Adélaïde de Souza

Adélaïde-Marie-Émilie Filleul, dite Adélaïde, comtesse de Flahault de la Billarderie, puis Adélaïde de Souza, ou encore Madame de Flahault, et Madame de Souza, née le à Paris et morte dans la même ville le , est une écrivaine, moraliste et salonnière française.

Adélaïde de Souza
Titre de noblesse
Comtesse
Biographie
Naissance
Décès
(à 74 ans)
Paris
Sépulture
Nom de naissance
Adélaïde-Marie-Émilie Filleul
Pseudonymes
A. de F., L'Auteur d’Adèle de Sénange
Nationalité
Domicile
Activités
Mère
Fratrie
Marie-Françoise Julie Constance Filleul (d)
Conjoints
Enfant
Prononciation
Signature
Vue de la sépulture.

Biographie

Sa mère est connue sous le nom de Madame Filleul : Marie Irène Catherine du Buisson de Longpré, épouse Filleul, aurait été la maîtresse de Louis XV (au Parc-aux-cerfs) ayant de lui une fille Julie. Sa mère devient ensuite la maîtresse d’un fermier général, Étienne-Michel Bouret qui, selon Jean Orieux, est le véritable père d’Adélaïde ; selon d’autres (dont Charles de Morny), il s’agit du roi. À seize ans, Julie épouse Abel-François Poisson de Vandières, marquis de Marigny et frère de madame de Pompadour. Sa mère meurt en 1767 et elle a la charge d’Adélaïde.

Selon Sainte-Beuve[1], elle perd très tôt ses parents et fait ses études au couvent, lieu qui servira de cadre à certains épisodes de ses romans.

À l’âge de dix-huit ans, à sa sortie du couvent, elle épouse le , le comte Charles-François de Flahaut de la Billarderie[2], sur décision de sa sœur aînée Julie. Il a 36 ans de plus qu’elle et est maréchal de camp, intendant des jardins et du cabinet du roi ; selon elle, le mariage n’est jamais consommé. Les époux résident au Louvre alors en pleine effervescence pré-révolutionnaire où la jeune femme, trop jeune pour apprécier la situation politique, s’ennuie[1]. Elle a alors l’idée d’écrire et commence Adèle de Sénange, l’histoire d’une toute jeune fille, mariée à un homme beaucoup plus âgé qu’elle, qui vit une situation évoquant l’amour impossible de la Princesse de Clèves.

Maitresse de l'Abbé de Périgord (Talleyrand), elle ouvre son salon où le jeune abbé tient la première place durant dix ans, de 1783 à 1792. Ils vivent tous deux quasiment maritalement, et le naît leur enfant (la paternité de Talleyrand est généralement admise), Charles de Flahault. Son salon compte également Gouverneur Morris, ministre plénipotentiaire des États-Unis et témoin de son temps qui passe l’été 1784 avec elle et qui se défendra d’être le père de Charles de Flahault, William Windham, à qui la paternité de Charles de Flahault est parfois attribuée, d’Holbach, Suard, Marmontel, Panckouke, le médecin de la Reine Félix Vicq d'Azyr[3] et bien entendu Talleyrand.

Talleyrand se rapproche, durant les débuts de la Révolution, de Germaine de Staël ; suit une période de brouille entre eux et elle s’inquiète de la tournure que prend la Révolution. Elle se cache avec son fils chez Gouverneur Morris durant les massacres de Septembre.

Au début de la Terreur, elle s’installe à Londres, laissant son mari en France. C’est là qu’est publié son premier roman, en 1794. Chevaleresque, le comte de Flahault se rend de lui-même au Tribunal révolutionnaire pour épargner son avocat ; il est guillotiné en 1794.

Pour vivre à Londres et payer l’éducation de son fils, elle confectionne des chapeaux. Lord Wycombe la convainc d’écrire un roman ; ce sera Adèle de Senange, inspiré de sa propre histoire et qui connaît un grand succès.

Elle se rend en Suisse où elle rencontre le ci-devant duc de Chartres qui est peut-être alors son amant. Elle le suit à Hambourg où elle retrouve Gouverneur Morris, et où elle rencontre aussi son futur mari, Dom José Maria de Sousa Botelho Mourão e Vasconcelos, ambassadeur de Portugal au Danemark.

Talleyrand l’aide à rentrer en France fin 1797, puis à la radier de la liste des émigrés. Il fait entrer leur fils au ministère de la Marine en 1799. Elle continue à écrire, publiant Émilie et Alphonse en 1799, Charles et Marie en 1802.

Elle épouse en secondes noces José Maria de Sousa, lui aussi veuf, riche aristocrate portugais, ambassadeur du Portugal à Paris et illustre mécène littéraire, plus connu comme « Morgado de Mateus », le [1]. Ce dernier renonce à un poste d’ambassadeur en Russie pour rester à Paris, se consacrant aux lettres. Souza est l'orthographe ancienne du nom Sousa en langue portugaise ; morgado, un titre de courtoisie donné au Portugal aux seigneurs de maison indivisible.

Même si « Madame de Souza » est souvent désignée comme « marquise de Souza Botelho » en littérature ou bien par snobisme social, ce titre n'a jamais existé. La confusion vient peut-être du fait que son beau-fils, Dom José Luís de Sousa Botelho Mourão e Vasconcelos, a été créé 1er comte de Vila Real en 1823, ou parce que ces Sousa Botelho descendent, par les femmes et par batardise, du célèbre António Luís de Sousa (en), le conquérant de Madrid pendant la guerre de Succession d'Espagne, le .

Adélaïde de Souza fréquente de nouveau les salons pour favoriser la fortune de son fils, Charles de Flahault. Elle va jusqu’à favoriser la liaison de celui-ci avec Hortense de Beauharnais, dont le fruit est Charles de Morny, son petit-fils né en 1811, puis elle le marie à Margaret Mercer Elphinstone, fille de l'amiral Keith ; il connait par la suite une carrière militaire et politique importante. Elle perd de son influence avec la chute de l’Empire (elle dissuade son fils, devenu aide de camp de Napoléon, de partir avec lui à Sainte-Hélène) ; Dom José Luís de Sousa meurt à Paris le . Il reste surtout connu pour la magnifique édition de luxe des Lusiades, qu'il a payé et fait imprimer de son vivant à Paris.

Madame de Souza se retire alors de la vie mondaine et reporte une partie de son affection vers son petit-fils, qu’elle élève. Il sera lui-même l’éminence grise de son demi-frère Napoléon III.

Elle est enterrée au cimetière du Père-Lachaise à Paris (20e division) auprès de son mari portugais, qui, lui, sera ramené dans sa patrie en 1964, et reste inhumé depuis lors à son palais de Mateus, près de Vila Real.

Notes

  1. Revue des Deux Mondes, tome 1, 1834, Poètes et romanciers modernes de France : Mme De Souza
  2. L'acte du mariage, célébré dans l'église Saint-Jacques du Haut Pas à Paris, est reproduit par Charles Nauroy, dans Le Curieux, 1885-1888, Paris, p. 205-206. Article numérisé.
  3. Yves Pouliquen, Félix Vicq d'Azyr, les Lumières et la Révolution, Odile Jacob, dl 2009 (ISBN 978-2-7381-2308-4 et 2-7381-2308-2, OCLC 495418251)

Œuvre

Adélaïde de Souza a écrit un grand nombre de romans dont le plus important est Adèle de Senange. Chénier a dit d’elle qu’elle était de ces femmes « qui figurent avec le plus de distinction parmi les romanciers modernes ». Sainte-Beuve a procédé à une édition de ses œuvres en 1843 ; Léon Tolstoï évoque ses romans à plusieurs reprises dans Guerre et Paix.

Romans

  • Adèle de Senange, ou Lettres de Lord Sydenham, Londres, 1794, deux volumes ; Genève, Slatkine Reprints, 1995
  • Émilie et Alphonse ou le Danger de se livrer à ses premières impressions, Hambourg, P. F. Fauche ; Paris, Charles Pougens, 1799
  • Charles et Marie, 1802
  • Eugène de Rothelin, Londres, Dulan, 1808
  • Eugénie de Revel : souvenirs des dernières années du dix-huitième siècle, Lille, L. Lefort, 1853
  • Eugénie et Mathilde, ou, Mémoires de la famille du comte de Revel, Paris, F. Schoell, 1811
  • La Comtesse de Fargy, Paris, Alexis Eymery, 1823
  • La Duchesse de Guise, ou intérieur d’une famille illustre dans le temps de la Ligue ; drame en trois actes, Paris, C. Gosselin, 1832
  • La Pensionnaire mariée, comédie-vaudeville en un acte, [S.l.s.n.], 1835
  • Mademoiselle de Tournon, Paris, Firmin Didot, 1820
  • Œuvres complètes de Madame de Souza, Paris, Garnier, 1865

Bibliographie

  • André de Maricourt, Madame de Souza et sa famille. Les Marigny, les Flahaut, Auguste de Morny (1761-1836), 1874-1945, Paris, Émile-Paul, 1907
  • Simone Vincens, Vestiges du classicisme au temps de Chateaubriand : les romans de Madame de Souza (1761-1836), Thèse de l’Université du Colorado, 1974, 1969
  • Jean-Philippe Chaumont, Archives du Général Charles de Flahaut et de sa famille, 565 AP, Paris, Centre historique des Archives nationales, La documentation française, 2005, 251 p.

Liens externes

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