Kliment Vorochilov

Kliment Iefremovitch Vorochilov (en russe : Климе́нт Ефре́мович Вороши́лов), né le 23 janvier 1881 ( dans le calendrier grégorien) à Gouvernement de Iekaterinoslav et mort le à Moscou, est un militaire et homme d'État soviétique.

Kliment Vorochilov

Portrait photographique de Kliment Vorochilov en 1961.
Fonctions
Président du præsidium du Soviet suprême de l'URSS

(7 ans, 1 mois et 22 jours)
Prédécesseur Nikolaï Chvernik
Successeur Léonid Brejnev
Vice-président du conseil des ministres de l'URSS

(12 ans, 9 mois et 26 jours)
Président Viatcheslav Molotov
Joseph Staline
Commissaire du peuple à la Défense (en)

(14 ans, 6 mois et 1 jour)
Président Alexeï Rykov
Viatcheslav Molotov
Joseph Staline
Prédécesseur Mikhaïl Frounze
Successeur Semion Timochenko
Membre du Soviet suprême de l'URSS
Membre du Politburo
Biographie
Date de naissance
Lieu de naissance Verkhneïe, Gouvernement de Iekaterinoslav, Empire russe
Date de décès
Lieu de décès Moscou, RSFSR, URSS
Sépulture Nécropole du mur du Kremlin
Nationalité Russe, soviétique.
Parti politique POSDR
PCUS
Conjoint Ekaterina Vorochilova (en)
Profession Ouvrier, militaire.


Présidents du Præsidium du Soviet suprême de l'URSS

Kliment Vorochilov

Portrait photographique de Kliment Vorochilov en 1937.

Origine Empire russe
Allégeance Union soviétique
Grade Maréchal de l'Union soviétique
Commandement Armée rouge
Conflits Guerre civile russe
Guerre d'Hiver
Seconde Guerre mondiale (Front de l'Est)
Distinctions

Un soldat de la guerre civile

Vorochilov est né à Verkhneïe, un village du gouvernement d'Ekaterinoslav, dans l'Empire russe[1]. Son père était un simple ouvrier et l'enfance de Kliment fut difficile. Il n'a sans doute pas pu finir l'école primaire et c'est un fait établi qu'il a appris à lire et écrire alors qu'il était membre du parti bolchévique. Devenu ouvrier métallurgiste[2] dans la grande ville industrielle de Donetsk, il perd à plusieurs reprises son travail et doit vivre de la mendicité.

Ces conditions de vie difficiles l'ont conduit aux idées radicales et au marxisme. Il adhère au POSDR en 1903[3], où il fait partie de la tendance bolchévique, et fait la connaissance de Staline en 1906[3]. Délégué du Parti à plusieurs congrès, comme de nombreux « vieux bolchéviques », il est arrêté à plusieurs reprises ce qui ne freine pas son implication dans le parti. Mobilisé en 1914, il rejoint Pétrograd lors de la révolution de Février 1917.

Après la Révolution russe, Vorochilov fait partie du gouvernement provisoire de l'Ukraine. Il assure alors le poste de commissaire du peuple pour les Affaires intérieures. Il y commence une carrière militaire en 1918 contre les troupes d'occupation allemandes, devient ensuite l'ami de Staline au siège de Tsaritsine[3] puis participe à la guerre civile, période où il a sous ses ordres Ivan Koniev qui lui devra plus tard une grande partie de son parcours dans la hiérarchie militaire soviétique. Vorochilov est membre du comité central dès 1921, poste qu'il conserve jusqu'à l'arrivée au pouvoir de Khrouchtchev au milieu des années 1950.

Le maître de l'Armée rouge

Staline et Vorochilov en 1935.

En 1925, après le décès de Mikhaïl Frounze, Vorochilov reprend ses responsabilités de commissaire du peuple pour les Affaires militaires et navales et de président du Conseil militaire révolutionnaire de l'URSS, poste qu'il occupe jusqu'en 1934. Il devient membre titulaire du nouveau Bureau politique en 1926. Faisant preuve d'une longévité exceptionnelle, il conserve cette responsabilité jusqu'en 1952.

Kliment Vorochilov durant une réunion de la jeunesse communiste en novembre 1935.

Maréchal de l'Union soviétique en 1935, Vorochilov s'oppose à la modernisation de l'Armée rouge menée par Toukhatchevski, favorise la cavalerie par rapport aux blindés, et entérine la politique de liquidation dirigée par Staline. Les résultats de cette saignée  les trois cinquièmes des maréchaux soviétiques et un tiers des officiers de l'Armée rouge sont liquidés  sont sans aucun doute une des causes des lourdes défaites de l'Armée rouge contre l'Allemagne nazie en .

Il préside la délégation soviétique qui reçoit, en août 1939, la mission militaire franco-britannique chargée d'obtenir un accord militaire avec l'URSS visant à dissuader l'Allemagne d'attaquer la Pologne. À cette occasion, il va directement au cœur du problème, en exigeant des Alliés qu'ils répondent clairement quant à l'accord de la Pologne et de la Roumanie sur le passage des troupes soviétiques sur leur territoire. Les délégués alliés, au fait des refus de ces deux pays, ne peuvent que se dérober.

Après l'échec de l'attaque de la Finlande en 1939, Vorochilov doit quitter son poste l'année suivante. Il conserve néanmoins une part de ses prérogatives. Il reste ainsi jusqu'en 1953 vice-président du Conseil des commissaires du peuple.

Le , avec les autres membres du bureau politique, il est cosignataire du décret préparé par Beria, qui donne lieu au massacre de Katyń, où sont assassinés environ 25 700 Polonais, dont 14 700 officiers.

Lorsque l'Allemagne attaque l'URSS, Vorochilov est nommé commandant des armées du nord-ouest pendant deux mois en 1941, mais, piètre stratège[4],[5], il ne réussit pas à empêcher les Allemands d'encercler Léningrad, ce qui précipite sa rétrogradation au rang de responsable du front de Léningrad le , avant d'être lui-même limogé par Staline en personne et remplacé les jours suivants par Joukov[6].

Molotov, Staline et Vorochilov le .

Un témoin ultime du stalinisme

Son rôle militaire s'achève à cette date. Il reste cependant en politique. Après la guerre, il supervise l'instauration du régime communiste en Hongrie. En 1952, il devint membre du Présidium du Soviet suprême. La mort de Staline, en , provoque des changements importants dans les instances dirigeantes. Vorochilov est élu président du Présidium. Khrouchtchev occupe le poste de Secrétaire général. Ce sont ces trois dirigeants (s'est joint aux deux premiers Malenkov) qui organisent l'arrestation de Beria. Toutefois, des dissensions avec Khrouchtchev l'amènent à se joindre contre ce dernier avec Malenkov, Kaganovitch et Molotov. Cette tentative de mise à l'écart de Khrouchtchev se solde par un échec en . Toujours prudent, Vorochilov a pu se rallier à temps au vainqueur.

En , le Soviet suprême accepte sa démission et le remplace par Léonid Brejnev comme président du Présidium. Dans la foulée, il est évincé du Présidium en juillet suivant. Un an plus tard, en , lors du XXIIe congrès, son élimination politique est complète quand il est exclu du Comité central. Après la chute de Khrouchtchev, Brejnev rappelle Vorochilov, mais ce dernier ne joue plus qu'un rôle de figuration. Il est réélu comme suppléant au Comité central en 1966, avant d'être fait une seconde fois « Héros de l'Union soviétique » en 1968. Il meurt à Moscou à l'âge de 88 ans l'année suivante.

Une exceptionnelle longévité politique

Étonnant parcours que celui de Vorochilov si l'on en juge par sa longévité et son maintien dans les plus hautes sphères de l'État soviétique de 1921 à 1969, à l'exemple – mais il est unique — du surprenant Anastase Mikoyan. L'exploit est encore plus grand quand on examine la relative incompétence militaire du maréchal dans tous ses champs d'action lors de la Grande Guerre patriotique[7]. Échec en Finlande, catastrophe en URSS lors de l'attaque par l'Allemagne nazie. Il n'y a guère de positif dans cette période que son rôle – très indirect – pour favoriser les innovations matérielles de l'Armée rouge à la veille du conflit, dont témoigne le nom de l'excellent KV-1, baptisé « Kliment Vorochilov » en l'honneur du chef de l'industrie d'armement. Sans nul doute, sa proximité avec Staline, dès l'origine de son ascension politique, explique en grande partie l'exception que constitue le parcours de Vorochilov dans le monde très dangereux de la dictature stalinienne. Un chant lui est dédié : The Echelon's Song, interprété par les Chœurs de l'Armée rouge. Le 5 novembre 1935, la ville de Louhansk change de nom et devient Vorochilovgrad en son honneur.

Le rapport Khrouchtchev dévoilé lors du XXe congrès du PCUS en février 1956, semble indiquer que cette faveur était en train de faiblir au début des années 1950. Selon ces révélations, Vorochilov ne pouvait plus assister aux réunions du Politburo sur ordre de Staline qui voyait en lui un « agent anglais » à surveiller d'abord et à éliminer ensuite. Son épouse est décédée en 1959.

Vie privée et personnalité

Simon Sebag Montefiore le qualifie d’« ex-tourneur devenu un officier de cavalerie à l’air affable et fanfaron, avec une belle moustache à la d’Artagnan, des cheveux blonds et un visage de chérubin aux joues roses »[8], « [d’]un naturel doux mais [d’]un courage hors pair ». Il était connu et moqué pour être « vaniteux comme une femme » et amoureux des uniformes : il « comprenait presque tout de travers, tenant rarement le bon bout », et alimentait un complexe d’infériorité face aux « cerveaux militaires plus évolués que le sien ». Épicurien, il aimait le tennis et la compagnie des artistes. Il faisait partie des rares dirigeants qui pouvaient se mettre en colère contre Staline, et pouvait faire montre d’un tempérament colérique et obstiné[9].

Titres et décoration

Principaux titres et décorations :

Notes et références

  1. Ce village a été ultérieurement incorporé à la ville de Lyssytchansk, dans l'oblast de Louhansk, en Ukraine.
  2. Montefiore, la cour du tsar rouge, t. I, où il est précisé que cet épisode lui vaudra le surnom de « commandant en chef issu des laminoirs », p. 98.
  3. Montefiore, la cour du tsar rouge, t. I, p. 98.
  4. Sheila Fitzpatrick, Dans l'équipe de Staline, Perrin, 2018, page 203 et suivantes.
  5. Ian Kershaw le qualifie lapidairement de « favori incompétent de Staline » (Ian Kershaw (trad. de l'anglais), L’Europe en enfer, Paris, Seuil-Points histoire, 2016 (pour la traduction), 2018, 640 p. (ISBN 978-2-7578-7315-1), p 317)
  6. Lasha Otkhmezuri et Jean Lopez, Joukov l'homme qui a vaincu Hitler, p 352-359
  7. Sheila Fitzpatrick, op. cit. page 203 et suivantes.
  8. Montefiore, la cour du tsar rouge, t. I, p. 33-34.
  9. Montefiore, la cour du tsar rouge, t. I, p. 97-99.

Bibliographie

  • Simon Sebag Montefiore (trad. de l'anglais par Florence La Bruyère et Antonina Roubichou-Stretz), Staline : La cour du tsar rouge, vol. I. 1929-1941, Paris, Perrin, , 723 p. (ISBN 978-2-262-03434-4). 

Liens externes

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