Spontour

Spontour est un village des Gorges de la Haute-Dordogne[1], situé dans la commune de Soursac, en Corrèze (19). Le hameau est historiquement connu pour la construction de gabares, ces barques traditionnelles servant au transport de marchandises sur les rivières et les estuaires.

Clocher de l'église
Portail du château de Spontour
Spontour
Géographie
Pays
Région
Arrondissement français
Département
Ancien canton français
Commune française
Coordonnées
45° 13′ 22″ N, 2° 10′ 40″ E
Berge vue depuis le pont
Ruelle dans le centre du village
Vue depuis le centre du village

Toponymie

Le village tire son nom de deux petits ponts sur la Dordogne : en limousin, Es Pontours signifie « aux petits ponts »[2].

Administration

Le village de Spontour est intégré aux collectivités territoriales suivantes :

Géographie

Château de Spontour
La Dordogne au petit matin
Logotype de Natura 2000

Le village se situe à 270 mètres d'altitude dans le Massif central, plus précisément dans les Gorges de la Haute-Dordogne. Flanqué par la Dordogne, Spontour est six kilomètres en aval du barrage de l'Aigle.

Le bourg s'étire sur un kilomètre le long de la rivière. Les maisons les plus basses ont été rasées, puis noyées, lors de la mise en eau du barrage du Chastang en 1952[3].

Lorsque les eaux sont basses[2], les ruines de l’Abbaye de la Valette émergent dans le méandre du Rioux Grand.

Environnement

Spontour fait partie d'un vaste site intégré au réseau européen Natura 2000. Ce réseau, constitué d’un ensemble de sites naturels, terrestres et marins, vise à assurer la survie à long terme des espèces et des habitats particulièrement menacés, à forts enjeux de conservation en Europe.

L’objectif de la démarche européenne, fondée sur les directives Oiseaux et Habitats faune flore, est double :

  • la préservation de la diversité biologique et du patrimoine naturel : le maintien ou le rétablissement du bon état de conservation des habitats et des espèces s’appuie sur le développement de leur connaissance ainsi que sur la mise en place de mesures de gestion au sein d’aires géographiques spécialement identifiées, les sites Natura 2000. Le maillage de sites s’étend sur tout le territoire de l’Union européenne pour une politique cohérente de préservation des espèces et des habitats naturels ;
  • la prise en compte des exigences économiques, sociales et culturelles, ainsi que des particularités régionales : les projets d’aménagements ou les activités humaines ne sont pas exclus dans les sites Natura 2000, sous réserve qu’ils soient compatibles avec les objectifs de conservation des habitats et des espèces qui ont justifié la désignation des sites.

Le « village aux ponts » fait partie de la zone tampon de la réserve de biosphère du bassin de la Dordogne classée au patrimoine mondial de l'Unesco le 11 juillet 2012.

Histoire

Les gabares

Spontour était autrefois un centre important de construction de gabares, du XVIIe siècle jusqu'au début du XXe siècle.

Ces barques prennent les deux orthographes, l'une, « gabarre », est issue de l'ancien provençal gabarra, l'autre, « gabare », est simplifiée.

Le bois

Le bois était une ressource majeure jusqu'au début du XXe siècle. Toute l'économie du village était dédiée à la fabrication des gabares et au commerce du bois. Le bois était coupé et destiné aux vignerons du Bordelais. Le chêne était utilisé pour la tonnellerie et le châtaignier pour les ceps de vignes.

Les collines de la vallée étaient déboisées par l'exploitation forestière. Les forêts se sont reconstituées après l'arrêt de cette activité, il y a une centaine d'années.

Les chantiers

Ces barques à fond plat étaient conçues pour limiter les frictions et assurer la stabilité des marchandises à bord. Selon le tonnage, on distinguait le gabarau, le courpet, le coujadour et la nau. Ces différents modèles mesuraient de 7 à 20 mètres de long et pouvaient transporter jusqu'à 150 tonnes de marchandise.

Le savoir-faire du village était reconnu avec une douzaine de chantiers à son apogée dans les années 1850, un record pour une zone montagneuse. A la fin du XIXe siècle siècle, 350 bateaux étaient fabriqués chaque année.

Les convois

Spontour était à la fois le centre de construction des gabares et le point de départ des gabariers qui convoyaient des chargements de bois sur la Dordogne en direction du Bordelais. Les convois passaient par les ports d'Argentat, de Souillac, de Bergerac et de Libourne dans lesquels les échanges commerciaux se faisaient pendant des siècles.

L'économie de la région dépendait de la Dordogne et de ses embarcations. Les gabares embarquaient des matelots, des charpentiers et des commerçants. Ils vendaient le bois, le charbon, le fromage du Cantal, les cuirs et les peaux de Bort-les-Orgues.

Les gabares faisaient un voyage à sens unique car il était impossible remonter la Dordogne. Les bateaux étaient démantelés à leur arrivée dans le sud-ouest, puis vendus en bois de chauffage. Les matelots rentraient à pied le long du fleuve. Les auberges et les villages sur le chemin du retour étaient également des lieux d'affaires.

La grande époque des gabares spontournoises s'achèvera en 1934 dans un contexte de pénurie de bois et de progrès techniques, les nouveaux moyens de locomotion ayant des capacités de chargement bien plus conséquentes.

Le barrage de l'Aigle

Le chantier

Spontour se situe en aval du barrage de l'Aigle (1935-1945), un édifice reconnu pour l'originalité de son architecture de type poids-voûte avec ses doubles évacuateurs de crues. L'infrastructure est construite à cheval sur deux départements, celui du Cantal (15) et celui de la Corrèze (19).

L’essentiel de la construction de cet édifice a eu lieu pendant la Seconde guerre mondiale. Le dossier du projet a été déposé en 1929, le décret de concession du barrage à l’Énergie électrique de la Moyenne Dordogne a été rédigé en 1934, les travaux préparatoires ont été effectués de 1935 à 1940 et finalement le projet a été reporté pour cause d’occupation et de guerre. Le barrage aurait dû être achevé en 1942.

La Résistance

Le chantier du barrage avance à grand pas, mais l’occupation allemande de la zone libre en novembre 1942 vient le bouleverser. Si l’occupant s’est solidement installé au barrage de Marèges, il ne place cependant pas de troupes sur le chantier de l’Aigle. Pourtant la menace plane et la résistance s’organise.

Un jeune ingénieur des Ponts et Chaussées travaillant sur le chantier, André Decelle (qui sera directeur général d’EDF de 1962 à 1967), prisonnier évadé, est en lien avec l’Organisation de résistance de l’armée (ORA), construite au sein de l’armée de Vichy (dissoute au moment de l’invasion de la zone libre) par les militaires souhaitant poursuivre le combat contre l’Allemagne. Il en est le délégué départemental pour le Cantal, connu comme le « commandant Didier ».

Sous son impulsion, le chantier du barrage de l’Aigle devient l'une des places fortes de l’ORA. La tactique de l’organisation s’oppose en tous points à celle des Francs-tireurs et des partisans français (FTPF) proches des communistes, très présents en Corrèze. Là où ces derniers privilégiaient l’action immédiate de guérilla contre l’occupant, l’ORA préférait se préparer minutieusement pour ne déployer son activité qu’après le débarquement allié.

En juin 1944, l’ORA du barrage de l’Aigle, équipée grâce à plusieurs parachutages, entre en action. Ses hommes se fondent avec ceux des FTPF et de l’Armée secrète, pour former les Forces françaises de l’intérieur (FFI) qui accablent les troupes allemandes. Plusieurs batailles rangées ont lieu dans les environs du barrage. Les conflits armés ne tournent pas tous à l’avantage de la Résistance mais ils épargnent les civils qui sont exposés au massacre dans la ville de Tulle ou dans le village d'Oradour-sur-Glane.

Comme l’ensemble du sud-ouest, la région du barrage de l’Aigle se libère seule de l’occupant, sans l’intervention des troupes alliées. Une partie des hommes impliqués aux côtés du commandant Didier s’engage ensuite dans l’armée française reconstituée pour combattre le nazisme jusqu’au cœur de l’Allemagne. Quant au barrage de l'Aigle, il entrera en service en octobre 1945, quelques mois après la fin de la Seconde Guerre mondiale.

Culture

Spontour rend hommage à la construction des gabares, source historique de sa prospérité, en proposant des croisières commentées à bord d'une authentique gabare restaurée pendant la haute saison.

Une partie du roman L'Âme de la vallée, troisième tome de La rivière Espérance (série de romans ayant pour thème les gabariers) se déroule à Spontour.

Le film Lumière d'été de Jean Grémillon a été tourné à Spontour[4].

Personnages

  • Paulette Lajoinie, originaire de Spontour, était l'épouse d'André Lajoinie, membre du parti communiste français et candidat à l'élection présidentielle de 1988.
  • Altéro Betti (1920-2021), accordéoniste et compositeur d'origine italienne, fondateur du café Au Triolet, habitait le village de Spontour. Sa chanson la plus célèbre est Le temps des gabariers.

Évènements

Spontour accueille trois évènements chaque été :

  • la « Journée de l'art et de la création »[5], un vide-grenier est associé à cette manifestation ;
  • le concours de pêche ;
  • le concours de pétanque.

Loisirs

Spontour et ses environs proposent de nombreux loisirs :

  • les croisières en gabare organisées par une association locale[6]pendant la saison estivale ;
  • la pratique nautique grâce à sa cale de mise à l’eau, son petit port, ainsi qu'un embarcadère pour les croisières en gabare ;
  • la petite piscine municipale (un bassin de faible profondeur et une pataugeoire) ouverte l'été, en juillet et en août ;
  • les visites du barrage de l'Aigle, à quelques kilomètres du village, sont organisées tout au long de l'année.

Sport

Le village est propice à la pratique sportive avec :

Spontour avait autrefois :

  • sa section natation et de canotage[8] de 1925 à 1935 ;
  • ses fêtes nautiques[9] sur la Dordogne de 1925 à 1951.

Restauration

Pour les voyageurs, les croisiéristes et les cyclistes, il est possible de se restaurer Au Triolet-Café à l'entrée du village. La guinguette organise des concerts, des scènes libres et des bals traditionnels.

Gîtes et camping

Le village dispose d'un parc immobilier dédié à la location saisonnière :

Références

  1. « Gorges de la Haute-Dordogne », sur Tourisme Haute-Corrèze (consulté le )
  2. Bernard, ... Barbarin, Marie-Françoise Couppey et Impr. Dumas), Gorges de la Dordogne, vol. 2, Éd. du Laquet, (ISBN 2-910333-78-7 et 978-2-910333-78-2, OCLC 468865758, lire en ligne), p. 89
  3. « Le village de Spontour », sur lacorreze.com (consulté le )
  4. « 1942 : SILENCE ON TOURNE A SPONTOURS ( 19 CORREZE ) - l'ABC de Riviereesperance », sur riviereesperance.canalblog.com, (consulté le )
  5. « Journée de l'Art et de la Création de Spontour - Événements Artistiques locaux - Corrèze », sur Ateliers Dibutade (consulté le )
  6. « Les Gabares de Haute-Dordogne - Balade en gabare - Spontour - Corrèze », sur Les Gabares de Haute-Dordogne (consulté le )
  7. ladordognedevillagesenbarrages.com
  8. Centre France, « Spontour a brillé sous l’ère Henri Soudeille », sur www.lamontagne.fr, (consulté le )
  9. Centre France, « Instituteur, Henri Soudeille fut aussi un précurseur en termes de tourisme », sur www.lamontagne.fr, (consulté le )
  • Portail de la Corrèze
  • Portail du Limousin
  • Portail de la Nouvelle-Aquitaine
Cet article est issu de Wikipedia. Le texte est sous licence Creative Commons - Attribution - Partage dans les Mêmes. Des conditions supplémentaires peuvent s'appliquer aux fichiers multimédias.