Élections générales espagnoles de 2016

Les élections générales espagnoles de 2016 (en espagnol : Elecciones generales de España de 2016) se tiennent le , un peu plus de cent quatre-vingts jours après le précédent scrutin parlementaire qui n'a pu dégager aucune majorité claire au Congrès des députés, la chambre basse des Cortes Generales.

Élections générales espagnoles de 2016
350 sièges du Congrès des députés
(majorité absolue : 176 sièges)
208 des 266 sièges du Sénat
(majorité absolue : 134 sièges)
Type d’élection Élections parlementaires
Corps électoral et résultats
Population 46 624 382
Inscrits 36 520 913
Votants 24 279 259
66,48%  3,2
Votes exprimés 24 053 755
Votes blancs 179 081
Votes nuls 225 504
Parti populaire  Mariano Rajoy
Voix 7 941 236
33,01%
 4,3
Sénateurs élus 130  6
Députés élus 137  14
Parti socialiste ouvrier espagnol  Pedro Sánchez
Voix 5 443 846
22,63%
 0,6
Sénateurs élus 43  4
Députés élus 85  5
Unidos Podemos  Pablo Iglesias
Voix 5 087 538
21,15%
 3,2
Sénateurs élus 16
Députés élus 71
Ciudadanos  Albert Rivera
Voix 3 141 570
13,06%
 0,9
Sénateurs élus 0
Députés élus 32  8
Résultats par province
Représentation du Congrès des députés
Représentation du Sénat
Président du gouvernement
Sortant Élu
Mariano Rajoy
PP
Mariano Rajoy
PP

À l'issue de ces précédentes élections, le Parti populaire (PP), dirigé par le président du gouvernement sortant Mariano Rajoy, est arrivé en tête avec 28,72 % des voix et 123 sièges acquis sur 350, perdant ainsi la majorité absolue qu'il détenait à la chambre basse bien qu'ayant conservé sa majorité au Sénat, avec 124 sièges sur les 208 concernés par ces élections.

Le Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE), arrivé deuxième avec 22 % des voix, soit l'un des plus faibles résultats de son histoire, s'est alors allié au parti centriste et libéral Ciudadanos pour former un gouvernement de coalition[1] mais avec 90 sièges pour le PSOE et 40 autres pour Ciudadanos, le quorum pour atteindre la majorité absolue au Congrès n'était pas suffisant pour que le secrétaire général du PSOE, Pedro Sánchez, puisse être investi président du gouvernement.

C'est la première fois, depuis la Transition, que des élections générales sont convoqués après l'échec d'un candidat désigné par le roi à la présidence du gouvernement devant le Congrès des députés. Aucun gouvernement n'ayant été nommé à l'issue de ces élections, les ministres du cabinet sortant sont chargés d'expédier les affaires courantes jusqu'à ce qu'une majorité se dégage après alliances éventuelles entre partis.

Système électoral

Les 615 parlementaires sont tous désignés pour une législature de quatre ans, sauf si celle-ci devait être abrégée par une dissolution approuvée par le roi d'Espagne[2].

Congrès des députés

Les députés sont élus au scrutin proportionnel d'Hondt par province. Toute liste qui obtient 3 % des suffrages exprimés dans une province est admise à la répartition des sièges, nulle province ne pouvant avoir moins de deux députés.

Circonscriptions Députés Carte
Madrid 36
Barcelone 31
Valence 16
Alicante et Séville 12
Málaga 11
Murcie 10
Cadix 9
Asturies, Îles Baléares, La Corogne, Las Palmas et Biscaye 8
Grenade, Pontevedra, Santa Cruz de Tenerife et Saragosse 7
Almería, Badajoz, Cordoue, Gérone, Guipuscoa, Tarragone et Tolède 6
Cantabrie, Castellón, Ciudad Real, Huelva, Jaén, Navarre et Valladolid 5
Álava, Albacete, Burgos, Cáceres, León, Lleida, Lugo, Ourense, La Rioja et Salamanque 4
Ávila, Cuenca, Guadalajara, Huesca, Palencia, Ségovie, Teruel et Zamora 3
Soria 2
Ceuta et Melilla 1

Sénat

Les sénateurs sont élus au scrutin majoritaire plurinominal par province (et par île dans les deux communautés autonomes archipélagiques). Chaque province a quatre sénateurs, excepté Grande Canarie, Tenerife et Majorque (trois), Ceuta et Melilla (deux), Fuerteventura, La Gomera, El Hierro, Lanzarote et La Palma, Ibiza-Formentera et Minorque (un). En outre, les assemblées des communautés autonomes désignent un certain nombre de sénateurs, à raison d'un de droit, et un supplémentaire par million d'habitants. Ces sénateurs désignés étaient 57 en .

Contexte

Remise en cause du bipartisme

Les élections générales du remettent en cause trente années de bipartisme[3] : le Parti populaire (PP), au pouvoir depuis sa victoire aux élections générales du , perdait sa majorité absolue au Congrès des députés, la chambre basse des Cortes Generales ; alors que ce parti de droite à tendance conservatrice avait recueilli 44,6 % des voix à l'issue de ces élections et disposait d'une confortable majorité de 186 députés sur 350, il ne recueille alors que 28,7 % des voix et perd 63 de ses sièges. Quant au Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE), quatre ans après sa cuisante défaite face à la droite, il obtient le deuxième plus mauvais résultat de son histoire avec 22 % des suffrages, manquant d'être devancé de quelques dizaines de milliers de voix par le mouvement contestataire Podemos, qui réalise une percée tout à fait historique en obtenant 20,6 %, parvenant ainsi à faire entrer 69 de ses candidats au Congrès ; enfin, le parti centriste et libéral Ciudadanos obtient lui-même un résultat satisfaisant puisque, pour la première fois, il parvient à se faire représenter à la chambre basse après avoir recueilli 13,9 % des voix, bien que n'obtenant pas de sièges au Sénat, dont ce parti fondé en 2006 souhaite ardemment la suppression.

Ces élections favorisent l'émergence d'un Parlement fragmenté, sans qu'il n'y ait de majorité suffisamment claire capable d'approuver l'investiture du prochain chef du gouvernement[4]. Des tractations ouvertes par le roi Felipe VI devaient entamer des discussions entre les différents partis représentés au Parlement pour qu'un accord soit trouvé afin qu'un gouvernement puisse être investi et que des élections générales anticipées, a priori inévitables compte tenu de la situation née des élections du . Dès lors, le PP dirigé par Mariano Rajoy, chef du gouvernement sortant, propose au PSOE et à Ciudadanos un gouvernement de grande coalition qu'il dirigerait lui-même et qui serait constitué par ces trois partis réunis, ce qui constituerait un fait inédit dans l'histoire de l'Espagne.

Néanmoins, ces deux partis rejettent la proposition du PP, préférant s'allier pour investir le secrétaire général du PSOE, Pedro Sánchez.

Campagne

Forces politiques représentées au Parlement

Parti Chef Alliés

Parti populaire
(PP)

Mariano Rajoy Brey
(Président du gouvernement)
Députés avant l'élection 123

Navarre : coalition avec l'Union du peuple navarrais (UPN)
Aragon : coalition avec le Parti aragonais (PAR)
Asturies : coalition avec le Forum des Asturies (FORO)

Candidats présentés 350 (dans toute l'Espagne)
Slogan Pour
(A Favor)

Parti socialiste ouvrier espagnol
(PSOE)

Pedro Sánchez
Députés avant l'élection 90

Catalogne : candidature du Parti des socialistes de Catalogne (PSC)
Canaries : coalition avec Nouvelles Canaries (NCa)
Estrémadure : coalition avec Socialistes indépendants d'Estrémadure (SIEX)
Candidats présentés 350 (dans toute l'Espagne)
Slogan Un Oui pour le changement
(Un Sí por el Cambio)

Unidos Podemos
(Podemos-IU-Equo)

Pablo Iglesias Turrión
Députés avant l'élection 71

Coalition de Podemos, de Gauche unie (IU) et d'Equo
Catalogne : présent sous le nom de En Commun Nous pouvons-Gagnons le Changement avec Barcelone en commun, l'Initiative pour la Catalogne Verts (ICV), la Gauche unie et alternative (EUiA) et le Parti pirate de Catalogne.
Communauté valencienne : présent sous le nom de À la valencienne avec la Coalition Compromís
Galice : présent sous le nom de En Marée avec Anova-Fraternité nationaliste
Candidats présentés 350 (dans toute l'Espagne)
Slogan Le sourire d'un pays
(La Sonrisa de un País)

Ciudadanos

Albert Rivera
Députés avant l'élection 40
Candidats présentés 350 (dans toute l'Espagne)
Slogan Temps d'accord, temps de changement
(Tiempo de Acuerdo, Tiempo de Cambio)

Gauche républicaine de Catalogne-Catalogne Oui
(ERC-CatSí)

Gabriel Rufián
Députés avant l'élection 9 Coalition de la Gauche républicaine de Catalogne (ERC) et Catalogne Oui (Cat Sí).
Candidats présentés 47 (seulement en Catalogne)
Slogan Nous sommes République
(Som República)

Convergence démocratique de Catalogne
(CDC)

Francesc Homs
Députés avant l'élection 8
Candidats présentés 47 (seulement en Catalogne)
Slogan

Parti nationaliste basque
(EAJ-PNV)

Andoni Ortuzar
Députés avant l'élection 6
Candidats présentés 18 (seulement en Pays basque)
Slogan L'Euskadi est ce qui importe
(Euskadi es lo que importa)

Euskal Herria-Uni
(EH Bildu)

Marian Beitialarrangoitia
Députés avant l'élection 2

Coalition de Eusko Alkartasuna (EA), Aralar, Alternatiba et Sortu.
Candidats présentés 23 (seulement en Pays basque et en Navarre)
Slogan Nous allons créer les opportunités
(Vamos a Crear Oportunidades)

Coalition canarienne-Parti nationaliste canarien
(CC-PNC)
Ana Oramas Députés avant l'élection 1

Coalition du Parti nationaliste canarien (PNC), Groupes indépendants des Canaries (AIC) et Assemblée Majorera (AM).
Candidats présentés 15 (seulement en Canaries)
Slogan À partir de maintenant
(De Aquí en Adelante)

Intentions de vote

Sondages sur l'élection générales de 2016 :
  • PP
  • UP (Podemos+IU)
  • PSOE
  • Podemos
  • C's
  • IU-UP
  • ERC
  • DL/CDC
  • PNV

Résultats

Congrès des députés

Résultats des élections au Congrès des députés[5]
Parti ou coalition Voix  % +/- Sièges +/-
Parti populaire (PP) 7 941 236 33,01 4,30
137  /  350
14
Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE) 5 443 846 22,63 0,63
85  /  350
5
Podemos 3 227 123 13,42 2,63 45 / 350 1
En Comú Podem (ECP) 853 102 3,55 0,14 12 / 350
A la valenciana 659 771 2,74 0,38 9 / 350
En Marea 347 542 1,44 0,19 5 / 350 1
Total coalition Unidos Podemos 5 087 538 21,15 3,34
71  /  350
Ciudadanos (Cs) 3 141 570 13,06 0,88
32  /  350
8
Gauche républicaine-Catalunya Sí (ERC–CatSí) 632 234 2,63 0,24 9 / 350
Souveraineté pour les îles (SI) 7 418 0,03 Nv 0 / 350
Total Coalition Gauche republicaine-CatSí-SI 639 652 2,66 0,26
9  /  350
Convergence démocratique de Catalogne (CDC) 483 488 2,01 0,24
8  /  350
Parti nationaliste basque (EAJ/PNV) 287 014 1,19 0,01
5  /  350
1
Parti animaliste contre la maltraitance animale (PACMA) 286 702 1,19 0,32
0  /  350
Euskal Herria Bildu (EH Bildu) 184 713 0,77 0,10
2  /  350
Nouvelles Canaries (CCa–PNC) 78 253 0,33 0,01
1  /  350
Recortes Cero-Grupo Verde (Recortes Cero–GV) 51 907 0,22 0,03
0  /  350
Union, progrès et démocratie (UPyD) 50 247 0,21 0,41
0  /  350
Vox 47 182 0,20 0,01
0  /  350
Bloc nationaliste galicien (BNG–Nós) 45 252 0,19 0,09
0  /  350
Parti communiste des peuples d'Espagne (PCPE) 26 627 0,11 0,01
0  /  350
32 autres partis (moins de 0,10 % chacun) 86 876 0,36 -
0  /  350
Vote blanc 179 081 0,74 0,01
Suffrages exprimés 24 053 755 99,07
Votes nuls 225 504 0,93
Total 24 279 259 100 - 350
Abstention 12 241 654 33,52
Inscrits / participation 36 520 913 66,48

Résultats par communauté autonome

Sénat

Résultats des élections au Sénat de 2016
Liste Sièges
Parti populaire (PP) 126
Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE) 42
Unidos Podemos[n 2] 16
Gauche républicaine de Catalogne-Catalunya Sí (ERC-CAT SÍ) 10
Parti nationaliste basque (EAJ-PNV) 5
Convergence démocratique de Catalogne (CDC) 2
Parti aragonais (PAR) 2
Union du peuple navarrais (UPN) 1
Groupement indépendant d'El Hierro 1
Nouvelles Canaries 1
Groupement socialiste gomérien (ASG) 1
Forum des Asturies (Foro) 1
Total 208

Cartogrammes

Répartition des sièges de députés par circonscription
Répartition des sièges de sénateurs par circonscription

Conséquences

Au soir du scrutin, le Parti populaire du président sortant est le seul parti national à avoir gagné des sièges au Congrès des députés et maintenant sa majorité absolue au Sénat. Mariano Rajoy revendique alors son « droit à gouverner » et indique qu'il tentera de « former un nouveau gouvernement ». Il se voit refuser l'idée de grande coalition avec les socialistes par la négative de Sánchez. Le Parti nationaliste basque indique dès lors qu'il ne soutiendra aucun candidat puisqu'il n'est pas présent pour « régler les affaires de l'Espagne » et invite les socialistes à reconsidérer leur position.

Après près de deux mois de négociations, un accord est trouvé entre les centristes de Ciudadanos et le Parti populaire reposant sur un pacte d'anti-corruption de la part du parti de droite. Mariano Rajoy appelle alors les socialistes à faire des concessions, ce que le secrétaire général du PSOE, Pedro Sánchez, refuse, affirmant qu'« il ne peut y avoir de régénération que si Rajoy n'est plus chef de gouvernement »[6].

Finalement, le , le président de la direction provisoire du PSOE, Javier Fernández Fernández, annonce qu'il va laisser Mariano Rajoy former un nouveau gouvernement. Cela met fin à dix mois de crise politique[7]. L'investiture de Mariano Rajoy, formant ainsi le gouvernement Rajoy II, est validée le .

Lors du vote d'une motion de censure le , le Congrès des députés remplace Mariano Rajoy par Pedro Sánchez, qui forme à son tour un gouvernement minoritaire. Le , le chef de l'exécutif convoque des élections générales anticipées pour le après que les députés ont rejeté son projet de loi de finances pour 2019[8].

Notes et références

Notes

  1. Les villes autonomes élisent chacun un député par scrutin uninominal majoritaire à un tour.
  2. Dont onze sièges pour Podemos, deux sièges pour l'Initiative pour la Catalogne Verts, deux pour la Gauche unie et un pour la Coalition Compromís.

Références

  1. « Espagne : Ciudadanos va soutenir l'investiture du candidat socialiste », sur Le Point, (consulté le ).
  2. Conformément à la Constitution espagnole (Article 68 de la Constitution espagnole de 1978) et à la loi organique des élections générales de 1985 (Article 42.2 loi organique des élections de 1985).
  3. « Des élections législatives à suspense en Espagne », sur Le Monde.fr, (consulté le ).
  4. « Législatives en Espagne : courte victoire de la droite, le PS et Podemos en embuscade », sur leparisien.fr, (consulté le ).
  5. (es) « CONGRESO / JUNIO 2016 », sur infoelectoral.mir.es/.
  6. « L'Espagne fait un pas supplémentaire vers un nouveau gouvernement », Le Figaro, (ISSN 0182-5852, lire en ligne, consulté le ).
  7. « Espagne : après dix mois de paralysie, les socialistes décident de laisser le conservateur Mariano Rajoy gouverner », Franceinfo, (lire en ligne, consulté le ).
  8. (es) Juanma Romero, « Pedro Sánchez convoca elecciones generales para el 28 de abril », El Confidencial, (lire en ligne, consulté le ).

Voir aussi

Articles connexes

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