Apostasie
L'apostasie (du grec ancien ἀπόστασις (apóstasis), « se tenir loin de ») est l'attitude d'une personne, appelée apostat, qui renonce publiquement à une doctrine, une croyance ou une religion.
Description
L'apostasie peut signifier la renonciation à une doctrine ou une religion, ou au fait de se soumettre à l'autorité représentant ladite doctrine (comme l'autorité religieuse ou celle d'un parti politique). Dans le contexte religieux (le plus courant), l'apostasie signifie la renonciation par un individu, adulte et responsable, à faire partie d'une organisation religieuse. La renonciation sous la contrainte (politique, parentale...) ou par perte des facultés cognitives n'est pas considérée comme de l'apostasie.
Christianisme
Dans le christianisme, l'apostasie est, littéralement, une « désertion ».
S'appuyant sur les lois issues des directives européennes, certaines personnes ayant été baptisées enfants, donc sans consentement, se font rayer des registres des « églises », ou tout simplement parce qu'elles ne veulent plus cautionner les propos de ces mouvements religieux. Cette procédure est communément appelée débaptisation[3].
Mormonisme
Selon l'Église de Jésus-Christ des saints des derniers jours, quand des gens ou des groupes se détournent des principes de l'Évangile, ils sont en état d'apostasie. Lorsque les hommes corrompent les principes de l'Évangile et apportent des modifications non autorisées à l'organisation et aux sacrements de l'Église, l'apostasie est généralisée.
Protestantisme
Dans le protestantisme, notamment dans la période ouverte par le Réveil du début du XIXe siècle, et jusqu'aux mouvements fondamentalistes et pentecôtistes du début du XXe siècle, l'affrontement théologique a été très fort, et cette accusation très fréquente. Il arrive aujourd'hui encore que des Églises fondamentalistes considèrent comme apostates d'autres Églises, accusées d'avoir abandonné les fondements de la foi chrétienne.
Catholicisme
Dans l'Église catholique, le terme est appliqué dans deux domaines différents : l'apostasie dite « de foi » consiste à abandonner la foi chrétienne, éventuellement pour embrasser une autre religion ; l'apostasie « des vœux de religion » consiste, pour un religieux à quitter l'ordre où il a fait profession. Thomas d'Aquin définissait l'apostasie comme « une certaine façon de s'éloigner de Dieu », et distinguait bien « l'apostasie de la vie religieuse » de « l'apostasie par incroyance » : cette dernière « sépare totalement l'homme d'avec Dieu, ce qui n'arrive pas dans n'importe quel autre péché ».
Le droit canonique considère que l’apostasie entraîne l’excommunication ‘latae sententiae’, autrement dit, automatiquement (article 1364 du Code de droit canon)[4].
En France, on constate périodiquement des poussées d'apostasie liées à la volonté de groupes ou d'individus désireux de se séparer ostensiblement du catholicisme. On demande alors par écrit (LR+AR) à la paroisse dont dépend l'église du lieu du baptême de supprimer la mention de celui-ci ou bien à l'évêché du département là où le baptême s'est déroulé. Il existe sur internet des modèles de lettres de demande d'apostasie. Les demandes de radiation ne sont pas acceptées du fait du droit canon et de la jurisprudence des tribunaux français.
En effet, dans l'Église catholique, le nom n'est pas rayé du registre, l'acte d'apostasie est inscrit en marge. La jurisprudence française a admis que la loi française n° 78-17 du 6 janvier 1978, consolidée par la loi n°2004-801 du , qui indique que l'on peut exiger que son nom soit rayé de façon à n’être plus lisible de tout fichier non automatisé, notamment manuscrit, n'exigeait pas cette radiation dans le cas du baptême. La cour d'appel de Caen a en effet annulé, en , une décision du tribunal de Coutances condamnant pour la première fois en France un diocèse à effacer un baptême. La chambre civile de la Cour a infirmé la décision de première instance, datant d'. Pour la Cour, « Il n'y a pas lieu à effacement ou correction supplémentaire du document litigieux »[5]. La Cour de cassation a conclu en que « le baptême constituait un fait dont la réalité historique ne pouvait être contestée » et qu’il n’y avait pas lieu d’ordonner l’effacement de sa mention du registre[6]. Début 2019, à la suite de l'affaire Bernard Preynat et le refus de la démission de Philippe Barbarin par le pape François, les demandes d'apostasie ont fortement augmenté en France[7],[8],[9],[10], facilitées par les démarches proposées par certaines associations, tout en restant marginales en nombre[11], ne concernant que quelques centaines de personnes par an[12].
Du point de vue théologique, cette démarche est très discutée, notamment sur la question de savoir si les débaptisés doivent être qualifiés comme apostats stricto sensu. Voir Débaptisation.
Islam
Les doctrines de la charia, également connues sous le terme de « loi islamique », rejettent l'apostat. Elles divergent à propos de la mise à mort de l'apostat. Tandis que dans certains pays, certains religieux la considèrent comme une punition définie par certaines juridictions liées à l'islam, d'autres considèrent cette peine comme sujette au débat et étant affaire de gestion politique.
Judaïsme
Il est fait référence à l'apostasie dans le Deutéronome au verset 13:6-10 dans lequel il est demandé au fidèle de faire mourir par lapidation un proche apostat qui se livrerait sur lui à un prosélytisme non juif.
Pour sa part, Philon d'Alexandrie (Ier siècle), tout en déclarant : « ceux qui abandonnent les lois saintes de Dieu, les apostats, sont excessifs, impudiques et injustes, amis du mensonge et du parjure, prêts à vendre leur liberté pour les plaisirs du ventre, amenant la ruine sur leur corps et leur âme »[13], ne reprend pas la condamnation à mort pour l'apostat.
La pratique est seulement d'interdire aux Juifs formellement convertis à d'autres religions le mariage juif, la « montée à la Torah », la participation au minyan et l'enterrement dans un cimetière juif. Selon le Dictionnaire encyclopédique du judaïsme, « dans la tradition juive, l'apostat est considéré comme mort, au point que ses proches parents observent à son égard les rites du deuil. Lorsqu'un apostat meurt réellement, toutefois, on ne prend pas le deuil pour lui »[14].
Dans la culture populaire
Le documentaire Pork and Milk, réalisé par Valérie Mréjen et sorti en 2004, est consacré à l'apostasie de juifs orthodoxes israéliens. L'écrivain irakien Joseph Fadelle, musulman converti au catholicisme et accusé d'apostasie, a raconté son histoire dans son autobiographie Le Prix à payer, parue en 2010.
Notes et références
- Ch. IV, 2
- Xénophon, p. 449
- Modèle de lettre de débaptisation pour la Belgique Apostasie
- « Code du droit canon », sur droitcanonique
- Religion : un « débaptisé » débouté en justice sur le site du Figaro
- https://www.courdecassation.fr/jurisprudence_2/premiere_chambre_civile_568/1441_19_30541.html
- « Les demandes d'apostasie se multiplient après les scandales de l'Église catholique », sur BFMTV (consulté le )
- « «Ça me fait plaisir de faire chier l’Église»: ces catholiques se sont fait débaptiser », sur Slate.fr, (consulté le )
- « Apostasie : choqués par le pape, ils veulent renier leur baptême », sur Orange Actualités, (consulté le )
- « "Une décision le jour où le pape a refusé la démission du cardinal Barbarin" : comment l'onde de choc conduit des croyants à vouloir effacer leur baptême », sur Franceinfo, (consulté le )
- « La hausse des « débaptisations » n’inquiète pas l’Église », sur la-croix.com,
- « Plus de 2000 Français se sont fait débaptiser en 2018 », sur liberation.fr,
- (en) Kaufmann Kohler, Richard Gottheil, « Apostasy and Apostates from Judaïsm », sur Jewish Encyclopedia
- Dictionnaire encyclopédique du judaïsme, article Apostasie.
Voir aussi
Articles connexes
- Article détaillé pour chaque religion :
- Conversion religieuse
- Grande apostasie
- Récit d'atrocités
- Julien (empereur romain)
- Unitarisme
- Marranisme - Anoussim
- Hérésie
- Relaps
Bibliographie
- Pierre Chambry (dir.) (trad. Pierre Chambry), Xénophon. Œuvres complètes : Cyropédie. Hipparque. Équitation. Hiéron. Agésilas. Les Revenus, t. I, Garnier-Flammarion, (1re éd. 1967).
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