Vie politique en France depuis 1958
La vie politique en France se déroule sous le régime de la Cinquième République depuis l'adoption de la Constitution française du 4 octobre 1958.
Depuis 1958, la France est une république et un régime parlementaire. Concrètement, cela signifie que le pouvoir exécutif est détenu essentiellement par le président de la République et qu'il partage avec le Premier ministre et le gouvernement qu'il a nommé. On peut aussi parler de régime semi-présidentiel[1]. C'est un régime politique typiquement français car très rare dans le monde ; ce régime a la réputation d'être à la fois très stable et très souple[2].
Politique de la France sous la Cinquième République
Après que Charles de Gaulle a fait adopter la Constitution de 1958, la France a été gouvernée par des gouvernements de droite successifs jusqu'en 1981. Durant les années 1960, les partis de gauche avaient des résultats plutôt médiocres aux élections nationales. Les gouvernements successifs appliquaient généralement le programme gaulliste d'indépendance nationale, et de modernisation d'une manière interventionniste. Le gouvernement gaulliste, pourtant, a été critiqué pour sa brutalité[réf. nécessaire]: tandis que les élections étaient libres, l'État avait le monopole et le contrôle des émissions de radio et des émissions de télévision et cherchait à imposer son point de vue[réf. nécessaire] sur l'actualité (cependant ce monopole n'était pas absolu, puisqu'il ne pouvait s'exercer qu'à l'intérieur du territoire français et qu'il y avait des radios qui émettaient depuis les pays voisins). La politique sociale de De Gaulle était foncièrement conservatrice.
Pendant les événements de Mai 1968, une série de grèves de travailleurs et de révoltes d'étudiants agita la France. Mais cette agitation n'eut pas pour effet un changement immédiat de gouvernement, la droite étant largement réélue à l'élection de . L'électorat bascula en 1969 au référendum sur la réforme du Sénat et la régionalisation, dans un mouvement généralement considéré[réf. nécessaire] comme une lassitude des Français pour De Gaulle.
En 1981, François Mitterrand, candidat du parti socialiste, fut élu président avec un programme de réformes de grande envergure, le Programme commun. Après s'être assuré une majorité au parlement à l'issue des élections législatives de la même année, son gouvernement mena un programme de réformes économiques et sociales.
En 1983, la forte inflation et la crise économique menèrent à un revirement de la politique économique, connue sous le terme de « tournant de la rigueur » – le gouvernement de gauche s'est alors engagé dans des réformes de politique fiscale et de contrôle des dépenses, et de privatisation des principales banques françaises.
Bien que la majorité des nationalisations aient été annulées dès 1984, ou par les gouvernements suivants (de gauche comme de droite), les réformes sociales entreprises ont été maintenues. Depuis lors, le gouvernement alterna entre une coalition de gauche (composée du parti socialiste et du parti communiste, et plus récemment Les Verts), et une coalition de droite (composé par l'Union pour la démocratie française et le Rassemblement pour la République de Jacques Chirac, plus tard remplacé par l'Union pour un mouvement populaire).
Les années 1980 et années 1990 ont vu aussi l'émergence du Front national de Jean-Marie Le Pen, un parti accusant l'immigration, particulièrement l'immigration provenant des pays d'Afrique du Nord tels que l'Algérie de l'augmentation du chômage et de la criminalité[3]. Depuis les années 1980, le chômage est resté élevé, à environ 10 % de la population active, quelles que soient les politiques menées pour le combattre[réf. nécessaire]. En outre, la criminalité a changé durant cette période, avec une très forte augmentation de la délinquance juvénile et des actes d'incivilité, bien que la mesure de son augmentation soit sujette à débat[réf. nécessaire]. Les problèmes dans les banlieues – un euphémisme décrivant les zones d'habitations périurbaines défavorisées, souvent à forte proportion de population issue de l'immigration – restent préoccupants. La présence de Jean-Marie Le Pen au second tour de l'élection présidentielle de 2002 a été attribuée, en grande partie, au sentiment d'insécurité[réf. nécessaire].
Extrême gauche
- Lutte ouvrière : nom sous lequel se présente l'Union Communiste Internationaliste (UCI). L'UCI est un parti trotskiste issu d'une scission de la IVe Internationale datant de 1939. Sa porte-parole, Arlette Laguiller, a recueilli 1,34 % des voix à l'élection présidentielle de 2007. Sa successeuse, Nathalie Arthaud, recueille 0,56% des suffrages exprimés en 2012 et 0,64% en 2017.
- Nouveau Parti anticapitaliste (NPA) : parti anticapitaliste affilié à la IVe Internationale. Certains de leurs anciens militants, dont Alain Krivine, ont été exclus en du PCF[4] pour leur opposition radicale au stalinisme. Son porte-parole, Olivier Besancenot, a recueilli 4,08 % des voix à l'élection présidentielle de 2007. Après lui, Philippe Poutou fit de moins bons résultats : 1,15% en 2012 et 1,09% en 2017.
- Parti ouvrier indépendant (POI) : parti anticapitaliste et eurosceptique, issu en grande partie du Parti des travailleurs. Le candidat soutenu par le PT, Gérard Schivardi, a recueilli 0,34 % des voix à l'élection présidentielle de 2007.
Gauche
- La France insoumise : parti de gauche radicale fondé en 2016 par Jean-Luc Mélenchon en vue des scrutins de 2017, se réclamant notamment de l'écosocialisme[5],[6],[7], du socialisme démocratique[7], de l'antilibéralisme[8],[9] et de l'altermondialisme[10]. Au premier tour de l'élection présidentielle de 2022, Mélenchon arrive largement en tête de la gauche avec près de 22 % des voix. Depuis les législatives de 2022, le groupe La France insoumise - Nouvelle Union populaire écologique et sociale compte 75 députés.
- Parti socialiste : héritier de la SFIO, ce parti en son état actuel est recréé par Alain Savary et rassemblé par François Mitterrand. Il se réclame de la voie progressiste et social-démocrate. Ses congrès organisent le rapport de force idéologique des courants en son sein et désigne son premier secrétaire (Olivier Faure actuellement). Il est un des deux ou trois grands partis depuis 1958 et jusqu'en 2017, remportant plusieurs présidentielles et des législatives. Les candidatures de François Mitterrand (1965 soutenu par la SFIO, 1974, 1981, 1988) permettent toutes une présence au second tour, et deux victoires suivies de dissolutions donnant une majorité au moins relative au PS à l'assemblée. En 1969, en revanche, et en 2002 avec Lionel Jospin, le candidat socialiste est éliminé au premier tour. En 2007, la candidate à l'élection présidentielle fut Ségolène Royal (25,87 %) des voix, perdant au second tour avec 46,94 % des voix, contre le candidat UMP Nicolas Sarkozy. Lors de l'élection présidentielle 2012, François Hollande est élu président de la République française avec 51,64 % des suffrages contre le candidat UMP Nicolas Sarkozy qui rassemble 48,36 % des suffrages ; le Parti socialiste obtient la majorité absolue à l'Assemblée nationale. La République en marche est la première force politique du pays, détenant les groupes parlementaires les plus importants en effectifs à l'Assemblée nationale (mais Les Républicains détiennent encore le Sénat). Mais les Républicains (et encore un peu le PS) sont également bien implantés dans les collectivités territoriales, dirigeant actuellement 20 conseils régionaux sur 22 en France métropolitaine et une majorité de conseils généraux avec le soutien des autres partis de gauche parlementaire. Depuis 2015, la gauche gère 5 régions (Nouvelle-Aquitaine, Occitanie, Bourgogne-Franche-Comté, Bretagne et Centre Val-de-Loire). Après la présidence de François Hollande le parti socialiste, au plan national se divise (les candidats à la primaire les mieux placés finissent par le quitter) et s'affaiblit. Aux élections de 2017, le candidat socialiste finit 5e avec 6,3 % et n'a plus que 29 députés. Malgré des élections locales qui maintiennent quelques bastions, en 2022, la candidate à la présidentielle est 10e avec 1,7 %.
- Parti communiste français : après avoir connu son heure de gloire après la Seconde Guerre mondiale, il est depuis 1981 en nette perte de vitesse. Sa candidate au premier tour de l'élection présidentielle de 2007, Marie-George Buffet, a obtenu 1,93 % des voix. Lors de l'élection présidentielle de 2012, le PCF ne propose pas, pour la première fois depuis 1974, de propre candidat mais apporte son soutien à la candidature de Jean-Luc Mélenchon. Le PCF, plus ancien parti de la gauche parlementaire, a toujours été un allié fidèle du Parti socialiste depuis 1974, année au cours de laquelle l'Union de la gauche a été formée à l'initiative des dirigeants socialiste, communistes et radicaux de gauche de l'époque. Disposant de plusieurs fiefs électoraux très localisés, le PCF est le troisième parti de l'Assemblée nationale en effectifs, où ses députés siègent aux côtés des verts au sein du groupe politique de la Gauche démocrate et républicaine, tandis que ses sénateurs siègent avec ceux du Parti de gauche au sein du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche. Le PCF a dirigé les conseils généraux du Val-de-Marne et de l'Allier (jusqu'en 2015) avec l'appui du PS.
- Parti radical de gauche : mouvement issu de la scission en 1971 du Parti radical-socialiste, parti politique dominant durant la majeure partie de la Troisième République. Très faible électoralement parlant, le PRG doit compter sur ses alliances avec le Parti socialiste pour conserver quelques sièges à l'Assemblée nationale et dans les parlements locaux des collectivités territoriales. Il demeure relativement bien implanté en Corse et surtout en Midi-Pyrénées, où il dirige respectivement les conseils généraux de la Haute-Corse et de Tarn-et-Garonne. Les sénateurs du PRG siègent au sein du groupe RDSE, tandis que ses députés sont membres du groupe RRDP. Il fusionne en 2018 avec le Parti républicain, radical et radical-socialiste pour former le Mouvement radical, social et libéral.
- Europe Écologie Les Verts : principal groupement écologiste. Sa candidate à l'élection présidentielle de 2007 fut Dominique Voynet, qui recueillit 1,57 % des voix au premier tour. Souvent alliés aux autres partis de la gauche parlementaire, ils ne peuvent compter sur aucun fief électoral régulier, leurs électeurs étant équitablement répartis sur l'ensemble du territoire. Si les verts n'ont jusqu'à présent eu qu'un succès très limité aux élections présidentielle et législatives, ils recueillent généralement de bons résultats lors des élections régionales (12,18 % en 2010) et des élections européennes (16,28 % en 2009), ainsi que dans plusieurs grandes villes lors des élections municipales. Ses députés siègent au sein du groupe écologiste tandis que ses sénateurs sont membres du groupe écologiste.
- Mouvement républicain et citoyen : Fusion du Mouvement des citoyens, scission du Parti socialiste, et du Pôle républicain, qui a soutenu l'élection de Jean-Pierre Chevènement au cours de l'élection présidentielle de 2002, ce parti est un ensemble de tendances se réclamant du républicanisme de gauche. Le MRC a toujours été un parti « marginal » au niveau national, et il doit compter, comme le PRG, sur ses alliances avec le Parti socialiste pour conserver quelques mandats au parlement et dans les collectivités territoriales. Ses députés sont membres du groupe RRDP à l'Assemblée nationale, tandis que son sénateur, M. Chevènement, siège au sein du groupe RDSE.
Centre
- La République En Marche (ou LREM) : Crée en 2016 par Emmanuel Macron à l'occasion des élections présidentielles de 2017. Emmanuel Macron, candidat de LREM, remporte les élections présidentielles de 2017 et devient ainsi le 25e président de la République en battant Marine Le Pen lors du second tour avec 66,10 % contre 33,90 % pour Marine Le Pen. Il est réélu en 2022 face à la même candidate qu'en 2017 en obtenant 58,55% des voix.
- Mouvement démocrate (ou MoDem) : issu principalement de l'Union pour la démocratie française, ce mouvement indépendant se réclamant du centrisme a été créé par François Bayrou à la suite de l'élection présidentielle de 2007. Se voulant en dehors du clivage gauche/droite, il n'émet généralement aucune préférence quant aux alliances électorales, se tournant, si nécessaire, aussi bien vers le PS que vers l'UMP en vue des élections municipales et cantonales de 2008. Le MoDem s'allie en 2017 avec La République en marche lors des élections législatives à la suite du renoncement la candidature de François Bayrou à l'Élection présidentielle française de 2017.
- Union des démocrates et indépendants : confédération de centre-droit créée en 2012, comprend notamment :
- La Gauche moderne : créée en 2007 par Jean-Marie Bockel, ex-membre du Parti socialiste, pour soutenir l'action de Nicolas Sarkozy peu après son élection en tant que président de la République. Se réclamant du social-libéralisme, ce parti se veut un allié loyal mais distinct de l'UMP.
- Le Nouveau Centre : créé par des parlementaires, ex-membres de l'UDF, qui ont appelé à voter Nicolas Sarkozy lors de l'entre deux tours de l'élection présidentielle de 2007. Contrairement au Mouvement démocrate, le Nouveau centre se réclame comme une composante à part entière de la majorité présidentielle de Nicolas Sarkozy, rejetant toute idée d'alliance avec la gauche pour demeurer un allié et un soutien loyal de l'UMP. Marginal électoralement parlant (2 % des voix lors des élections législatives de 2007), il ne doit la formation de son groupe parlementaire à l'Assemblée nationale qu'à ses alliances avec l'UMP. Il se renforce en accueillant des déçus du Modem, comme Jean-Marie Cavada, ou de l'UMP, comme Hervé de Charette.
- Parti radical : le plus ancien parti politique français, créé en 1901, présidé actuellement par Laurent Hénart. Parti d'inspiration républicaine, laïque et sociale, il a été un mouvement associé à l'UMP de 2002 à 2012, avant de reprendre son indépendance. Il rejoint le Parti radical de gauche pour former en 2017 le Mouvement radical.
Droite
- Les Républicains : créé en mai 2015 lors d'un congrès fondateur. Il est le successeur de l'UMP qui était une fusion du parti gaulliste du Rassemblement pour la République et de Démocratie libérale, ainsi que de plusieurs ex-membres de l'UDF ayant soutenu Jacques Chirac lors de la campagne présidentielle de 2002, l'UMP était le premier grand parti fédérant l'essentiel des forces des droites françaises. Son ancien président, Nicolas Sarkozy, a été président de la République, après avoir remporté le second tour (53,06 % des voix) de l'élection présidentielle de 2007.En 2012 il perd l'élection présidentielle face à François Hollande et l'UMP perd aussi les législatives et donc devient la première force d'opposition du pays. Nicolas Sarkozy, alors président de l'UMP décide de renommer le parti et changer les statuts de ce dernier. François Fillon est désigné candidat du parti lors de la Primaire française de la droite et du centre de 2016. Il récolte 20,01% à l'élection présidentielle de 2017 et échoue à se maintenir au second tour. En 2021n Valérie Pécresse est élu lors du congrès des Républicains pour représenter LR lors de l'élection présidentielle de 2022. Elle ne récolte que 5% au premier tour ce qui représente le score le plus faible de la droite aux élections présidentielles sous la 5e république.
Extrême droite
- Rassemblement national (RN), ex-Front National (FN) : Parti nationaliste et populiste, classé à l'extrême droite de l'échiquier politique, fondé en 1972 par Jean-Marie Le Pen qui l'a dirigé jusqu'en 2011. Marginal avant le milieu des années 1980, le FN devient un acteur incontournable de la vie politique française à partir de 1984, année au cours de laquelle il réalise sa première grosse percée électorale lors des élections européennes, rassemblant près de 11 % des suffrages exprimés et plus de 2 millions d'électeurs. Les consultations nationales des années suivantes donneront au FN des résultats allant de 9 à environ 15 % des suffrages exprimés. Lors des élections législatives de 1986, le FN gagne 35 sièges à l'Assemblée nationale, profitant de l'instauration de la représentation proportionnelle. Le retour au scrutin uninominal majoritaire à deux tours pour les élections législatives et son isolement politique le laisseront ensuite continuellement aux portes du Parlement malgré des résultats en forte et constante progression en pourcentage de voix. Lors de l'élection présidentielle française de 2002, Jean-Marie Le Pen a créé la surprise en se qualifiant pour le second tour, où il sera battu par Jacques Chirac, réélu avec plus de 82 % des suffrages exprimés. Les scores du FN resteront cependant assez élevés par la suite (notamment lors des élections régionales de 2004) jusqu'en 2007, année au cours de laquelle Le Pen subit un recul important lors du premier tour de l'élection présidentielle (10,4 % des suffrages exprimés), tandis que le FN fera ensuite face à une véritable déroute électorale lors des élections législatives, rassemblant à peine plus de 4 % des suffrages exprimés au niveau national. Il pèse depuis un peu plus de 14 % des voix au niveau national et 17,9 % des voix à l'élection présidentielle de 2012. Le score de Marine Le Pen (21,30%) lui permet d'accéder au second tour de l'élection présidentielle française de 2016, battue par la suite par Emmanuel Macron (33,90% des suffrages exprimés en faveur de Marine Le Pen).
- Reconquête, créé en 2021 et actuellement dirigé par Éric Zemmour.
Années 1950 et 1960, l'État-UDR
Le système politique français est marqué par la bipolarisation de ses forces politiques sur la base du clivage gauche/droite. Aux débuts de la Cinquième République, la vie politique s'organisait à gauche autour du Parti communiste français (PCF) et de la gauche réformiste de gouvernement, au sein de laquelle le Parti socialiste (PS) deviendra hégémonique dès sa fondation en 1969. À droite, les partis de la mouvance gaulliste, unifiés en 1967 au sein de l'Union démocratique pour la Ve République (UDR) occupèrent longtemps une position largement dominante, mais régulièrement contrebalancée par la droite libérale principalement incarnée par les Républicains indépendants et de petits mouvements du centre droit, héritiers du Mouvement républicain populaire (MRP), comme le Centre démocrate ou Progrès et démocratie moderne. Les rapports entre ces formations au sein même des deux blocs sont souvent conflictuels, mais le recours au scrutin uninominal majoritaire à deux tours pour l'élection des députés et la présidentialisation du régime avec, dès 1962, l'élection du Président de la République au suffrage universel direct contribue au maintien de la bipolarisation. La droite menée par la sensibilité gaulliste dominera assez largement la vie politique jusqu'au début des années 1970, Charles de Gaulle et Georges Pompidou étant successivement largement élus à la présidence de la République, avec le soutien constant de l'Assemblée nationale, où le parti gaulliste reste la première force jusqu'en 1981.
Années 1970 : le quadrille bipolaire
Les années 1970 marqueront le premier grand bouleversement du paysage politique français. Les élections législatives de 1973 marquent un net reflux du gaullisme au profit du centre-droit, largement concrétisé lorsque Valéry Giscard d'Estaing, chef des Républicains indépendants, accède à la présidence de la République aux dépens du gaulliste Jacques Chaban-Delmas. C'est la fin de "l'État-UDR". À gauche, le PS s'allie au PCF et au petit Mouvement des radicaux de gauche (MRG) dans le cadre de l'Union de la gauche en 1972. Cette alliance permettra à la gauche de se renforcer, son candidat unique à l'élection présidentielle de 1974, le Premier secrétaire du PS François Mitterrand, manquant de peu la victoire au second tour (49,2 % des voix). À droite, les rapports de force se rééquilibrent avec la fondation par M. Giscard d'Estaing en 1978 de l'Union pour la démocratie française (UDF), parti fédérant les forces de la droite non-gaulliste et du centre-droit. Ce nouveau parti met fin à l'hégémonie gaulliste à droite, l'UDR, transformée en Rassemblement pour la République (RPR) en décembre 1976 sous l'impulsion de Jacques Chirac, restant toutefois légèrement plus forte électoralement parlant. Le système partisan s'organise dès lors sur la base d'une "quadrille bipolaire"[11], avec quatre partis d'importance équivalente : à gauche, le PCF et le PS, à droite, le RPR et l'UDF. Cette nouvelle situation est particulièrement bien illustrée par les résultats des élections législatives de 1978, à l'occasion desquelles la droite conserve de justesse sa majorité à l'Assemblée nationale malgré d'éclatantes victoires de la gauche lors d'élections locales.
Années 1980, lourd déclin du communisme et apparition de l'extrême-droite
En 1981, l'élection de François Mitterrand à la Présidence de la République bouleverse à nouveau les rapports de forces au sein du système partisan français. Au cours de cette élection et des législatives qui suivront, le Parti communiste perd une grande partie de son audience à gauche au bénéfice du Parti socialiste, qui devient très largement majoritaire de seul à l'Assemblée nationale. Les années 1980 marqueront l'avènement d'une nouvelle ère dans la vie politique française. Si à droite les rapports de forces restent inchangés, le PCF amorce de manière brutale un inexorable déclin, le PS devenant progressivement hégémonique dans le camp de la gauche de gouvernement. Les déceptions vis-à-vis des politiques menées par les premiers gouvernements socialistes, qui abandonnent dès 1982 leur plan de relance keynésien au profit d'un plan de rigueur économique nettement moins ambitieux, mécontente une bonne partie de l'électorat qui se réfugie dans le vote protestataire. À l'occasion des Élections européennes de 1984, le Front national (FN), formation populiste classée à l'extrême droite de l'échiquier politique, effectue une percée phénoménale, passant d'un niveau proche de zéro à plus de 10 % des suffrages exprimés. Ce succès est concrétisé en 1986 lorsque le FN envoie 32 députés siéger à l'Assemblée nationale, alors élue à la représentation proportionnelle. Rejeté par la droite traditionnelle, le FN est exclu du jeu des alliances et ne sera jamais en mesure d'obtenir plus d'un siège à l'Assemblée après le rétablissement du scrutin majoritaire dès les législatives de 1988. Cela n'empêchera pas son audience électorale et médiatique de croitre, Jean-Marie Le Pen obtenant plus de 14 % des suffrages exprimés au premier tour de l'élection présidentielle de 1988. Le FN s'impose peu à peu comme une troisième force politique alternative, en dehors de la bipolarisation traditionnelle entre droite et gauche.
Années 1990, l'émiettement partisan
Les années 1990 débutent sous le signe de l'alternance. Alors que le second mandat du président Mitterrand touche à sa fin, la gauche est laminée par l'alliance RPR-UDF lors des élections législatives de 1993. Cette période est marquée par une consolidation du FN et par la percée significative des mouvements écologistes, en particulier Les Verts et Génération écologie, qui font leur entrée dans plusieurs conseils régionaux à l'issue des élections régionales de 1992 et obtiennent d'excellents scores aux législatives de 1993. Ce succès sera de courte durée, et seuls Les verts parviendront à s'imposer durablement dans le paysage politique avec des scores tournant autour des 4 %. La classe politique traditionnelle perd encore du terrain lors de l'élection présidentielle de 1995, au cours de laquelle Jean-Marie Le Pen atteint les 15 %, tandis que l'extrême gauche, représentée par la candidate de Lutte ouvrière Arlette Laguiller, effectue une percée avec plus de 5 % des voix. Cette nouvelle recomposition des forces politiques oblige le Parti socialiste à composer avec des formations concurrentes à gauche, notamment sa petite scission du Mouvement des citoyens (MDC) mené par Jean-Pierre Chevènement. Lors des élections législatives de 1997, la Gauche plurielle menée par le socialiste Lionel Jospin, rassemblant PS, PCF, verts, MDC et radicaux-socialistes, investit une étroite majorité de 55 % des sièges. Le PS, doté d'une majorité relative, doit composer avec les autres forces de la majorité plurielle et Jospin forme dans cet esprit un gouvernement de coalition intégrant toutes ses composantes. Malgré des résultats plutôt satisfaisants, l'alliance volera en éclats, en 2002, à la fin de la législature.
À droite, l'UDF doit faire face dès 1998 à une scission orchestrée par une quarantaine de députés de sa tendance libérale, qui partent fonder Démocratie libérale (DL). Malgré son groupe parlementaire conséquent, ce parti restera marginal, dépendant de ses alliances avec le RPR et une UDF recentrée. Le Mouvement pour la France (MPF), autre scission de l'UDF intervenue en 1994 à l'initiative du député Philippe de Villiers, restera dans l'ombre jusqu'à sa fusion, en 1999, avec le Rassemblement pour la France (RPF) de l'ex RPR Charles Pasqua, à l'occasion des élections européennes, au cours desquelles leur liste obtient 13 % des voix, devant la liste RPR-DL de Nicolas Sarkozy. Ce sera un succès sans lendemain, le mouvement éclatant dès 2000 lorsque M. de Villiers décide de faire scission pour refonder le MPF, qui retrouve son audience antérieure, tandis que ce qui reste du RPF sombre dans la marginalisation. Un autre petit parti fondé par d'anciens membres des partis de droite traditionnels, Chasse, pêche, nature et traditions (CPNT), connaîtra à la fin des années 1990 un succès éphémère, en obtenant 6 élus lors des européennes de 1999 avec près de 7 % des voix et faisant son entrée dans plusieurs conseils régionaux lors des régionales de 1992 et de 1998. Malgré le score honorable de son chef Jean Saint-Josse à l'élection présidentielle de 2002 (4,2 %), CPNT connaîtra un brutal reflux lors des scrutins qui suivront, au cours desquels le parti perdra tous ses élus régionaux et européens.
Années 2000, création de l'UMP, alternances successives et montée du FN
Les années 2000 seront le théâtre de profonds bouleversements. L'élection présidentielle de 2002 sera marquée par une fragmentation du paysage politique tenant du jamais vu. Au premier tour, Jean-Marie Le Pen, bénéficiant d'un nouvel apport de voix (près de 17 % des voix) devance ainsi Lionel Jospin, victime de l'éparpillement des voix de gauche. L'extrême-gauche, dont les candidats Arlette Laguiller et Olivier Besancenot capitalisent 10 % des voix, monte en puissance. Le PCF, qui s'était jusqu'ici maintenu aux alentours de 9 %, s'effondre à 3,3 % avec la candidature de Robert Hue. Avec les candidatures de Jean-Pierre Chevènement pour le MDC et de Christiane Taubira pour le Parti radical de gauche, l'électorat socialiste s'éparpille aux dépens du candidat Jospin. Au second tour, Jacques Chirac, bénéficiant du rejet de l'extrême-droite, écrase Jean-Marie Le Pen avec 82 % des voix. Forte de ce nouveau souffle inattendu, la droite se réorganise, avec le lancement entre les deux tours de l'Union pour la majorité présidentielle (UMP) à l'initiative de Jacques Chirac. L'UMP, fusion du RPR et de Démocratie libérale (scission de l'UDF intervenue en 1998 à l'initiative d'une quarantaine de députés) et ayant reçu le renfort d'une majorité de cadres et d'élus de l'UDF devient le premier grand parti de la droite gouvernementale française. Lors des élections législatives de 2002, l'UMP, largement victorieuse, prend l'hégémonie à droite, la "Nouvelle UDF" de François Bayrou se sauvant qu'une vingtaine de sièges. Les scrutins locaux qui suivront verront le retour de la domination du Parti socialiste sur l'ensemble de la gauche, contribuant à faire converger peu à peu le système partisan vers une situation de bipartisme, bien que l'audience conservée par les petits partis (le PCF, les verts et le PRG à gauche, l'UDF à droite), oblige les deux grandes formations à continuer d'évoluer dans le cadre de la bipolarisation.
Lors de l'élection présidentielle de 2007, l'UMP et le PS se renforcent et leurs candidats s'affrontent au second tour dans un schéma plus traditionnel qu'en 2002. Les petits candidats à la gauche du PS sont laminés, obtenant des scores très inférieurs à ceux qu'ils avaient obtenu en 2002. Jean-Marie Le Pen, concurrencé par la campagne très marquée à droite du candidat de l'UMP Nicolas Sarkozy, s'effondre à 10,4 %, tandis que François Bayrou, en axant son discours sur une volonté de former une formation centriste indépendante de la droite, atteint plus de 18 % des voix. La transformation de l'UDF en Mouvement démocrate (MoDem) ne permettra toutefois pas de concrétiser ce succès, le nouveau parti obtenant un score nettement plus faible lors des législatives qui suivront (7,6 %). En revanche le FN s'effondre à nouveau et, avec 4,3 %, n'est définitivement plus en mesure de peser sur le débat politique. Les scrutins locaux qui suivront confirmeront cette tendance. Le paysage politique français s'organise actuellement sur la base d'une opposition gauche/droite très marquée, avec deux grands partis forts, l'UMP et le PS, qui composent avec plusieurs petits partis proches de leur sensibilité. Les dernières élections municipales ont été le théâtre d'une marginalisation du FN, de l'obtention de bons scores pour des listes menées par des partis de gauche autre que le PS (PCF, verts et surtout Ligue communiste révolutionnaire (LCR) dans plusieurs grandes villes) ainsi que de l'échec de la stratégie d'autonomie du MoDem, contraint de composer avec le PS ou l'UMP lorsque c'est possible, battu lorsqu'il présente des listes autonomes.
Les élections européennes de 2009, marquées par un taux de participation historiquement faible de 40,6 %, ont été l'occasion de plusieurs reclassements sur l'échiquier politique français. L'UMP s'est imposée avec près de 28 % des voix, loin devant le PS qui, à 16,5 %, subit la concurrence d'Europe écologie, rassemblement écologiste initié par les verts (16,3 %). Ce scrutin fut également l'occasion d'une nouvelle déconvenue pour le MoDem qui n'obtient qu'un piètre score de 8,5 %, très en dessous de la performance réalisée par l'UDF en 2004. À gauche, le Front de gauche initié par le Parti communiste et le nouveau Parti de gauche fondé par d'anciens membres de la minorité du PS obtient 6,5 % des voix, tandis que l'extrême-gauche se renforce considérablement, avec la percée du Nouveau Parti anticapitaliste (NPA), successeur de la LCR, qui obtient 5 % des voix (Lutte ouvrière est à 1,2 %). Le FN, à qui profite normalement ce type d'élection, demeure faible à seulement 6,3 % des voix, devant les listes Libertas alliant le Mouvement pour la France et CPNT, à 4,8 %, là aussi en net reflux par rapport aux scores obtenus par le seul MPF lors des scrutins précédents. Des courants minoritaires, en particulier l'Alliance écologiste indépendante et la formation gaulliste « Debout la République », obtiennent en outre des scores significatifs (respectivement 3,6 et 1,8 %).
Les élections régionales de 2010 sont remportées par la gauche qui gagne 21 des 22 régions métropolitaines. Cela est principalement dû à un retour du Front national qui réalise 11,4 % des suffrages et s'est maintenu dans douze régions. Les élections cantonales de 2011 sont aussi gagnées par la gauche qui totalise 49 % des voix. L'UMP est la grande perdante de cette élection, puisqu'elle ne représente que 17 % des voix. Le Front national, quant à lui poursuit son ascension et réalise 15 % des voix. Désormais, tous les regards sont portés vers l'élection présidentielle de 2012.
On observe une participation de plus en plus faible des électeurs aux différents scrutins, particulièrement depuis les dernières législatives de 2007, municipales de 2008, européennes de 2009, régionales de 2010 ou cantonales de 2011 où l'abstention a connu des chiffres jamais atteints sous la Ve République. Seule l'élection présidentielle semble résister à ce phénomène récurrent.
Aux élections sénatoriales de 2011, alors que le Sénat est désormais renouvelé de moitié, la gauche progresse de vingt-cinq sièges, et détient désormais la majorité absolue à la haute assemblée, avec 177 sénateurs contre 171 à la droite.
Depuis 2012 : le PS au pouvoir, fin du bipartisme et Emmanuel Macron président
Le premier tour de l'élection présidentielle de 2012 voit le candidat du PS François Hollande arriver en tête devant le président sortant Nicolas Sarkozy ; les observateurs notent également les 18 % de la candidate FN Marine Le Pen, qui maintient son parti comme troisième force politique nationale. Au second tour, François Hollande l'emporte sur Nicolas Sarkozy, par 51,6 %. Le suivant, à la suite des élections législatives, le Parti socialiste devient majoritaire à l'Assemblée nationale. Ainsi, pour la première fois sous la Ve République la gauche est majoritaire dans toutes les institutions (Présidence, Parlement, Conseils régionaux, Conseils généraux, Conseils municipaux).
La forte poussée du FN lors des scrutins suivants conduit les observateurs à évoquer, surtout à partir des élections européennes de 2014, une « tripartition » du système politique, expression créée dès 1997 par Gérard Grunberg et Étienne Schweisguth à propos de l’élection présidentielle de 1995 ; le politologue Joël Gombin remet en cause cette notion en soulignant que « la porosité entre les électorats de l’extrême droite et de la droite ne cesse de grandir », et lui préfère celle de « système bipolaire, mais asymétrique »[12].
Au pouvoir, le PS devient très impopulaire et lors des élections de 2017, marquées par des affaires politico-financières et par l'émergence de nouvelles forces politique comme La France Insoumise (gauche radicale) ou La République en Marche ! (centre), Emmanuel Macron devient président de la République et forme un gouvernement comprenant des ministres venus de gauche, de centre et de droite. À l'Assemblée, on compte, pour la première fois sous la Ve République, deux oppositions : d'une part, trois groupes de députés de gauche (groupe La France Insoumise, groupe Nouvelle gauche et groupe de la Gauche démocrate et républicaine) ; d'autre part, le groupe Les Républicains qui reste, avec 102 députés, la première force d'opposition[13].
Le parti du président ne parvient pas à s'imposer aux élections locales perturbées par la Covid-19 : de nombreuses mairie passent aux écologistes et les régions restent majoritairement aux sortants alors qu'on pensait que le RN emporterait des régions importantes. Pour les présidentielles, en plein conflit ukrainien, la primaire à droite (Valérie Pécresse choisie) la division des candidatures à gauche (2 trotskistes, un communiste, une socialiste, un écologiste désigné après une primaire, et J-L Mélenchon de LFI, avec un temps l'évocation d'une candidature de C Taubira issue d'une primaire citoyenne) et celle de la Droite nationaliste (Marine Le Pen et Dupont Aignan étant concurrencés par le polémiste E Zemmour) permettent à E Macron de rentrer en lice tardivement. A la fin du premier tour, il est en tête devant Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon, qui ont bénéficiés d'un vote utile laissant les autres partis en dessous du seuil de remboursement (EELV, LR, le PCF, et pire encore pour le PS qui a deux fois moins de voix que le candidat du monde rural Jean Lassalle).
Chefs d'État et hommes politiques
Événements politiques
- 1958 : Charles de Gaulle remporte l'élection, au scrutin universel indirect.
- 1965 : Charles de Gaulle remporte l'élection.
- 1969 : Georges Pompidou remporte l'élection, à la suite de la démission de Charles de Gaulle.
- 1974 : Valéry Giscard d'Estaing remporte l'élection, à la suite du décès de Georges Pompidou.
- 1981 : François Mitterrand remporte l'élection.
- 1988 : François Mitterrand est réélu.
- 1995 : Jacques Chirac remporte l'élection.
- 2002 : Jacques Chirac est réélu.
- 2007 : Nicolas Sarkozy remporte l'élection.
- 2012 : François Hollande remporte l'élection.
- 2017 : Emmanuel Macron remporte l'élection.
- 2022 : Emmanuel Macron est réélu.
Relations internationales
Notes et références
- RÉGIME SEMI-PRÉSIDENTIEL Sur le site perspective.usherbrooke.ca
- La Constitution de la Ve République : un régime stable et souple Sur le site clio.navyc.fr
- « Marine Le Pen reprend son bréviaire anti-immigrés », sur www.lemonde.fr (consulté le )
- Léo Figuères, Le trotskisme, cet antiléninisme, 1969, p.201
- Alban de Montigny, « La France insoumise, une opposition radicale », La Croix, (ISSN 0242-6056, lire en ligne, consulté le ).
- Johann Chapoutot, « A chacun son arène », Libération, (lire en ligne, consulté le ).
- (en) Wolfram Nordsieck, « Parties and Elections in Europe », sur www.parties-and-elections.eu (consulté le ).
- Jules Pecnard, « Présidentielle: à l'étranger, la percée de Mélenchon intrigue… voire effraie », L'Express, (lire en ligne, consulté le ).
- Geoffroy Clavel, « Ni Staline ni Robert Hue : pourquoi l'étiquette "communiste" ne colle pas à Mélenchon », sur Le Huffington Post, (consulté le ).
- Thomas Guénolé, « Présidentielle 2017 : comment Jean-Luc Mélenchon emprunte à l'altermondialisme », sur leplus.nouvelobs.com, (consulté le ).
- L'expression est de Maurice Duverger, exposée dans : Maurice Duverger, Le système politique français, 21e édition, Presses Universitaires de France, collection Thémis, 1996, (ISBN 9782130474142).
- Joël Gombin, « FN, droite et gauche: comment s’effectuent les reports de voix », sur Mediapart, (consulté le ).
- Samuel Le Goff, « À l’Assemblée, une opposition éparpillée façon puzzle », sur contexte.com, (consulté le ).
Voir aussi
Articles connexes
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