Extrême gauche (groupe parlementaire)

Le groupe de l’Extrême gauche est un groupe parlementaire à la Chambre des députés de la Troisième République française.

Cet article concerne un groupe parlementaire. Pour un article général sur le positionnement politique, voir Extrême gauche.

Extrême gauche
Chambre Chambre des députés
Législature(s) Ire, IIe, IIIe, IVe et VIe (Troisième République)
Fondation 1876
1893 (reformé)
Scission de Union républicaine
Disparition 1892
1895
Fusionné dans Groupe républicain radical-socialiste (1892)
Groupe radical-socialiste (1895)
Président Louis Blanc
Désiré Barodet
Positionnement Extrême gauche
Idéologie Radicalisme

Histoire

Formation et développement (1876-1881)

Majoritaires depuis les élections législatives de 1876, les républicains accèdent progressivement aux responsabilités, ce qui fait apparaître des dissensions idéologiques et stratégiques. Celles-ci traversent notamment le groupe parlementaire le plus à gauche, l'Union républicaine, où les radicaux les plus intransigeants reprochent aux « opportunistes » de renier leurs engagements (notamment ceux du programme de Belleville) en menant une politique trop modérée. Une scission se produit donc au sein de ce groupe.

Louis Blanc et Désiré Barodet, premier et second présidents de l'Extrême gauche (photographies par Carjat).

Annoncé dès le mois de juin 1876[1], le groupe de l'Extrême gauche est formé par Louis Blanc le mois suivant avec 25 députés[2]. Son nom découle du positionnement à l'extrême gauche qui le caractérise exclusivement jusqu'en 1886.

Le 12 août, ses premiers membres se réunissent pour signer un manifeste rédigé par Blanc, Madier-Montjau et Floquet[3]. Après avoir dénoncé le cléricalisme et son influence conservatrice sur un Sénat jugé peu légitime, ce long texte rappelle les principaux engagements des républicains les plus avancés : amnistie des communards, élection de tous les maires par les conseils municipaux, retrait au clergé de la collation des grades, abolition du privilège du volontariat dans l'armée, réduction du service militaire de cinq à trois ans, liberté complète de la presse, séparation de l’Église et de l’État par la suppression du budget des cultes, libertés d'association et de réunion, liberté syndicale... Se défendant d'être des idéalistes, les auteurs du manifeste se présentent au contraire comme des « hommes pratiques » qui, toutefois, ne pensent pas « qu'il soit pratique, lorsqu'on atteindrait le but en suivant le grand chemin, de prendre pour y arriver des chemins de traverse qui en éloignent et où l'on risque de s'égarer »[4]. Cette formule est une attaque évidente de la politique opportuniste de Léon Gambetta.

Pendant l’année 1876, le groupe est conduit par Georges Clemenceau. Lors de la crise du 16 mai 1877 et en vue des élections législatives anticipées, le groupe rejoint à nouveau l'alliance républicaine, et se retrouve alors subordonné à l'Union républicaine jusqu'en 1881[5].

Louis Blanc, bien qu'initialement opposé au concept d'une présidence[6], finit par accepter celle-ci. Reconduit dans cette fonction en 1881[7], il sera remplacé après sa mort par Désiré Barodet.

Sous la troisième législature (1881-1885)

Reconduit après les élections législatives de 1877 et de 1881, le groupe revendique environ 80 membres[8] et en compte au moins une cinquantaine sous la troisième législature (1881-1885)[alpha 1],[10].

Le groupe est initialement ouvert, ce qui permet à une partie de ses membres de continuer à appartenir simultanément à celui de l'Union républicaine. En 1881, cette possibilité de double adhésion est supprimée (par 22 voix contre 21) à la suite de la création d'un nouveau groupe situé entre l'Extrême gauche et l'Union républicaine, la Gauche radicale[11].

En mars 1885, un groupe équivalent est créé, sous le même nom, au Sénat. Victor Schœlcher en est le président et Georges Martin le secrétaire[12].

Sous la quatrième législature (1885-1889)

Après les élections législatives de 1885, le groupe de la chambre des députés est reconstitué, sous la forme d'un groupe ouvert, le 15 janvier 1886[13]. À la même époque, ses membres les plus à gauche se distinguent en fondant un nouveau groupe parlementaire de sensibilité ouvertement socialiste, le groupe ouvrier. Celui-ci devient de fait le groupe le plus à gauche, délégitimant ainsi le nom de l'Extrême gauche.

En 1888, l'Extrême gauche est confrontée à l'ampleur du phénomène boulangiste. Le 21 mars, une cinquantaine de membres du groupe publie une déclaration nettement anti-boulangiste[14]. Le mois suivant, le groupe exclut de ses rangs les membres du Comité de protestation nationale, comité qui constitue alors l'état-major boulangiste. Les six députés ainsi rejetés de l'Extrême gauche sont Chevillon, Duguyot, Laguerre, Laporte, Susini et Vergoin. Hugues[15], Gaussorgues, Théron et Turigny réagissent à cette exclusion en démissionnant du groupe[16].

Sous les cinquième et sixième législatures (1889-1898)

En mars 1892, le groupe est reconstitué sous le nom de « groupe républicain radical-socialiste »[17]. Il reprend son nom initial après les élections de 1893 et fusionne avec le groupe radical-socialiste en 1895.

Le groupe de l'Extrême gauche est l'ancêtre des différents groupes radicaux-socialistes ainsi que l'un des jalons historiques du Parti républicain, radical et radical-socialiste (PRRRS) fondé en 1901.

Membres

Notes et références

Notes

  1. En effet, 53 députés appartiennent à l'extrême gauche en décembre 1884[9].

Références

  1. La Presse, 12 juin 1876, p. 1.
  2. La Presse, 6 juillet 1876, p. 2.
  3. Le Rappel, 13 août 1876, p. 2.
  4. Le Rappel, 14 août 1876, p. 1-2.
  5. Paolo Pombeni, Introduction à l'histoire des partis politiques, Paris, Presses universitaires de France, , 439 p. (ISBN 2-13-044244-7 et 978-2-13-044244-8, OCLC 25861480, lire en ligne), p. 299
  6. Le Figaro, 18 août 1876, p. 2.
  7. Journal des débats, 2 novembre 1881, p. 1
  8. Le Rappel, 9 janvier 1884, p. 1.
  9. Le Temps, 11 décembre 1884, p. 1.
  10. Le Rappel, 3 novembre 1883, p. 2.
  11. Le Rappel, 18 décembre 1881, p. 1.
  12. Le Rappel, 2 mars 1885, p. 1.
  13. « Coulisses des chambres », Le Rappel, no 5791, , p. 1 (lire en ligne, consulté le ).
  14. Le Radical, 21 mars 1888, p. 1.
  15. Le XIXe siècle, 21 avril 1888, p. 2 et La Lanterne, 22 avril 1888, p. 1-2
  16. Le Radical, 23 avril 1888, p. 1-2.
  17. le Radical, 11 mars 1892, p. 2.
  18. Le Rappel, 20 octobre 1883, p. 1.
  19. Le Radical, 22 avril 1888, p. 1.
  20. Le Rappel, 22 septembre 1883, p. 1.
  21. Le Rappel, 8 décembre 1886, p. 1.
  22. Le Rappel, 1er octobre 1883, p. 1.

Liens externes

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