Seconde guerre de Tchétchénie

La seconde guerre de Tchétchénie[alpha 1] (ou deuxième guerre de Tchétchénie) est un conflit post-soviétique armé opposant l'armée fédérale russe aux indépendantistes tchétchènes du au , jour de la prise de Grozny, la capitale de la république autonome, par les troupes russes. Cependant, des opérations de contre-insurrection perdurent jusqu'au [16] et un conflit de basse intensité se fait sentir encore pendant des années[17],[alpha 2].

Pour les articles homonymes, voir Guerres en Tchétchénie.

Seconde guerre de Tchétchénie
Carte de la Tchétchénie et des autres régions du Caucase.
Informations générales
Date août 1999 – avril 2009
(9 ans et 8 mois)
Lieu Tchétchénie, Daghestan
Issue

Victoire russe

Belligérants
Russie
Loyalistes tchétchènes
République tchétchène d'Itchkérie
Émirat du Caucase
Moudjahidines
Loups gris[1],[2]
Commandants
Boris Eltsine
Vladimir Poutine
Victor Kazantsev
Gennadi Trochev[3]
Vladimir Chamanov
Alexandre Baranov[4]
Sergueï Makarov
Valentin Korabelnikov
Anatoli Kvachnine
Vladimir Moltenskoï
Iouri Boudanov
Yuriy Torchin
Akhmad Kadyrov
Ramzan Kadyrov
Djabrail Iamadaev
Soulim Iamadaev
Ruslan Iamadaev
Said-Magomed Kakiev
Aslan Maskhadov
Abdoul-Khalim
Rouslan Guélaev
Chamil Bassaïev
Salman Radouïev
Dokou Oumarov
Aslambek Vadalov
Ilyas Gorchkhanov
Akhmed Yevloyev
Rasul Makacharipov
Rappani Khalilov
Ilgas Malachiyev
Muslim Atayev
Alan Digorsky
Ibn al-Khattab
Abu al-Walid
Abu Hafs
Muhannad
Forces en présence
140 000 hommes[5],[6]22 000 hommes
Pertes
4 700 militaires tués selon le gouvernement russe[7]

12 000 militaires tués selon l'Union des comités de mères de soldats de Russie[8]
13 000 tués[7]
Civils : 100 000 à 300 000 morts, soit de 10 à 25 % de la population totale[7],[9]

La guerre se solde par l'« extermination partielle »[20] du peuple tchétchène et par la réinsertion de la Tchétchénie dans la fédération de Russie. Il s'agit du conflit le plus violent qu'aient connu l'Europe[21] et l'ex-URSS[22] depuis la Seconde Guerre mondiale, certains commentateurs allant même jusqu'à parler de « génocide »[23],[24],[25],[26],[27].

Contexte

Combattants tchétchènes priant à l'extérieur du palais présidentiel de Grozny pendant le premier conflit russo-tchétchène en décembre 1994.

Le premier conflit qui embrase la petite république de Tchétchénie, située dans le Caucase du Nord russe, s'achève en août 1996. Aslan Maskhadov, chef d'État-major tchétchène, et Alexandre Lebed, secrétaire du Conseil de sécurité russe, signent les accords de Khassaviourt, qui, sans préciser explicitement le statut de la Tchétchénie, prévoyaient de clarifier d'ici cinq ans les « bases des relations mutuelles » entre les deux parties[28]. En janvier 1997, se déroule l'élection présidentielle en Tchétchénie dont Maskhadov sort vainqueur avec 59 % des voix. Le 12 mai 1997, il signe avec le président russe Boris Eltsine un traité de paix qui prévoyait d'établir « de solides relations égales et mutuellement bénéfiques »[29] entre la fédération de Russie et la république tchétchène d'Itchkérie et mettait fin à « 400 ans »[30] de conflit russo-tchétchène en ouvrant une « ère de paix »[31] entre les deux entités.

Mais Maskhadov n'arrive pas à maîtriser ses chefs de guerre qui rêvaient d'un Caucase islamique destiné à regrouper toutes les républiques voisines, à l'image de l'ancienne Ciscaucasie démantelée au XIXe siècle lors de la guerre du Caucase.

Les éléments les plus radicaux, dirigés par les chefs de guerre Chamil Bassaïev et Khattab font, le 7 août 1999, une incursion au Daghestan, une république du Caucase russe voisine de la Tchétchénie, sous prétexte de porter secours aux rebelles islamistes locaux pilonnés dans leurs fiefs par les forces fédérales russes[32],[33].

Du 31 août au 16 septembre 1999, surviennent cinq explosions en Russie, trois à Moscou et deux autres en province, entraînant la mort de plus de 300 personnes[34],[35]. Elles sont attribuées par les autorités russes aux indépendantistes tchétchènes, ces derniers y voyant une manipulation[36]. Combinés à la volonté de Moscou de prendre sa revanche[37],[38],[39], envisagée, paraît-il, depuis des mois[40],[41], ces événements conduisent à une nouvelle guerre.

Déroulement de la guerre

BTR-80 russe mis hors de combat après une embuscade en mars 2000.

Pour rétablir le contrôle russe sur la Tchétchénie, l'armée russe intervient dans la république séparatiste avec 140 000 hommes[5],[6] le . La seconde guerre (officiellement appelée « opération anti-terroriste ») commence. Ayant rapidement rétabli le contrôle du nord de la république (les plaines au nord de la rivière Terek), l'opération russe dans le sud montagneux se solde par un lent succès après des combats acharnés. Le bilan est plus meurtrier que lors du premier conflit. Le 21 octobre, des missiles russes sont lancées sur le centre de Grozny, notamment sur le marché et la maternité de la ville, tuant jusqu'à 120 personnes et en blessant jusqu'à 500[42],[43]. Considéré par certains défenseurs des droits de l'homme comme « crime contre l'humanité »[44], le massacre est officiellement imputé par les autorités russes aux indépendantistes tchétchènes dont un dépôt de munitions aurait explosé au marché[45]. Initialement, les Russes pensaient que les séparatistes quitteraient Grozny de leur propre initiative par crainte de faire face à une bataille tous azimuts[46] et mettent en place un prétendu[47] corridor sécurisé pour permettre l'évacuation des civils[48]. Finalement, après une stratégie de bombardements intensifs et d'envoi de petits groupes d'infanteries spécialisés en combat urbain précédant les blindés, Grozny tombe après un siège qui dure du au . Transformée en forteresse, les séparatistes tchétchènes s'étant préparés à l'assaut russe, le siège et les combats dévastent la capitale tchétchène comme aucune autre ville européenne depuis la Seconde Guerre mondiale ; en 2003, les Nations unies qualifient Grozny de « ville la plus détruite sur Terre »[49]. Le bombardement de Katyr-Yurt, qui atteint une certaine notoriété en raison de la condamnation ultérieure de la Russie par la Cour européenne des droits de l'homme, a lieu dans ce contexte, le 4 février 2000. Le 2 mars 2000, 27 membres d'une colonne motorisée de l'OMON originaire de Serguiev Possad sont tués par un tir ami d'une autre unité de l'OMON originaire de Podolsk alors qu'ils étaient venus prendre la relève[50]. Les rebelles tchétchènes sont d'abord accusés de l'attaque[51] mais des journalistes indépendants découvrent les faits, forçant les autorités à admettre la vérité[52]. Du 5 au 20 mars 2000, au village Komsomolskoïe (ou Saadi-Kotar), se déroule la dernière bataille d'envergure[53],[54],[55], au terme de laquelle sont décomptés au moins 625 morts du côté tchétchène[56].

Vladimir Poutine rétablit l'autorité de Moscou dans la totalité du territoire de la république, mais la guérilla séparatiste continue jusqu'en 2006, voire plus tard, principalement dans les montagnes[57].

Discours politique russe pendant le conflit

La majorité absolue de la population russe, journalistes[58] et intellectuels[59] compris, soutient la décision du Premier ministre, Vladimir Poutine, d'envahir la Tchétchénie[60],[61]. « Nous ne nous emparons pas de nos villes, nous les libérons », déclare le ministre de la Défense, Igor Sergueïev[62]. Après la chute de Grozny en février 2000, ses troupes hissent sur la ville le même exemplaire du drapeau russe qu'ils avaient dû emporter avec eux au terme de leur campagne infructueuse de 1994-1996[63]. Intransigeants[64], ils disaient aux Tchétchènes : « On va vous éradiquer en tant que nation »[65].

Si l'offensive terrestre commence en octobre 1999, les bombardements de la Tchétchénie démarrent plus tôt, dès le mois d'août[66]. Le 23 septembre, l'aviation russe mène de nouvelles frappes en Tchétchénie, dont une contre l'aéroport Cheikh Mansour à Grozny[67], en détruisant le seul avion de la république, le biplan An-2, employé pour l'agriculture et le parachutisme sportif pendant les fêtes[68]. Vladimir Poutine dit ne pas avoir été au courant de l'attaque contre l'aéroport mais ajoute : « Les bandits seront pourchassés partout où ils se trouvent. […] S'ils se trouvent à l'aéroport, alors ce sera à l'aéroport »[69]. Le lendemain, interrogé de nouveau sur ces frappes dont certaines auraient touché des quartiers résidentiels des banlieues de Grozny[70], il prononce sa célèbre phrase qui passe par la suite en proverbe[71], entre dans des recueils d'aphorismes[72], devient une sorte de slogan pour sa campagne présidentielle[73] et « immortalise »[74] son nom : « On poursuivra les terroristes partout, dans les aéroports s'ils sont dans les aéroports et, excusez-moi, mais, s'il le faut, on les attrapera dans les toilettes, on les butera jusque dans les chiottes. La question est close »[70]. En 2002, lors du sommet UE-Russie, Poutine répond de la même manière à un journaliste français qui l'avaient interpellé sur l'usage des mines antipersonnel en Tchétchénie, lesquelles tuaient, d'après lui, « beaucoup plus de civils que de terroristes » : « Si vous êtes prêt à devenir le plus radical des islamistes, et que vous êtes prêt à vous faire circoncire, je vous invite à Moscou. Je recommanderai qu'on fasse l'opération de telle manière que plus rien ne repousse »[75],[76].

La rhétorique de l'establishment militaire n'est pas moins vigoureuse que celle de Poutine. Le 11 janvier 2000, le général Victor Kazantsev, commandant en chef des troupes russes en Tchétchénie, annonce : « Maintenant, seuls les enfants jusqu'à l'âge de 10 ans, les vieillards de plus de 60 ans et les femmes seront considérés comme des réfugiés »[77], laissant entendre qu'il considérait tout le reste de la population tchétchène comme des combattants en puissance[78],[79]. L'un de ses subalternes, le général Vladimir Chamanov, commandant du front ouest de l'armée russe en Tchétchénie, avoue dans une interview qu'il considérait les femmes et les enfants des combattants tchétchènes comme étant également des « bandits »[80]. Le général Sergueï Makarov, commandant du front est, affirme que les Tchétchènes était un « peuple parasite » et estime que la mère d'un commandant tchétchène, tuée lors d'une opération, « n'a[vait] eu que ce qu'elle méritait pour avoir élevé un tel loup »[81]. L'adjoint du commandant d'une division d'infanterie motorisée, le colonel Anatoli Khrouliev, nommé chef du poste de contrôle entre la Tchétchénie et l'Ingouchie voisine, fermé fin octobre-début novembre 1999 pour des civils tchétchènes fuyant la zone des combats, se dit déterminé à ne pas laisser les Tchétchènes « se reproduire »[82]. En août 2000, un autre colonel, le commandant du 503e régiment d'infanterie motorisée, Romane Chadrine, répond comme suit à la question de savoir quand la guerre terminerait : « Nous n'avons qu'à laisser en vie 100-120 mille Tchétchènes, et nous pourrons dormir tranquillement pendant une trentaine d'années, jusqu'à ce qu'ils ne se reproduisent »[83]. Quant aux officiers russes de grades moins élevés, ils répétaient très souvent la phrase : « Un bon Tchétchène est un Tchétchène mort »[84],[85],[86].

Un tel discours de la part des décideurs russes encourage[87] l'armée russe à commettre en Tchétchénie des exactions : destructions de villes et villages non justifiées par les exigences militaires, attaques et bombardements de villes et de villages non défendus, exécutions sommaires et assassinats, tortures et mauvais traitements, viols de femmes et d'hommes, atteintes graves et intentionnelles à l'intégrité physique et à la santé de personnes ne participant pas directement aux hostilités, attaques délibérées contre la population civile et contre les moyens de transport et personnel sanitaire, arrestations et détentions arbitraires de civils, disparitions forcées, pillages des biens privés, extorsions de fonds, commerce des êtres humains, pressions exercées sur les personnes déplacées et prises d'otages de proches de rebelles[78],[88],[89],[90],[91],[92],[93]. Ces violations sont massives, généralisées et systématiques[78],[94].

Victimes

Soldat russe marchant sur une fosse commune à Saadi-Kotar.

Selon diverses estimations, les deux guerres font au total de plusieurs dizaines de milliers[95],[96] à 300 000[7],[97] victimes en Tchétchénie, essentiellement des civils[95],[98]. Les hostilités entraînent la destruction de plus de 80% des infrastructures de la république[99].

Les statistiques officielles russes recensent 4 572 morts et 15 549 blessés parmi les militaires de l'armée fédérale dans la période allant du 1er octobre 1999 au 23 décembre 2002[100]. Les pertes des combattants tchétchènes sont évaluées par Moscou à 13[7] ou 15 000 hommes[100].

Le Comité des mères de soldats de Russie avance le chiffre de 12 000 morts du côté des forces armées russes, en se fondant sur les données recueillies dans les comités régionaux, en prenant en compte les soldats blessés au combat et morts des suites de leurs blessures. Ce chiffre circule beaucoup et est finalement déclaré proche de la réalité[8].

Réactions internationales

La communauté internationale, et en particulier le Conseil de l'Europe, demandent de manière timide une solution pacifique. Certains médias internationaux et plusieurs autres associations (dont Amnesty International et le Comité Tchétchénie) réclament de la communauté internationale, et en particulier des gouvernements américains et européens, une action diplomatique auprès du gouvernement russe pour mettre fin à des violations des droits de l'homme imputables aux militaires de l'armée fédérale et des milices tchétchènes pro-fédérales, en l'absence de recours judiciaires réels. Ils exigent également la médiation internationale afin que s'établissent des négociations entre les nouvelles autorités tchétchènes et les séparatistes. Vladimir Poutine justifie son refus de négocier avec les rebelles en arguant un principe universel : « On ne négocie pas avec les terroristes et les criminels ». Il appelle les Occidentaux à ne pas faire preuve de « double morale ».

Comme lors de la précédente guerre russo-tchétchène, les chancelleries occidentales font l'objet de critiques de la part d'observateurs indépendants. Outre leur « tiédeur remarquable » et leur « capacité d'indignation inversement proportionnelle à la puissance de l'agresseur », il leur est reproché d'avoir « sacrifié » le peuple tchétchène sur l'autel de la realpolitik en profitant des positions conciliantes de Moscou sur des dossiers bilatéraux en échange d'« une indifférence vis-à-vis d'un confetti d'empire [la Tchétchénie] sans intérêt vital pour l'Ouest »[101] et « musulman de surcroît »[102].

Événements postérieurs

Aslan Maskhadov, chef du mouvement séparatiste tchétchène et président de la république tchétchène d'Itchkérie, tué le .

Après la fin des opérations militaires majeures, le président Poutine réaffirme les bases de la nouvelle politique de Moscou en Tchétchénie : transfert du maintien de l'ordre à la milice locale, élection d'un président et d'un parlement au suffrage universel, traité de délimitation des pouvoirs entre la fédération de Russie et la république de Tchétchénie et reconstruction. En outre, Moscou proclame officiellement l'amnistie pour des rebelles, mais en réalité aucun de ceux-ci ne semble à l'abri des poursuites[103]. Malgré les assurances de normalisation de la part du Kremlin, quelques groupes de rebelles continuent, de façon sporadique, à mener des actes de résistance contre les troupes fédérales russes.

En 2005, plus de 200 combattants indépendantistes sont désarmés, selon le chef du FSB, Nikolaï Patrouchev. La mort d'Aslan Maskhadov le 8 mars 2005 porte un coup dur à la logistique des rebelles. Les attaques contre les forces fédérales prennent de plus en plus un caractère sporadique et moins coordonné. Selon la déclaration du président tchétchène Alou Alkhanov faite le 25 décembre 2005, la diminution sensible des activités des combattants atteinte en 2005 grâce, notamment, à la neutralisation de leurs chefs, permettrait maintenant de réduire encore les effectifs des forces fédérales russes dans la république, les organes de l'ordre locaux étant dorénavant aptes à garder la situation en Tchétchénie sous leur contrôle. Néanmoins, en 2007, on compte encore 80 000 militaires russes en Tchétchénie[6].

Après la mort d'Abdoul-Khalim Saïdoullaïev, Dokou Oumarov devient le chef du mouvement séparatiste. En dépit de la mort de plusieurs chefs indépendantistes, dont Oumarov en 2013, les affrontements entre les forces de l'ordre – troupes russes ou milices locales – et la rébellion subsistent jusqu'en 2021[17].

Le 16 avril 2009, le régime d'opération dit antiterroriste en vigueur en Tchétchénie depuis 1999 est levé[104].

La Ciscaucasie demeure, en 2012, la zone des conflits armés les plus meurtriers d'Europe. En 2011, on y compte 750 morts et au moins 628 blessés (forces de sécurité, insurgés et civils) et, du 1er janvier au 1er septembre 2012, 516 morts et 397 blessés[105].

De 2006 à 2020, les unités du génie du ministère des Situations d'urgence et du ministère de la Défense russes déminent près de 22 000 hectares de terres en Tchétchénie en neutralisant environ 44 000 engins explosifs[106],[107],[108]. Le déminage se poursuit au-delà de 2020[109],[110].

Faits divers

En 2001, une jeune Tchétchène, Aïzan Gazoueva, devient une figure mythique pour le mouvement séparatiste. Alors qu'elle n'avait que 18 ans, cette jeune mariée se fait exploser auprès du général Gueïdar Gadjiev et de ses hommes. Par cet acte, elle souhaitait venger à la fois son époux, son oncle et ses deux frères, « disparus » après une rafle dirigée par cet officier[111],[112].

Notes et références

Notes

  1. L'appellation « seconde guerre tchétchène », de même que « première guerre tchétchène » pour la campagne précédente (cf. anglais Second Chechen War, First Chechen War, russe Вторая чеченская война, Первая чеченская война), sont critiquées par des Tchétchènes comme inexactes et partiales. Selon eux, ce sont des guerres russo-tchétchènes (et non simplement tchétchènes, ce qui leur en imputerait unilatéralement la responsabilité) et de loin pas la première ni la seconde dans l'histoire[10]. Certains experts européens[11] et certains responsables russes[12] semblent être grosso modo du même avis.
    À l'inverse, les autorités russes rejettent le terme même de guerre pour parler de ces deux campagnes en les nommant respectivement « rétablissement de l'ordre constitutionnel » et « opération antiterroriste »[13]. Il faut souligner cependant qu'à deux reprises au moins, en 2008[14] et en 2017[15], Vladimir Poutine qualifia la confrontation russo-tchétchène entre 1994 (ou, plus globalement, 1991) et 2000 comme la « guerre civile » de Russie.
  2. Scientifiquement parlant, il est impossible[18] de dater la fin de la seconde guerre de Tchétchénie, car il n'y eut pas de négociations ni de cessez-le-feu officiel entre les parties belligérantes[19].

Références

  1. John K. Cooley, Unholy Wars : Afghanistan, America and International Terrorism, Londres, Pluto Press, , 3e éd., 268 p. (ISBN 978-0-7453-1917-9, lire en ligne), 195
    « A Turkish Fascist youth group, the "Grey Wolves," was recruited to fight with the Chechens. »
  2. Thomas Goltz, Chechnya Diary : A War Correspondent's Story of Surviving the War in Chechnya, New York, Thomas Dunne Books, , 285 p. (ISBN 978-0-312-26874-9, lire en ligne ), 22
    « I called a well-informed diplomat pal and arranged to meet him at a bar favored by the pan-Turkic crowd known as the Gray Wolves, who were said to be actively supporting the Chechens with men and arms.
    …the Azerbaijani Gray Wolf leader, Iskander, Hamidov… »
  3. Commandant en chef du District militaire du Nord-Caucase de mai 2000 à décembre 2002
  4. Commandant en chef du District militaire du Nord-Caucase de juillet 2004 à mai 2008
  5. Marie-Pierre Rey (dir.), Les Russes de Gorbatchev à Poutine, Paris : Armand Colin, 2005, p. 76.
  6. Duclos 2010, p. 50.
  7. « La Russie annonce la fin de la guerre en Tchétchénie », Libération, (lire en ligne, consulté le ).
  8. « Le Comité des mères de soldats de Russie : tant que les journalistes viendront… », sur Grotius International, (consulté le ).
  9. Selon le recensement de 1989, la république socialiste soviétique autonome de Tchétchénie-Ingouchie comptait 1 275 513 personnes (Tchétchènes, Russes, Ingouches, et autres), soit 122 063 habitants de plus que dix ans auparavant, en 1979, où l'on eut recensé 1 153 450 personnes. On peut donc supposer qu'en 1994 (cinq ans après le dernier recensement officiel), la population de la Tchétchénie et de l'Ingouchie (qui se scindèrent en deux républiques en 1991) s'élevait au total à 1 336 544 âmes, toutes ethnies confondues. Si l'on soustrait de ce chiffre 194 171 personnes qui peuplaient, d'après les données officielles russes, l'Ingouchie en 1994, la population de la Tchétchénie à la veille de la première guerre se limitait hypothétiquement à 1 142 373 âmes.
  10. (ru) Вера Васильева, « Повернуть безумие вспять », sur svoboda.org, (consulté le ) : « Фактически в научном обороте не устоялось даже серьезное название этого события. Чеченцы считают, что это русско-чеченская война, и далеко не первая. Но мы в "Мемориале" и многие в России называют ее Первой чеченской войной. »
  11. Eric Hoesli, À la conquête du Caucase. Épopée géopolitique et guerres d'influence, Paris : Syrtes, 2006, p. 602 : « En , le pouvoir central lance une offensive contre Groznyï. […] C'est le début de ce que l'on appelle curieusement "la première guerre de Tchétchénie", comme s'il n'y en avait pas eu auparavant. »
  12. (ru) Владлен Максимов, « "Гражданское общество на крови не строят" », sur newizv.ru, (consulté le ) : « Член Совета Федерации Рамазан Абдулатипов раскритиковал сам термин "чеченская война", как бы приписывающий авторство этой войны чеченскому народу. »
  13. Merlin 2010, p. 126.
  14. (ru) Мумин Шакиров, « Война, объявленная оконченной », sur svoboda.org, (consulté le ) : « В 2008 году в одном из своих выступлений президент Путин заявил, что гражданская война в Чечне продолжалась десять лет. […] Термин "гражданская война" был тогда впервые произнесен официальной властью, – до этого чаще говорили о наведении конституционного порядка в республике, о борьбе с террором, с исламским подпольем и т. д. »
  15. (ru) «Молодые люди не помнят, что происходило в 90-х», sur lenta.ru, (consulté le ) : « Конечно, совсем молодые люди не помнят, даже не знают, что происходило в 90-х и в начале 2000-х годов, и не могут сравнить с тем, что стало теперь. […] Мы жили в условиях гражданской войны в течение долгого периода времени, практически 6 лет, больше – почти 10, когда пацанов 18-19 лет, неготовых, необученных, под пули вынуждена была страна направлять. »
  16. (en) « Russia 'ends Chechnya operation' », BBC News, (lire en ligne, consulté le ).
  17. (ru) Антон Демидов, « Глава ФСБ заявил об уничтожении лидеров всех бандгрупп на Северном Кавказе », sur Газета.Ru, (consulté le ).
  18. Aude Merlin et Anne Le Huérou, « Le conflit tchétchène à l'épreuve de la reconnaissance », Cultures & Conflits, no 87, , p. 47 (lire en ligne [PDF], consulté le ).
  19. Aude Merlin, « 1991 en Tchétchénie. Regards sur un basculement, vingt ans après », Revue d'études comparatives Est-Ouest, vol. 42, no 3, , p. 191 (lire en ligne, consulté le ).
  20. Merlin 2010, p. 132.
  21. Sophie Shihab, « Réponse à un anti-Tchétchène », sur Politique Internationale, (consulté le ).
  22. Aude Merlin et Jean Radvanyi, « Russes et Caucasiens à la fin du XXe siècle. Identités et territoires », Revue d'études comparatives Est-Ouest, vol. 34, no 4, , p. 180 (lire en ligne, consulté le ).
  23. C'est le cas, entre autres, de la journaliste russe connue pour ses reportages sur la Tchétchénie, Anna Politkovskaïa : « Est-ce que quelqu'un a fixé des règles précises pour définir un génocide ? Combien d'hommes une nation doit-elle perdre pour qu'on puisse parler d'un génocide ? Pour moi, pour mon système de valeurs, il s'agit bien d'un génocide. Même les militaires ne s'en cachent pas. Quand je pose des questions du genre "Pourquoi avez-vous tué celui-ci ?" ou "Pourquoi avez-vous fusillé tel autre ?", ils répondent : "Parce qu'il était Tchétchène." C'est donc bien un génocide » (Eric Bergkraut (réalisé par), Lettre à Anna, Suisse : Schweizer Fernsehen, 2008).
  24. Galia Ackerman, « Nouvelle Russie, nouveau mensonge », entretien avec Elena Bonner, dissidente soviétique et militante russe des droits de l'homme, sur Politique Internationale, (consulté le ) : « [Le devoir des pays occidentaux] était de dénoncer le génocide perpétré en Tchétchénie et d'édicter des sanctions contre la Russie […]. »
  25. Mariel Tsaroieva, Mythes, légendes et prières ancestrales des Ingouches et Tchétchènes, Paris : L'Harmattan, 2009, p. 16 : « Le monde ne réagit pas et observe d'un œil indifférent ce génocide d'un petit peuple [les Tchétchènes] défendant sa liberté et son existence même contre l'énorme Russie. »
  26. Hubert Lizé, « Michel Hazanavicius de retour à Cannes avec "The Search" », entretien avec le réalisateur français Michel Hazanavicius, sur Le Parisien, (consulté le ) : « [Lizé :] Pourquoi filmer la guerre des Russes contre les Tchétchènes ? [Hazanavicius :] J'avais le désir de raconter ce génocide passé trop inaperçu, malgré les reportages de l'époque. »
  27. Ghebali 2014, p. 670-671.
  28. Didier François, « La paix en Tchétchénie suspendue à Eltsine », sur Libération, (consulté le ).
  29. Voir le texte du traité (en russe) à l'adresse : https://ru.wikisource.org/wiki/Договор_о_мире_и_принципах_взаимоотношений_между_РФ_и_ЧРИ_(1997)
  30. (en) « Russia: Yeltsin and Chechen president sign peace agreement », sur Radio Free Europe, (consulté le ) : « After the signing Yeltsin told journalists he and Maskhadov had signed a "historic document, putting an end to more than 400 years of conflict". »
  31. (en) « Russia, Chechnya sign peace deal. But key issue of independence unresolved », sur CNN, (consulté le ) : « "The war is ending, for the first time in the history of relations between Moscow and Grozny, and the era of peace is starting", Maskhadov said on arrival in Moscow. »
  32. Laure Mandeville, La reconquête russe, Paris : Grasset & Fasquelle, 2008, p. 167.
  33. Moroz 2012, p. 232-233.
  34. (ru) Владимир Воронов, « Кто взрывает Россию? », sur Радио Свобода, (consulté le ).
  35. Moroz 2012, p. 244-246.
  36. Attentats de 1999 en Russie et article Wikipedia Russian_apartment_bombings
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  41. (ru) Сергей Дмитриев, « "Хасавюртовские соглашения стали для всех сюрпризом" », sur RFI, (consulté le ) : « Все было расписано еще до вторжения Шамиля в Дагестан – то, что мне передали в Госдуме, это был проект, одобренный еще в декабре 1998 года на совещании Совета безопасности РФ, который вел в тот период Путин. То есть за год до Шамиля Басаева, до всяких ваххабитов Москва считала необходимым решить вопрос исключительно военным путем ».
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  47. D'après Novaïa Gazeta, les corridors de sécurité autour de Grozny n'étaient en réalité que des « corridors de la mort » ((ru) « Страсбургский суд: Россия выплатит компенсации трем жительницам Чечни », sur Новая газета, (consulté le ) : « Федеральные силы блокировали город в начале декабря. Якобы обеспеченные коридоры безопасности были фактически "коридорами смерти" »). Kavkazski Ouzel enchaîne dans la même veine que « les corridors sûrs pour sortir de Grozny n'étaient pas établis » ((ru) « Евросуд вынесет решения по трем делам жителей Чечни », sur kavkaz-uzel.eu, (consulté le ) : « Правозащитники отмечают, что бомбардировки и обстрелы города начались в сентябре 1999 г., блокирован федеральными силами он был в начале декабря. Безопасные коридоры для выхода из Грозного обеспечены не были, и десятки тысяч людей не рискнули покидать его под обстрелами »).
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  61. Jacques Allaman, La guerre de Tchétchénie ou l'irrésistible ascension de Vladimir Poutine, Genève, Georg Éditeur, , p. 82, 121, 123-124 :
    « Soutenu par l'immense majorité des Russes, la guerre de Tchétchénie est à l'origine d'une profonde crispation nationaliste, bien symptomatique de l'état réel du pays. […] Dans l'écrasante majorité des cas, les médias russes ne reprennent ni ne vérifient les graves accusations portées par les Organisations non gouvernementales et les journaux occidentaux à l'encontre du Kremlin. Le grand quotidien populaire Komsomolskaïa Pravda évoque même sans scrupule cette absence de rigueur: "Peu importe quelles pressions peuvent être exercées sur nous et par qui. Nous faisons la guerre en Tchétchénie pour restaurer notre contrôle sur une région russe". […] Et que dire de cette timide et bien tardive prise de conscience par rapport au sort d'un journaliste [Andreï Babitski], aussi courageux soit-il, alors que la situation dramatique de la population civile tchétchène laisse de marbre l'immense majorité des rédactions russes ? Dans ce contexte, le silence prudent d'une certaine intelligentsia russe, qui va jusqu'à approuver l'intervention du Kremlin, est très inquiétant. De nombreux sondages montrent sans ambiguïté que près de 75% des intellectuels se rangent derrière Vladimir Poutine. […] Les milieux du cinéma, du théâtre et de la danse ne sont pas en reste et signent des pétitions de soutien à Vladimir Poutine. Pour l'immense majorité de cette élite, la cause tchétchène est tout simplement indéfendable. »
  62. Cité dans (ru) Современный русский язык: Активные процессы на рубеже XX-XXI веков / Отв. ред. Л. П. Крысин / Ин-т рус. яз. им. В. В. Виноградова РАН. – М.: Языки славянских культур, 2008. С. 526: « Мы наши города не захватываем, мы их освобождаем (Министр обороны Сергеев, НТВ, Итоги, 26.12.1999) ; […] Военные настояли на том, чтобы исключить словосочетание "чеченская территория", заменить… "российская земля" (Киселев, Итоги, 02.10.1999). »
  63. (ru) Хасин Радуев, « Погиб мэр Грозного Лечи Дудаев », sur Радио Свобода, (consulté le ) : « Военные заявляют, что уже в нынешнем месяце они намерены установить над резиденцией чеченского лидера российский флаг, причем именно тот, который в 1996-м году войска забрали, уходя из Чечни. Пока этот флаг временно водружен над площадью Минутка. »
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    « […] lors du 2ème conflit en 1999, la détermination militaire pour exterminer les Tchétchènes est telle que les officiers menacent de démissionner si un ordre était donné d'interrompre les opérations militaires ou si s'engageait un processus de négociation. »
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  73. Selon Mikhaïl Zadornov, satiriste qui était très en vue en Russie. Voir l'extrait de son spectacle datant au plus tard de 2011 ((ru) [vidéo] Задорнов о Путине и режиме (запрещенное на ТВ) sur YouTube) ou son interview de 2006 ((ru) Дмитрий Гордон, « Михаил Задорнов: "В самый разгар "оранжевой революции" я увидел Тимошенко по телевизору. Выглядела она ужасно: бледная, с косой… Тогда я и понял: эта бледная с косой за Ющенко еще придет" », sur Бульвар Гордона, (consulté le )).
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  81. Cité par (ru) Александр Рыклин, « Кузница кровников », article paru dans la revue Итоги et repris par le centre des droits de l'homme russe Мемориал, sur Мемориал, (consulté le ) : « В последнем номере "Литературки" читаем: "Они – народ-паразит". Это слова командующего Восточной группировкой войск в Чечне генерал-майора Макарова. […] "Там и мать его, между прочим, погибла… (речь идет о матери полевого командира Абдулаева). В общем, туда ей и дорога, если она такого волка воспитала…". Это все тот же Макаров откровенничает. »
  82. Cité par (ru) Анна Политковская, « Военный переворот », sur Новая газета, (consulté le ) : « Полковник Хрулёв воюет в Чечне с 13 сентября. Он производит странное впечатление – откровенный человеконенавистник. Его основной тезис – "Я не дам ИМ размножаться". »
  83. Cité par (ru) Дмитриевский С. М., Гварели Б. И. et Челышева О. А., Международный трибунал для Чечни, vol. 2, t. VI–VIII, Нижний Новгород, , 607 p. (lire en ligne [PDF]), p. 16
    « Вот оставим чеченцев тысяч 100-120 и можем спать спокойно лет тридцать. Пока они не размножатся. »
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  86. (ru) Александр Коц, « Как контрактники с ментами в войну играли », sur Комсомольская правда, (consulté le ) : « "Хороший чеченец – мертвый чеченец!" – это выражение я [младший сержант Мозолев В. Н., служивший в Чеченской Республике с августа 2000 г. по август 2005 г.] слышал на протяжении всех последующих контрактов из речей как младших, так и старших офицеров. »
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Bibliographie

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Voir aussi

Témoignages

Articles connexes

Liens externes

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