Mausolée de Reza Chah
Le mausolée de Reza Chah (en persan : آرامگاه رضاشاه), situé dans les environs de Ray au sud de Téhéran, était le lieu de sépulture de Reza Shah, l'avant-dernier empereur de l'Iran.
Mausolée de Reza Chah | ||
Le mausolée de Reza Shah à Rey, dans les années 1970 | ||
Présentation | ||
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Nom local | آرامگاه رضاشاه | |
Culte | Islam chiite | |
Début de la construction | 1948 | |
Fin des travaux | 1950 | |
Architecte | Mohsen Foroughi, Keyqobad Zafar, Ali Sadeq | |
Date de démolition | mai 1980 | |
Géographie | ||
Pays | Iran | |
Province | Téhéran | |
Ville | Rey | |
Coordonnées | 35° 35′ 09″ nord, 51° 26′ 03″ est | |
Géolocalisation sur la carte : Iran
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Après la révolution de février 1979, le mausolée a été détruit sous la direction de l'Ayatollah Sadegh Khalkhali et sur ordre de l'ayatollah Ruhollah Khomeini. Dans ses mémoires, Khalkhali a décrit combien il a été difficile de détruire le bâtiment.
La zone abrite finalement une école de théologie[réf. souhaitée].
Construction interne et externe
Le mausolée et ses alentours s'étendaient sur une superficie de 9 000 mètres carrés, et mesurait 25 mètres de haut (sans la coupole située sur le dessus), c'est-à-dire que sa hauteur était plus courte de 7 mètres que la coupole de la mosquée voisine Shah Abdol Azim. Le style architectural était inspirée du tombeau des Invalides à Paris, où repose Napoléon[1].
À l'intérieur, une colonnade circulaire délimitait des galeries et le centre du mausolée, où se trouvait le sarcophage de Reza Shah, en marbre bleu izimir, à côté duquel se trouvait un buste en marbre blanc de Reza Shah, et un exemplaire du Coran[2].
Parc et jardins
Le mausolée possédait deux entrées : une donnant directement dans la cour de la mosquée Shah Abdol Azim, et une autre dans un petit parc, délimité par un mur. Quelques années plus tard, probablement dans les années 1970[3], juste avant le jubilé d'Or de la dynastie Pahlavi, le mur est abattu (ou élargi), le petit parc est remplacé par deux grands bassins en L cernant le passage amenant au mausolée, et une très grande avenue est percée dans tout Rey dans la continuité du passage amenant au mausolée [4].
Histoire
Reza Chah est renversé en 1941 à la suite de l'invasion anglo-soviétique de l'Iran, puis part en exil à l'île Maurice puis en Afrique du Sud, ou il mourra le . Il est enterré à la suite de funérailles simples à la mosquée Al-Rifa'i, au Caire. L'Iran est très occupé, devant gérer l'occupation étrangère pendant la Seconde Guerre mondiale, puis la crise d'Azerbaïdjan, mais après 1947, le calme revient et l'idée de rapatrier le corps de l'ancien souverain survient au Parlement. En 1948, le Majlis décerne à Reza Chah le titre posthume de « Reza Chah le Grand », et le retour des cendres et pour ça, la construction d'un mausolée sont ordonnées.
Retour de la dépouille de Reza Chah en Iran
La construction du mausolée débute en 1948. Les ingénieurs sont Mohsen Foroughi, fils de Mohammad Ali Foroughi, Keyqobad Zafar et Ali Sadeq, pionniers d'une architecture moderne en Iran [5]. En mars 1950, les travaux sont finis, et le cercueil de Reza Shah est ramené d'Égypte par train puis par avion, en faisant deux escales, une à la Mecque et l'autre à Médine [6].
Le ont lieu les funérailles nationales de Reza Chah à Rey, auxquelles participent Mohammad Reza Pahlavi, alors empereur, toute la famille Pahlavi, de nombreux ministres et le Premier Ministre Mohammad Mossadegh. Le cercueil est placé dans un sarcophage où il restera pendant 28 ans, 8 mois et 6 jours [6].
Sous Mohammad Reza Chah
D'autres personnes seront enterrées dans le mausolée après 1951 : le Premier Ministre assassiné Haj Ali Razmara, le valet de chambre et ami de Reza Chah Soleyman Behboudi, le prince Ali-Reza Pahlavi, mort dans un accident d'avion en 1954, le général-Premier Ministre Fazlollah Zahédi et le Premier Ministre assassiné Hassan Ali Mansour.
Le mausolée est aussi un lieu de visite obligé pour les chefs d'état étrangers qui viennent en Iran ; il est ainsi visité en 1961 par la reine Elizabeth II du Royaume-Uni, ainsi que par l'empereur Hailé Sélassié Ier d’Éthiopie dans les années 1960[2]. Lors de la visite du président des États-Unis Richard Nixon en 1972 au mausolée, une bombe, posée par les terroristes de l'organisation Moudjahiddines du Peuple, explose une heure après la visite du président[7].
Le mausolée est le théâtre de plusieurs célébrations : la plus spectaculaire est celle du jubilé d'or de la dynastie Pahlavi en 1976, 50 ans après le couronnement de Reza Chah. Une autre célébration a lieu, alors que les troubles qui déboucheront sur la révolution Iranienne ont déjà largement commencé, le , pour le centenaire de Reza Chah, au même mausolée.
Révolution et république islamique
Peu avant son départ en exil, le Shahanshah Mohammad Reza Pahlavi aurait fait exhumer le corps de son père le . Le corps aurait été transporté vers la mosquée Al-Rifa'i, au Caire, et remis dans le caveau où il se trouvait avant 1950.
Destruction
Après la prise de pouvoir par les religieux le et la chute de Chapour Bakhtiar, la révolution triomphe et Khomeini et ses fidèles s'installent durablement au pouvoir. L'ayatollah, qui cherche par tous les moyens à effacer toutes les avancées de la dynastie Pahlavi[8], va ordonner la destruction du mausolée de Reza Chah, supervisée par l'ayatollah Sadeq Khalkhali, le « Fouquier-Tinville iranien ».
Sadegh Ghotbzadeh et Abdolhassan Bani Sadr s'opposent à la destruction du mausolée, désirant en faire un « musée des martyrs des Pahlavi », ce que refusent Khomeini et Khalkhali.
La destruction dure une vingtaine de jours, en avril - mai 1980. Devant les caméras, Khalkhali justifie la destruction par :
« Il a assassiné de nombreuses personnes, notamment dans la mosquée de Goharshad, à cause de leurs croyances en l'Islam[9]. Et le peuple, comme la population de Rey, ne peut supporter l’idée que la dépouille d’un tel homme se trouve si près du mausolée du Shah Abdol-Azim[8]. »
Une tombe vide ?
Il est communément admis que lorsque les révolutionnaires ouvrirent le sarcophage de Reza Chah, ils ne trouvèrent rien, Mohammad Reza Chah ayant fait déplacer le corps de son père ailleurs[10].
Mais dans le documentaire De Téhéran au Caire, daté de 2015 et centré sur l'exil du chah de à sa mort en , sa veuve, l'impératrice Farah, confrontée à un moment aux images de Khalkhali pavoisant au milieu des ruines du mausolée, dit pourtant cela :
« L'histoire raconte que le gouvernement avait eu le temps de récupérer le corps de Reza Chah le Grand pour le mettre autre part, caché... mais il n'en est rien ; il est toujours enterré là-bas »[8].
Dans leur biographie du chah, Houchang Nahavandi et Yves Bomati écrivent que le cadavre de Reza Chah a été effectivement déplacé avant la révolution, mais dans un endroit tenu secret. Peu avant sa mort le (36 ans et 1 jour après son père), Mohammad Reza aurait précisé à un cercle réduit d'intimes un emplacement en Iran où, si ses restes y revenaient un jour, il désirerait être enterré avec des soldats et des officiers suppliciés par les révolutionnaires ; les auteurs sous-entendent que ce lieu pourrait être le même que celui où le corps de Reza Chah est caché[11].
Un corps retrouvé (?)
Le , un squelette momifié est découvert lors de travaux dans la zone autour de Shah Abdol Azim. La ressemblance du cadavre avec une photo de la dépouille de Reza Chah juste avant son enterrement ainsi que l'annonce du comité du patrimoine de Téhéran laisse fortement entendre que ce squelette puisse être le corps de l'ancien empereur[12]. Les autorités iraniennes, faisant savoir qu'elles avaient longtemps cherché le corps de l'empereur, ont cependant vite appelé à la prudence sur ce genre d'annonce, le bureau de presse du sanctuaire Shah Abdol Azim ayant affirmé de son côté qu'il ne s'agissait que d'une « rumeur ». « La zone entourant le sanctuaire était auparavant un cimetière. Découvrir un corps dans cette zone est donc naturel », déclare son directeur des relations publiques, Mostafa Ajoorloo. Néanmoins, le comité du patrimoine fait savoir qu'il compte traiter l'affaire pour répondre prochainement à cette question. Cette nouvelle, après les troubles politiques en Iran en décembre 2017 et janvier 2018, font craindre aux autorités islamiques la résurgence d'une nostalgie royaliste parmi la population, surtout liés à la sécularisation et la modernisation de la société sous Reza Chah ; Abbas Milani, historien irano-américain, parlant d'un « cauchemar » pour le régime, la preuve « que l'histoire n'est pas écrite par des autorités équipées de forces, d'hypocrisie, de pelles et de bulldozers ».
Le petit-fils de Reza Chah, Reza Pahlavi, un des meneurs de l'opposition à la République islamique, déclare sur Twitter qu'il suivait de près ces informations concernant la dépouille de son grand-père, mettant ainsi fin à la rumeur qui disait que la dépouille du Chah avait été sortie d'Iran après la révolution par sa famille. Il met également en garde le gouvernement islamique sur la transparence dans leur traitement de l'affaire.
Après sa découverte, le parcours de la momie reste inconnu. Selon certaines sources, elle a été à nouveau enterrée.
Galerie
- Peu après la fin de la construction, en 1950
- Le mausolée sur un timbre
- Dans les années 1960
- Dans les années 1960
- Dans les années 1970
- Destruction du mausolée en
- L'avenue, percée dans les années 1970, menant à l'ancien emplacement du mausolée, dans les années 2010
Voir aussi
- Reza Shah
- Sadegh Khalkhali
- Mosquée Al-Rifa'i (Mausolée de Mohammad Reza Pahlavi)
Liens externes
Notes et références
- (en) Abbas Milani, The Shah, Macmilian, , 496 p. (ISBN 978-0-230-11562-0 et 0-230-11562-4, lire en ligne), p. 111
- irandokhi, « Historic video of Reza Shah mausoleum ruined by Ayatollah Sadegh Khalkhali », (consulté le )
- Les photos datant des années 1960 montrent encore le petit parc
- « حرم در تصویر( تطبیقی) 1 | آستان مقدس حضرت عبدالعظیم الحسنی علیه السلام », sur abdolazim.com (consulté le )
- « О мавзолее, которого нет » (consulté le )
- Bianca Devos ; Christoph Werner, Culture and Cultural Politics Under Reza Shah : The Pahlavi State, New Bourgeoisie and the Creation of a Modern Society in Iran ., Routledge,
- C'est d'ailleurs peut-être après cet incident que l'urbanisme autour du mausolée est révisé
- manototv, « Tehran to Cairo - English Subtitled », (consulté le )
- Khalkhali fait allusion au soulèvement de la mosquée de Goharshad (en) en 1935.
- « 20th Century Cairo », sur www.laits.utexas.edu (consulté le )
- Yves Bomati ; Houchang Nahavandi, Mohammad Reza Pahlavi, le dernier shah/1919-1980, Paris, Perrin, , p. 553
- (en) Jon Gambrell, « Mysterious mummy found in Iran could be father of last shah », Associated Press, (lire en ligne)
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