Klebsiella

Le genre Klebsiella (klebsielles), de la famille des entérobactéries, comporte cinq espèces dont l'espèce-type est Klebsiella pneumoniae qui est la plus fréquente des bactéries à Gram négatif impliquée dans les cas de pneumonies nosocomiales.

Klebsiella
Colonie de Klebsiella pneumoniae
Classification selon LPSN
Règne Bacteria
Embranchement Pseudomonadota
Classe Gamma Proteobacteria
Ordre Enterobacteriales
Famille Enterobacteriaceae

Genre

Klebsiella
Trevisan, 1885

Synonymes

  • Calymmatobacterium Aragão & Vianna, 1913
  • Raoultella Drancourt et al., 2001

Ces bactéries causent jusqu'à 5 % des infections urinaires communautaires et 9 % des nosocomiales[1].

Caractères bactériologiques

Les Klebsiella sont des Enterobacteriaceae bacilles gram négatif, généralement considérées immobiles (cela dépend des espèces et des souches)[2] et capsulées (sauf 6 % des souches de K. pneumoniae subsp. pneumoniae).
Elles font partie du groupe "KESH" (Klebsiella, Enterobacter, Serratia et Hafnia mais rare.), elles fermentent le glucose par la voie du butane-2,3-diol avec production de gaz. ODC négative, ADH négative, TDA négative et PDA négative. VP positif caractère clé.
Malgré la présence de flagelles pour les espèces K. aerogenes et K. michiganensis[3], les Klebsiella ont longtemps été considérées comme non mobiles et ce caractère a été considéré comme une des caractéristiques du genre[4]. La découverte de flagelles sur certaines souches de K. pneumoniae ainsi que la présence des gènes fliC, fliA et flgH démontre que certaines souches de Klebsiella considérées comme non-mobiles peuvent l'être[2].

Habitat

Ce sont des bactéries ubiquitaires présentes dans le tube digestif et dans l'appareil respiratoire des animaux (dont l'Homme) en tant que bactéries commensales.
Elles sont fréquentes dans les selles et peuvent être un indicateur d'une contamination fécale.
Elles sont abondantes dans le sol, les eaux et sont des fixateurs de l'azote atmosphérique.

Pouvoir pathogène

  • Klebsiella pneumoniae détermine des infections respiratoires (pneumonies, abcès pulmonaires, pleurésies), des infections intestinales et urinaires.
    Elle a un effet cytotoxique sur les épithéliums des voies aériennes et peut être responsable d'infections nosocomiales.
  • Klebsiella pneumoniae hypervirulente est une souche hypervirulente de Klebsiella pneumoniae issue d'Asie responsable d'infections foudroyantes. Elle touche particulièrement le système nerveux central et l'œil (endophtalmie). Elle peut également être responsable d'abcès hépatiques. Son incidence est en augmentation. Le diagnostic microbiologique est fait grâce au string test, qui révèle le caractère hypermuqueux de cette souche. Le bilan d'extension et le traitement de cette infection ne font pas l'objet de recommandations et sont donc discutés au cas par cas. [5]

Son pouvoir pathogène et sa virulence[6] seraient liés à plusieurs facteurs :

  • sa capsule de polysaccharides ; elle confère à Klebsiella pneumoniae un fort pouvoir invasif en protégeant les bactéries de la phagocytose et dans une certaine mesure de certains désinfectants. C'est cette capsule volumineuse de nature polysaccharidique qui explique l'aspect gluant et bombé des colonies sur les milieux usuels. Son rôle est encore mal compris, avec des résultats différents pour les études in vivo et in vitro [7]
  • une production de sidérophores
  • une production de lipopolysaccharide (LPS)
  • une production d'un complexe extracellulaire (toxique pour les tissus pulmonaires notamment). On sait que cet effet est lié à la capsule, car il disparaît en présence d'isolats de bactéries vivantes mais non capsulées. De plus, la cytotoxicité des souches non capsulées est restaurée par simple ajout de capsules extraites par purification d'un isolat capsulé[8]
  • une production d'adhésine lui permettant de produire des biofilms
  • Klebsiella ozenae n'est pas l'agent de l'ozène mais peut être pathogène dans les voies respiratoires et leurs annexes.
    • Klebsiella rhinoscleromatis est l'agent spécifique du rhinosclérome.

Traitements

Antibiotiques

  • Le genre Klebsiella est naturellement sécréteur d'une Pénicillinase chromosomique de bas niveau ce qui le rend naturellement résistant aux Pénicillines A (Amoxicilline) et aux Carboxypénicilines et Uréidopénicillines (Ticarcilline, Pipéracilline).
  • Comme toutes les Enterobacteriaceae, Klebsiella peut acquérir de nombreux mécanismes de résistances aux autres antibiotiques (pénicillinases plasmidiques, céphalosporinases,enzyme TRI, Bétalactamase à spectre élargie, etc.)

Préparations bactériophagiques

En Russie et en Géorgie, le traitement des klebsielles par phagothérapie est commun. Le médicament existe sous forme liquide ou en pulvérisateur. Il existe des cocktails bactériophagiques contenant exclusivement des bactériophages spécifiques aux klebsielles, et des cocktails contenant plus largement des phages spécifiques aux germes présents dans telle ou telle pathologie. Des phages anti-klebsielles figurent par exemple dans les cocktails pour les infections gynécologiques[9],[10].

Des recherches sont en cours ailleurs dans les pays occidentaux pour développer des bactériophagiques efficaces contre les Klebsiella pneumoniae productrices de carbapenemases KPC (KPC-KP)[11].

En France la phagothérapie nécessite une Autorisation Temporaire d'Utilisation (ATU) délivrée par l'ANSM et des organisations de patients se sont montées pour faciliter l'accès aux bactériophagiques étrangers[12],[13],[14],[15].

Systématique

Liste des espèces (base LPSN au 27 mars 2022)

  • Klebsiella aerogenes (Hormaeche & Edwards, 1960) Tindall et al., 2017
  • Klebsiella africana corrig. Rodrigues et al., 2019
  • Klebsiella granulomatis (Aragão & Vianna, 1913) Carter et al., 1999
  • Klebsiella grimontii Passet & Brisse, 2018
  • Klebsiella huaxiensis Hu et al., 2019
  • Klebsiella indica Gujarati et al., 2020
  • Klebsiella michiganensis Saha et al., 2013
  • Klebsiella oxytoca (Flügge, 1886) Lautrop, 1956
  • Klebsiella pasteurii Merla et al., 2020
  • Klebsiella pneumoniae (Schroeter, 1886) Trevisan, 1887
  • Klebsiella quasipneumoniae Brisse et al., 2014
  • Klebsiella spallanzanii Merla et al., 2020
  • Klebsiella variicola Rosenblueth et al., 2004

Espèces synonymes (base LPSN au 27 mars 2022)

  • Klebsiella alba Xu et al., 2015, synonyme de la sous-espèce Klebsiella quasipneumoniae subsp. similipneumoniae Brisse et al. 2014
  • Klebsiella mobilis Bascomb et al., 1971, synonyme de Klebsiella aerogenes
  • Klebsiella ozaenae (Abel et al., 1893) Bergey et al., 1925, synonyme de la sous-espèce Klebsiella pneumoniae subsp. ozaenae (Abel 1893) Ørskov 1984

Espèces aux noms invalides (base LPSN au 27 mars 2022)

Espèces placées dans le genre Raoultella (base LPSN au 27 mars 2022)

Taxinomie

En 2001, des analyses phylogénétiques d'espèces du genre Klebsiella, ainsi que d'espèces parmi d'autres genres de la famille des Enterobacteriaceae, et portant sur deux gènes semblent indiquer que le genre Klebsiella est hétérogène[17]. Ce genre est alors scindé en deux et les auteurs proposant la reconnaissance d'un nouveau genre, Raoultella dédié au microbiologiste Didier Raoult. Les espèces K. ornithinolytica, K. planticola, K. trevisanii (synonyme de K. planticola) et K. terrigena y sont alors placées par les descripteurs du genre. En 2014, une nouvelle espèce de bactérie est isolée et caractérisée comme appartenant au genre Raoultella. Elle est nommée R. electrica[18]. En 2014, la pertinence du genre Raoultella est remise en question par une analyse phylogénétique des klebsielles plus poussée, utilisant des génomes complets (2,93 Mpb) plutôt que deux gènes seulement. Cette analyse montre que R. ornithinolytica est nichée au milieu de l'arbre phylogénétique de klebsielles, sur une branche proche de K. oxytoca. L'analyse conclut que le genre Raoultella devrait être abandonné[19]. La synonymie avec Klebsiella est explicitement demandée à nouveau par Ma et al. en 2021[20]. D'autres analyses phylogénétiques dont celle de la base Genome Taxonomy Database[21], qui est désormais intégrée avec le Bergey's Manual of Systematic Bacteriology comme faisant autorité pour les génomes bactériens, concluent au maintien des Raoultella et à la présence de deux groupes génomiques distincts pour les Klebsiella[21],[22]. Depuis, la List of Prokaryotic names with Standing in Nomenclature (LPSN), retransmettant les décisions de l'ICNP faisant autorité en nomenclature bactérienne, n'a pas retenu la nouvelle combinaison proposée et maintient le nom de Raoultella comme seul correct name pour les quatre espèces concernées par le genre Raoultella[23].

Notes et références

  1. Bactériologie médicale: techniques usuelles. Par François Denis,Marie-Cécile Ploy. ECBU, page 139. Elsevier Masson, 2007 - 573 pages.
  2. (en) Alejandro Carabarin-Lima, Libia León-Izurieta, Rosa Del Carmen Rocha-Gracia, Miguel Castañeda-Lucio, Carmen Torres, Zita Gutiérrez-Cazarez, Sirenia González-Posos, Claudia F Martínez de la Peña, Ygnacio Martinez-Laguna et Patricia Lozano-Zarain, « First evidence of polar flagella in Klebsiella pneumoniae isolated from a patient with neonatal sepsis », J Med Microbiol., vol. 65, no 8, , p. 729-737 (DOI 10.1099/jmm.0.000291)
  3. (en) R. Saha, C. E. Farrance, B. Verghese, S. Hong et R. S. Donofrio, « Klebsiella michiganensis sp. nov., a new bacterium isolated from a tooth brush holder. », Curr Microbiol, vol. 66, , p. 72–78 (PMID 27283194, DOI 10.1099/jmm.0.000291)
  4. (en) W. H. Ewing, Edwards and Ewing's Identification of Enterobacteriaceae, New York, Elsevier Science Publishing Co. Inc, , 4e éd., 536 p. (ISBN 9780444009814)
  5. (en) Thomas A. Russo et Candace M. Marr, « Hypervirulent Klebsiella pneumoniae », Clinical Microbiology Reviews, vol. 32, no 3, (ISSN 0893-8512 et 1098-6618, PMID 31092506, DOI 10.1128/CMR.00001-19, lire en ligne, consulté le )
  6. Lawlor MS, Hsu J, Rick PD, Miller VL: Identification of Klebsiella pneumoniae virulence determinants using an intranasal infection model. Mol Microbiol 2005, 58:1054-1073. Résumé PubMed
  7. Struve C, Krogfelt KA ; : Role of capsule in Klebsiella pneumoniae virulence: lack of correlation between in vitro and in vivo studies. FEMS Microbiol Lett 2003, 218:149-154. (Résumé PubMed)
  8. Victoria Cano et al. ; Klebsiella pneumoniae triggers a cytotoxic effect on airway epithelial cells ; BMC Microbiology 2009, 9:156doi:10.1186/1471-2180-9-156 ; on line: 2009/08/03 ; (Résumé)
  9. Alexander Sulakvelidze, Zemphira Alavidze et J. Glenn Morris, « Bacteriophage Therapy », Antimicrobial Agents and Chemotherapy, vol. 45, no 3, , p. 649–659 (ISSN 0066-4804, PMID 11181338, DOI 10.1128/AAC.45.3.649-659.2001, lire en ligne, consulté le )
  10. Gilles Bourdin, Armando Navarro, Shafiqul A Sarker et Anne-C Pittet, « Coverage of diarrhoea-associated Escherichia coli isolates from different origins with two types of phage cocktails », Microbial Biotechnology, vol. 7, no 2, , p. 165–176 (ISSN 1751-7915, PMID 24528873, PMCID PMC3937720, DOI 10.1111/1751-7915.12113, lire en ligne, consulté le )
  11. Marco Maria D’Andrea, Pasquale Marmo, Lucia Henrici De Angelis et Mattia Palmieri, « φBO1E, a newly discovered lytic bacteriophage targeting carbapenemase-producing Klebsiella pneumoniae of the pandemic Clonal Group 258 clade II lineage », Scientific Reports, vol. 7, (ISSN 2045-2322, PMID 28572684, PMCID PMC5453958, DOI 10.1038/s41598-017-02788-9, lire en ligne, consulté le )
  12. « AVIBEP - Association pour la Phagothérapie », sur AVIBEP - Phagothérapie (consulté le )
  13. « Phages-Sans-Frontières – Ensemble nous pouvons tenter de changer le destin ! », sur phages-sans-frontieres.com (consulté le )
  14. « Association PHAG ESPOIRS », sur Association PHAG ESPOIRS (consulté le )
  15. « EuroPhages - Sauver les vies de milliers de Français grâce aux bactériophagiques », sur EuroPhages (consulté le )
  16. « Klebsiella electrica », sur LPSN (consulté le )
  17. (en) Michel Drancourt, Claude Bollet, Anne Carta et Patricia Rousselier, « Phylogenetic analyses of Klebsiella species delineate Klebsiella and Raoultella gen. nov., with description of Raoultella ornithinolytica comb. nov., Raoultella terrigena comb. nov. and Raoultella planticola comb. nov. », International Journal of Systematic and Evolutionary Microbiology, Society for General Microbiology (d), vol. 51, no 3, , p. 925-932 (ISSN 1466-5026 et 1466-5034, OCLC 807119723, PMID 11411716, DOI 10.1099/00207713-51-3-925)
  18. (en) Zen-ichiro Kimura, Kyung Mi Chung, Hiroaki Itoh, Akira Hiraishi et Satoshi Okabe, « Raoultella electrica sp. nov., isolated from anodic biofilms of a glucose-fed microbial fuel cell », International Journal of Systematic and Evolutionary Microbiology, Society for General Microbiology (d), vol. 64, no 4, , p. 1384-1388 (ISSN 1466-5026 et 1466-5034, OCLC 807119723, PMID 24449794, DOI 10.1099/IJS.0.058826-0)
  19. (en) Corey M Hudson, Zachary W. Bent, Robert J. Meagher et Kelly P. Williams, « Resistance determinants and mobile genetic elements of an NDM-1-encoding Klebsiella pneumoniae strain », PLOS ONE, PLoS, vol. 9, no 6, , e99209 (ISSN 1932-6203, OCLC 228234657, PMID 24905728, PMCID 4048246, DOI 10.1371/JOURNAL.PONE.0099209).
  20. (en) Yuanyuan Ma, Xiuqin Wu, Shuying Li, Lie Tang, Mingyue Chen et Qianli An, « Proposal for reunification of the genus Raoultella with the genus Klebsiella and reclassification of Raoultella electrica as Klebsiella electrica comb. nov. », Research in Microbiology, Elsevier, vol. 172, no 6, , p. 103851 (ISSN 0923-2508 et 1769-7123, DOI 10.1016/J.RESMIC.2021.103851).
  21. Donovan H Parks, Maria Chuvochina, David W Waite, Christian Rinke, Adam Skarshewski, Pierre-Alain Chaumeil et Philip Hugenholtz, « A standardized bacterial taxonomy based on genome phylogeny substantially revises the tree of life », Nature Biotechnology, vol. 36, no 10, , p. 996-1004 (DOI 10.1038/nbt.4229)
  22. « Taxonomy Tree (Enterobacteriaceae) - Release 06-RS202 », sur Genome Taxonomy DataBase (GTDB), (consulté le )
  23. (en) « Raoultella », sur List of Prokaryotic names with Standing in Nomenclature (consulté le )
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