommes du Calvados, F. Boisard, 1848, p. 24, 42.
  • Biographie normande, Th. Lebreton, Rouen, 1857, p. 219.
  • La Semaine religieuse de Bayeux, abbé Faucon, 1869, p. 468.
  • Charles Marie: Notice sur les trois Brébeuf, Société des Antiquaires de Normandie, 1875, p. 124.
  • J. Robinne: L'Apôtre au cœur mangé, 1949, p. 3.
  • René Latourelle: Jean de Brébeuf, Québec, Ed. Bellarmin, 1993, 330pp.

Notes et références

  1. « Parc Brébeuf », sur reseaupatrimoine.ca (consulté le )
  2. « Saint Jean de Brébeuf », sur nominis.cef.fr (consulté le )
  3. « Saint Jean de Brébeuf Prêtre s.j. et martyr », sur www.levangileauquotidien.org (consulté le )
  4. Visite actuelle par Christine Robitaille le 19 novembre 2014 à la Cathédrale-Basilique Notre-Dame-de-Québec.
  5. (en) Joseph Boyden, The Orenda, Hamish Hamilton, Penguin Canada Books,

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

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