Oumm Waraka

Umm Waraqa

Oumm Waraka
أم ورقة
Portrait imaginaire d'Oumm Waraka, à la manière des miniatures persanes du XVIe siècle. (2022)
Biographie
Naissance
Avant 622
Médine, Arabie (actuelle Arabie saoudite)
Décès
Nom dans la langue maternelle
أم ورقة بنت عبد الله بن الحارثا بن نوفل الأنصارية
Surnom
La Martyre (el-Chahida)
Activité
Famille
Banou-Nadjdjar
Père
Abd-Allah ibn el-Harith
Autres informations
Religion
Islam (à partir de 622)
Conflit
Maître

Oumm Waraka (en arabe : أم ورقة, Umm Waraqa)[n 1], dite « la Martyre », est une ansâr morte martyre en à Médine. La tradition musulmane fait d'elle la première imame de l'islam, racontant qu'à partir de 624, elle est chargée par Mahomet de la direction de la prière de son dâr, terme signifiant « lieu » et dont le sens exact suscite la polémique.

Au IXe siècle, l'historien Ibn Saad écrit sa première biographie d'après les traditions primitives (hadiths) à son sujet, qu'Ibn Hanbal et Abou Dawoud recueillent aussi. L'historicité d'Oumm Waraka et la portée de son imamat ont été scrutés. Les hadiths la concernant furent l'objet d'un examen critique par les érudits musulmans postérieurs, qui jugèrent leur véracité faible (da'if). Cependant, trois des quatre écoles juridiques de l'islam (hanéfite, chaféite et hanbalite) les estimèrent assez bons (hassan) voire authentiques (sahih) pour autoriser les femmes à être imames, sous certaines conditions. Une minorité des érudits, notamment de tendance soufie, permirent l'imamat féminin sans opposer de restrictions particulières.

Au fil des siècles, la figure d'Oumm Waraka va être minimisée, certaines biographies ne mentionnant pas son imamat. Depuis les années 2000, Oumm Waraka est remise en avant par l'islam libéral, qui fait directement référence à elle pour soutenir l'imamat des femmes et la mixité des salles de prière dans les mosquées.

Nom

Son ism (prénom) est inconnu, seul son konya (surnom) d’Oumm Waraka mère de Waraka ») est passé à la postérité[2]. Son nasab (filiation) est Oumm Waraka bint Abd-Allah ibn el-Harith ibn Nawfal[2], ou Oumm Waraka bint Abd-Allah ibn el-Harith ibn Awaimer ibn Nawfal selon al-Asqalani (mort en )[1]. On ne connaît pas son nisba (origine) si elle en avait un, mais son lakab (nom honorifique) d’el-Ansariyya l'Ansâr » au féminin) indique qu'elle fait partie des ralliés à Mahomet à Médine[2].

Biographie traditionnelle

Sanctuaire de Médine, manuscrit du Dalaïl al-khaïrat du XVIIIe siècle, BNF, Arabe 6859, fo 23r.

Sources

L'historien Ibn Saad (m. ) écrit la biographie d'Oumm Waraka au même moment où son contemporain Ibn Hanbal (m. ) recueille deux hadiths sur elle dans son Mousnad, et qui figurent plus tard dans les Sunan de son élève Abou Dawoud (m. ) : le premier raconte la vie d'Oumm Waraka, le second sa nomination à l'imamat[C2020 1],[3],[4].

Vie à Médine

Selon Ibn Saad, son premier biographe, Oumm Waraka bint Nawfal est une respectable médinoise appartenant aux Banou-Nadjdjar, clan de la tribu des Banou-Khazradj. En 622, après la fuite de Mahomet de La Mecque pour Yathrib (nom de Médine à l'époque), elle compte parmi les premières médinoises à devenir musulmanes et à lui prêter allégeance, faisant d'elle une ansâr. Hafiza, elle connaît le Coran entièrement[C2020 2].

En 624, elle demande à participer à l’effort de guerre lorsque Mahomet part pour la bataille de Badr, souhaitant être infirmière de guerre afin de devenir martyre. Mahomet n’exclut pas la possibilité pour elle de venir sur le champ de bataille, mais le hadith d'Ibn Saad n’est pas explicite sur sa présence à Badr. Le chef arabe garantit encore à Oumm Waraka que Dieu lui octroiera le martyre, sans préciser où et quand cela arrivera[C2020 2].

Le prophète de l'islam rend souvent visite à Oumm Waraka, qu’il surnomme « la Martyre », accompagné par d’autres musulmans. Il lui permet d'avoir un muezzin pour l'appel à la prière islamique, et Ibn Saad précise que Mahomet ordonne à Oumm Waraka de diriger la prière de son dâr en raison de son statut de hafiza[C2020 2].

Martyre

Femme riche, Oumm Waraka possède deux esclaves, un homme et une femme. En 641, ceux-ci l'étranglent dans son sommeil (après avoir essayé de la voler ?) puis ils fuient Médine[C2020 2]. Dans la version du hadith d’Abou Dawoud, le mobile du crime est le suivant : Oumm Waraka annonce que ses esclaves seront affranchis après sa mort, et ceux-ci l’assassinent afin de retrouver leur liberté plus rapidement[2]. Finalement capturés et amenés devant le calife bien-guidé Omar Ier (r.  634-644), ils sont reconnus coupables de meurtre et exécutés par crucifiement. La tradition ajoute qu'il s'agit de la première fois que le hadd de crucifiement était appliqué à Médine[C2020 2].

Analyse des traditions

L’isnad et le matn du hadith

L’isnad (chaine de transmetteurs) chez Ibn Saad et Ibn Hanbal remonte depuis Walid ibn Abd-Allah ibn Jumay al-Zuhri — sa grand-mère (anonyme)[n 2] — Oumm Waraka[C2020 3]. Abou Dawoud ajoute un autre transmetteur[4], le compagnon Abd-al-Rahman ibn Khalid al-Ansari (m. ), dont on ne sait quasiment rien[C2020 4]. Simonetta Calderini conjecture que son addition sert à renforcer la crédibilité du récit car il s'agit d'un contemporain d'Oumm Waraka ; selon d'autres versions de l'isnad, Ibn Khalid n'est pas témoin de l'événement et tient l'anecdote de son père. Le récit de la nomination est le même chez Ibn Saad et Ibn Hanbal[C2020 1], mais chez Abou Dawoud, Ibn Khalid précise que le muezzin est un vieil homme : cela permet de répondre à d'éventuels questionnements sur la pudeur et la bienséance d'Oumm Waraka, car il y a un homme libre non-mahram dans sa maison, et l'âge avancé est synonyme de sagesse[C2020 4]. Sur la mort de l'imame, al-Asqalani rapporte une isnad aussi différente : Walid ibn Abd-Allah ibn Jumay al-Zuhri — Layla bint Malik — sa mère [à Layla] — Oumm Waraka[1]. Le fait que seul Ibn Khalid rapporte un hadith sur cet événement a été questionné en raison de cette étrangeté (gharib) dans la transmission, d'autant qu'il n'y a pas de consensus autour de la fiabilité du narrateur commun (Walid al-Zuhri) et que les autres transmetteurs sont inconnus[2].

Les mouhaddithoun (traditionnistes) pointent aussi du doigt qu'il n'est pas clair dans le matn (récit du hadith) où le muezzin et l'esclave masculin étaient placés par rapport à Oumm Waraka (devant ou derrière) ni si d'autres hommes étaient présents à la prière[2]. Al-Daraqutni et une majorité d'oulémas postérieurs à Abou Dawoud et Ibn Hanbal jugeront l’isnad de ce hadith faible (da'if) pour les raisons précitées[6]. Cependant, une partie des oulémas (tel qu'Ibn Khouzayma ou Albani) continuèrent de le juger authentique (sahih) ou bon (hassan)[4],[7],[8].

Définir le dâr d'Oumm Waraka

Mahomet permet à Oumm Waraka d'avoir un muezzin pour appeler à la prière de son dâr (Wilhelm Gentz, Appel à la prière de Muezzin, 1878).

En arabe, le nom dâr a une définition large, désignant une maisonnée, un domaine, un voisinage, un territoire ou un pays[9]. Le théologien Muhammad Hamidullah comprit le hadith comme la nomination d'Oumm Waraka à la charge d'imame de la mosquée de son voisinage, et que les hommes priaient derrière elle, y compris le muezzin[10]. Cette interprétation a été soutenue par plusieurs juristes musulmans, tel que le chaféite Djamal al-Din al-Mizzi (m. 1341) qui donne comme version du hadith : « [Mahomet] lui ordonna d'être l'imame des personnes de son dâr, alors/et elle les guida (fa kânat ta'ummuhum) [le pronom hum indique la présence d'au moins un homme] et elle avait un muezzin[C2011 1]. »

Nevin Reda fait valoir que dans un hadith, Mahomet dit à Oumm Houmayd, épouse d'Abou Houmayd al-Saadi, qu'il est mieux pour elle de prier dans sa maison (baytiki) que dans le voisinage (dâriki). Demander les services d'un muezzin implique qu'un nombre important de personnes est appelé à la prière, dâr serait donc difficilement limitable à la seule maisonnée d'Oumm Waraka (c.-à-d. elle-même et ses deux serviteurs) et au vieux muezzin[11]. Cet argument a toutefois été remis en question, car plusieurs hadiths indiquent que les muezzins peuvent être donnés à des petits groupes, et que des mosquées étaient instaurées dans les demeures (dour, pluriel de dar) de croyants au temps de Mahomet[12].

En se basant sur un hadith de Mahomet félicitant les Banou-Nadjdjar d'être la meilleure tribu (khay dar) des Ansars, Calderini juge que dâr ne doit pas être entendu comme un lieu physique (à la manière de Reda, qu'elle critique) mais comme un terme pour désigner une collectivité de personnes : Oumm Waraka aurait guidé la prière de sa tribu[C2020 5].

Dans son dictionnaire des biographies de compagnons de Mahomet, Al-Isaba fi tamyiz al Sahaba, al-Asqalani rapporte un hadith où c'est Omar Ier qui découvre le corps d’Oumm Waraka, deux jours après son homicide. Surpris de ne pas l'avoir entendue réciter le Coran aux prières du jour précédent, le calife serait allé la voir à son dâr, où il n’y avait personne. Quand il va voir à sa maison (bayt), Omar Ier découvre Oumm Waraka dans un coin, le linge ayant servi à l’étrangler autour du cou. Le calife monte ensuite au minbar, duquel il annonce la nouvelle du décès de l’ansâr et ordonne de poursuivre ses assassins[G 1]. Pour Guardi, le besoin qu'a al-Asqalani de différencier le nom dâr de bayt démontre qu'il désignait d'abord le voisinage d'Oumm Waraka puis la maison de cette dernière. Par harmonisation des sources, le hadith d'al-Asqalani semble plus explicite que celui d'Abou Dawoud sur le fait que la récitation du Coran par Oumm Waraka était journalière, et qu'elle pouvait être entendue par tout le monde[G 2].

Symbole d'une époque en mutation

Selon Calderini, la certitude de l'historicité d'Oumm Waraka est impossible[C2020 6]. Figure historique ou littéraire, Oumm Waraka est un symbole de la communauté islamique naissante : son désir de participer à la bataille de Badr, et l'octroi d'un muezzin par Mahomet, qui l'ordonne de diriger la prière, renvoient à une période où l'allégeance politique allait de pair avec une allégeance religieuse, une ritualisation de l'islam se mettait en place, et d'importants changements religieux et politiques avaient lieu à Médine[C2020 7].

Oumm Waraka dirigeait la prière comme Oumm Salama, épouse de Mahomet, mais cette dernière n'est imame que de femmes dans sa maison. Leurs biographies ont plusieurs similitudes (connaissance du Coran, piété, fidélité envers Mahomet, femmes de haut rang, capacité à diriger), mais la bataille de Badr semble être un point important : un muezzin et la direction des prières est attribué à Oumm Waraka avant , date à laquelle Oumm Salama épouse Mahomet[C2020 8].

Le hadith d'Oumm Waraka pourrait refléter une première période médinoise où les femmes pouvaient être imames en congrégation mixtes[C2020 9], et la grande victoire que fut Badr a pu apporter des changements ayant touché ou influencé le rituel de la prière, notamment dans le rôle des femmes lors de celle-ci. Les récits relatifs à la direction de la prière par Oumm Salama vont être favorisés comme base de la Sunna prophétique, alors que l'exemple d'Oumm Waraka va être écarté ou remanié[C2020 10].

Évolution de la figure d'Oumm Waraka

La croyante parfaite chez Ibn Saad

La mosquée de Quba dans la seconde moitié du XIXe siècle.

Mourir au combat était, pour les juristes-théologiens du temps d'Ibn Saad, une façon d'être martyr « dans ce monde et le suivant », hommes comme femmes. Les martyrs « dans le [monde] suivant » sont les personnes ayant combattu des voleurs, mortes de façon violente ou tuées alors qu'elles servaient Dieu[C2020 2]. En faisant d'Oumm Waraka une femme désirant mourir au combat (sans confirmer sa présence à Badr), ordonnée imame par Mahomet et assassinée par ses esclaves voleurs, Ibn Saad présente un exemple de croyante et de guide d'une communauté, à une époque où les musulmans se demandent, des actes dévotionnels ou combattifs, lesquels sont les plus méritoires[C2020 11].

Calderini estime possible qu'Oumm Waraka est liée à Mahomet du côté maternel, ce qui expliquerait la familiarité qu'il lui montrait et l'ardeur qu'elle avait de participer à ce qu'il faisait. L'historienne ajoute encore que l'association d'Oumm Waraka avec un lieu pour le culte sur son dâr rappelle le rôle des Banou-Nadjdjar, dont la terre aurait servi à construire la mosquée de Quba, première mosquée à avoir été construite, et ses dépendances[C2020 12].

Altérations biographiques

Par rapport au récit d'Ibn Saad, des variations importantes apparaissent dans d'autres sources : chez Ibn Hanbal, Mahomet dit à Oumm Waraka de « rester » (qirri) à Médine plutôt que d'aller à Badr, et Dieu lui donnera son martyre ; dans la version enrichie d’Abou Dawoud, Mahomet précise « rester chez elle » (qirri fi baytiki). Dans la narration du zahirite Ibn Abi Asim (m. ), avec une isnad entièrement irakienne, Mahomet permet à Oumm Waraka d'avoir un lieu de prière (masjid) sur son dâr pour adorer Dieu. Ce hadith va être repris par d'autres lettrés musulmans qui n'évoqueront pas le rôle d'imame d'Oumm Waraka dans leurs encyclopédies biographiques, la construction d'une mosquée lui sera attribuée à la place[C2020 4].

L’érudit cordouan Ibn Abd el-Barr (m. ) se rapproche du récit biographique d'Ibn Hanbal, et il est suivi par al-Asqalani (Al-Isaba), qui ajoute que Mahomet précise que le martyre de l'ansâr va se passer chez elle. Al-Asqalani ne mentionne ensuite que sa demande de muezzin, être une hafiza ne vaut aucune reconnaissance particulière à Oumm Waraka[13],[n 3]. Ibn Khouzayma (m. ) transmet une version où Mahomet « permet » (adhana) plutôt qu'« ordonne » (amara) à Oumm Waraka d'être l'imame. Le fait que Mahomet « permette » et non « ordonne » à Oumm Waraka de diriger la prière laisse entendre qu'il s'agit d'une gracieuse exception et lui fait perdre en autorité[C2020 13]. Dans des versions recueillies par al-Daraqutni (m. ), d'autres variations significatives sont introduites : elle dirigeait uniquement les femmes de sa maison, ou était imame de femmes et ne dirigeait que durant les tarawih[C2020 14].

Évolution du statut des femmes

À partir du Moyen Âge central, les femmes musulmanes sont encouragées à rester dans leurs foyers (Abû Zayd et son fils, miniature d'une copie des Makamat d'al-Hariri, BNF, Arabe 5847, fo 13v, XIIIe siècle).

Calderini voit chez al-Daraqutni une interpolation manifeste du hadith original, reflétant les débats et les changements progressifs du rôle des femmes dans la société islamique[C2020 14]. Dans des textes ultérieurs, son titre de martyre va aussi finir par disparaître[14]. Calderini suggère qu’Abou Dawoud put anachroniquement faire dire à Mahomet quelque chose faisant écho à la sourate XXXIII, révélée trois ans après la bataille de Badr : l’injonction « reste dans ton foyer » se trouve aussi dans le Coran (XXXIII, 33) au sujet des épouses de Mahomet, injonction qui va être étendue à toutes les musulmanes par certains théologiens[C2020 3]. Toujours selon elle, la surenchère des auteurs postérieurs à Ibn Saad a servi à décourager les femmes de s'engager à la guerre et à les reléguer à des rôles domestiques[C2020 1].

D'après A. Afsaruddin, la plupart des changements interviennent à l'époque seldjoukide (XIe – XIVe siècles) et mamelouk (XIIIe – XVIe siècles), où l'on commence à élaborer des guides de bonne conduite pour les femmes : les extrapolations, modifications ou suppressions de certains détails permettent aux auteurs de mettre Oumm Waraka en adéquation avec les attentes qu'on a des femmes dans la société de leur époque, al-Asqalani notamment[13]. Faire perdre à Oumm Waraka son statut d'imame, de prières féminines comme mixtes, permet de soutenir qu'une femme ne peut acquérir le statut de martyre qu'en restant chez elle et en vaquant à des activités domestiques, auxquelles elle doit se tenir[13].

Réhabilitation au XXIe siècle

Au début des années 2000, le personnage d'Oumm Waraka fait l'objet d'un regain d'intérêt dans les cercles de l'islam libéral et du féminisme musulman, avec sa presque contemporaine Ghazala, autre imame de prières mixtes[C2020 15]. Sur Internet, des pages ou des vidéos (comme sur Youtube) sont dédiées aux femmes imames des premiers temps de l'islam, notamment Oumm Waraka[C2020 16]. Les musulmanes se revendiquant imames la prennent en exemple pour soutenir le droit des femmes à diriger une prière et à la mixité dans les mosquées[C2020 16],[15]. De nos jours, écrit Calderini, en raison des multiples interprétations de l'imamat d'Oumm Waraka avec une multiplicité d’isnad, les personnes défendant le droit des femmes à l'imamat choisissent la version du hadith rapportée par Ibn Saad[C2020 14].

Jurisprudence islamique

Femmes priant le vendredi à midi (dhuhr) dans une mosquée aux États-Unis. Photo de Beth Rankin, 2004.

Entre le IXe siècle et le XIIIe siècle, sur la base du hadith d'Oumm Waraka, plusieurs juristes chaféites, hanbalites et soufis (tel qu'Abou-Thawr, al-Muzani, Tabari, Ibn Khouzayma, Averroès, Ibn al-Jawzi et Ibn Arabi) considérèrent qu'une femme peut être imame et diriger une prière mixte[16]. L'imam al-Nawawi (m. ) et Hassan el-Banna (m. ) listent Daoud el-Zahiri, Abou-Thawr, al-Mazuni et Tabari comme ceux qui considèrent que la prière d'un homme est valide lorsqu'elle est faite derrière une femme[G 3].

La majorité des théologiens musulmans vont privilégier les versions rapportées par al-Daraqutni pour juger de la licéité et des dispositions de l'imamat féminin[C2020 14]. Des juristes, parmi lesquels al-Bayhaqî, ne le permirent que sous certaines conditions[2],[16],[17] Hamidullah se range du côté de l'avis traditionnel : lorsqu'un homme connaît les versets nécessaires à la prière, la femme qui tient le rôle d'imame doit lui en céder la direction. Selon lui, Mahomet fit une exception car Oumm Waraka était plus qualifiée que les hommes de son lieu de résidence[10].

En s'appuyant sur l'exemple d'Oumm Waraka, Asma Lamrabet, féministe musulmane, résume la situation actuelle sur la question de l'imamat des femmes : l'« absence de consensus et une claire divergence des théologiens et des différentes écoles juridiques, prouve encore une fois que cette soi-disant interdiction formelle est le fait d’une majorité (jumhur) de savants qui sont contre, et qu’on ne peut parler d’unanimité. » Elle juge incohérents les arguments des opposants à l'imamat féminin, donnant comme exemple la possibilité d'être une muezzin selon l'école hanéfite[18].

Notes et références

Notes

  1. Aussi orthographié Umm Waraqa. Son nom complet est Oumm Waraka bint Abd-Allah ibn el-Harith ibn Nawfal el-Ansariyya (en arabe : أم ورقة بنت عبد الله بن الحارثا بن نوفل الأنصارية). Ibn Hajar al-Asqalani écrit que son grand-père s'appelle Awaimer (en arabe : عويمر), faisant de Nawfal son arrière-grand-père[1].
  2. Appelée Layla bint Malik dans certaines chaines[5].
  3. Cependant, dans le Tahdhîb al-tahdhîb, al-Asqalani mentionne l'imamat d'Oumm Waraka[C2011 2].

Ouvrages

  1. Calderini 2011, p. 12-13.
  2. Calderini 2011, p. 13.
  1. Calderini 2020, p. 100.
  2. Calderini 2020, p. 99.
  3. Calderini 2020, p. 100-101.
  4. Calderini 2020, p. 101.
  5. Calderini 2020, p. 102-104.
  6. Calderini 2020, p. 104.
  7. Calderini 2020, p. 104-105.
  8. Calderini 2020, p. 105.
  9. Calderini 2020, p. 124.
  10. Calderini 2020, p. 105-106.
  11. Calderini 2020, p. 99-100.
  12. Calderini 2020, p. 103.
  13. Calderini 2020, p. 101-102.
  14. Calderini 2020, p. 102.
  15. Calderini 2020, p. 106.
  16. Calderini 2020, p. 195.
  1. Guardi, p. 1441-1442.
  2. Guardi, p. 1443.
  3. Guardi, p. 1440.

Autres sources

  1. « Umm Waraqa bint Abdullah », sur isnad.io (consulté le )
  2. Dayhan.
  3. Ibn Saad, p. 295.
  4. Abou Dawoud, p. 362-363
  5. (en) David Solomon Jalajel, Women and Leadership in Islamic Law : A Critical Analysis of Classical Legal Texts, Taylor & Francis, , 330 p. (ISBN 9781317302742), p. 111.
  6. Curtis, p. 240-241.
  7. Al-Asqalani, p. 142
  8. Hammer, p. 80
  9. Georg Wilhelm Friedrich Robarts - University of Toronto, Lexicon arabico-latinum praesertim ex Djeuharii Firuzabadiique et aliorum Arabum operibus, adhibitis Golii quoque et aliorum libris confectum. Accedit Index vocum latinarum locupletissimus, Halis Saxonum C.A. Schwetschke, , 544 p. (lire en ligne), p. 69
  10. Hamidullah, p. 46-48.
  11. Reda, p. 90-92
  12. Curtis, p. 241-242.
  13. (en) Asma Afsaruddin, « Reconstituting Women's Lives: Gender and the Poetics of Narrative in Medieval Biographical Collections* », The Muslim World, vol. 92, nos 3-4, , p. 461–480 (ISSN 1478-1913, DOI 10.1111/j.1478-1913.2002.tb03753.x, lire en ligne, consulté le )
  14. Long.
  15. Eva Janadin et Anne-Sophie Monsinay, « Plaidoyer pour l’égalité hommes-femmes dans le culte musulman », sur Voix d'un islam éclairé, (consulté le ).
  16. Faker Korchane, « De la mixité et de l’imamat féminin », sur Mutazilisme, (consulté le ).
  17. Lamrabet, p. 162-163.
  18. Lamrabet, p. 164-165.

Annexes

Bibliographie

 : Tout ou une partie de cet ouvrage a servi comme source à l'article.

Sources primaires
  • (en) Ibn Saad (trad. de l'arabe par Aisha Bewley), Kitab at-Tabaqat al-Kabir : The Women of Madina, vol. 8, Londres, Ta-Ha Publishers Ltd., (ISBN 978-1897940242, lire en ligne) (OCLC 615184807).
  • (en + ar) Abou Dawoud (trad. de l'arabe par Yaser Qadhi), English translation of Sunan Abu Dawud, vol. 1, Riyad, Darussalam, (ISBN 978-9960500126, lire en ligne) (OCLC 399873780).
  • (en + ar) Ibn Hajar al-Asqalani (trad. de l'arabe), Bulugh Al-Maram, vol. 2, Riyad, Darussalam, (ISBN 978-9960899527, lire en ligne) (OCLC 764443840).
Sources secondaires
  • (en) Simonetta Calderini, « Contextualizing Arguments about Female Ritual Leadership (Women Imāms) in Classical Islamic Sources », Comparative Islamic Studies, vol. 5, no 1, , p. 5-32 (DOI 10.1558/cis.v5i1.5).
  • (en) Simonetta Calderini, Women as Imams : Classical Islamic Sources and Modern Debates on Leading Prayer, Bloomsbury Publishing, , 248 p. (ISBN 978-1-838-606-183) (OCLC 1259508246).
  • (tr) Ahmet Tahir Dayhan, « Ümmü Varaka », dans TDV İslâm Ansiklopedisi, vol. 42, Istanbul, TDV İslâm Araştırmaları Merkezi, (ISBN 978-9753897372, lire en ligne), p. 332-333 (OCLC 930986427).
  • (en) Matthew Long, « Umm Waraqa », dans Natana J. DeLong-Bas, The Oxford Encyclopedia of Islam and Women, Oxford University Press, (ISBN 9780199764471, lire en ligne) (OCLC 937862893).
  • (en + ar) Nevin Reda, « Women in the Mosque: Historical Perspectives on Segregation », The American Journal of Islamic Social Sciences, vol. 21:2, , p. 78-97 (DOI 10.35632/ajis.v21i2.504, lire en ligne).
  • Asma Lamrabet, Islam et femmes : Les questions qui fâchent, Gallimard, coll. « Folio Essais », , 290 p. (ISBN 978-2-07-278908-3), p. 154-165 (OCLC 1090782007).
  • (en) Muhammad Hamidullah, The Emergence of Islam : History of the Qur’an, vol. 1, , 48 p. (lire en ligne) (OCLC 31375155).
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  • (en) Juliane Hammer, American Muslim Women, Religious Authority, and Activism : More Than a Prayer, University of Texas Press, , 295 p. (ISBN 978-0-292-75440-9) (OCLC 795320709).
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  • (en) Jolanda Guardi, « Women leadership in the Mosque », HORIZONTE - Revista de Estudos de Teologia e Ciências da Religião, (ISSN 2175-5841, DOI 10.5752/P.2175-5841.2015v13n39p1427, lire en ligne, consulté le ).

Articles connexes

Liens externes


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