Ounas
Ounas (ou Ounis, égyptien ancien : wnjs) est un pharaon, le neuvième et dernier souverain de la Ve dynastie de l'Égypte sous l'Ancien Empire. Ounas règne pendant quinze à trente ans au milieu du XXIVe siècle avant notre ère[1], succédant à Djedkarê Isési— qui aurait pu être son père — et précédant Téti.
Pour les articles homonymes, voir Unas (homonymie).
Ounas | |
Cartouche d'Ounas sur une stèle à Saqqarah | |
Période | Ancien Empire |
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Dynastie | Ve dynastie |
Fonction | souverain |
Prédécesseur | Djedkarê Isési |
Dates de fonction | -2353 à -2323 (selon J. P. Allen) -2380 à -2350 (selon R. Krauss) -2342 à -2322 (selon J. von Beckerath) -2404 à -2374 (selon D. B. Redford) -2341 à -2311 (selon J. Málek) |
Successeur | Téti |
Famille | |
Grand-père paternel | Menkaouhor ? |
Père | Djedkarê Isési ? |
Mère | Setibhor ? |
Conjoint | Nebet |
Enfant(s) | ♂ Ounasânkh |
Deuxième conjoint | Khenout |
Enfants avec le 2e conjoint | ♀ Khentkaous ♀ Hemitrê Hemi ♀ Sechséchet Idout ? ♀ Néferout ? ♀ Néfertkaous ? ♀ Ipout Ire ? |
Fratrie | ♂ Néserkaouhor ? ♂ Rêmkoui ? ♂ Isésiânkh ? ♂ Kaemtjenent ? ♀ Khekeretnebti ? ♀ Hedjetnebou ? ♀ Meret-Isési ? ♀ Nebtyemneferes ? ♀ Kentkhaous ? |
Sépulture | |
Nom | Pyramide d'Ounas |
Type | Pyramide à faces lisses |
Emplacement | Saqqarah |
Date de découverte | |
Découvreur | Gaston Maspero |
Fouilles | 1889-1901 : Alexandre Barsanti 1929-1930 : Cecil Mallaby Firth 1937 : Jean-Philippe Lauer 1973 : Jean Leclant, Jean-Philippe Lauer, Audran Labrousse |
Objets | Textes des pyramides Sarcophage en grauwacke Débris du coffre à canopes |
On sait peu de choses des activités d'Ounas pendant son règne, qui fut une période de déclin économique. L'Égypte entretenait des relations commerciales avec la côte levantine et la Nubie, et des actions militaires ont pu avoir lieu dans le sud de Canaan. La croissance et la décentralisation de l'administration, conjuguées à la diminution du pouvoir du roi, se sont poursuivies sous Ounas, contribuant finalement à l'effondrement de l'Ancien Empire quelque deux-cents ans plus tard.
Ounas a construit une pyramide à Saqqarah, la plus petite des pyramides royales achevées sous l'Ancien Empire. L'ensemble mortuaire qui l'accompagnait, avec ses temples funéraire et de la vallée reliés par une chaussée de 750 mètres de long, était richement orné de reliefs peints, dont la qualité et la variété dépassent l'iconographie royale habituelle. De plus, Ounas fut le premier pharaon à faire graver et peindre les Textes des pyramides sur les murs des chambres de sa pyramide, une innovation majeure qui fut suivie par ses successeurs jusqu'à la Première Période intermédiaire. Les hiéroglyphes disposés en des successions de colonnes verticales sont délicatement ouvragés et rehaussés d'une couleur bleue ; 227 formules entourent la dépouille royale telle une récitation silencieuse mais permanente. Ces textes identifient le roi à Rê et à Osiris, dont le culte était en croissance au temps d'Ounas, et étaient destinés à aider le roi à atteindre l'au-delà. Ces inscriptions influenceront toute la littérature funéraire des Égyptiens[2].
Manéthon, prêtre égyptien du royaume ptolémaïque du IIIe siècle avant notre ère et auteur de la première histoire de l'Égypte, affirme qu'avec la mort d'Ounas, la Ve dynastie a pris fin. Ounas a été remplacé par Téti, le premier souverain de la VIe dynastie, peut-être après une courte crise. Cependant, les preuves archéologiques suggèrent que les Égyptiens de l'époque n'ont pas rompu consciemment avec la dynastie précédente et la distinction entre ces deux dynasties pourrait être illusoire.
Le culte funéraire d'Ounas, établi à sa mort, a continué jusqu'à la fin de l'Ancien Empire et a peut-être survécu pendant la Première Période intermédiaire chaotique. Le culte existait encore ou a été ressuscité au cours du Moyen Empire tardif. Ceci n'a pas empêché Amenemhat Ier et Sésostris Ier de démanteler partiellement le complexe mortuaire d'Ounas pour ses matériaux.
Parallèlement au culte officiel, Ounas a peut-être reçu la vénération populaire en tant que dieu local de Saqqarah jusqu'à la fin de la Basse époque, presque deux-mille ans après sa mort.
Famille
Ascendance
Ounas est peut-être le fils de son prédécesseur Djedkarê Isési[3]. Aucune preuve formelle ne vient étayer cette hypothèse[4] mais la succession entre les deux souverains semble s'être passée sans heurt[5], les hauts fonctionnaires ont gardé leurs postes et enfin, le cartouche d'Ounas retrouvé sur des vestiges de relief du temple mortuaire de la reine Setibhor enterrée dans la pyramide située à côté de celle de Djedkarê Isési à Saqqarah semble démontrer le lien étroit qui lie les deux souverains et entre Ounas et cette reine. Si ce lien est réel, alors Djedkarê Isési et Setibhor seraient ses parents.
Épouses
Ounas avait au moins deux reines, Nebet[6] et Khenout[7], qui furent enterrées dans un grand double mastaba adjacent à la pyramide de leur mari.
Descendance
Ounas et Nebet eurent peut-être un fils, le « fils du roi », le « chambellan royal », le « prêtre de Maât » et le « surveillant de Haute-Égypte » Ounasânkh[8], qui meurt durant la dixième année du règne d'Ounas[9]. La filiation d'Ounasânkh est indirectement suggérée par son nom et ses titres et par la présence de sa tombe près de celles de Nebet et d'Ounas[10] mais n'est pas universellement acceptée[11],[12],[note 1].
Deux autres fils ont été proposés, Nebkaouhor[14] et Shepespouptah[15], mais ces filiations sont conjecturales et contestées[16]. Il est probablement mort sans héritier mâle[16].
Ounas avait au moins cinq filles nommées Hemitrê Hemi[17], Khentkaous[18], Néferout[19], Néfertkaous Ikou[20] et Sechséchet Idout[21]. Le statut d'une autre fille possible, Ipout Ire, est incertain[22].
Fin d'une dynastie
Dans son histoire de l'Égypte, Manéthon affirme qu'avec la mort d'Ounas, la cinquième dynastie a pris fin[4]. C'est peut-être parce qu'Ounas est mort sans héritier mâle[23], son fils probable Ounasânkh étant décédé avant lui. Cela a pu provoquer une crise de succession[23] que le nom personnel choisi par Téti lors de son accession au trône laissait entrevoir : Seheteptaouy signifiant « Celui qui réconcilie/pacifie les deux terres »[4],[23]. La prétention de Téti au trône aurait pu reposer sur son mariage avec Ipout Ire, qui était peut-être une fille d'Ounas[24],[25],[26]. Cette possibilité est fortement débattue, car l'interprétation des titres d'Ipout Ire qui indiquerait qu'elle était la fille d'un roi est incertaine[note 2],[22]. De plus, l'idée que Téti puisse légitimer sa prétention en se mariant dans la famille royale est rejetée par de nombreux égyptologues, dont Munro, Dobrev, Baud, Mertz, Pirenne et Robin, qui ne pensent pas que le droit au trône pharaonique soit passé par la lignée féminine[27].
En plus de la déclaration de Manéthon, la liste des rois de Turin présente un point de rupture particulier entre Ounas et son successeur Téti. Bien que la liste des rois ne soit pas organisée en dynasties - qui ont été inventées par Manéthon - l'égyptologue Jaromir Málek explique que « le critère pour de telles divisions dans le Canon de Turin était invariablement le changement de localisation de la capitale et de la résidence royale »[25]. Málek suggère donc que la capitale de l'Égypte, alors connue sous le nom d'Inbou-Hedj[note 3], a en effet été supplantée à l'époque par des colonies situées au sud, à l'est de Saqqarah-Sud, où se trouvait peut-être le palais d'Ounas. Au cours du deuxième millénaire avant notre ère, ces villes ont finalement fusionné et donné naissance à Memphis[29],[note 4].
Quelle que soit la base du choix de Manéthon de mettre fin à la cinquième dynastie avec Ounas, les Égyptiens vivant à l'époque ne percevaient probablement aucun changement particulier d'une dynastie à l'autre[4]. L'administration de l'État ne montre aucune trace de troubles, de nombreux fonctionnaires poursuivant leur carrière depuis le règne d'Ounas jusqu'au règne de Téti[4]. Il s'agit notamment des vizirs Mehou, Kagemni et Nikaou-Isési et du surveillant de la province d'Edfou[30]. Étant donné que les Égyptiens de l'Ancien Empire n'ont peut-être pas conçu de dynastie[31], la distinction entre les cinquième et sixième dynasties pourrait être illusoire[4].
Règne
Durée du règne
La durée du règne d'Ounas est incertaine. Des sources historiques lui attribuent trente et trente-trois ans sur le trône, chiffres qui ont été adoptés par de nombreux égyptologues, dont Flinders Petrie[32], William Christopher Hayes[33], Darrell Baker[34], Peter Munro[35], et Jaromir Málek[36]. En faveur d'un règne aussi long, on trouve des scènes d'une Fête-Sed[37] dans le temple mortuaire d'Ounas[38],[3]. Cette fête n'était normalement célébrée qu'après trente ans de règne et avait pour but de rajeunir la force et la puissance du pharaon. De simples représentations du festival n'impliquent pas nécessairement un long règne ; cependant, par exemple, un relief montrant le pharaon Sahourê dans la tunique de la Fête-Sed a été trouvé dans son temple mortuaire[39],[40], bien que les sources historiques et les preuves archéologiques conviennent qu'il a régné en Égypte pendant moins de quatorze années complètes[41],[42],[43].
D'autres égyptologues soupçonnent un règne de moins de trente ans pour Ounas en raison de la rareté des artefacts datables de son règne ainsi que de l'absence de documents datés de plus de huit ans sur le trône[44]. Ainsi, Jürgen von Beckerath pense qu'Ounas a gouverné l'Égypte pendant vingt ans[42] alors que Rolf Krauss, David Warburton et Erik Hornung ont réduit ce nombre à quinze ans dans leur étude de la chronologie égyptienne de 2012[43]. Krauss et Miroslav Verner remettent en question la crédibilité du Canon royal de Turin en ce qui concerne les IVe et Ve dynasties, de sorte que le chiffre de trente ans crédité à Ounas par le canon pourrait ne pas être fiable[45].
Les fouilles de la tombe de Nikaou-Isési sous la direction de Naguib Kanawati à Saqqarah[46] ont fourni des preuves à l'appui d'un règne plus court[47]. Nikaou-Isési était un fonctionnaire qui a commencé sa carrière sous le règne de Djedkarê Isési, a vécu sous celui d'Ounas et est mort comme superviseur de la Haute-Égypte sous le successeur d'Ounas, Téti[48]. Nikaou-Isési est connu pour être mort l'année du onzième recensement des bovins pendant le règne de Téti, un événement consistant à compter le bétail dans tout le pays pour évaluer le montant des impôts à percevoir. On croit traditionnellement que de tels comptages se produisaient tous les deux ans pendant l'Ancien Empire et tous les ans pendant le Moyen Empire[48]. Ainsi Nikau-Isesi aurait vécu pendant vingt-deux ans après que Téti ait pris le trône et avec les trente ans de règne crédités à Ounas, serait mort après soixante-dix ans[48]. Cependant, l'examen médico-légal de sa momie a révélé que l'âge au décès n'était pas supérieur à quarante-cinq ans. Cela suggère que le comptage du bétail a eu lieu plus d'une fois tous les deux ans à l'époque d'Ounas et Téti, peut-être de façon irrégulière. Si c'est le cas, le chiffre de trente ans d'Ounas sur le Canon royal de Turin, c'est-à-dire quinze comptages de bétail, pourrait se traduire par aussi peu que quinze ans, ce qui, avec seulement onze ans sous le règne de Téti, expliquerait la mort de Nikaou-Isési à l'âge de quarante à quarante-cinq ans environ[48].
Activités
Le règne d'Ounas a été une période de déclin économique[23] bien que, comme l'écrit l'égyptologue français Nicolas Grimal, ce ne fût « en aucun cas une période de décadence »[4]. En effet, l'État égyptien était encore capable d'organiser d'importantes expéditions pour fournir les pierres de construction du complexe pyramidal du roi[3]. Ces expéditions sont représentées sur des reliefs uniques trouvés sur la chaussée d'Ounas[49],[50],[3] et sont également mentionnées dans la stèle autobiographique d'un fonctionnaire administratif[51],[note 5]. Ce fonctionnaire rapporte le transport de colonnes palmiformes[note 6] de granit rouge de 10,40 mètres de haut d'Éléphantine à Saqqarah en seulement quatre jours, un exploit pour lequel il a été loué par le roi[51]. En plus des importants travaux de construction entrepris à Saqqarah pour la construction de son complexe pyramidal, des activités de construction ont également eu lieu sur Éléphantine[4].
Jusqu'en 1996, la situation domestique sous le règne d'Ounas était considérée comme désastreuse, d'après les reliefs de la chaussée de son complexe pyramidal montrant des gens émaciés et suggérant ainsi des périodes de famine[53],[54]. La situation a changé lorsque les fouilles d'Abousir en 1996 ont permis d'obtenir des reliefs similaires dans le complexe mortuaire de Sahourê, qui régnait à une époque prospère, au début de la cinquième dynastie[55]. En outre, les recherches ont montré que les personnes affamées sont plus susceptibles d'être des habitants du désert — des nomades qui se distinguent par leur style de cheveux spécifique — plutôt que des Égyptiens[56]. Ainsi, ces reliefs sont maintenant compris comme des représentations standard de la générosité du roi envers les indigents et des difficultés de la vie dans les régions désertiques limitrophes de l'Égypte plutôt que comme des références à des événements réels[56].
Activités hors des frontières
En raison de la rareté des preuves datant du règne d'Ounas, nous en savons très peu sur ses activités[34]. Les relations commerciales existantes avec les pays et les villes étrangères, en particulier Byblos[57], semblent s'être poursuivies au temps du règne d'Ounas. Les reliefs de la chaussée de son complexe pyramidal montrent deux grands navires de mer revenant d'une expédition sur la côte levantine avec des hommes syro-cananéens, qui étaient soit les équipages des bateaux, soit des esclaves[58],[59].
Un autre relief représente une campagne militaire, des Égyptiens armés d'arcs et de poignards attaquant des nomades cananéens appelés les Shasou[60],[61]. Des reliefs similaires ont été trouvés dans les pyramides précédentes, comme celle de Sahourê, et ils peuvent donc être des thèmes standard plutôt que des représentations d'événements réels[60]. D'autres sources tendent à confirmer l'exactitude de ces représentations ; cependant, par exemple, l'autobiographie d'Ouni relate de nombreux raids punitifs contre les nomades cananéens du début de la VIe dynastie[60],[62].
Au sud de l'Égypte, les inscriptions d'Ounas sur Éléphantine font état d'une visite du roi en Basse-Nubie, peut-être pour recevoir l'hommage des chefs locaux[38] ou en raison des troubles croissants dans la région[23]. De plus, un relief de la chaussée d'Ounas menant à sa pyramide montre une girafe, suggérant des relations commerciales avec la Nubie[63].
Évolution de la religion
Les règnes de Djedkarê Isési et d'Ounas ont été une période de changements dans la religion égyptienne ancienne et dans l'idéologie de la royauté, changements qui sont d'abord démontrés sous Ounas[64]. Une analyse statistique des fragments de sceaux d'argile portant les noms d'Horus de pharaons de la cinquième dynastie indique un déclin marqué du culte du roi au temps d'Ounas sur le trône[65]. Cela s'est poursuivi sous le successeur d'Ounas, Téti, pour qui nous ne connaissons que deux sceaux portant son nom d'Horus[66]. Cette tendance reflète la diminution du pouvoir du roi en conjonction avec la croissance de l'administration et du sacerdoce[23].
Pendant ce temps, le culte d'Osiris devenait plus important[67], ce dieu remplaçant le roi comme garant de la vie après la mort pour les sujets du pharaon[25][68]. L'égyptologue allemand Hartwig Altenmüller écrit que pour un Égyptien de l'époque « l'au-delà ne dépend plus de la relation entre le mortel individuel et le roi, mais de sa position éthique en relation directe avec Osiris ». En revanche, le culte du dieu Soleil Rê était en déclin apparent, même si Rê était encore la divinité la plus importante du panthéon égyptien. Ainsi, Djedkarê Isési et Ounas n'ont pas construit de temple solaire contrairement à la plupart de leurs prédécesseurs de la Ve dynastie[68]. De plus, les noms de Menkaouhor et d'Ounas n'incorporent aucune référence à Rê, en rupture avec une tradition qui existait depuis le règne d'Ouserkaf, environ un siècle auparavant[67],[69]. Les textes pyramidaux trouvés dans la pyramide d'Ounas démontrent l'importance d'Osiris et de Rê dans la religion égyptienne antique de l'époque. On croyait que les deux dieux jouaient les rôles clés dans l'accès à l'au-delà, avec Rê comme source de vie et Osiris comme force par laquelle la prochaine vie serait atteinte[70],[note 7].
Sépulture
Ounas s'est fait construire une pyramide à Saqqarah-Nord, entre la pyramide de Sekhemkhet et le coin sud-ouest du complexe pyramidal de Djéser, en symétrie avec la pyramide d'Ouserkaf située dans le coin nord-est[74]. Au cours de ce processus, les ouvriers ont nivelé et recouvert des tombes plus anciennes situées dans la région[3], notamment la tombe du pharaon de la IIe dynastie Hotepsekhemoui[74].
Le nom égyptien original de la pyramide était Nefer Isout Ounas, signifiant « Beaux sont les lieux d'Ounas »[75]. La pyramide d'Ounas est la plus petite des pyramides[74] achevées sous l'Ancien Empire, avec une base carrée de 57,7 × 57,7 m pour une hauteur de 43 m[74],[75].
Complexe funéraire
La pyramide d'Ounas fait partie d'un complexe mortuaire plus vaste construit autour d'elle. On y accédait par un ancien lac[76] sur les rives duquel se trouvait le temple de la vallée d'Ounas. Ce temple recevait les provisions pour le culte du roi et les offrandes à faire y étaient préparées. Au fond du temple de la vallée se trouvait le début d'une chaussée couverte de 750 mètres et menant à un temple supérieur adjacent à la pyramide. Une fine fente dans le toit de la chaussée permettait à la lumière d'éclairer ses murs recouverts sur toute leur longueur de reliefs peints. Celles-ci représentaient les saisons égyptiennes, les processions des nomades égyptiens, les artisans à l'œuvre, les porteurs d'offrandes, les scènes de bataille et le transport des colonnes de granit pour la construction du complexe pyramidal[77].
Au bout de la chaussée se trouvait une grande salle menant à une cour ouverte à pilastres entourée de chambres à revues[77]. La cour mène au temple mortuaire proprement dit qui abritait les statues du roi et où avaient lieu les offrandes aux défunts[77]. Il était immédiatement adjacent au côté est de la pyramide, qui était entouré d'un mur d'enceinte définissant l'espace sacré. Au coin sud-est de l'enceinte se trouvait une petite pyramide satellite pour le Ka du roi[74]. Les chambres internes de la pyramide ont été ouvertes en 1881 par Gaston Maspero, qui a ainsi découvert les textes de la pyramide. La chambre funéraire ne contenait rien d'autre qu'un sarcophage noir de grauwacke[78] enfoncé dans le sol et un coffre canope. Le sarcophage contenait des os éparpillés, qui pourraient appartenir à Ounas[74].
Textes des pyramides
La principale innovation de la pyramide d'Ounas est la première apparition des Textes des pyramides[36], l'un des textes religieux les plus anciens d'Égypte à avoir survécu à ce jour[note 8]. Ce faisant, Ounas a initié une tradition qui sera suivie dans la pyramide des rois et reines de la VIe à la VIIIe dynastie, c'est-à-dire jusqu'à la fin de l'Ancien Empire environ deux-cents ans plus tard[80].
Au total, 283 sorts magiques[79],[note 9], aussi connus sous le nom d'énoncés, ont été gravés et les signes peints en bleu sur les murs du corridor, de l'antichambre et de la chambre funéraire de la pyramide d'Ounas[82]. Ils constituent l'interprétation la plus complète des textes de la pyramide existant aujourd'hui[83]. Ces sorts étaient destinés à aider le roi à vaincre les forces et les puissances hostiles dans le monde souterrain et ainsi rejoindre le dieu Soleil Rê, son divin père dans l'au-delà[84]. En écrivant les textes sur les murs des chambres internes de la pyramide, les architectes de la pyramide d'Ounas ont fait en sorte que le roi puisse bénéficier de leur puissance même si le culte funéraire devait cesser[3],[85]. Ainsi, les textes de la pyramide d'Ounas incorporent des instructions pour les actions rituelles et les paroles à prononcer, suggérant qu'elles étaient précisément celles exécutées et récitées pendant le culte du roi dans son temple funéraire[3][85].
La bonne conservation des textes dans la pyramide d'Onuas montre qu'ils ont été arrangés de manière à être lus par le Ba d'Ounas, tel qu'il est issu du sarcophage grâce aux paroles de résurrection et entouré de sorts de protection et d'offrandes rituelles[83],[86]. Le Ba quitterait alors la chambre funéraire, qui comprend des textes identifiant le roi avec Osiris dans la Douât, et se déplacerait dans l'antichambre symbolisant l'Akhet. Parmi les sorts écrits sur les murs de l'antichambre d'Ounas figurent deux paroles connues sous le nom d'Hymne cannibale, qui dépeint le pharaon comme volant vers le ciel à travers un ciel orageux et mangeant à la fois les dieux et les hommes. Ce faisant, le roi recevrait la force vitale des dieux[83],[note 10]. C'est là que le Ba d'Ounas faisait face à l'est, dans la direction du lever du soleil, et au-delà de la maçonnerie pyramidale, la fausse porte du temple funéraire où se déroulaient les rituels funéraires. Enfin, en tournant à gauche, le Ba rejoindrait Rê dans le ciel en passant par le couloir pyramidal[83].
- Gaston Maspero dans la chambre funéraire de la pyramide d'Ounas peu de temps après sa découverte
- Partie restaurée de la chaussée d'Ounas à Saqqarah
- Bédouins mourant dans le désert (pièce conjoncturée de l'époque du règne d'Ounas) - Musée du Louvre
Culte funéraire
Ancien Empire
L'héritage le plus immédiat d'Ounas est son culte funéraire, qui s'est poursuivi au moins jusqu'à la fin de l'Ancien Empire. Ce culte est attesté par les tombes à Saqqarah de sept prêtres responsables des devoirs religieux à accomplir dans le complexe funéraire. Trois de ces tombes datent du début de la VIe dynastie après la mort de Pépi Ier. Trois autres tombes datent du règne de Pépi II et la dernière date de la toute fin de l'Ancien Empire. Les prêtres du culte d'Ounas adoptèrent des noms basilophores, incorporant celui du roi, éventuellement dès leur entrée en fonction[88].
Moyen Empire et époques suivantes
Le culte funéraire d'Ounas semble avoir survécu pendant la chaotique Première Période intermédiaire jusqu'au Moyen Empire[89]. Au temps de la XIIe dynastie, le prêtre-lecteur Ounasemsaf[note 11] et sa famille étaient impliqués dans le culte d'Ounas[90],[91]. Malgré cela, le complexe funéraire d'Ounas a été partiellement démantelé et ses matériaux ont été réutilisés pour la construction des complexes pyramidaux d'Amenemhat Ier et de Sésostris Ier[92],[93].
En plus de son culte officiel, Ounas fut déifié et devint un dieu local de la nécropole de Saqqarah. Grimal attribue cela directement à la grandeur de son complexe funéraire[4]. Jaromir Málek doute de l'existence d'un culte populaire d'Ounas pendant l'Ancien Empire mais le reconnaît à partir du Moyen Empire[94]. Il attribue cette renaissance à la position géographique du complexe d'Ounas qui en fait une porte naturelle vers la nécropole de Saqqarah[95]. Le culte populaire d'Ounas déifié s'est poursuivi pendant près de deux-mille ans, comme en témoignent les nombreux scarabées portant le nom d'Ounas trouvés à Saqqarah et datant du Nouvel Empire jusqu'à la Basse époque[96],[97],[98],[99]. L'épicentre de ce culte n'était pas la pyramide d'Ounas ni le temple mortuaire associé mais plutôt les statues du roi dans le temple de la vallée[100]. Cette activité pourrait expliquer pourquoi le complexe pyramidal d'Ounas a fait l'objet de travaux de restauration sous l'impulsion du prince Khâemouaset, fils de Ramsès II[77].
Titulature
Notes et références
Notes
- En particulier le titre de « fils du roi » est donné à des fils royaux et à des non-royaux[13].
- Ipout a le titre de z3t nswt-bjtj, qui signifie « Fille du roi de Haute et Basse Égypte ». Cependant ce titre peut aussi être une variante de z3t-ntjr, signifiant mère du roi (Pépi Ier)[22]
- Inbou-Hedj signifiant « murs blancs »[28].
- De Men-néfer, déformation grecque du nom égyptien de la pyramide de Pépi Ier[28]
- Stèle CG 1433, musée égyptien du Caire[51].
- Une colonne paliforme est une colonne dont le chapiteau a une forme de feuille de palmier. Ce style se retrouve dans le complexe funéraire du roi Sahourê[52].
- Le mythe de la création memphite a peut être été écrit durant le règne d'Ounas[23]. Il raconte qu'au début des temps, Ptah le démiurge, issu de Noun, l'océan primordial, prit conscience de son existence. Puis il prit le limon de la terre, créant et modelant l'Homme. Aussitôt son œuvre créatrice terminée, il céda la place à son successeur Rê, le soleil[71]. Il est cependant admis que ce mythe date plutôt de la XIXe dynastie ou même de la XXVe dynastie[72],[73].
- Le style archaique de certains passages du Textes des pyramides, montre qu'il est plus ancien que le règne d'Ounas[79].
- Ce nombre varie suivant les auteurs. Clayton mentionne 228 sorts[81] ; Allen en donne 236[80].
- Alors que le plupart des historiens pensent qu'il est peu probable qu'Ounas s'adonne lui même au cannibalisme, Ernest Alfred Thompson Wallis Budge propose que l'Hymne cannibale ramène a des temps anciens où le cannibalisme était pratiqué[87].
- Ounasemsaf signifiant « Ounas est sa protection ».
Références
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