Mont Saint-Michel (Bas-Rhin)

Le mont Saint-Michel est un sommet situé dans le parc naturel régional des Vosges du Nord, sur la commune de Saint-Jean-Saverne. Il culmine à 438 mètres.

Pour les articles homonymes, voir Mont Saint-Michel (homonymie).

Mont Saint-Michel

Vue du mont Saint-Michel depuis Saint-Jean-Saverne.
Géographie
Altitude 438 m[1]
Massif Vosges du Nord
Coordonnées 48° 46′ 30″ nord, 7° 20′ 51″ est[1]
Administration
Pays France
Région Grand Est
Collectivité territoriale Collectivité européenne d'Alsace
Géolocalisation sur la carte : France
Géolocalisation sur la carte : Bas-Rhin

Ce lieu offre un panorama sur les villages environnants, et fait l'objet d'une occupation humaine depuis au moins le IVe millénaire av. J.-C.

Toponymie

La première mention connue de la montagne se trouve dans un document de 1126, connu par une copie de 1377, dans lequel elle est appelée Hertenstein[2]. Cette dénomination reste en usage au moins jusqu’à la fin du XVIIe siècle, mais le terme, qui désignait à l’origine uniquement le rocher, s’étend par métonymie à la montagne entière au cours du Moyen Âge. Plusieurs autres noms apparaissent en parallèle dans les documents à partir du XVIe siècle, sans qu’il soit aisé de déterminer s’ils s’appliquent à toute la montagne ou à des parties précises de celle-ci. Ainsi, le nom de Michelsberg, « mont Saint-Michel », apparaît pour la première fois en 1553, concurrencé par Sankt Johannesberg, « montagne Saint-Jean » en 1569[3].

Sur sa carte réalisée en 1576, Daniel Specklin nomme la montagne Bruderstein, « pierre des frères », appellation qui semble avoir été dominante au XVIIe siècle avec peut-être le nom similaire de Bruderberg, « montagne des frères ». Cette dénomination est remplacée à la fin de ce siècle par celle de mont Saint-Michel, un document de 1693 expliquant que la chapelle se trouve « sur la montagne Hertenstein, dans le massif qu’on avait appelé autrefois Bruderberg mais qui porte maintenant le nom de Saint-Michel »[3].

Géographie

Le mont Saint-Michel se trouve dans la région de Saverne, dans le département du Bas-Rhin, à l’extrême nord des Vosges centrales. Situé immédiatement au nord du village de Saint-Jean-Saverne qu’il domine d’une centaine de mètres, son altitude à partir du niveau de la mer étant de 378 m. De forme oblongue orientée sud-ouest-nord-ouest, la colline possède des flancs particulièrement escarpés rendant son accès difficile sur trois côtés, l’accès n’étant aisé que par l’ouest, où elle se rattache au reste du massif. Le petit vallon, dit Winterhalde, qui le borde au nord la sépare d’une autre colline occupée à son sommet par l’oppidum de la Heidenstadt[2].

Le sommet du mont est occupé par une plateforme en poudingue de grauwacke et de galets de quartz surplombant une grotte naturelle[3],[2]. Ces deux éléments ont fait l’objet de nombreux aménagements humains, dont un large bassin circulaire taillé à l’extrémité orientale de la plateforme, la partie occidentale étant occupée par une chapelle. Le site possède au moins une source, qui émerge à environ cinquante mètres à l’ouest de la chapelle, tandis qu’un puits comblé, taillé dans la roche au nord-est de celle-ci, semble également avoir tenté de capter[2].

Histoire

La première occupation du site établie avec certitude date du second âge du fer et est à mettre en relation avec l’oppidum voisin de la Heidenstadt, les céramiques retrouvées sur les deux sites étant semblables. Il n’est en revanche pas totalement certain que l’occupation se soit poursuivie à l’époque gallo-romaine, malgré la découverte sur le versant nord de la montagne d’un lingot de fer de cette époque et d’une pièce de bronze frappée vers 340 en contrebas de la plateforme rocheuse[4]. Le site, et en particulier la grotte, est de nouveau habité au plus tard vers le milieu du IXe siècle, comme l’attestent de nombreux déchets de cuisine et quelques éléments métalliques comme une lame de couteau ou une pointe de flèche[5].

La grotte est occupée tout au long du Moyen Âge et se voit doter d’éléments de confort comme un poêle en céramique, plusieurs fois reconstruit[5]. Une chapelle est construite sur le site à une date indéterminée du Moyen Âge antérieure à 1371, un registre de recettes de l'évêché de Strasbourg évoquant l’existence d’un chapelain à cette date, ce qui indique que le lieu de culte existait déjà. Cette chapelle, qui est abandonnée au cours du XVIe siècle, est reconstruite en 1593, tandis qu’en parallèle sont fondés un pèlerinage et la confrérie de Saint-Michel[3]. Le site subit des destructions pendant la guerre de Trente Ans à la suite de laquelle l’habitat est abandonné et, bien que la chapelle ait été rénovée en 1686, il ne semble pas y avoir eu de présence humaine permanente jusqu’au début du XVIIIe siècle[6],[3]. Cette renaissance est toutefois de courte durée et la majeure partie des constructions occupant les lieux, notamment les aménagements de la grotte, sont détruites peu après 1720, peut-être simultanément à l’ouverture d’une carrière pour le chantier de reconstruction de l’abbaye Saint-Jean entre 1729 et 1740[6].

Lors de la Révolution française, la chapelle est saccagée en 1792, puis le site est transformé par le général Sautter en position d’artillerie dans le but de défendre l’approche de Saverne par le nord[3]. Des travaux de consolidation de la chapelle sont entrepris en 1826, mais ce n’est qu’en 1848 qu’elle est reconstruite et rendue au culte catholique[7].

Aménagements humains

Bassin

L’extrémité orientale du promontoire est occupé par un grand bassin circulaire de 4,70 m de diamètre et d’une profondeur oscillant entre 0,30 et 0,60 m taillé directement dans la roche[8]. Du côté nord, trois marches, elles-aussi taillées dans le roc, permettent d’accéder au fond du bassin. Il est probable que ce bassin n’était anciennement pas à l’air libre, mais entouré d’une construction circulaire, comme tendent à l’indiquer la marche supérieure de l’escalier qui n’est pas de plain-pied, mais légèrement en contrebas, la présence dans la chapelle de pierres de réemploi ayant un profil courbe correspondant à une structure circulaire de m de diamètre et la carte de Specklin de 1576, qui fait figurer à l’emplacement du mont une construction ressemblant à une tour. L’usage et la date de construction de cette structure demeure cependant indéterminés[9].

La datation de cet aménagement demeure incertaine : si en 1828 l’archéologue Jean Geoffroy Schweighaeuser n’y voyait qu’un aménagement tardif dédié aux pèlerins, les travaux postérieurs tendent à lui donner une origine antique, si ce n’est protohistorique, en relation avec l’oppidum de la Heidenstadt[8].

Grotte

La grotte, dont l’entrée onze mètres sous la plateforme sommitale, est une cavité naturelle qui a été aménagée à la fois par la retaille du rocher et par des constructions, dont ne subsistent que les traces des poteaux. Globalement orientée est-ouest, elle s’ouvre sur l’extérieur par une entrée de 18 m de large, puis se rétréci pour former une rotonde de 4,50 m de diamètre, le fond se trouvant à 20 m de l’extrémité orientale du plateau[10].

Les traces de constructions divisent la grotte en trois espaces, intérieur, intermédiaire et extérieur. Tout au fond de la grotte se trouve l’espace intérieur, qui était divisé en deux pièces par des cloisons en bois. L’extrémité occidentale à fait l’objet d’importants travaux de taille à une date ancienne pour créer une rotonde semi-circulaire. Les parois de celle-ci ont été retaillées à une date postérieure, apparemment dans le but de détruire des aménagements dont la nature exacte n’est pas connue. La paroi nord est par ailleurs ouverte sur l’extérieur par une fissure naturelle, dite « trou des fées », « trou du diable » ou « trou des sorcières », à laquelle des traditions orales attribuent des vertus curative au bénéfice de celui qui la traverse[10].

La séparation entre cet espace intérieur et l’espace intermédiaire a varié au cours du temps, prenant la forme d’abord d’une cloison en bois, qui a été par la suite remplacée par un mur en pierre. Le sol de cet espace est creusé de rigoles supposée canaliser les eaux de ruissellement, mais ce réseau semble avoir été réalisé sans réflexion préalable, obligeant son ou ses auteurs à multiplier les creusements pour parvenir à un minimum d’efficacité[10]. L’élément le plus caractéristique de l’espace intermédiaire est un sarcophage à cavité céphalique taillé directement dans le socle rocheux et qui pourrait remonter à l’époque carolingienne. Cet aménagement a toutefois été la cible en 1987 de vandales, qui ont retaillé son emprise, de sorte qu’il n’en subsiste qu’une vague cavité[11].

Chapelle

À l’angle nord-est de la chapelle se trouve un puits ou une citerne taillé dans le roc. Cet aménagement est vraisemblablement plus ancien que la chapelle elle-même, les aspects de taille de ses parois ayant été mis en relation avec des méthodes en usage à l’époque gallo-romaine[8].

Légendes

Le mont Saint-Michel serait un haut lieu de culte païen de différentes divinités comme Belenos, Mercure et Mithra[12]. On y aurait pratiqué des sacrifices en remplissant le rond des sorcières de sang pour rappeler le disque solaire à son lever et son coucher.

Le « rond des sorcières ».

Le bassin, nommé « rond », « chaudron » ou « école des sorcières », serait également le lieu d'anciens rassemblements de sorcières[13]. De cet endroit elles s'envolaient sur leurs balais vers le Bastberg. Elles y célébraient alors le sabbat sous la tutelle d'Itta, l'épouse du comte Pierre de Lutzelbourg, fondateur du château de Lutzelbourg (Moselle).

En dessous se trouve une grotte occupée depuis la préhistoire. Des ermites y avaient élu domicile au Moyen Âge et elle présente plusieurs signes d'aménagement. Dans cette grotte, un sarcophage a été creusé dans le grès ; il s'agirait soit de la tombe d'un saint pèlerin ou alors de l'endroit où Itta fut enterrée vivante après avoir été accusée de sorcellerie.

« Hexenloch », « trou des sorcières » ou « du diable », sont les noms attribués à la fissure naturelle dans la paroi nord de la grotte. Elle a été polie par les passages successifs de ceux qui attribuent à cette pratique des vertus bénéfique. Un rite initiatique y aurait été perpétré par une ancienne du village de Saint-Jean-Saverne. Ce rite en trois étapes symboliques consistait alors à se « laisser mourir » sous forme de méditation guidée allongé dans le sarcophage pour laisser au passé tout son vécu, de traverser la fissure symbolisant le vagin maternel afin de renaître, et enfin de monter au rond des sorcières sur le plateau pour s'élever spirituellement et rompre le cycle des renaissances.

Éléments du site et de ses environs

  • La chapelle Saint-Michel.
  • Le Hexenkreis (rond des sorcières) ou Hexenschule (école des sorcières), peut-être la fondation d'un ancien édifice.
  • La Hexenhöhle (grotte aux fées) dans laquelle se situe un sarcophage de forme médiéval et un passage étroit qui conduit au côté nord de la paroi rocheuse.
  • En outre, escaliers datés de la période de la guerre de Trente Ans.
  • Plattenweg (passage taillé dans le rocher, avec deux ornières-rails parallèles, d'origine gallo-romaine).
  • L'oppidum de la Heidenstatt de la fin de l'âge du fer (deux levées de terre de 350 m de long, 6 m de hauteur, à 700 m d'intervalle).
  • Le château-fort de Warthenberg (mur bouclier et donjon).
  • Les Stampfloecher (roches à cupules ; cuvettes médiévales pour broyer les grains, ou peut-être déjà « pierres à sacrifices » à l'Âge du fer).
  • Le Wasserfallfelsen, un rocher très allongé qui goutte tout le long de sa paroi, créant ainsi un ruisseau.
  • Le tunnel de Saverne, le plus long de la ligne à grande vitesse Est européenne.

Notes et références

  1. « Carte IGN classique » sur Géoportail.
  2. Wernet, Levy-Mertz et Gerber 1965, p. 33.
  3. Gerber 1965, p. 35.
  4. Ring 1993, p. 5.
  5. Ring 1993, p. 6.
  6. Ring 1993, p. 7.
  7. Gerber 1965, p. 36.
  8. Wernet, Levy-Mertz et Gerber 1965, p. 33-34.
  9. Ring 1993, p. 1.
  10. Ring 1993, p. 2.
  11. Ring 1993, p. 3.
  12. Adolphe Landspurg, Les Hauts Lieux d'énergie en France[réf. non conforme]
  13. L'école des sorcières et la Heidenstadt

Voir aussi

Article connexe

Bibliographie

  • René Gerber, « La chapelle St. Michel et son pèlerinage », Bulletin de la société d’histoire et d’archéologie de Saverne et environs, vol. 52, , p. 35-39 (lire en ligne, consulté le ).
  • Jean-Joseph Ring, « Saint-Jean-Saverne - Le Mont-Saint-Michel - Recherches archéologiques récentes », Pays d’Alsace, vol. 163, , p. 1-7 (lire en ligne, consulté le ).
  • Paul Wernet, G. Levy-Mertz et René Gerber, « La montagne St. Michel dans l’antiquité », Bulletin de la société d’histoire et d’archéologie de Saverne et environs, vol. 52, , p. 33-34 (lire en ligne, consulté le ).

Liens externes

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