Marius Moutet
Marius Moutet est un homme politique français, né le à Nîmes (Gard) et mort le à Paris.
Pour les articles homonymes, voir Moutet.
Marius Moutet | |
Marius Moutet, en 1933. | |
Fonctions | |
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Député 1914-1928 puis 1929-1940 puis 1945-1947 Sénateur 1947-1968 | |
– | |
Gouvernement | IIIe République - IVe République |
Groupe politique | SFIO |
Biographie | |
Date de naissance | |
Lieu de naissance | Nîmes (France) |
Date de décès | |
Lieu de décès | Paris (France) |
Nationalité | Français |
Résidence | Rhône puis Drôme |
Biographie
Il fait partie des étudiants socialistes de Lyon, milite chez les socialistes indépendants dès 1895. Il devient avocat. En 1900, il est délégué du Rhône au congrès de Wagram, en 1900. Cinq ans plus tard, il est délégué de ce département au congrès constitutif de la Section française de l'Internationale ouvrière.
Il bénéficie du soutien de Jean Jaurès lors de sa candidature à la députation en juillet 1914 dans la circonscription de Lyon-Vaise, dans le Rhône où il est élu. Pendant la Première Guerre mondiale, en , il est chargé par Aristide Briand de convaincre le nouveau gouvernement russe, dirigé par Alexandre Kerensky, de continuer la guerre aux côtés de la France et de la Grande-Bretagne. Peu avant ce voyage en Russie, Moutet est parmi les 52 députés qui votent à la Chambre pour une consultation des Alsaciens sur leur réintégration dans la France. Cette position est minoritaire. La Chambre décide qu'il n'y aura aucune consultation des Alsaciens sur le retour de l'Alsace-Lorraine à la France[1]. La même année, Moutet plaide en faveur de Joseph Caillaux devant la Haute cour de justice. A la suite de la répudiation des emprunts russes, Marius Moutet intervient à la chambre pour dénoncer le rôle des banques et de l'état dans le placement de ces titres auprès d'un vaste public[2].
Également membre du Comité central de la Ligue des droits de l'homme (1918-1936, honoraire comme ministre de 1936-1939, 1939-1940, 1945-47), il est réélu député du Rhône en 1919 et 1924, mais battu en 1928 par le candidat républicain-socialiste. Le , il est élu député de la Drôme, succédant à Jules Nadi, décédé. Devenu spécialiste des questions coloniales, il prône une politique généreuse d'assimilation, refusant la répression brutale et le paternalisme condescendant. Il est l'avocat des indépendantistes vietnamiens.
Il est ministre des Colonies dans les gouvernements de Front populaire du au (gouvernements Léon Blum (1), Camille Chautemps (3) et Blum (2) mais pas dans le cabinet Chautemps (4) qui dure deux mois). Moutet est confronté aux difficiles questions coloniales. Il supprime le bagne en Guyane. Il interdit l'usure (décret du ) et ordonne aux administrateurs de coloniaux de ne plus considérer la famine comme une fatalité mais comme un fléau à combattre, à la suite de l'enquête menée de à . Il multiplie les initiatives pour associer les colonisés à l'administration de leur territoire. Il nomme pour la première fois un gouverneur noir de la Guadeloupe : Félix Éboué. Il fait voter l'amnistie des indépendantistes vietnamiens, qu'il avait défendus devant les tribunaux français quelques années plus tôt.
Après la guerre, alors ministre socialiste des Colonies, Marius Moutet, donna l'ordre aux troupes françaises de réprimer une révolte à Madagascar[3].
Le , il déclare, lors du congrès de la fédération drômoise de la SFIO, que « chaque concession [aux puissances de l'Axe] nous rapproche de la guerre ».
Marius Moutet est l’un des quatre-vingts parlementaires qui refusent les pleins pouvoirs à Philippe Pétain en 1940. II entre dans la clandestinité, puis se réfugie en Suisse pour échapper à l'arrestation, un de ses fils étant interné à sa place à Vals-les-Bains par le régime de Vichy en guise de représailles.
À la Libération, il est réélu député de la Drôme aux deux Assemblées nationales constituantes en 1945, puis est élu au Conseil de la République.
Le 27 juin 1945, Marius Moutet, dépose les statuts de l’OPEJ (Œuvre de Protection des Enfants Juifs), association loi 1901, dix-sept maisons ouvrent dans le Sud-Ouest, la Région parisienne, l’Isère et le Sud-Est pour prendre en charge les enfants cachés dans les campagnes françaises et ceux revenus des camps de la mort (sa femme était juive et sa fille et la belle-famille de celle-ci durent se cacher pendant l'Occupation[4]).
Il est président du conseil général jusqu'en 1951. Il retrouve le ministère de la France d’Outre-mer dans les gouvernements Félix Gouin (du au ), Georges Bidault (du au ), Léon Blum (du au ) et Paul Ramadier (du au ). Il négocie avec Ho Chi Minh et fonde le Fonds d’investissement pour le développement économique et social des territoires d’Outre-mer (FIDES). Il est en fonction lors de l’insurrection malgache de 1947. Convaincu du bien-fondé de la répression, qui fit plusieurs dizaines de milliers de victimes, il critique néanmoins les colons français auxquels il reproche d'avoir laissé la situation dégénérer en bloquant les réformes nécessaires pour réduire les inégalités économiques et sociales[5]. À partir de 1947, il représente le Soudan français (aujourd'hui Mali) au Conseil de la République puis le département de la Drôme dès 1948 sous le IVe République. Il représente ensuite le même département au Sénat sous la Ve République, jusqu'à sa mort. Il est doyen d’âge du Sénat.
Comme parlementaire, il œuvre en faveur de la paix au sein de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, de l’Assemblée de l'Union de l'Europe occidentale et de l’Union interparlementaire.
Famille
Le 31 janvier 1901 à Lyon, il épousa Iakovlena (Anne) Matoussévitch (1877-1926), une jeune femme d'origine juive russe (elle est née à Minsk) et dont il eut une fille Marianne, qui épousera Georges Basch, le fils du philosophe Victor Basch (1863-1944), cofondateur et président de la Ligue des droits de l'homme[4]. Georges Basch se suicidera en 1940 à la suite de la débâcle française[4].
D'une autre union, il aura une autre fille, Aimée Moutet (1936-2020), historienne du mouvement ouvrier et de l'entreprise[6].
Hommages
À l'initiative de Jean Besson, sénateur de la Drôme, un institut d'histoire contemporaine porte son nom.
En 2012, une biographie par Freddy Martin-Rosset est parue sur son itinéraire politique dans la Drôme "Il était une fois 5000 paysans idéalistes..."
Bibliographie
- Robert Delavignette, « La politique de Marius Moutet au ministère des colonies », dans Pierre Renouvin et René Rémond (dir.), Léon Blum, chef de gouvernement, Presses de la Fondation nationale des sciences politiques, 1967 ; rééd., coll. « Références », 1981.
- Jean Fremigacci, « La vérité sur la grande révolte de Madagascar », L'Histoire, no 318, .
- Jean-Pierre Gratien, Marius Moutet : un socialiste à l'Outre-mer, Paris, L'Harmattan, 2006.
- (en) James I. Lewis, « The Tragic Career of Marius Moutet », European History Quarterly, 38,1 (2008), p. 66-92.
- Freddy Martin-Rosset, L'Itinéraire politique drômois de Marius Moutet, Paris, édition de l'OURS (Office Universitaire de Recherche Socialiste), 2012.
- Marie-Rose Polidori, L'Action de Marius Moutet au ministère des colonies, mémoire de maîtrise en histoire dirigé par Marc Michel, université de Provence, 1992.
- « Marius Moutet », dans le Dictionnaire des parlementaires français (1889-1940), sous la direction de Jean Jolly, PUF, 1960
Article connexe
Références
- Yves Le Jariel, L'ami oublié de Malraux en Indochine, Paul monin (1890-1929), Paris, Les Indes savantes, , 260 p.
- (en) Kim Oosterlinck, Hope Springs Eternal. French Bondholders and the Repudiation of Russian Sovereign Debt,, Yale University Press, , 264 p. (ISBN 9780300190915), p. 122-123
- Hubert Bonin, compte-rendu du livre de Jean-Pierre Gratien, Marius Moutet. Un socialiste à l'Outre-Mer, Outre-mers, 2007, vol. 94, n°356, pp. 320-322, consulté sur persee.fr le 15 mai 2017.
- « Françoise Basch, Ilona, ma mère et moi. Une famille juive sous l’Occupation, 1940-1944 », Clio. Femmes, genre, histoire, (lire en ligne, consulté le ).
- L'Empire qui ne veut pas mourir: Une histoire de la Françafrique, Seuil, , p. 138-139
- "La mort d’Aimée Moutet, historienne spécialiste de l’entreprise" par Patrick Fridenson, Le Monde, 20 octobre 2020.
Liens externes
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