Napoléon-Jérôme Bonaparte
Napoléon Bonaparte, dit Napoléon (Jérôme)[1], prince français[3], dit le prince Napoléon, prince de Montfort, comte de Meudon et de Moncalieri[4], né le à Trieste et mort le à Rome, est une personnalité politique et militaire française du Second Empire, cousin germain de l’empereur Napoléon III.
« Prince Napoléon » redirige ici. Pour le titre utilisé par les prétendants bonapartistes, voir Prince Napoléon (titre).
Pour les articles homonymes, voir Napoléon (homonymie).
Titres
1853 –
(environ 38 ans)
Prédécesseur | Création du titre |
---|---|
Successeur | Victor Napoléon |
–
(18 ans et 7 jours)
Titulature |
prince Napoléon prince de Montfort comte de Meudon et de Moncalieri |
---|---|
Dynastie | maison Bonaparte |
Distinctions |
Grand-croix de la Légion d'honneur Ordre du Séraphin[2] |
Nom de naissance | Napoléon Joseph Charles Paul Bonaparte |
Surnom | « Plon-Plon » |
Naissance |
Trieste (Autriche) |
Décès |
Rome (Italie) |
Sépulture | basilique de Superga (Turin) |
Père | Jérôme Bonaparte |
Mère | Catherine de Wurtemberg |
Conjoint | Marie-Clotilde de Savoie |
Enfants |
Victor Bonaparte, prince Napoléon Louis Bonaparte Marie-Laëtitia Bonaparte |
Titre bonapartiste
Il était connu comme « le prince Napoléon » et était familièrement appelé « Plon-Plon »[5]. Parfois désigné sous le nom de « Napoléon V », il ne fut, en réalité, jamais pleinement reconnu comme le chef de la maison impériale. En 1879, après la mort du prince impérial, les bonapartistes lui préfèrent son fils aîné, le prince Victor, ou, dans une moindre mesure, son fils cadet, le prince Louis Napoléon, colonel dans la garde impériale russe.
Biographie
Jeunesse
Fils cadet de Jérôme Bonaparte (le prince Jérôme), ancien roi de Westphalie, et de Catherine de Wurtemberg, le prince Napoléon naît en exil à Trieste. Il est le frère de la princesse Mathilde. À la mort de sa mère en 1835, il est accueilli par sa tante Hortense à Arenenberg, où il se lie d'amitié avec son cousin germain Louis-Napoléon. Il suit, de 1837 à 1840, des études militaires à Ludwigsburg et devient officier dans le régiment des Gardes du roi de Wurtemberg. En , il voyage en compagnie d'Alexandre Dumas à Livourne et dans l'archipel toscan, où les deux hommes visitent l'île de Montecristo, que Dumas mettra au cœur de son célèbre roman[6].
En 1847, le prince Napoléon se rend à Londres pour y retrouver son cousin qui vient de s'évader de la forteresse de Ham. À l'insu de Louis-Napoléon, il a une liaison avec la célèbre tragédienne Rachel, dont son cousin est également l'amant.
Sous la Deuxième République
En 1848, il est élu représentant de la Corse à l'Assemblée constituante, dont il est le plus jeune membre (il a 26 ans) et où il siège à l'extrême-gauche. Réélu député de la Sarthe lors des élections législatives de , il reste fidèle au parti de la Montagne, ce qui lui vaut le surnom de « prince de la Montagne ». Il s'oppose ainsi à son cousin, qui a été élu président de la République avec le soutien du parti de l'Ordre et qui se débarrasse momentanément de lui en l'envoyant comme ministre plénipotentiaire à Madrid. Après le coup d'État du , il intervient auprès de son cousin pour atténuer la répression contre les républicains.
Sous le Second Empire
Prince français, Altesse impériale et sénateur en 1852, général de division[7] en 1853, président de l'Exposition universelle de 1855, puis ministre de l'Algérie et des Colonies de 1858 à 1859, Napoléon Jérôme est un personnage important de la famille impériale pendant le Second Empire. Il incarne en effet l'aile gauche - anticléricale et démocrate - du mouvement bonapartiste face à une aile droite conservatrice et autoritaire dirigée par Eugène Rouher, son rival. Mais cette tendance, représentée par le « groupe du Palais-Royal » - où l'on trouvait les journalistes Émile de Girardin et Adolphe Guéroult, ainsi que le saint-simonien François Barthélemy Arlès-Dufour - ne concerne qu'une minorité du parti bonapartiste.
Jusqu'au , jour de la naissance du prince impérial Louis-Napoléon, "Plon-Plon" pouvait espérer succéder à Napoléon III (dont il n'était néanmoins que l'héritier secondaire, après son père Jérôme[8]), mais ce dernier ne faisait pas confiance aux capacités politiques de son cousin. Il lui confie cependant plusieurs missions diplomatiques.
Pendant la guerre de Crimée, il commande avec bravoure une division lors de la bataille de l’Alma mais, en raison de désaccords avec le général Canrobert, il décide de rentrer en France avant la fin du conflit, ce qui vaut à "Plon-Plon" le perfide surnom de « Craint-plomb ». En 1859, son mariage avec la fille du roi de Piémont-Sardaigne s’inscrit dans la stratégie tracée par Napoléon III et Cavour lors de l’entrevue de Plombières (voir l'article Politique italienne de Napoléon III). Favorable depuis toujours à la cause de l’unité italienne, il commande un corps de douze mille hommes en Toscane durant la Seconde guerre d’indépendance italienne.
Il a la jouissance du Palais-Royal et du château de Meudon, alloués à son père par Napoléon III[9]. En 1855, il se fait également construire par l'architecte Alfred Normand (qui suit les conseils de Jacques Ignace Hittorff) un hôtel particulier de style néo-pompéien sur l'avenue Montaigne, suivant les goûts de sa maîtresse d'alors, la tragédienne Rachel. Celle-ci ne voit pas l'ouvrage terminé, décédant deux ans (1858) avant l'achèvement des travaux (1860)[10].
"Plon-Plon" tombe en disgrâce en 1865 après avoir prononcé, lors de l'inauguration d'un monument à Ajaccio, le , un discours favorable à un empire libéral. Il se retire alors dans sa propriété de Prangins, au bord du lac Léman. Il revend sa villa pompéienne en 1866, qui est utilisée par Théophile Gautier puis Arsène Houssaye comme musée, avant de tomber en ruine et d'être détruite en 1891[10].
Le prince Napoléon était franc-maçon, membre de la loge des Amis de la Patrie[11], et Grand-croix de la Légion d'honneur (décret du ).
Après la chute de l'Empire
Après le désastre de la guerre franco-allemande, la chute de l'Empire et la proclamation de la République, le prince Napoléon ne quitte pas l'arène politique : il est élu conseiller général de la Corse en 1871 et à nouveau député de la Corse en 1876. Son titre de général de division lui est retiré en 1873 par le gouvernement (il attaquera sans succès cette décision devant le Conseil d'État). Mais après la mort de Napoléon III, il se querelle avec l'impératrice Eugénie et, surtout, avec Eugène Rouher, chef des bonapartistes conservateurs, contre lequel il se présente aux élections de 1876. Élu député, en il est l'un des signataires du manifeste des 363 contre la politique du président Mac-Mahon et l'instauration du monarchiste duc de Broglie à la présidence du Conseil. Il est battu aux élections d'octobre de la même année, par le baron Haussmann[12].
La mort inattendue du prince impérial Louis-Napoléon, unique fils légitime de Napoléon III, en Afrique du Sud en 1879, fait de lui en principe le chef de la Maison Napoléon, mais les bonapartistes se rallient majoritairement à son fils aîné Victor (1862-1926), alors âgé de 17 ans, au demeurant désigné comme son successeur par le prince impérial. Le père, appelé Napoléon V par ses partisans, et le fils s'opposent alors durement l'un à l'autre.
Manifeste et exil
Le , il est arrêté pour avoir fait placarder dans Paris un manifeste bonapartiste. Très vite libéré, il est banni de France en 1886 par la loi d'exil frappant tous les membres des familles ayant régné sur la France. Retiré à Prangins, il y reçoit en 1888 Georges Boulanger, qui cherche à obtenir le soutien des bonapartistes. Il meurt en 1891 lors d'un séjour à Rome où il avait l'habitude de passer ses hivers. Il est enterré à Turin, le , et y repose encore au côté de sa femme, dans la crypte des Savoie de la basilique de Superga. L'ouverture de son testament, le jour même de l'enterrement, déclencha un scandale : il y déshéritait son épouse et ses enfants Victor et Marie-Laëtitia au profit de Louis. Non conforme à la loi républicaine, le testament ne fut pas appliqué, Louis n'ayant de plus aucune prétention à faire valoir ses droits dynastiques.
Vie privée
Il est l'un des clients les plus connus de la courtisane Anne Deslions[13],[14].
En 1859, il épouse Clotilde de Savoie, fille de Victor-Emmanuel II d'Italie. Leurs descendants continuent jusqu'à nos jours la seule ligne directe mâle légitime de chefs de la Maison impériale. Trois enfants sont issus de ce mariage :
- le prince Victor Napoléon[1], « prince Napoléon » (1862-1926), dit Victor Bonaparte, chef de la Maison impériale (1891-1926), Napoléon V pour ses partisans.
- le prince Louis Napoléon[1] (1864-1932), dit Louis Bonaparte.
- la princesse Marie-Laëtitia Napoléon[1], duchesse d’Aoste (1866-1926), épouse d’Amédée de Savoie, duc d’Aoste et ancien roi d’Espagne.
Il a par ailleurs deux enfants avec Marie Scheppers, épouse d'Hervé de Carbonnel, marquis de Canisy (branche cadette des anciens seigneurs de Canisy). Le marquis et la marquise de Canisy divorceront en 1875, une fois la liaison entre la marquise et le prince Napoléon devenue de notoriété publique. L'acte de naissance de ces deux enfants indique qu'ils sont de « parents inconnus », mais le prince Napoléon leur écrira jusqu'à sa mort en se présentant comme leur « parrain ». Il s'agit de :
- Lucien de Céligny, qui épouse Mlle Maria Luisa Daireaux, d'où une fille unique, Léticia de Céligny, qui épouse Harold Fitch. Ils ont un fils, Douglas Lucien Jérôme Jacques Fitch-Celigny, marié à Lucila Castro-Fuentès, d'où cinq enfants ; ils vivent actuellement entre la France et l'Argentine. Ils ont également une fille, Béatrice Marie-Louise Catherine Fitch-Céligny, mariée au pianiste concertiste François-Joël Thiollier ;
- Catherine de Céligny, qui épouse le docteur Edmond Lévy-Solal, médecin obstétricien, professeur à la Faculté de médecine de Paris, membre de l'Académie de médecine ; les enfants portent le nom de Solal-Céligny (dont Jérôme Solal-Céligny, conseiller d'État, un des auteurs de la Constitution de la Ve République en 1958[15]).
Hommages
- Une variété de rose lui est dédiée en 1864 sous le nom de 'Prince Napoléon', ainsi qu'une variété de poire, sous le même nom.
Décorations françaises
Grand Croix de la Légion d'honneur[16] () |
Voir aussi
Bibliographie
- Pierre Milza, Napoléon III, Perrin, , 706 p. (ISBN 2-262-01635-6, présentation en ligne), [présentation en ligne]. Réédition : Pierre Milza, Napoléon III, Paris, Perrin, coll. « Tempus » (no 159), , 852 p., poche (ISBN 978-2-262-02607-3).
- Michèle Battesti, Plon-Plon, le Bonaparte rouge, Perrin, 2010[17].
- David Saforcada, Portrait militaire du Prince Napoléon-Jérôme Bonaparte.
- Étienne Chilot, Un jardin pour Eugénie, Somogy Éditions d'Art, 2014.
- Antonietta Angelica Zucconi, « Mathilde, Julie et Napoléon-Jérôme Bonaparte, mécènes des gens de lettres sous le Second Empire », dans Le Mécénat littéraire aux XIXe et XXe siècles, Anne Struve-Debeaux (dir.), Paris, éditions Hermann, 2019.
Article connexe
Liens externes
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- WorldCat
- Les archives de la gestion des travaux au Palais-Royal, résidence du prince Napoléon-Jérôme sous le Second Empire, sont conservées aux Archives nationales (France).
Notes et références
Notes
- Sans faire l’objet d’un décret spécifique, le titre de « prince Napoléon » s’imposa dans les faits pour désigner l’aîné de la branche cadette de la maison impériale. Ainsi, il n’existe pas de date précise mais celle du peut être retenue puisqu’elle instaure un statut de la famille impériale.
Références
- Depuis le règne de Napoléon III, le patronyme de tous les descendants dynastes de Jérôme Bonaparte est « Napoléon »
- https://twitter.com/riddarholmskyrk.
- Article 6 du sénatus-consulte du [lire en ligne]
Napoléon III institue par ce sénatus-consulte le statut de la famille impériale ; Napoléon (Jérôme) devient par ce fait « prince français ». - Le titre de comte de Moncalieri fut créé pour lui par le roi d’Italie.
- À l'origine « Plom-Plom », surnom affectueux donné par sa mère Catherine de Wurtemberg, mais ridiculisé plus tard.
- Ce voyage est évoqué par Dumas au chapitre IX de ses Causeries.
- En 1875, l'Arrêt Prince Napoléon du Conseil d'État lui retire ce grade.
- https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k54907352/f788.
- Senatus consulte du 12/12/1852.
- Saskia Hanselaar, « La maison pompéienne de Joseph Napoléon [sic] par Gustave Boulanger », L'Histoire par l'image, (lire en ligne)
- Liste de francs-maçons célèbres.
- Joseph Valynseele, « Haussmann, Georges Eugène, Baron, (1809-1891) préfet de la Seine et urbaniste », sur napoleon.org (consulté le ).
- (en) Arthur Marwick, A History of Human Beauty, A&C Black, (ISBN 978-0-8264-3945-1, lire en ligne)
- Pierre Branda, La saga des Bonaparte, Place des éditeurs, (ISBN 978-2-262-09481-2, lire en ligne)
- Béatrice Gurrey, « Jérôme Solal-Céligny, l’inconnu de la rédaction de la Constitution de 1958 », Le Monde, (lire en ligne)
- Base léonore.
- Cette biographie est fondée sur le dépouillement des carnets du prince, conservés aux Archives nationales.
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