La Fille
La Fille est la seconde partie de la quatrième fable du livre VII de Jean de La Fontaine situé dans le second recueil des Fables de La Fontaine, édité pour la première fois en 1678. La première partie de la fable est composée par Le Héron. C'est une fable double comme Le Lion et le Rat / La Colombe et la Fourmi, La Mort et le Malheureux / La Mort et le Bûcheron, Le Loup, la Chèvre et le Chevreau / Le Loup, la Mère et l'Enfant et Le Pâtre et le Lion / Le Lion et le Chasseur.
Pour les articles homonymes, voir Fille (homonymie).
La Fille | ||||||||
illustration de Gustave Doré | ||||||||
Auteur | Jean de La Fontaine | |||||||
---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Pays | France | |||||||
Genre | Fable | |||||||
Éditeur | Claude Barbin | |||||||
Lieu de parution | Paris | |||||||
Date de parution | 1678 | |||||||
Chronologie | ||||||||
| ||||||||
Texte
LA FILLE
Certaine Fille, un peu trop fière
Prétendait trouver un mari
Jeune, bien fait, et beau, d'agréable manière (1),
Point froid et point jaloux : notez ces deux points-ci.
Cette Fille voulait aussi
Qu'il eût du bien, de la naissance,
De l'esprit, enfin tout. mais qui peut tout avoir ?
Le destin se montra soigneux de la pourvoir (2) :
Il vint des partis d'importance.
La belle les trouva trop chétifs (3) de moitié :
" Quoi ? moi ! quoi ces gens-là ? l'on radote, je pense.
À moi les proposer ! hélas ils font pitié .
Voyez un peu la belle espèce ! "
L'un n'avait en l'esprit nulle délicatesse ;
L'autre avait le nez fait de cette façon-là ;
C'était ceci, c'était cela,
C'était tout ; car les précieuses (4)
Font dessus tout les dédaigneuses.
Après les bons partis les médiocres (5) gens
Vinrent se mettre sur les rangs.
Elle de se moquer. " Ah vraiment, je suis bonne
De leur ouvrir la porte ! ils pensent que je suis
Fort en peine de ma personne.
Grâce à Dieu je passe les nuits
Sans chagrin (6), quoique en solitude. "
La belle se sut gré de tous ces sentiments.
L'âge la fit déchoir ; adieu tous les amants (7).
Un an se passe et deux avec inquiétude.
Le chagrin vient ensuite : elle sent chaque jour
Déloger quelques Ris (8), quelques Jeux, puis l'Amour ;
Puis ses traits choquer et déplaire ;
Puis cent sortes de fards. Ses soins ne purent faire
Qu'elle échappât au temps, cet insigne larron :
Les ruines d'une maison
Se peuvent réparer ; que n'est cet avantage
Pour les ruines du visage !
Sa préciosité changea lors de langage.
Son miroir lui disait : " Prenez vite un mari. "
Je ne sais quel désir le lui disait aussi ;
Le désir peut loger chez une précieuse.
Celle-ci fit un choix qu'on n'aurait jamais cru,
Se trouvant à la fin tout aise et tout heureuse
De rencontrer un malotru (9).
Vocabulaire
(1) aspect, façon de se comporter, il était agréable
(2) de l'établir par un mariage...
(3) vils, méprisables
(4) Femmes affectées dans leurs manières et leur langage. Molière les a parodiées dans ses Précieuses ridicules
(5) qui sont de condition sociale moyenne
(6) " Inquiétude, ennui, mélancolie " (dictionnaire de Furetière)
(7) ceux qui ont déclaré leurs sentiments amoureux, à la différence du sens actuel
(8) rires
(9) " Terme populaire, qui se dit des gens mal faits, mal bâtis, et incommodés, soit en leur personne, soit en leur fortune " (dictionnaire de Furetière)
Liens externes
- Le héron (La Fontaine) (78 tours numérisé / audio : 1 minute 51 secondes), lecture de Jacques Charon sur le site de la Médiathèque Musicale de Paris
- La fille (La Fontaine) (78 tours numérisé / audio : 2 minutes 12 secondes), lecture de Jacques Charon sur le site de la Médiathèque Musicale de Paris
- La fille ; Le chat, la belette et le petit lapin (audio : 2 minutes 43 secondes ; 2 minutes 41 secondes), fables lues par Eugène Silvain sur le site de la Bibliothèque Nationale de France
- Portail des contes et fables
- Portail de la poésie
- Portail de la littérature française