Crise de juillet

La crise de juillet est une crise diplomatique européenne déclenchée par l'assassinat à Sarajevo de François-Ferdinand, héritier des trônes austro-hongrois, le et close le , date de la déclaration de guerre du Reich impérial[alpha 1] à l'Empire russe. L'enchaînement de ces évènements constitue la cause immédiate du déclenchement de la Première Guerre mondiale. Son explication et son interprétation ont déclenché dès le début de la guerre de violentes controverses dans l'opinion publique comme dans la recherche historique des pays belligérants.

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Contexte

La double monarchie en

Alexander Hoyos, proche conseiller de Leopold Berchtold, compte parmi les partisans d'une politique agressive dans les Balkans.

Quelques jours avant l'assassinat du Kronprinz[T 1] François-Ferdinand, les hommes d'État austro-hongrois définissent la nouvelle politique qu'ils souhaitent mener dans les Balkans redécoupés par les deux guerres balkaniques[1].

De plus, face aux tendances centrifuges qui minent la double monarchie, les responsables austro-hongrois considèrent avec pessimisme l'évolution de la situation politique : en effet, ces dirigeants estiment devoir affronter rapidement une guerre ou une révolution, alors que le Reich n'incite plus son allié à la modération, comme les diplomates allemands l'avaient fait en 1913[2],[3].

Les tenants de cette ligne se recrutent parmi les collaborateurs les plus proches de Leopold Berchtold, le ministre austro-hongrois des affaires étrangères, notamment son chef de cabinet Alexander Hoyos[alpha 2], son conseiller Franz von Matscheko, les chefs de section[alpha 3] Janos Forgach, chargé du réseau diplomatique austro-hongrois, Alexander von Musulin[alpha 4], chargé de l'Orient, et Friedrich Szápary, l'ambassadeur impérial et royal à Saint-Pétersbourg ; ils bénéficient de l'appui de Franz Conrad von Hötzendorf, le belliqueux chef de l'AOK, l'état-major austro-hongrois, proche de l'archiduc François-Ferdinand et d'Alexander von Krobatin, le ministre commun de la guerre[4]. Le chef de l'AOK défend, depuis l'annexion de la Bosnie-Herzégovine à la double monarchie en 1908, la nécessité d'attaquer la Serbie, afin de soumettre ce royaume à l'issue d'une guerre préventive, limitée et à l'issue heureuse pour l'armée commune[5].

Ces responsables bellicistes perçoivent la situation de la double monarchie sous un œil pessimiste et redoutent « une attaque concentrique contre l'Autriche », impliquant la Russie, la Roumanie et la Serbie[4]. Forts de cette analyse, ces hauts-fonctionnaires parmi les plus importants de la double monarchie aspirent à « éliminer la Serbie comme facteur politique », selon le mot d'Alexander von Krobatin, ministre commun de la guerre[alpha 5],[6] : le , le ministre commun des affaires étrangères, Leopold Berchtold, a reçu de l'un de ses principaux collaborateurs, un rapport proposant la mise en œuvre d'une politique plus active dans les Balkans[7].

L'assassinat du prince héritier

La voiture du prince héritier quelques minutes avant son assassinat.

Le , jour du 525e anniversaire de la défaite serbe à Kosovo, à 11 h 30[8], le Kronprinz François-Ferdinand, en visite officielle à Sarajevo, est assassiné par Gavrilo Princip, un nationaliste serbe originaire de Bosnie-Herzégovine[alpha 6],[9]. Le Kronprinz assistait depuis le aux manœuvres de l'armée austro-hongroise sur place[10].

Gavrilo Princip et ses complices bénéficient de l'appui d'une partie des services secrets de l'armée serbe, sous la responsabilité de Dragutin Dimitrijević, dirigeant, sous le surnom d'Apis, d'une société secrète nationaliste, la Main noire[11]. En effet, les conjurés sont entraînés au tir au pistolet et infiltrés en Bosnie-Herzégovine sur ordre de l'organisation par des douaniers serbes membres de la Main noire[11],[12]. Les conjurés ne bénéficient pas du soutien clair de l'ensemble de l'appareil d'État du royaume de Serbie : en effet, le gouvernement serbe, notamment le premier ministre Nikola Pašić, est avisé du passage en Bosnie-Herzégovine d'activistes de la Main noire[13]. Il informe les représentants austro-hongrois à Belgrade de projets d'attentats[12], tout comme l'ambassadeur serbe à Vienne éclaire le ministre des finances de la double monarchie Leon Biliński sur les risques encourus par l'héritier impérial et royal durant sa prochaine visite à Sarajevo, sans succès[alpha 7],[14].

Les conjurés exploitent également les multiples négligences des autorités du condominium lors de la visite du couple archiducal[15] alors qu'il n'avait pas été inquiété durant son séjour en Bosnie-Herzégovine, que ce soit lors de la visite du bazar de la ville ou durant leur séjour à la station thermale de Ilidze[16]. Le dispositif de sécurité avait été allégé[15], le couple se déplace en voiture ouverte[16] et le parcours du cortège dans Sarajevo publié dans la presse locale quelques jours auparavant, L'attentat a lieu alors que la voiture du François-Ferdinand manœuvre pour rebrousser chemin, le chauffeur s'étant égaré dans les rues de la ville[15].

L'implication des services de renseignements serbes n'est démontrée sans équivoque qu'en 1919, Cependant, les policiers austro-hongrois parviennent à démontrer la complicité de douaniers serbes dans la fourniture des armes utilisées lors de l'attentat par la Serbie et dans le franchissement clandestin de la frontière par les conjurés chargés de l'attentat[11],[6]. Dès le , les conjurés encore en liberté sur le territoire austro-hongrois sont arrêtés et les enquêtes diligentées par la police austro-hongroise mettent en évidence de multiples tentatives d'attentats depuis 1903, organisés avec le soutien des services secrets, des autorités douanières, de militaires et d'hommes politiques serbes[13].

Crise austro-serbe

Entre le , date de l'assassinat de François-Ferdinand, et le , date du déclenchement des premières opérations militaires, les principaux protagonistes sont serbes et austro-hongrois, définissant les contours d'une crise internationale affectant les seules relations entre la double monarchie et le royaume de Serbie.

La Serbie face à l'attentat

Nikola Pašić, premier ministre serbe, ici en 1915, suit une ligne politique erratique après l'attentat de Sarajevo.

Dès l'annonce de l'attentat, le premier ministre serbe, Nikola Pašić, alors en campagne électorale[13], envoie des signaux contradictoires à ses homologues européens ; ces réactions sont scrutées à la loupe par le gouvernement austro-hongrois[17].

Le gouvernement royal se désolidarise rapidement des activités de la Main noire à l'origine du régicide du , par une lettre circulaire adressée à l'ensemble des diplomates serbes, appelant à agir avec la plus grande fermeté contre les auteurs de l'attentat contre le Kronprinz austro-hongrois ; cependant, il ajoute à ce désaveu un appel à distinguer les activistes serbes et les officiels du royaume, et il ne prononce aucune sanction, ni contre Dragutin Dimitrijević, le principal animateur de la société secrète, ni contre l'instable représentant du royaume à Saint-Pétersbourg, Miroslav Spalajković, qui multiplie les provocations[alpha 8],[13],[18] : dès le , le diplomate serbe menace d'une offensive serbe en Bosnie-Herzégovine[19]. Enfin, le premier ministre Nikola Pašić, alors en campagne électorale, surenchérit également, se montrant maladroit devant le corps diplomatique, puis affichant un « silence hautain »[20].

Si le gouvernement serbe condamne officiellement l'attentat, les Serbes se montrent beaucoup moins mesurés à l'annonce de l'attentat de Sarajevo, manifestant leur contentement de façon spontanée à l'annonce de l'assassinat du Kronprinz austro-hongrois[17]. Parallèlement à ces manifestations souvent privées, la presse nationaliste exprime son contentement, dépeignant les conjurés en des termes particulièrement élogieux[6],[19]. L'ensemble des articles reprenant cette position sont soigneusement signalés au gouvernement serbe par le représentant austro-hongrois à Belgrade, qui joint à l'appui de ce signalement un dossier les recensant de façon systématique[6].

Les diplomates austro-hongrois n'insistent ni sur la condamnation du régicide par le gouvernement royal, ni sur les premières mesures gouvernementales contre les « éléments anarchistes », comme les qualifie Nikola Pašić[21]. En effet, les rapports de la représentation austro-hongroise à Belgrade ignorent simplement l'impuissance gouvernementale face aux manifestations de joie populaire nombreuses dans le royaume à l'annonce de l'attentat[19].

Initiatives austro-hongroises

Rapidement après l'annonce de l'attentat, les principaux responsables politiques de la double monarchie, aussi bien les Autrichiens que les Hongrois, se divisent sur la conduite à adopter dans la crise ouverte par l'assassinat du Kronprinz impérial et royal[6].

François-Joseph, réservé sur une issue militaire, développe sa position rapidement après l'attentat. Ultime responsable de la décision d'une action contre la Serbie, l'empereur-roi souhaite non seulement appuyer la politique de la monarchie avec les résultats de l'enquête criminelle lancée immédiatement après l'assassinat, mais aussi obtenir l'accord de l'ensemble des dirigeants autrichiens et hongrois avant toute action contre la Serbie[4].

L'enquête criminelle débute ainsi quelques minutes après l'attentat, après l'arrestation de ses auteurs : Princip est interrogé pour la première fois quelques heures après son arrestation ; en dépit de ses déclarations et de celles de l'un de ses complices arrêté en même temps que lui, l'enquête progresse, accélérée par les arrestations de plus en plus nombreuses au fil des heures dans les milieux nationalistes serbes du condominium, ainsi que par les déclarations de l'un des conjurés, Danilo Ilić, interrogé le [22].

Parallèlement, l'empereur-roi multiplie les initiatives en direction du premier ministre hongrois, Istvan Tisza, dans un premier temps hostile à toute initiative austro-hongroise en direction de la Serbie. Mandaté par François-Joseph, Leopold Berchtold, le ministre commun des affaires étrangères le rencontre dès le afin de sonder ses intentions[23].

Dès l'assassinat, les responsables austro-hongrois multiplient les initiatives pour permettre à la monarchie danubienne un renforcement de puissance à la faveur de la crise qui frappe la double monarchie. Ainsi, les responsables austro-hongrois présentent l'assassinat comme une attaque contre la double monarchie et la dynastie des Habsbourg-Lorraine[6]. Cette analyse est reprise par les futurs interlocuteurs d'Alexander Hoyos : Friedrich Naumann, lors de sa rencontre avec le diplomate austro-hongrois, estime vital pour la double monarchie d'« anéantir la Serbie » le plus rapidement possible, afin de placer la Russie et la France devant le fait accompli[24].

Les responsables austro-hongrois, divisés sur la conduite à adopter, s'accordent cependant sur la nécessité de connaître la position officielle du Reich dans la crise en cours[25]. Rapidement, le conseil de la couronne austro-hongroise[alpha 9] cherche ainsi à obtenir le soutien allemand dans la crise juste ouverte[26]. Le ministre austro-hongrois des affaires étrangères, Leopold Berchtold, dépêche à Berlin son directeur de Cabinet, Alexander Hoyos, afin de convaincre le Reich de la justesse de la position austro-hongroise[27]

Le Reich, acteur précoce de la crise

Dès l'assassinat du Kronprinz austro-hongrois, la recherche du soutien allemand constitue la principale des préoccupations austro-hongroises.

De plus, dans les jours suivant l'assassinat de François-Ferdinand, le gouvernement allemand fait savoir officieusement son soutien aux initiatives austro-hongroises. Le , une semaine après l'attentat, une mission diplomatique austro-hongroise est envoyée à Berlin, afin de permettre à la double monarchie de connaître précisément la position du Reich dans la crise en cours[2]. Muni du rapport Matscheko actualisé pour la circonstance et de divers documents, notamment une lettre autographe de François-Joseph à Guillaume II, Alexander Hoyos, l'un des proches collaborateurs de Leopold Berchtold, rencontre notamment le Kaiser Guillaume II, le chancelier du Reich Theobald von Bethmann-Hollweg, et obtient officiellement le soutien du Reich dans la crise austro-serbe qui se profile[28].

De plus, les diplomates allemands informent précocement, dès le leurs collègues austro-hongrois que le gouvernement du Reich attend une action vigoureuse de la double monarchie face à la Serbie[2]. Le , Gottlieb von Jagow, alors ministre des affaires étrangères, informe les diplomates allemands de la position du Reich dans la crise en cours, notamment l'ambassadeur à Rome[29].

L'ultimatum du

Fort de l'appui du Reich, Leopold Berchtold prépare du point de vue diplomatique l'« expédition de châtiment »[27].

Les diplomates austro-hongrois préparent ainsi une note diplomatique comportant un ultimatum rédigé minutieusement pour être repoussé par le gouvernement serbe[26]. Cependant, l'envoi de cette note doit être approuvé par l'ensemble des dirigeants de la double monarchie, István Tisza, le premier ministre hongrois, continue à exprimer son opposition à toute action belliqueuse contre la Serbie. En effet, le Hongrois se montre farouchement hostile à toute expansion territoriale de la double monarchie dans les Balkans : ce n'est qu'au terme d'une semaine de négociations entre les responsables austro-hongrois que Tisza, ayant obtenu la garantie qu'aucune annexion importante ne suivra la défaite serbe, se prononce en faveur de l'envoi d'un ultimatum à Belgrade[30].

Remis le au gouvernement serbe, la note austro-hongroise reçoit une réponse le 25, conformément au délai accordé par la double monarchie. Les Serbes acceptent les termes de la note, repoussant seulement la participation de policiers austro-hongrois aux investigations menées sur le territoire serbe[26].

La réponse serbe ne satisfait pas les diplomates austro-hongrois, dont le représentant à Belgrade, ce qui entraîne la rupture des relations diplomatiques entre la double monarchie et la Serbie dès le [31].

Crise européenne

L'échec de la politique de localisation

Dès le , lendemain de la remise de l'ultimatum, les diplomates allemands et austro-hongrois tentent de limiter les implications internationales de leur politique belliciste, en mettant en avant le caractère bilatéral, austro-serbe, de la confrontation[26].

Le même jour, les diplomates allemands reçoivent une note rappelant la position des puissances centrales, donnant à la crise austro-serbe une dimension strictement bilatérale. Les Allemands insistent notamment sur les conséquences d'une intervention russe dans la crise en cours, souhaitant « intimider » la France, la Grande-Bretagne et l'Italie, et les empêcher ainsi de s'immiscer dans le différend austro-serbe[26]. Les diplomates allemands font ainsi savoir à leurs interlocuteurs que toute intervention d'une tierce puissance dans le différend austro-serbe obligerait le Reich à se porter au secours de son allié, tandis que le gouvernement du Reich repousse une proposition de médiation britannique[26].

Cette volonté de localisation de la crise est en réalité vouée à l'échec dès le  ; en effet, le ministre russe des affaires étrangères, Sergueï Sazonov, fait alors savoir au représentant britannique à Saint-Petersbourg la volonté russe de défendre son allié serbe contre la double monarchie, y compris en prenant les armes, tandis que la crise austro-serbe constitue l'un des principaux sujets des entretiens franco-russes[alpha 10]. De concert avec le gouvernement français, une politique commune franco-russe, ferme face aux initiatives germano-austro-hongroises est définie, signifiant ainsi l'échec précoce de la tentative allemande visant à donner à la crise les contours d'une crise bilatérale austro-serbe[26],[32].

Les autres grandes puissances dans la crise

La crise austro-serbe incite les grandes puissances à une grande prudence ; cependant, rapidement, leurs représentants prennent conscience de leurs intérêts, et mettent en place différentes stratégies pour sortir de la crise[25].

Le gouvernement impérial russe est ainsi le premier à analyser les conséquences possibles de la crise austro-serbe sur l'influence de la Russie dans les Balkans[27]. Depuis le dénouement de la crise bosniaque, les Russes renforcent leurs liens avec la Serbie, tandis que l'empire des Tsars connaît depuis la fin des guerres balkaniques une crise politique, marquée par les hésitations entre les bellicistes, menées par Sergueï Sazonov, et les partisans d'une politique plus modérée, regroupés autour de Vladimir Kokovtsov, le ministre russe des finances ; au début de l'année 1914, à la demande expresse du gouvernement français, ce dernier est renvoyé, marquant la victoire des bellicistes dans les luttes internes au sein du gouvernement russe[33]. Dès le , la presse nationaliste, relayée par le ministre russe des affaires étrangères, Sergueï Sazonov, multiplie les déclarations incendiaires, appelant à soutenir la Serbie par solidarité slave[25]. Le , lors d'une réunion du conseil des ministres, les ministres les plus nationalistes du gouvernement impérial appellent Nicolas II à la fermeté : ainsi, Sergueï Sazonov[alpha 11],[32] et Alexandre Krivocheïne, le ministre de l'agriculture, défendent l'un et l'autre une intervention aux côtés des Serbes et emportent l'adhésion de leurs collègues[34] ; cette intervention doit dans un premier temps se limiter à un soutien diplomatique[34].

Le principal allié de l'empire russe, la France, se trouve dans une situation peu confortable ; son armée est en cours de modernisation, souffrant de multiples lacunes, notamment dans le domaine de l'artillerie lourde, mais elle redoute de perdre l'alliance de la Russie, que sa diplomatie n'avait pas soutenu face à l'annexion austro-hongroise de la Bosnie-Herzégovine[27]. Cependant, rapidement, Raymond Poincaré définit de concert avec ses interlocuteurs russes avec lesquels il s'entretient à partir du une réplique à la réponse austro-hongroise[32].

La Grande-Bretagne, traditionnelle garante d'un équilibre des puissances sur le continent, tarde à s'impliquer dans la crise ; peu sensible aux affaires balkaniques, le gouvernement britannique soutient à la fois la France, son allié, mais aussi sa politique de maintien de l'équilibre européen, donc de lutte contre l'hégémonie allemande en Europe qui découlerait d'une victoire austro-hongroise face à la Serbie[27].

Tentatives de médiations

Le , après la remise de la réponse serbe à la note austro-hongroise, le chargé d'affaires austro-hongrois à Belgrade annonce la rupture des relations diplomatiques entre la double monarchie et la Serbie, faisant craindre aux responsables européens une guerre austro-serbe[26]. Ainsi, dès le , l'ensemble des chancelleries européennes multiplient les initiatives afin de limiter l'impact de la crise[31].

Ces initiatives sont lancées alors que la diplomatie austro-hongroise devient mutique, Berchtold et ses proches conseillers espérant des concessions serbes[35] ; dans ce contexte, les diplomates austro-hongrois en poste en Europe se voient pressés d'inciter leurs supérieurs à faire preuve de modération dans la formulation de leurs revendications face à la Serbie[35].

Face à ce silence, le cabinet britannique propose donc la réunion d'une conférence internationale destinée à résoudre par la diplomatie la crise en cours, mais essuie un sec refus de la part de Berlin, ferme soutien de son allié[31]. Devant ce refus, le premier ministre britannique propose alors la tenue de pourparlers bilatéraux, austro-hungaro-serbes, qui suspendraient toutes les opérations militaires dans l'attente des résultats : appuyé par le Reich, Leopold Berchtold, le ministre austro-hongrois des affaires étrangères, refuse cette solution[31].

Vers la guerre

Mobilisations

Parallèlement à cette activité diplomatique, les principaux pays directement impliqués dans la crise mobilisent leurs troupes à partir du .

Franz Conrad von Hötzendorf, le chef d'état-major austro-hongrois, avait imposé un calendrier serré prenant en compte les délais nécessaires à la mobilisation de l'armée commune[26].

Face à la mobilisation austro-hongroise, le conseil des ministres russe réuni le décide l'activation pour le lendemain du « règlement pour la période préparatoire à la guerre du  », organisant la mobilisation partielle de l'armée impériale russe[36] ; en effet, le gouvernement russe avait planifié de mobiliser partiellement son armée en cas de guerre austro-serbe[31] : ce règlement prévoit d'importants déploiements de troupes, la promotion accélérée d’élèves officiers et la déclaration de l'état de guerre dans les plus grandes villes de l'Ouest de l'empire, Saint-Pétersbourg, Riga, Vilnius, Varsovie et Kiev ; ces mesures et leur mise en application autorisent les services de renseignement allemand et austro-hongrois en activité dans l'empire russe à affirmer que la Russie est déjà en état de guerre avec le Reich et la double monarchie[36].

Le , alors que les dispositions prises en vue de la mobilisation partielle de l'armée impériale russe sont en cours de déploiement dans la plus grande confusion, le tsar décrète la mobilisation générale[37].

Déclarations de guerre

Inquiet devant la multiplication des propositions d'ouverture de négociations, Leopold Bechtold décide le d'adresser une nouvelle note au gouvernement royal serbe, dans laquelle la double monarchie se déclare en état de guerre avec la Serbie.

Cette note est adressée le lendemain au petit matin ; les diplomates austro-hongrois en poste dans les diverses capitales européennes peuvent alors affirmer à leurs interlocuteurs que toute tentative de médiation dans le conflit qui débute est « dépassée par les évènements »[31]. Quelques heures plus tard, les monitors austro-hongrois de la flotte du Danube bombardent Belgrade[38].

Notes et références

Traductions

  1. Prince-héritier.

Notes

  1. Entre 1871 et 1945, le nom officiel de l'État national allemand est Deutsches Reich, simplement désigné par le terme de Reich par la suite.
  2. Celui-ci est envoyé à Berlin dans les jours qui suivent l'attentat du pour sonder les intentions du Reich.
  3. Depuis les réformes de Joseph II, le ministère austro-hongrois des affaires étrangères est divisé en sections.
  4. Celui-ci est chargé de la rédaction de la note du à la Serbie.
  5. L'Autriche-Hongrie est en réalité composée de l'Autriche, de la Hongrie, qui ont des institutions propres et partagent la gestion commune de l'armée, de la diplomatie et de l'administration de la Bosnie-Herzégovine.
  6. Occupée depuis 1878, annexée en 1908, la Bosnie-Herzégovine n'est attribuée ni à l'Autriche, ni à la Hongrie, mais administré conjointement par les deux parties de la double monarchie dans le cadre d'un condominium.
  7. L'administration du condominium est placée sous la responsabilité du ministre commun des finances de la double monarchie.
  8. Dans de multiples interviews, le diplomate serbe justifie l'assassinat du Kronprinz austro-hongrois.
  9. Le conseil de la couronne austro-hongroise réunit, sous la présidence de l'empereur-roi les ministres communs, le président du conseil autrichien et le premier ministre hongrois.
  10. Raymond Poincaré est en visite officielle en Russie depuis le .
  11. Une fois connu le texte de l'ultimatum, il avait annoncé le déclenchement d'une guerre européenne avant la fin de l'été.

Références

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  2. Renouvin 1934, p. 201.
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  5. Ortholan 2017, p. 306.
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  7. Seiti 2015, p. 13.
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  27. Renouvin 1934, p. 203.
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Voir aussi

Bibliographie

  • Jean-Paul Bled, L'agonie d'une monarchie : Autriche-Hongrie 1914-1920, Paris, Tallandier, , 464 p. (ISBN 979-10-210-0440-5). 
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  • Fritz Fischer (trad. Geneviève Migeon et Henri Thiès), Les Buts de guerre de l’Allemagne impériale (1914-1918) Griff nach der Weltmacht »], Paris, Éditions de Trévise, , 654 p. (BNF 35255571). 
  • Gerd Krumeich (trad. de l'allemand), Le feu aux poudres : Qui a déclenché la guerre en 1914, Paris, Belin, coll. « Histoire », , 301 p. (ISBN 978-2-7011-9090-7). 
  • Henri Ortholan, L'armée austro-hongroise : 1867-1918, Paris, Bernard Giovannangeli Éditeur, , 526 p. (ISBN 978-2-7587-0180-4). 
  • Pierre Renouvin, La Crise européenne et la Première Guerre mondiale, Paris, Presses universitaires de France, coll. « Peuples et civilisations » (no 19), , 779 p. (BNF 33152114)
  • François Roth, Six mois qui incendièrent le monde : Juillet-décembre 1914, Paris, Tallandier, , 560 p. (ISBN 979-10-210-0378-1). 
  • Arta Seiti, Des guerres balkaniques à la Grande Guerre : un regard stratégique, Paris, Les Cahiers de la Revue Défense Nationale, (ISSN 2105-7508). 
  • Alexandre Sumpf, La Grande Guerre oubliée : Russie 1914-1918, Paris, Perrin, , 607 p. (ISBN 978-2-262-06917-9). 

Article connexe

les protagonistes

Liens externes

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