Mikio Naruse

Mikio Naruse (成瀬 巳喜男, Naruse Mikio), né le à Tokyo et mort le dans la même ville est un réalisateur, écrivain et producteur japonais. Il est l'auteur de 89 films datant de la fin du cinéma muet jusqu'aux années 1960. Naruse s'est spécialisé dans le genre shomingeki (tragi-comédie sur les classes salariées) comme Yasujirō Ozu[1].

Mikio Naruse
成瀬 巳喜男
Naissance
Tokyo (Japon)
Nationalité  Japonais
Décès (à 63 ans)
Tokyo (Japon)
Profession Réalisateur
Films notables Ma femme, sois comme une rose
Le Repas
Nuages flottants
Nuages d'été
Une femme dans la tourmente

Biographie

Mikio Naruse est le dernier enfant d'une famille modeste. Son père, artisan brodeur, meurt en 1920[2]. Il découvre dès son plus jeune âge la littérature japonaise. Il entre dans les studios de la Shōchiku à 15 ans comme accessoiriste, et y est six ans plus tard assistant réalisateur, notamment pour Yoshinobu Ikeda et Heinosuke Gosho[3]. À partir de 1930, il devient réalisateur en tournant Un couple de Chanbara (Chanbara fūfu, 1930), une comédie burlesque aujourd'hui perdue. Même si les années suivantes, il mélange le rire et les larmes dans Bon courage, larbin ! (Koshiben ganbare, 1931), Après notre séparation (Kimi to wakarete, 1933), Rêves de chaque nuit (Yogoto no yume, 1933), le meilleur film de cette période, ou Toute la famille travaille (Hataraku ikka, 1939), son travail reste peu valorisé au sein de la Shōchiku, compagnie dirigée, à ce moment-là, par Shirō Kido. Celui-ci défend une vision du cinéma qu'il décrit ainsi : « Il existe deux façons de voir l'humanité (...) avec joie ou avec tristesse. Cette dernière n'est pas recommandée : nous, à la Shochiku, préférons considérer l'existence d'une manière chaleureuse et optimiste. (...) Notre ligne est que le fondement des films doit être le salut »[4]. Une telle optique se situe aux antipodes du cinéma de Naruse, et Shirō Kido ne cache pas, alors, son antipathie à l'égard des films du réalisateur. Remarquant des affinités entre Yasujirō Ozu et Naruse, il dira plus tard : « La Shochiku n'avait pas besoin de deux Ozu. »

Affiche japonaise du film Le Cœur d'une épouse avec Hideko Takamine

En 1934, Naruse quitte donc la Shōchiku pour les studios de la P.C.L. (Photo Chemical Laboratories, en français Laboratoire photochimique de Tokyo) qui deviendront la Tōhō en 1937[3]. Il y sera plus à son aise, et dira plus tard : « À la Shōchiku, on m'autorisait à mettre en scène ; chez P.C.L., on me demandait de mettre en scène. Une différence significative. » (M. Naruse, Kinema Junpō, déc. 1960, cité par Leonard Schrader). Son succès commercial et critique culmine, d'ailleurs, dans son premier grand film Ma femme, sois comme une rose (Tsuma yo bara no yo ni, 1935), qui gagne le prix Kinema Junpō et est le premier film japonais parlant à être distribué aux États-Unis. C'est à cette époque qu'il épouse l'actrice Sachiko Chiba, avec laquelle il tourne régulièrement. Ils divorcent trois ans après leur union[5].

Après la guerre, il décrit avec un certain pessimisme des histoires de familles déchirées, comme dans La Mère (Okaasan, 1952), L'Éclair (Inazuma, 1954), ou dans son chef-d'œuvre Nuages flottants (Ukigumo, 1955). Passionné de littérature, il adapte à l'écran de grandes œuvres littéraires de Yasunari Kawabata avec La Danseuse (Maihime, 1951) et Le Grondement de la montagne (Yama no oto, 1954), mais surtout de Fumiko Hayashi dont il adapte six œuvres, notamment le roman Le Repas (Meshi, 1951) et son autobiographie Chronique de mon vagabondage (Hōrōki, 1962).

Dans ses mélodrames d'après-guerre transparaît sa compassion pour ses héroïnes (souvent jouées par son actrice fétiche Hideko Takamine ou par Setsuko Hara), face à des hommes pleutres (incarnés par Ken Uehara ou Masayuki Mori).

Dans les années 1960, son thème de prédilection reste le portrait de femmes, comme dans l'un de ses chefs-d'oeuvre, Quand une femme monte l'escalier (Onna ga kaidan wo agaru toki, 1960), l'histoire d'une hôtesse de bar, ou dans Nuages épars (Midaregumo, 1967), son dernier film.

Style

Son cinéma est marqué par une économie d'effet, et néanmoins une grande efficacité dramatique. Donnant peu d'instructions à ses comédiens, faisant très peu de commentaires, laissant tourner la caméra, l'essentiel de son travail se faisait au montage, où, par des inserts ou des coupes, il corrigeait et arrangeait les séquences à sa convenance. Il était capable d'estimer la longueur d'un plan grâce à la longueur de la bobine et créait ainsi le rythme d'une scène.

Postérité

Longtemps ignoré par la critique occidentale, de larges rétrospectives depuis les années 1980 (notamment aux festivals de Locarno, Hong-Kong et San Sebastian) ont permis de redécouvrir son œuvre, et il est finalement reconnu comme l'un des plus grands réalisateurs japonais du « second âge d'or » du cinéma japonais dans les années 1950, aux côtés de Kurosawa, Ozu, Mizoguchi et Kinoshita.

Il est également une référence majeure pour des réalisateurs tels que Hou Hsiao-hsien.

Filmographie

Années 1930

Cinq types au cirque (1935).
Sachiko Chiba, Kō Mihashi et Yō Shiomi dans La Fille dont on parle (1935).
  • 1930 : Un couple de Chanbara (チャンバラ夫婦, Chanbara fūfu)
  • 1930 : Un pur amour (純情, Junjō)
  • 1930 : Une époque difficile (不景気時代, Fukeiki jidai)
  • 1930 : La Force de l'amour (愛は力だ, Ai wa chikara da)
  • 1930 : Chronique des jeunes mariés sans vergogne (押切新婚記, Oshikiri shinkonki)
  • 1931 : Ne sois pas si excité ! (ねえ興奮しちゃいやよ, Nē kōfun shitara iya yo)
  • 1931 : Les Cris du second étage (二階の悲鳴, Nikai no himei)
  • 1931 : Bon courage, larbin ! (腰弁頑張れ, Koshiben ganbare)
  • 1931 : Un caprice saute dans le train (浮気は汽車に乗って, Uwaki wa kisha ni notte)
  • 1931 : La Force d'une moustache (髭の力, Hige no chikara)
  • 1931 : Sous le toit des voisins (隣の屋根の下, Tonari no yane no shita)
  • 1932 : Mesdames, prenez garde à vos manches ! (女は袂を御用心, Onna wa tomoto o goyōjin)
  • 1932 : Pleurs sous l'azur (青空に泣く, Aozora ni naku)
  • 1932 : Sois un grand homme ! (偉くなれ, Eraku nare)
  • 1932 : Un printemps mité (蝕める春, Mushibameru haru)
  • 1932 : La Fille aux chocolats (チョコレートガール, Chokorēto gāru)
  • 1932 : Sans liens de parenté (生さぬ仲, Nasaku naka)
  • 1932 : Kashi no aru Tōkyō fukei (菓子のある東京風景)
  • 1933 : Après notre séparation (君と別れて, Kimi to wakarete)
  • 1933 : Rêves de chaque nuit (夜ごとの夢, Yogoto no yume)
  • 1933 : Mon épouse coiffée (僕の丸髷, Boku no marumage)
  • 1933 : Deux prunelles (双眸, Sōbō)
  • 1933 : Bonne année (謹賀新年, Kinga shinnen)
  • 1934 : La Rue sans fin (限りなき舗道, Kagiri naki hodō)
  • 1935 : Trois sœurs au cœur pur (乙女ごころ三人姉妹, Otome-gokoro sannin shimai)
  • 1935 : L'Actrice et le poète (女優と詩人, Joyū to shijin)
  • 1935 : Ma femme, sois comme une rose (妻よ薔薇のやうに, Tsuma yo bara no yōni)
  • 1935 : Cinq types au cirque (サーカス五人組, Sākasu gonin-gumi)
  • 1935 : La Fille dont on parle (噂の娘, Uwasa no musume)
  • 1936 : Tochuken Kumoemon (桃中軒雲右衛門, Tōchūken Kumoemon)
  • 1936 : Le Chemin parcouru ensemble (君と行く路, Kimi to yuku michi)
  • 1936 : Une avenue au matin (朝の並木路, Ashita no namikimichi)
  • 1937 : Les Larmes d'une femme (女人哀愁, Nyonin aishū)
  • 1937 : Avalanche (雪崩, Nadare)
  • 1937 : Les Vicissitudes de la vie I (禍福 前篇, Kafuku zenpen)
  • 1937 : Les Vicissitudes de la vie II (禍福 後篇, Kafuku kōhen)
  • 1938 : Tsuruhachi et Tsurujiro (鶴八鶴次郎, Tsuruhachi Tsurujirō)
  • 1939 : Toute la famille travaille (はたらく一家, Hataraku ikka)
  • 1939 : Le Cœur sincère (まごころ, Magokoro)

Années 1940

Hideko Takamine et Kamatari Fujiwara dans Hideko, receveuse d'autobus (1941).
  • 1940 : Acteurs ambulants (旅役者, Tabi yakusha)
  • 1941 : Un visage inoubliable (なつかしの顔, Natsukashi no kao)
  • 1941 : La Lune de Shanghai (上海の月, Shanhai no tsuki)
  • 1941 : Hideko, receveuse d'autobus (秀子の車掌さん, Hideko no shashō-san)
  • 1942 : Ma mère ne mourra jamais (母は死なず, Haha wa shinazu)
  • 1943 : La Chanson de la lanterne (歌行燈, Uta andon)
  • 1944 : Cette belle vie ou Quelle vie agréable ! (楽しき哉人生, Tanoshiki kana jinsei)
  • 1944 : Le Chemin du drame (芝居道, Shibaidō)
  • 1945 : Jusqu'au jour de la victoire (勝利の日まで, Shōri no hi made)
  • 1945 : Histoire de l'arc au temple de Sanjusangendo (三十三間堂通し矢物語, Sanjūsangendō tōshiya monogatari)
  • 1946 : Les Descendants de Taro Urashima (浦島太郎の後裔, Urashima Tarō no kōei)
  • 1946 : Et toi et moi (俺もお前も, Ore mo omae mo)
  • 1947 : Quatre histoires d'amour (四つの恋の物語, Yottsu no koi no monogatari) - 2e partie : Même se quitter est un plaisir (別れも愉し, Wakare mo tanoshi)[6]
  • 1947 : L'Éveil du printemps (春のめざめ, Haru no mezame)
  • 1949 : La Mauvaise Fille (不良少女, Furyō shōjo)

Années 1950

Setsuko Hara et Ken Uehara dans Le Repas (1951).

Années 1960

Distinctions

Récompenses

Sélections

Notes et références

  1. Festival international du film de La Rochelle, « Mikio Naruse », sur archives.festival-larochelle.org,
  2. Jean Narboni, in : Mikio Naruse : Les Temps incertains, Cahiers du cinéma/Auteurs, 2006 - p. 31.
  3. op. cit. p. 31.
  4. Donald Richie (trad. de l'anglais), Le Cinéma japonais, Monaco, Éditions du Rocher, , 402 p. (ISBN 2-268-05237-0), p. 56
  5. op. cit. p. 33.
  6. note : la 1re partie est réalisée par Shirō Toyoda, la 3e partie est réalisée par Kajirō Yamamoto et la 4e partie est réalisée par Teinosuke Kinugasa
  7. (en) Stuart Galbraith, Japanese Filmography : A Complete Reference to 209 Filmmakers and the Over 1250 Films Released in the United States, 1900 Through 1994, Mcfarland, , 509 p. (ISBN 978-0-7864-0032-4), p. 480.
  8. (ja) « 12e prix Kinema Junpō - (1935年) », sur kinenote.com (consulté le ).
  9. (ja) « 6e cérémonie des prix du film Mainichi - (1951年) », sur mainichi.jp (consulté le ).
  10. (ja) « 1951年 第2回 ブルーリボン賞 » 2e cérémonie des Blue Ribbon Awards - (1951) »], sur allcinema.net (consulté le ).
  11. (ja) « 1952年 第3回 ブルーリボン賞 » 3e cérémonie des Blue Ribbon Awards - (1952) »], sur allcinema.net (consulté le ).
  12. (ja) « 10e cérémonie des prix du film Mainichi - (1955年) », sur mainichi.jp (consulté le ).
  13. (en) Stuart Galbraith, Japanese Filmography : A Complete Reference to 209 Filmmakers and the Over 1250 Films Released in the United States, 1900 Through 1994, Mcfarland, , 509 p. (ISBN 978-0-7864-0032-4), p. 475.
  14. (ja) « 29e prix Kinema Junpō - (1955年) », sur kinenote.com (consulté le ).

Voir aussi

Bibliographie

  • Audie Bock, Mikio Naruse : un maître du cinéma japonais - introduction à l'œuvre et filmographie commentée, préface de Max Tessier, traduit de l'américain par Roland Cosandey et André Kaenel, Locarno, Éditions du Festival international du film de Locarno, 1983 (BNF 39777847)
  • Jean Narboni, Mikio Naruse. Les temps incertains, Cahiers du cinéma, 2006 (ISBN 286642283X et 978-2866422837)
  • André Scala, « Naruse et quelques Hollandais », Cahiers du cinéma, no 466,

Liens externes

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