Mélantérite
La mélantérite est une espèce minérale composée de sulfate de fer heptahydraté, précisément le sulfate ferreux heptahydraté naturel, de formule chimique FeSO4· 7 H2O. C'est un minéral sulfaté secondaire qui se forme, dans la nature, par oxydation des sulfures de fer tels que pyrite, marcassite, pyrrhotite, chalcopyrite, arsénopyrite ou berthiérite sous l'action de l'oxygène de l'air en présence d'humidité. Les agrégats cristallins fragiles de densité 1,9, parfois en concrétions diverses ou en stalactites, sont le plus souvent gris sales, voire avec des nuances blanches, vertes, bleues, bleu-vertes ou vert-bleues, ces dernières s'expliquant par des traces d'ions cuivreux, alors que les spécimens purs ou les plus propres sont incolores à blancs.
Mélantérite Catégorie VII : sulfates, sélénates, tellurates, chromates, molybdates, tungstates[1] | |
Melanterite - Copperas Mountain, Ohio | |
Général | |
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Nom IUPAC | Sulfate de fer(II) heptahydraté |
Numéro CAS | |
Classe de Strunz | 7.CB.35
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Classe de Dana | 29.06.10.01
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Formule chimique | FeSO4· 7 H2O |
Identification | |
Masse formulaire[2] | 278,015 ± 0,011 uma H 5,08 %, Fe 20,09 %, O 63,3 %, S 11,53 %, |
Couleur | incolore à blanc, bleu-vert, bleuâtre à verdâtre, vert, bleu verdâtre à bleu si inclusions de cuivre |
Classe cristalline et groupe d'espace | prismatique 2/m - groupe d'espace P 21/c |
Système cristallin | monoclinique |
Réseau de Bravais | primitif P paramètres de maille a = 14,11 Å, b = 6,51 Å, c = 11,02 Å ; β = 105,15° |
Macle | non connu |
Clivage | parfait à {001}, distinct à {110} |
Cassure | conchoïdale (cassure fragile) |
Habitus | Rares cristaux dans la nature, cristaux prismatiques courts, pseudo-octaèdres, tabulaires ou aciculaires ; agrégats de cristaux aciculaires, tabulaires épais, agrégats fibreux, formations le plus souvent en concrétions ou en stalactites ; nodules à faciès massif (souvent trace de Cu) ; véritables masses rocheuses souvent pulvérulentes sous pression ; encroûtement à structure pulvérulente, en efflorescence, poudres. |
Échelle de Mohs | 2 |
Trait | blanc |
Éclat | vitreux, parfois soyeux (aspect fibreux) |
Propriétés optiques | |
Indice de réfraction | nα = 1.470-1.471 - 1.471 nβ = 1.477 - 1.480 nγ = 1.486 |
Biréfringence | Biaxial (+) ; δ = 0,016 2V = 86° |
Transparence | transparent, translucide à opaque |
Propriétés chimiques | |
Densité | 1,89 1,898 1,899 (très souvent arrondi à 1,9) |
Température de fusion | 64 °C |
Solubilité | soluble à l'eau à froid, 266 g/l à 20 °C, encore plus à chaud 438 g/l à 80 °C, soluble dans le méthanol |
Comportement chimique | devient du monohydrate ou szomolnokite vers 90 °C, anhydre à 300 °C |
Propriétés physiques | |
Radioactivité | aucune |
Précautions | |
Directive 67/548/EEC | |
SIMDUT[3] | |
Produit non contrôlé |
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Unités du SI & CNTP, sauf indication contraire. | |
La mélantérite est un indicateur de la présence possible d'acide sulfurique produit par l'oxydation des sulfures et ne doit pas être prise à main nue, ou inhalée lorsqu'elle est sous forme pulvérulente. Selon les anciens glycochimistes, elle possède un goût légèrement sucré, astringent et métallique.
Historique de la description et appellations
Inventeur et étymologie
Dioscorides en 50 apr. J.-C. est le premier à en faire mention écrite. Sa description moderne est due à René Just Haüy qui en 1801 la nomme fer sulfaté; François Sulpice Beudant en 1832[4] lui donne le nom de mélanterie (du grec μελαντηρία, melanteria ou couperose). Le mot racine μελας mélas désigne déjà le sulfate de fer, tout comme son dérivé melanteria. Ce n'est qu'en 1850 que le terme mélantérite sera définitivement arrêté par Haidinger[5].
Topotype
Non référencé pour cette espèce.
Synonymie
- couperose verte
- fer sulfaté (selon Haüy 1801)
- mélantérie (Beudant 1832)
- mélanthérite (Chapman, E.J. 1843)[6]
- vitriol vert(pour les Anciens chimistes)
- copperas (pour la mélantérite des mines de cuivre américaines)
- atrament (dans le scriptorium médiéval)
Caractéristiques physico-chimiques
La mélantérite, exposée à l'air humide, tend à devenir blanc jaunâtre à opaque. Placée au soleil à des températures caniculaires, ou légèrement chauffée, elle se déshydrate en sidérotile FeSO4· 5 H2O qui appartient au groupe minéral de la chalcantite.
Critères de détermination
FeIISO4 · 7 H2O est soluble dans l'eau : 15,65 g pour 100 g d'eau pure vers 0 °C, 32,8 g à 22 °C, 48,6 g à 50 °C...
Elle est soluble dans le méthanol, soit 15,6 g pour 100 g de méthanol pur à 18 °C. Par contre, le minéral est insoluble dans l'éthanol et quasi-insoluble dans l'alcool à 95°.
Un chauffage prolongé à l'étuve à 90 °C de la mélantérite permet d'obtenir facilement le sulfate du fer II monohydraté FeSO4· H2O, par la perte de 6 molécules d'eau. Le sulfate ferreux anhydre FeSO4 n'apparaît complètement qu'à 300 °C.
Variétés et mélanges
- pisanite : variété cuprifère de mélantérite de formule (Fe, Cu)SO4 · 7 H2O. Décrite par Alfred Kenngott en 1860 dédié au minéralogiste et marchand de minéraux Félix Pisani ( Constantinople, Turquie - Paris)[7].
- Synonyme de pisanite
- chalcitris
- chalcite
- mélantérite cuprifère
- cuprokirovite : variété cuprifère de kirovite de formule (Fe,Mg,Cu)SO4 · 7 H2O. Contenant 3,36 % MgO et 3,18 % CuO. Décrite par Vertushkov (1939) à Smolnik baňa, Smolnické rudné pole en Slovaquie.
- Synonyme de cuprokirovite
- cuprojarošite
- kirovite : variété magnésienne de mélantérite décrite par Vertushkov en 1939, à Smolnik baňa, Smolnické rudné pole en Slovaquie[8], de formule (Fe,Mg,)SO4 · 7 H2O.
- Synonyme de kirovite
- luckite : variété manganésifère de mélantérite décrite par Carnot en 1879[10], de formule (Fe,Mn)SO4 · 7 H2O. Le terme dérive de la localité type de « the Lucky Boy » Mine, Butterfield Canyon, Salt Lake County, Utah, États-Unis.
- Synonyme de luckite
- luckyite
- mélantérite manganésifère
- sommairite : variété zincifère de mélantérite de formule (Fe,Zn)SO4 · 7 H2O.
Cristallochimie
La mélantérite sert de chef de file à un groupe de sic sulfates heptahydratés monocliniques qui ont la même structure de base que la mélantérite mais avec substitution des ions fer par des ions manganèse, cobalt, cuivre ou zinc.
- Le groupe de la mélantérite
- Biebérite (sulfate de cobalt heptahydraté, CoSO4 · 7 H2O)
- Boothite (sulfate de cuivre heptahydraté, CuSO4 · 7 H2O)
- Mallardite (sulfate de manganèse heptahydraté, MnSO4 · 7 H2O)
- Zinc-mélantérite (sulfate de zinc, cuivre et fer heptahydraté, (Zn,Cu,Fe)SO4 · 7 H2O)
- Alpersite (sulfate de magnésium et de cuivre heptahydraté, (Mg,Cu)SO4 · 7 H2O)
Cristallographie
- Elle cristallise dans le système monoclinique.
- Paramètres de la maille conventionnelle : a = 14,11, b = 6,51, c = 11,02, Z = 4 ; bêta = 105,25° V = 976,61
- Densité calculée = 1,89
Propriétés physiques
- Habitus
- Elle se présente le plus souvent sous forme de petits cristaux n'excédant pas 2 mm, mais peut aussi exister sous forme de plus gros cristaux. Les formes cristallines sont variées : prismes courts, cristaux tabulaires, pseudo-rhomboèdres, pseudo-octaèdres, formes fibreuses, aciculaires. Les cristaux s'agencent en agrégats grenus, efflorescences, encroûtements ou masses stalactitiques et concrétionnées.
Gîtes et gisements
Il s'agit d'un minerai secondaire, issu le plus souvent de la dégradation des différents sulfates de fer dans les zones d'oxydation. Il peut aussi être récupéré parmi les dépôts de sublimation des fumerolles. Son remaniement par érosion et son transport différentiel le transforme ipso facto en minéral ou roche évaporites rémanents des milieux arides. La sidérotile, son produit de déshydratation, se retrouve surtout en surface.
Gîtologie et minéraux associés
- Gîtologie
- Elle se rencontre dans les crevasses ou cavités des roches sédimentaires et métamorphiques sulfurées et oxydées ainsi que dans le charbon et le lignite (roches carbonées qui contiennent très souvent de la marcassite altérable) mis en contact avec l'air. Elle se forme rapidement sur les murs, les voûtes et les structures de soutènement des galeries de mines dans lesquelles se trouvent des sulfures de fer récemment exposés à l'oxygène de l'air en conditions humides à la suite des travaux d'excavation de la mine. Par exemple, elle se retrouve très souvent fixée sur les vieux bois de mines, qui ont servi de poutres de soutènement. Elle s'amasse sur certaines parois de galerie.
- Minéraux associés
- chalcanthite, epsomite, pickeringite, halotrichite, pisanite, et autres sulfates.
Gisements remarquables
- Allemagne
- Espagne
- les mines de Rio Tinto
- États-Unis
- Ducktown, Tennessee ; Dakota du Sud ; Colorado ; Bigham Canyon, Utah ; Comstock Lode, Nevada ; Butte, Montana ; différentes mines de l'Arizona et enfin quelques régions de Californie.
- France
- Mine de Salsigne, Aude
- Italie
- Russie
- Suède
- Tchéquie
Usage
Le sulfate de fer s'emploie en milieu aqueux pour purifier les encres. Il était utilisé autrefois pour la fabrication finale d'encres ferro-galliques. Le bois de chêne, équivalent du tan à haute teneur en tanins, trempé dans l'eau, permettait d'obtenir une eau concentrée après évaporation en tanins, qui donnait après ajout d'atrament (sel ferreux hydraté ou mélantérite) de l'encre violette très foncée, dite encre noire selon les codes couleurs de l'époque médiévale.
La mélantérite est également employé comme coagulant, puisque le sulfate ferreux favorise les dépôts colloïdaux. Par exemple, dans l'industrie des eaux pour la purification de l'eau.
Il s'agit aussi d'un engrais, notamment pour lutter contre les carences en fer ou chlorose.
Voir aussi
Bibliographie
- Ronald L. Bonewitz, Margareth Carruthers, Richard Efthim, Roches et minéraux du monde, Delachaux et Niestlé, 2005, 360 pages (traduction de l'ouvrage anglo-saxon, publié par Dorling Kindersley Limited, London, 2005), en particulier p. 214. (ISBN 2-603-01337-8)
Liens externes
Notes et références
- La classification des minéraux choisie est celle de Strunz, à l'exception des polymorphes de la silice, qui sont classés parmi les silicates.
- Masse molaire calculée d’après « Atomic weights of the elements 2007 », sur www.chem.qmul.ac.uk.
- « Sulfate ferreux heptahydraté » dans la base de données de produits chimiques Reptox de la CSST (organisme québécois responsable de la sécurité et de la santé au travail), consulté le 24 avril 2009
- Beudant, F.S. (1832), Traité élémentaire de Minéralogie, second édition, 2 volumes: 2: 482.
- Haidinger, Wm. (1850) Handbuch der bestimmenden Mineralogie. Vienna, 2d. Edition: 489.
- Chapman, E.J. (1843) Practical Mineralogy. London, Paris, and Leipzig: 14.
- (1852) Kenngott, G.A. (1852) Ubersichte der Resultate mineralogischer Forschungen For the years for 1856-57, Leipzig: 10: 1860
- Grigory N. Vertushkov (1939) Bull. Acad. Sc. URSS., Sér. Geol., N° 1: 109.
- Kokta (1937) Sbornik Klubu Příro. Brnĕ: 19: 75.
- Carnot (1879) Bulletin de la Société Française de Minéralogie: 2: 168.
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