La France renaissante

La France renaissante est une statue équestre en bronze installée sur l'île aux Cygnes et le pont de Bir-Hakeim à Paris. Réalisée par Holger Wederkinch en 1930, elle a été donnée à la municipalité par la communauté danoise. Initialement destinée à représenter Jeanne d'Arc, son esthétique guerrière a retardé son installation, qui eut lieu en 1958 au prix d'un changement de nom.

La France renaissante
La France renaissante avec la ligne 6 du métro de Paris en arrière-plan.
Artiste
Date
Type
Technique
Hauteur
4,5 mètres
Localisation
Coordonnées
48° 51′ 20,75″ N, 2° 17′ 16,2″ E
Localisation sur la carte de Paris

Localisation

Cette statue est installée au centre d'une placette située entre les deux rives de la Seine, correspondant à la pointe amont de l'île aux Cygnes, dont elle est isolée par le pont de Bir-Hakeim, et qui sert également de belvédère donnant sur la Tour Eiffel.

Bien que sise à la limite entre deux arrondissements, les 16e et 15e, elle est administrativement rattachée à ce dernier.

Description

La France renaissante est une statue en bronze de 4,5 mètres de haut[1].

Elle représente une guerrière en cotte de mailles, coiffée d'un casque entouré par un nimbe ; celui-ci, représenté de profil, suggère que la statue est à voir de côté[2].

L'héroïne chevauche un coursier fougueux[2] dont les quatre pieds sont réunis, et le museau et la queue relevés, accentuant l'impression de mouvement[3]. Le pied de la cavalière presse le grasset du cheval[4].

De sa main droite, elle brandit un glaive à lame ondulée, tandis que son autre main retient un étendard[3] dont la bannière flotte au-dessus de la queue du cheval[4].

Critique

La statue, « animée d'un intense mouvement »[5], est « une allégorie montée sur un cheval furieux, d'un lyrisme échevelé quelque peu fantastique, coulé dans le bronze »[6]. L'ensemble est empreint « d'un lyrisme frénétique et assez superbement dressé face au cours de la Seine »[7]. Le résultat est « saisissant », de « conception efficace » mais la pose « exagérée »[4].

Histoire

La statue a été fondue dans l'atelier d'Alexis Rudier[8]. Elle a été présentée au Salon de 1930[4],[1],[9].

Elle était initialement supposée représenter Jeanne d'Arc, dont elle est la cinquième statue à Paris, érigée tardivement après celles de la fin du XIXe siècle[2],[10],[11] :

Statue de Jules Roulleau à Chinon.

Elle présente une certaine proximité avec la statue équestre réalisée en 1893 par Jules Roulleau à Chinon, et des attributs communs avec d'autres statues de l'héroïne[2]. Néanmoins, cette esthétique n'a pas été appréciée, son caractère ayant été jugé trop emphatique et trop guerrier, contraire à l'iconographie habituelle de Jeanne d'Arc et au « sentiment national attaché à [son] image »[12]. Ainsi, le conseil municipal de Paris y a vu une interprétation nordique de Jeanne d'Arc, proche d'une Walkyrie, en lien avec la nationalité danoise du sculpteur et de ses commanditaires[13]. De même, la Commission centrale des monuments commémoratifs, dépendant du ministère de l'Intérieur, a émis un avis défavorable en , et certains de ses membres ont démissionné en signe de protestation[2].

L'ambassade du Danemark, qui était associée à Wederkinch dans ce projet depuis 1930[14], est intervenue[15]. Pour éviter un incident diplomatique qui aurait pu être causé par l'oubli dans un dépôt, ou même la démolition, d'un cadeau de la communauté danoise[14], la statue a été rebaptisée La France renaissante. En effet, cette solution permettait de lui retirer sa portée commémorative et de lui donner un simple statut décoratif : ainsi pouvait-elle être érigée malgré l'avis de la Commission, celle-ci n'étant consultée que pour les monuments commémoratifs. Cette érection a été autorisée par un décret du [16] et l'inauguration a eu lieu en 1958 en présence de l'ambassadeur du Danemark[17],[18],[14].

De plus, ce nom permettait d'en faire une allégorie du discours tenu par de Gaulle le au Royal Albert Hall de Londres, dans lequel il faisait référence à la bataille de Bir Hakeim, qui a donné son nom en 1949 à l'ancien pont de Passy, où la statue est installée[19] :

« Quand, à Bir Hakeim, un rayon de sa gloire renaissante est venu caresser le front sanglant de ses soldats, le monde a reconnu la France. »

Divers

Il en existe une maquette en bronze patiné, d'une hauteur de 98 centimètres, vendue aux enchères en 2007 par la famille du sculpteur[20].

En 1986, une photo de la statue, avec la tour Eiffel en arrière-plan, fait la couverture d'un numéro de la revue Monuments historiques[21].

Références

  1. « Monument de la France renaissante », À nos grands hommes, Musée d'Orsay.
  2. Christel Sniter, « La gloire des femmes célèbres : Métamorphoses et disparités de la statuaire publique parisienne de 1870 à nos jours », Sociétés & Représentations, no 26, , p. 153–170 (DOI 10.3917/sr.026.0153).
  3. Georges Poisson, Guide des statues de Paris : Monuments, décors, fontaines, Paris, Hazan, coll. « Les Guides visuels » (no 2), , 157 p. (ISBN 2-85025-216-6), p. 23.
  4. (en) Lida Louise Fleitmann (en) (préf. Alfred Munnings), The Horse in Art : From Primitive Times to the Present, New York, William Farquhar Payson, , p. 330.
  5. Hervé Cabezas, « Jeanne d'Arc », dans Geneviève Bresc-Bautier (dir.) et Xavier Dectot (dir.), Art ou politique ? : Arcs, statues et colonnes de Paris, Action artistique de la ville de Paris, coll. « Paris et son patrimoine », , 237 p. (ISBN 2-913246-02-8), p. 199.
  6. Gilles-Antoine Langlois, « L'île des Cygnes », dans Gilles-Antoine Langlois (dir.), Le XVe arrondissement : L'étendue de la réussite, Paris, Délégation à l'action artistique de la ville de Paris, coll. « Paris et son patrimoine », , 246 p. (ISBN 2-905118-85-7), p. 144.
  7. Jean-Jacques Lévêque, Guide des parcs et jardins de Paris et de la région parisienne, Paris, Horay, coll. « Guides Horay » (no 10), , 330 p. (ISBN 2-7058-0094-8).
  8. Philippe de Ladebat, « Une Jeanne d'Arc incognito à Paris ? », sur histoire-genealogie.com, .
  9. « #19 – De Jeanne, la Parisienne (4ème partie) », sur PanamStory, .
  10. Christel Sniter, « Les statues de femmes célèbres érigées à Paris de 1870 à nos jours : Entre lieux de mémoire et espace d'investissement », dans Sylvette Denèfle (dir.), Femmes et villes (texte issu du colloque Femmes et villes à Tours en ), Tours, Maison des Sciences de l'Homme-Villes et territoires, Presses universitaires François-Rabelais, coll. « Perspectives Villes et Territoires » (no 8), , 539 p. (ISBN 2-86906-184-6, DOI 10.4000/books.pufr.426), p. 529–539 [533] [lire en ligne].
  11. Christel Sniter, « Pour une géographie sexuée de Paris : Étude des statues de femmes célèbres (de 1870 à nos jours) », dans Christine Bard (dir.), Le Genre des territoires : Masculin, féminin, neutre, Angers, Presses de l'Université d'Angers, , 348 p. (ISBN 2-903075-98-0), p. 255–270 [256].
  12. (de) Volker Hunecke, « Republikaner und Monarchen zu Pferd : Denkmalkulturen in Paris und Berlin », dans Jan Cölln (dir.) et Annegret Middeke (dir.), Dioskuren, Konkurrenten und Zitierende : Paarkonstellationen in Sprache, Kultur und Literatur, Gœttingue, Vandenhoeck & Ruprecht, , 360 p. (ISBN 978-3-8471-0300-4, DOI 10.14220/9783737003001.55), p. 55–84 [66] [lire en ligne].
  13. BMO décembre 1954, cité par Sniter 2008.
  14. Philippe Krief, Paris en histoires : XIXe et XXe siècles, Paris, Massin, , 268 p. (ISBN 978-2-7072-0576-6), p. 72–74.
  15. Lanfranchi 2004 : « À la préfecture de la Seine l'embarras est grand car l'ambassade du Danemark est intervenue afin que le monument soit érigé. »
  16. Décret du portant approbation de projets de monuments commémoratifs, JORF no 186 du , p. 7729, sur Légifrance.
  17. Jacques Lanfranchi, Les statues des grands hommes à Paris : Cœurs de bronze, têtes de pierre, Paris/Budapest/Torino, L'Harmattan, coll. « Histoire de Paris », , 297 p. (ISBN 2-7475-6645-5), p. 124–125.
  18. Christian Dupavillon, Paris côté Seine, Paris, Seuil, , 381 p. (ISBN 2-02-051688-8), p. 228 et 366.
  19. François Broche, Direction de la mémoire, du patrimoine et des archives, Bir Hakeim : La France renaissante, Paris, Italiques, , 253 p. (ISBN 2-910536-26-2), p. 250.
  20. (da) « Modern: Malerier, skulpturer og grafik », catalogue de la vente no 772, Bruun Rasmussen (da), 6–7 juin 2007, p. 116–117, item no 254.
  21. Monuments historiques, no 144, avril-mai 1986, « La République ».

Voir aussi

Bibliographie

Dans le Bulletin municipal officiel de la Ville de Paris. Débats des assemblées de la Ville de Paris et du département de la Seine (BMO) :

  • « Conseil municipal de Paris, 5e session extraordinaire de 1953, séance des jeudi et vendredi  : 81. — Acceptation du don d'une statue équestre de Jeanne d'Arc », BMO, no 28, , p. 1066 (lire en ligne).
  • « Conseil municipal de Paris, 4e session ordinaire de 1954, séance du lundi  : 9. — Renvoi à la 3e Commission d'un mémoire de M. le préfet de la Seine tendant à l'érection d'une statue équestre de Jeanne d'Arc square Samuel-Rousseau », BMO, no 23, , p. 978–980 (lire en ligne).
  • « Conseil municipal de Paris, 2e session extraordinaire de 1955, séance des jeudi et vendredi  : 78. — Érection d'une statue équestre de Jeanne d'Arc sur le terre-plein situé en amont du pont de Bir-Hakeim à l'extrémité de l'île des Cygnes », BMO, no 6, , p. 160 (lire en ligne).

Articles connexes

Liens externes

  • Portail de Paris
  • Portail de la sculpture
  • Portail du Danemark
  • Portail des relations internationales
  • Portail équestre
Cet article est issu de Wikipedia. Le texte est sous licence Creative Commons - Attribution - Partage dans les Mêmes. Des conditions supplémentaires peuvent s'appliquer aux fichiers multimédias.