Guerre du Kippour
La guerre du Kippour (en hébreu : מלחמת יום הכיפורים) ou guerre du Ramadan[2] (en arabe حرب رمضان) ou guerre d'Octobre (en arabe حرب تشرين) ou guerre israélo-arabe de 1973 opposa, du au , Israël à coalition militaire arabe menée par l'Égypte et la Syrie.
Pour les articles homonymes, voir Kippour.
Date | du au |
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Lieu | Rives du canal de Suez, plateau du Golan, péninsule du Sinaï et régions avoisinantes. |
Issue |
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Israël Soutien : États-Unis | Égypte Syrie Contingents militaires étrangers : Maroc Soutien : Union soviétique République démocratique allemande Pakistan |
Golda Meir Moshe Dayan David Elazar Israel Tal Shmuel Gonen (en) Yitzhak Hofi Binyamin Peled Haim Bar-Lev Albert Mandler † Ariel Sharon | Anouar el-Sadate Hafez el-Assad Ahmad Ismail Ali Mustafa Tlass Saad El Shazly Yusuf Shakkour Abdel Ghani el-Gammasy Ali Aslan Omar Abrash † |
415 000 hommes 3350 chars 740 avions[1] | 437 000 hommes 3450 chars 870 avions |
2 521 à ~ 7 570 tués 7 251 blessés 1 063 chars détruits 102 avions abattus | 20 000 tués 35 000 blessés 2 300 chars détruits 555 avions abattus 18 bateaux |
Batailles
Le jour du jeûne de Yom Kippour, férié en Israël, qui coïncidait en 1973 avec la période du ramadan, les Égyptiens et les Syriens attaquèrent par surprise simultanément dans la péninsule du Sinaï et sur le plateau du Golan, territoires respectivement égyptien et syrien occupés par Israël depuis la guerre des Six Jours.
Profitant d'une supériorité numérique écrasante, les armées égyptiennes et syriennes avancèrent durant 24 à 48 heures, le temps qu'Israël achemine des renforts. Même si les attaquants bénéficiaient toujours d'une large supériorité numérique, l'armée israélienne put alors les arrêter. En une semaine, Israël retrouva son potentiel militaire et lança des contre-offensives qui lui permirent de pénétrer profondément en Syrie et de traverser le canal de Suez pour progresser au sud et à l'ouest en Égypte lorsque le Conseil de sécurité des Nations unies, en coopération avec les deux superpuissances soviétique et américaine, par l'intermédiaire du Royaume-Uni, demanda un cessez-le-feu pour laisser place aux négociations. Alors que les armées israélienne et égyptienne se regroupaient, les combats reprirent sur les fronts syriens et égyptiens après l'heure du cessez-le-feu sur initiative israélienne. Sans en référer à l'état-major[réf. nécessaire], les officiers de terrain israéliens se servirent de cette rupture du cessez-le-feu pour encercler l'adversaire.
L'incapacité des services secrets israéliens à anticiper l'attaque imminente suscita un séisme politique majeur, et notamment la démission de la Première ministre Golda Meir. Un document déclassifié publié en 2012 après la Commission Agranat montra qu'un agent, Ashraf Marwan, avait prévenu le directeur du Mossad, Zvi Zamir, le , de l'imminence « d’un avertissement au sujet de la déclaration de guerre » mais que l'information n'était pas immédiatement remontée au vice-Premier ministre Yigal Allon[3],[4],[5].
La réussite militaire initiale égyptienne, la destruction de la ligne Bar-Lev et la profonde remise en question de la théorie de sécurité israélienne débouchèrent sur l'ouverture des négociations de paix qui aboutirent à la normalisation des relations entre Israël et l'Égypte. Celles-ci menèrent aux accords de Camp David en 1978. Contre l'engagement de ne plus attaquer Israël, encore respecté de nos jours, l'Égypte récupéra la péninsule du Sinaï, occupée après la guerre des Six jours de 1967. La frontière entre l'Égypte et Israël fut rouverte et les populations des deux pays peuvent maintenant voyager chez leur ancien ennemi. Pour le monde en général, la principale conséquence de cette guerre fut le choc pétrolier de 1973, quand l'OPEP décida de l'augmentation de 70 % du prix du baril de pétrole ainsi que de la réduction de sa production.
Contexte
Situation des belligérants avant la guerre
Plusieurs guerres avaient déjà eu lieu entre Israël et les pays arabes du Moyen-Orient depuis le plan de partage de la Palestine et la Déclaration d'Indépendance de l'État hébreu par David Ben Gourion en 1948. À l'issue de la guerre de 1967, Israël avait conquis des territoires importants à ses voisins et construit des fortifications sur le Golan et dans le Sinaï afin de se protéger militairement des attaques ponctuelles qui survenaient sur les nouvelles frontières : les années 1967-1970 constituent en effet une période de guerre larvée entre l'État juif et ses voisins égyptien et syrien. Notamment, 500 millions de dollars avaient été dépensés en 1971 dans la construction de la ligne Bar-Lev le long de la rive orientale du canal de Suez.
Cependant, après la mort du président égyptien Gamal Abdel Nasser en , son successeur Anouar el-Sadate, bien que plus modéré, décida de restaurer la souveraineté de l'Égypte sur l'ensemble de son territoire. À la suite de la proposition de l'intermédiaire onusien Gunnar Jarring, Sadate se déclara « prêt à négocier un traité de paix avec Israël » contre un engagement israélien à appliquer la résolution 242 (1967) des Nations unies. Mais les dirigeants israéliens, méfiants, firent prévaloir la sécurité militaire que leur assurait le contrôle du Sinaï. Aussi, certains analystes[Lesquels ?] expliquèrent qu'après 3 ans de pouvoir, la situation économique désastreuse de l'Égypte obligeait Sadate à prendre des mesures impopulaires et qu'une opération militaire victorieuse contre Israël, même mineure, s'imposait donc comme une bonne option pour lui rendre une certaine popularité auprès de son peuple miné par l'humiliation de 1967.
De son côté, Hafez el-Assad avait renforcé prioritairement son armée en vue de rendre à la Syrie son rang de puissance militaire au sein des pays arabes. Il se préparait à reprendre le Golan par la force puis obtenir de plus grandes concessions israéliennes plus tard en appuyant les nouvelles revendications palestiniennes formulées par la jeune OLP de Yasser Arafat, le leader palestinien.
Par ailleurs, le roi Hussein de Jordanie craignait d'entrer dans un éventuel nouveau conflit et surtout de nouvelles pertes pour son royaume (la Cisjordanie avait été perdue en 1967), d'autant que la crise du Septembre noir de 1970 avait créé un froid entre Hussein et les positions syriennes et palestiniennes. L'Irak refusa également de combattre au côté de la Syrie avec laquelle les relations étaient tendues. Les armées libanaises quant à elles étaient trop faibles pour prendre part aux combats.
Au cours des mois précédant le déclenchement de la guerre, Sadate tenta une offensive diplomatique pour obtenir le soutien des pays de la Ligue arabe, du Mouvement des non-alignés et de l'Organisation de l'unité africaine.
L'escalade vers la guerre
À partir de 1972, Sadate annonce ouvertement que son pays est prêt à partir en guerre contre Israël, quitte à « sacrifier un million de soldats »[6]. Son armée est renforcée par l'apport soviétique de Mig-21, missiles sol-air SA-6, de tanks T-62, de roquettes antichars RPG-7 et de missiles guidés anti-tanks AT-3 Sagger. Sur le plan stratégique, les généraux vaincus lors de la déroute de 1967 sont remplacés.
Les leçons de la précédente guerre sur le plan de l'armement amenèrent Sadate à menacer l'URSS de se tourner vers les Américains si l'Égypte ne recevait pas d'armes à la pointe de la technologie. Les Soviétiques sont donc contraints d'équiper l'Égypte pour la rendre capable de concurrencer Israël, elle-même équipée par l'industrie militaire américaine.
L'Union soviétique cherche pourtant à éviter une nouvelle confrontation israélo-arabe pour ne pas se trouver en conflit ouvert avec les États-Unis, alors que la Détente est enclenchée et qu'ils ont peu d'intérêt à voir une déstabilisation du Proche-Orient.
Les deux super-puissances se rencontrent à Oslo pour trouver les moyens de maintenir le statu quo entre les deux États. En apprenant cette information, les Égyptiens, qui se préparent à passer le Canal de Suez, décident d'expulser les Russes. En , 20 000 conseillers militaires soviétiques sont renvoyés d'Égypte et la politique extérieure égyptienne devient plus favorable aux Américains. Les Soviétiques estiment que les chances d'une victoire égyptienne sont faibles et qu'un assaut contre les fortifications de Suez pourrait être coûteux en pertes humaines. À plusieurs reprises, le président Brejnev tente d'éviter l'affrontement en recommandant à Israël de revenir aux frontières d'avant-1967.
Mais l'Égypte continue à menacer Israël et Sadate se dit prêt, le , à entrer en guerre même sans le soutien de l'URSS. Des exercices militaires à grande échelle y compris chez ses voisins arabes maintiennent le niveau d'alerte maximum en Israël. Les commandements des armées arabes ont secrètement coordonné leur plan d'attaque. Le nom de code de l'opération conjointe entre la Syrie et l'Égypte fut baptisée Opération Badr, qui signifie Croissant en arabe (en référence à la bataille de Badr, l'une des premières victoires militaires de Mahomet contre les habitants de La Mecque pourtant supérieurs en nombre).
Attaque surprise
Les services secrets israéliens, dans leur évaluation des risques d'une attaque, s'appuyaient sur plusieurs hypothèses de départ, dites la « Conception » :
- la Syrie n'aurait pas pu entrer en guerre sans l'Égypte ;
- un informateur égyptien, connu sous le nom de « L'Ange » ou « La Source », qui se trouve être le propre gendre de Nasser, Ashraf Marwan, précisa que l'Égypte souhaitait reconquérir l'ensemble du Sinaï mais que l'armée égyptienne attendait l'apport soviétique de chasseurs-bombardiers pour neutraliser les forces aériennes israéliennes et de missiles Scud dirigés vers les villes israéliennes pour dissuader d'éventuelles attaques contre les infrastructures égyptiennes[5] ;
- les chasseurs-bombardiers devaient arriver à la fin du mois d'août et nécessiter 4 mois de formation des militaires égyptiens. De plus, les observateurs signalaient que l'expulsion des conseillers soviétiques par les Égyptiens devait affaiblir l'armée égyptienne.
Ce sont ces hypothèses qui ont prévalu contre toutes les alertes signalées aux services israéliens. En et , les exercices militaires effectués par les troupes égyptiennes à la frontière avaient mobilisé l'armée israélienne pour un coût de 10 millions de dollars par deux fois, jetant le discrédit sur la thèse d'une attaque imminente, et donnant plus de poids à la « Conception » du major-général Elie Zeira notamment, chef du renseignement militaire (Aman), au point qu'en septembre, le ministère de la défense étudie l'opportunité de réduire le temps de conscription[7].
Tout au long de la semaine précédant le Yom Kippour, les exercices égyptiens se sont multipliés près du canal de Suez et des mouvements ont été observés à la frontière syrienne mais le renseignement israélien ne jugea pas plausible une attaque sans l'armement soviétique.
Le roi Hussein de Jordanie refusa de joindre ses troupes aux troupes syriennes et égyptiennes- Il avait pourtant très probablement (d'après Rabinovich) été informé de l'attaque à venir en des termes imprécis lors de la préparation entre les dirigeants arabes. Dans la nuit du , le roi Hussein prit secrètement l'avion pour prévenir le Premier ministre israélien Golda Meir à Tel Aviv de l'imminence d'une attaque syrienne[8].
De façon assez surprenante, l'avertissement ne fut pas pris en compte. D'après les rapports israéliens, malgré des dizaines de signes d’alerte, le Mossad continuait à estimer improbable l'option d'une guerre déclenchée par les pays arabes. Ce fut la rencontre du chef du Mossad, Zvi Zamir, avec « Babel » en Europe qui finit par faire réagir le haut commandement des Forces de défense d'Israël à quelques heures de l'attaque. Des réservistes furent partiellement mobilisés. La mobilisation fut facilitée[réf. nécessaire] par le fait que les soldats étaient généralement à la synagogue ou chez eux pour le jour du Yom Kippour.
Contrairement aux guerres précédentes, le facteur surprise a cette fois-ci été utilisé contre les Israéliens.
De plus, les Israéliens n'ont pas compris à quel point l'armée égyptienne avait changé :
- elle est mieux équipée et mieux entraînée. En effet, pour parer aux atouts israéliens que sont l'arme blindée et l'aviation, l'armée égyptienne s'est massivement équipée de missiles antichar et de missiles sol-air ;
- les généraux incompétents ont été limogés, et les conflits internes ont été réglés, procurant un commandement uni et cohérent ;
- les Israéliens pensaient que les Égyptiens chercheraient à détruire Israël, ce qui impliquait que les chars égyptiens traversent le Sinaï rapidement, là où ils pouvaient être facilement neutralisés. Mais les Égyptiens ont adopté une autre tactique : attaquer l'armée israélienne, mais en avançant seulement à l'abri derrière leur parapluie défensif anti-char et anti-aérien. C'est donc toute la doctrine militaire israélienne qui n'était plus valable, et dans ces conditions, les contre-attaques israéliennes devenaient très difficiles ;
- les services secrets égyptiens ont fait un excellent travail de désinformation. Les Égyptiens ont continuellement noyé les observateurs militaires de fausses informations sur des problèmes imaginaires de maintenance ou de manque de personnel formé sur les équipements avancés. De plus, certains avancent que l'agent israélien Ashraf Marwan était en fait un agent double, trompant ainsi les Israéliens sur les intentions réelles des Égyptiens.
Absence d'attaque préventive israélienne
La stratégie israélienne prévoyait une attaque préventive si la guerre était imminente. Les services secrets devaient donner un préavis de 48 heures.
Pourtant, Golda Meir, Moshe Dayan, ministre de la défense et le général David Elazar s'étaient rencontrés le matin du Yom Kippour, 6 heures avant l'attaque. Dayan doutait toujours de l'imminence de la guerre tandis qu'Elazar pensait à une attaque planifiée en Syrie contre ses forces aériennes, puis ses missiles et ses forces au sol.
Mais l'argument qui joua fut le risque qu'Israël puisse avoir besoin d'aide par la suite. Or une aide européenne allait être bloquée par des menaces arabes d'embargo sur le pétrole comme cela s'était déjà produit concernant des munitions. Israël ne pouvait donc compter que sur l'aide américaine qui était conditionnée par la première attaque. Si Israël avait attaqué en premier (même de façon préventive), aucune aide ne serait venue des États-Unis. Cela fut confirmé par Henry Kissinger (ministre américain des affaires étrangères) plus tard.
Déroulement de la guerre
Dans le Sinaï
Le à 14 h, les forces armées égyptiennes déclenchèrent la guerre, en lançant leur aviation, commandée par Hosni Moubarak, dans des sorties en profondeur pour frapper les postes de commandement, des batteries, des stations de radars, et trois aéroports israéliens. Durant ces bombardements, les Égyptiens perdirent onze avions, dont celui piloté par le frère du président égyptien, Atif Sadate.
Simultanément, un intense pilonnage d'artillerie et des infiltrations de commandos antichars Israeliens préparaient la traversée du canal de Suez, qui s'ensuivit rapidement, entraînant chez les Egyptiens la perte de 280[9] soldats sur les 8 000 qui constituaient la première vague.
Ayant anticipé une rapide contre-attaque de l'armée israélienne, les Égyptiens avaient équipé leurs soldats d'armes capables de détruire des tanks dont les missiles antichar AT-3 Sagger. Un soldat égyptien sur trois était armé contre les blindés. Les positions égyptiennes sur le canal de Suez avaient été surélevées de façon à obtenir un avantage certain pour tirer sur les tanks israéliens.
Contrairement à 1967, les unités égyptiennes choisirent de ne pas avancer au-delà de la couverture qu'assuraient leurs batteries de missiles sol-air qu'ils avaient installées pour protéger les lignes de cessez-le-feu de 1967. Les forces aériennes sur lesquelles Israël avait misé l'essentiel de ses investissements militaires ne pouvaient ainsi rien tenter contre elles.
Quatre mauvaises surprises pour les Israéliens
- Avant la guerre, la majorité des experts occidentaux et israéliens s'accordaient à estimer que la seule possibilité pour les Égyptiens de se rendre maître de la ligne Bar-Lev serait d'utiliser des armes nucléaires tactiques. Un des points forts du dispositif israélien consistait à couvrir le canal de Suez de napalm pour brûler toute force armée ayant l'audace de tenter la traversée. Mais avant le déclenchement des opérations, les forces du génie égyptien sabotèrent ce dispositif.
- L'infanterie égyptienne traversa le canal à bord de bateaux pneumatiques propulsés simplement à la rame, sous la protection d'un tir de barrage de l'artillerie égyptienne qui pilonnait les positions israéliennes de la ligne Bar-Lev, obligeant ainsi les unités à se terrer dans les bunkers de protection.
- Les forts de la ligne Bar-Lev cédèrent tous aux assauts égyptiens, sauf un, le plus au nord.
- Outre les positions statiques, la ligne Bar-Lev était constituée de concentrations de blindés, destinés, selon la stratégie israélienne en cas d'attaque, à repousser l'infanterie ennemie, pour laisser au gros des armées blindées israéliennes le temps de se mobiliser, ce qui nécessitait environ 48 heures. Les Israéliens eurent alors une deuxième surprise de taille : toutes les attaques de blindés furent mises en échec par l'infanterie égyptienne, grâce à l'utilisation massive de missiles Malyutka (code OTAN AT-3 Sagger). Facilement transportable dans une petite valise, ce missile était mis en action par un seul soldat ; guidé par fil, il pouvait détruire un char jusqu'à 3 000 mètres. Avant cette guerre, jamais dans l'histoire militaire des forces d'infanterie n'avaient réussi à mettre en déroute des blindés.
- La troisième mauvaise surprise pour les Israéliens, fut l'échec initial de leur aviation. En effet, la stratégie israélienne était basée sur leur indéniable supériorité aérienne. Or les Égyptiens utilisèrent massivement les missiles antiaériens SA-6 Gainful, équipés d'un système de radar très sophistiqué. Les pertes israéliennes furent telles que l'état-major israélien interdit à ses avions de s'approcher à moins de 5 km du canal de Suez.
- La quatrième surprise fut la capacité des Égyptiens à construire une vingtaine de ponts sur le canal alors que les services de renseignement militaire israéliens (AMAN) avaient estimé que cela était impossible pour les forces du génie égyptien.
L'armée égyptienne en position de force
Le au soir, les Égyptiens avaient réussi à faire traverser le canal à 60 000 hommes et cinq divisions mécanisées. La 18e, la 12e, et la 6e constituaient la deuxième armée, déployée sur la rive- est du canal entre les points faisant face à Port Saïd et Ismaïlia. Les 7e et la 19e divisions, face à une ligne joignant Ismaïlia à Suez, constituaient la troisième armée.
L'armée égyptienne adopta alors une position défensive, tactique plus avantageuse dans le désert, en restant dans une bande de 15 km le long de la rive est du canal. Elle était ainsi protégée par les missiles antiaériens placés à l'ouest du canal, qui empêchaient l'aviation israélienne d'intervenir efficacement, et aux blindés de manœuvrer librement. Les différentes attaques israéliennes furent toutes repoussées et les Israéliens se virent infliger des pertes importantes. Shmuel Gonen (en) (qui avait remplacé Ariel Sharon en tant que commandant du front sud seulement trois mois auparavant) ordonna une contre-attaque à Hizayon, alors que les chars israéliens y étaient particulièrement exposés aux tirs de missiles Sagger. Le désastre qui en résulta, suivi par la contre-attaque nocturne des Égyptiens, ne fut stoppé que par la division d'Ariel Sharon qui imposa une accalmie relative. Les deux armées se postèrent alors dans une position défensive.
Le haut commandement israélien était pris au dépourvu par les capacités opérationnelles inattendues d'un ennemi égyptien qui avait été rapidement défait à peine six ans auparavant lors de la guerre des Six Jours. Mais ce conflit de 1967 avait poussé les généraux égyptiens à repenser différemment, et à révolutionner la stratégie militaire en inaugurant la guerre des missiles. Elazar effectua alors un remaniement dans le commandement des troupes israéliennes, en remplaçant, à la tête, Gonen par Bar-Lev, sorti de sa retraite. Moshe Dayan, ministre de la défense, fit des rapports alarmants sur l'état des opérations, alimentant, avec ses collègues, les craintes d'une « troisième destruction du Temple ». Les Israéliens étaient en outre particulièrement sensibles à deux points : la durée de la guerre, et son coût en hommes.
L'erreur de Sadate
Après plusieurs jours d'attente, Sadate voulut reprendre l'offensive dès le afin d'aider les Syriens en difficulté. Une crise de commandement l'opposa alors à Saad el-Shazly, chef d'état major. Ce dernier estimait qu'une sortie des blindés hors de la protection du parapluie de missiles sol-air égyptien, mettrait les chars en danger (en effet, une brigade blindée égyptienne fut anéantie en menant une attaque à l'est avant la tombée de la nuit). Tous les commandants des deuxième et troisième armées égyptiennes étaient hostiles au développement d'une attaque en profondeur.
Néanmoins, Sadate, obstiné, lança le une attaque concentrée. Celle-ci se révéla un échec cuisant. 400 chars égyptiens attaquèrent 800 chars israéliens en position défensive, soutenus par la force aérienne. Le résultat fut le tournant de la guerre du Kippour. Les Israéliens malmenés depuis le réussirent finalement à reprendre l'initiative : le , sur 400 chars égyptiens, 250 furent anéantis. En outre, pour développer cette attaque, Sadate utilisa les 4e et 21e divisions blindées, vidant ainsi l'ouest du canal de Suez de réserves stratégiques, ce qui déséquilibra le dispositif général égyptien. Les généraux israéliens exploitèrent ce point faible en traversant le canal à leur tour, et en commençant à liquider au sol le redoutable dispositif égyptien de missiles SA-6 qui paralysait jusqu'alors quasi totalement l'aviation israélienne, et lui avait infligé, entre le 6 et le , les plus grandes pertes de son histoire.
Le retournement de la guerre
À partir du , les Israéliens changèrent de tactique, et attaquèrent en utilisant cette fois leur infanterie qui s'infiltra à pied jusqu'aux batteries de missiles sol-air et antichars.
Une division commandée par le major général Ariel Sharon attaqua la ligne égyptienne à son point le plus faible, à la limite entre les positions défendues par la deuxième armée égyptienne au nord, et la troisième armée au sud. Elle ouvrit une brèche et atteignit le canal de Suez. Une petite troupe passa le canal grâce à des canots pneumatiques, et constitua une tête de pont pour permettre le passage d'un grand nombre d'hommes. Une fois les missiles antiaériens et antichars neutralisés grâce à ces infiltrations, l'infanterie put à nouveau compter sur le support de l'aviation et des blindés.
Au sud, la division de Avraham « Bren » Adan put mettre en place un pont flottant dans la nuit du 16 au , et le traverser afin d'encercler la troisième armée égyptienne.
Sans ordres, Sharon attaqua Ismaïlia avec sa division blindée pour tenter de couper le ravitaillement de la deuxième armée égyptienne. Il y eut alors une crise de commandement, les supérieurs de Sharon lui reprochant ses insubordinations répétées. Sharon court-circuita la voie hiérarchique et obtint l'autorisation directement de Moshé Dayan. Cette bataille d'Ismaïlia dura quatre jours. Le terrain était totalement différent du Sinaï désertique, car il s'agissait de domaines agricoles plantés de manguiers, configuration plus favorable à une défense d'infanterie. La division blindée 142 de Sharon, renforcée de deux brigades blindées et une brigade de parachutistes, fut mise en échec par la 182e brigade de parachutistes épaulée par les 73e et 122e bataillons foudre (forces spéciales), et aidée par l'artillerie d'Abou Ghazala de la deuxième armée.
En même temps, au sud les batteries de missiles, côté est, furent en partie détruites.
Durant cette période décisive, le ravitaillement des armées belligérantes par l'URSS et les États-Unis fut intense.
Avant que la guerre ne s'arrête, une division israélienne était arrivée à 101 kilomètres de la capitale égyptienne Le Caire. Il faut cependant relativiser ce chiffre car la ligne de front au début du conflit était à 110 km du Caire.
Sur le plateau du Golan
Sur le plateau du Golan en altitude, les Syriens attaquèrent les Israéliens. Ils envoyèrent cinq divisions et 188 batteries d'artillerie contre les deux brigades et les onze batteries de défense des Israéliens. Au moment de l'assaut, seulement 180 chars d'assaut firent face aux quelque 1 400 chars syriens équipés pour les combats nocturnes. Des commandos syriens héliportés prirent immédiatement le plus important bastion de surveillance israélien sur le mont Hermon.
Les affrontements sur le plateau du Golan devinrent très vite la priorité des Forces de défense d'Israël qui y envoyèrent le plus rapidement possible des réservistes mobilisés, car la chute du Golan aurait permis aux Syriens de s'infiltrer facilement plus en avant dans le territoire israélien. Les réservistes furent envoyés directement dans des chars sur le front sans attendre même le calibrage des canons.
Comme les Égyptiens dans le Sinaï, les Syriens utilisèrent les armes antichars fournies par les Soviétiques et restèrent sous la protection de leurs batteries de missiles SAM. Toutefois, les tirs contre les chars furent moins efficaces sur ce terrain que dans le désert.
Contrairement aux prévisions syriennes qui avaient estimé que les réservistes israéliens n'arriveraient sur le front qu'au bout d'une journée, Israël parvient à mobiliser ses unités et à les envoyer au front après seulement 15 heures de combat.
À l'issue du premier jour, les Syriens obtinrent une victoire. Ils furent sur le point de contrôler l'importante jonction de Nafekh (qui était aussi le quartier général israélien du plateau).
Puis, pendant quatre jours, la septième brigade israélienne commandée par Yanush Ben Gal résista pour conserver le flanc Nord du quartier général de Nafekh. Au Sud, la brigade « Barak », non protégée par des obstacles naturels, essuya de lourdes pertes. Le commandant colonel Shoham mourut dans les premiers jours de combat alors que les Syriens tentaient désespérément d'avancer pour atteindre le lac de Tibériade.
Le vent tourna à partir du , à l'arrivée des nouveaux réservistes israéliens qui parvinrent à bloquer l'offensive syrienne puis, le , à la repousser au-delà de la Purple Line (en), la frontière d'avant la guerre.
Rabinovich raconte que le débat fut alors intense sur la question de continuer la contre-attaque à l'intérieur des frontières syriennes. La défaite de Shmuel Gonen dans le Sinaï s'était passée deux jours plus tôt et marquait encore les esprits. Certains considéraient sage de rester sur la défensive sur le plateau du Golan plutôt que de s'engager sur les plaines syriennes, mais quatre jours auraient été nécessaires pour envoyer les troupes du Golan dans le Sinaï et le bilan global israélien était alors négatif : perte de terrain dans le Sinaï et statu quo dans le nord. La décision fut donc prise de passer la Purple Line dès le .
Du 11 au , la poussée israélienne les amena à 40 km des banlieues de Damas qui étaient à la portée de l'artillerie. Le roi Hussein de Jordanie décida alors que la situation exigeait l'intervention de son armée. Certaines sources rapportent ainsi qu'il fit le nécessaire pour envoyer des troupes jordaniennes en soutien aux Syriens tout en évitant d'être attaqué par les Israéliens à ses propres frontières. Ces derniers ne souhaitaient pas non plus ouvrir un troisième front. Par ailleurs, l'Irak expédia quelque 30 000 hommes, 500 chars d'assaut et 700 APC. Les efforts combinés des armées arabes empêchèrent Israël d'avancer davantage.
Le , les brigades israéliennes récupérèrent la position du mont Hermon malgré de lourdes pertes dues aux francs-tireurs syriens. Les pertes des attaques contre cette position furent lourdes mais le sommet du mont fut occupé par une brigade parachutiste israélienne à la suite d'une brèche percée par un bulldozer D9 de l'infanterie.
En mer
La bataille navale de Lattaquié entre Syriens et Israéliens se déroula le , second jour du conflit. Ce fut une victoire israélienne retentissante qui démontra notamment l'efficacité des navires militaires équipés des moyens d'auto-défense ECM (en). La marine israélienne devait acquérir définitivement la supériorité navale en Méditerranée face à ses voisins avec une seconde victoire, remportée le à Damiette sur la marine égyptienne.
Par ailleurs, tant la marine israélienne que son homologue égyptienne montèrent plusieurs attaques et opérations commando (menées par des nageurs de combat) contre les bases navales adverses.
À l'issue du conflit, le bilan de la guerre navale fut très favorable à Israël qui s'imposa très nettement face à ses adversaires, coulant ou endommageant gravement quinze bâtiments pour la perte de deux patrouilleurs légers (en mer Rouge, face aux Égyptiens).
Contribution d'autres pays
Les apports des autres pays du front anti-israélien sont peu précis.
L'Arabie saoudite et le Koweït ont surtout fourni une aide financière et, de façon symbolique, quelques militaires sur le front. Le Maroc a envoyé 6 000 soldats de ses forces armées royales côté syrien. Le Pakistan a envoyé seize pilotes et des troupes palestiniennes se joignirent aussi aux armées arabes.
La Libye aurait également prêté plusieurs chasseurs Mirage achetés quelque temps plus tôt à la France, version contestée par les Français.[10].
Concernant l'Algérie, sa force était composée d'un escadron de bombardiers tactiques Su-7 et d'un escadron de chasse MiG-21 qui arrivèrent aux environs du canal entre le 9 et le . Une brigade blindée de 150 chars arriva plus tard, ses éléments avancés le , le gros de la brigade le . Après la guerre, au début du mois de novembre, le gouvernement algérien en collaboration avec l'URSS, finança les réarmements égyptien et syrien pour une somme de 200 millions de dollars[11].
La Tunisie a envoyé un contingent de 1 200 soldats auprès des forces égyptiennes dans le delta du Nil. Le Soudan a envoyé 3 500 soldats. Des pilotes de la Corée du Nord et de l'Allemagne de l'Est ont participé également au conflit[12]. La Corée du Nord a perdu au moins deux MiG-21, dont un par un tir ami égyptien (les Israéliens, pour leur part, ignoraient la nationalité des avions ennemis)[13]. La radio ougandaise a fait également mention de combattants ougandais.
Les États-Unis ont organisé l'opération Nickel Grass qui a permis aux Israéliens de se réapprovisionner après de fortes pertes dans le Sinaï.
Cessez-le-feu et lendemain de guerre
Le Conseil de sécurité des Nations unies adopte le la Résolution 338 (1973), négociée par les États-Unis et l'Union soviétique, qui réaffirme la validité de la résolution 242 (1967), adoptée pendant la guerre des Six Jours et appelle toutes les parties (l'Égypte, la Syrie, Israël, la Jordanie) à un cessez-le-feu immédiat et à des négociations en vue « d'instaurer une paix juste et durable au Moyen-Orient ». Le cessez-le-feu devient effectif douze heures plus tard à 19 h sur le terrain, à la tombée de la nuit.
Situation de la troisième armée égyptienne encerclée
À cet instant, les forces israéliennes étaient à quelques centaines de mètres de la route du Caire. Elazar et Dayan s'accordèrent pour prendre la route qui part vers le sud et encerclèrent ainsi la troisième armée égyptienne à l'ouest du canal de Suez. Au matin, les vols de reconnaissance soviétiques observèrent l'avancée que l'armée israélienne avait effectuée pendant la nuit et l'URSS accusa Israël de non-respect du cessez-le-feu. Surtout, cette situation offrit aux États-Unis une opportunité stratégique : obtenir de l'Égypte qu'elle sorte définitivement de l'influence soviétique en échange de la troisième armée qui était encerclée sans ravitaillement par les troupes israéliennes cependant beaucoup moins nombreuses.
Menace nucléaire soviético-américaine
Brejnev envoya une lettre à Nixon dans la nuit du 23 au afin qu'Américains et Soviétiques assurassent le respect du cessez-le-feu sur le terrain. Il menaça même les États-Unis d'intervenir aux côtés de l'Égypte s'ils n'agissaient pas dans ce sens.
Nixon, affaibli par le scandale du Watergate, ne fut pas consulté par ses conseillers qui prirent des mesures d'apaisement pour mettre un terme à la crise avec l'URSS.
Nikolaï Podgorny confia plus tard qu'il avait été surpris par la peur des Américains. Les Soviétiques n'auraient probablement pas déclenché la Troisième Guerre mondiale à cause de cette guerre au Proche-Orient.
La réponse des États-Unis fut de baisser le niveau d'alerte du DEFCON et de suggérer à Sadate d'abandonner sa demande d'assistance aux Soviétiques, ce qu'il accepta le lendemain matin.
Les négociations aboutirent à un cessez-le-feu ratifié par l’ONU le .
Accalmie sur le front nord
Sur le front Nord, les Syriens avaient planifié une contre-attaque massive pour le . Les cinq bataillons syriens furent aidés par deux bataillons irakiens et quelques troupes des autres pays arabes dont la Jordanie. Les Soviétiques avaient remplacé tous les tanks perdus par les Syriens dans les premières semaines de combat.
Toutefois, la veille de l'attaque prévue, les Nations unies imposèrent le cessez-le-feu qui avait déjà été accepté par l'Égypte et Israël sur le front sud. Hafez el-Assad décida d'abandonner l'offensive et accepta le cessez-le-feu le . L'Irak rappela ses troupes.
Négociations d'après-guerre
Les combats organisés prirent fin sur tous les fronts aux alentours du . Cela n'empêcha pas des tirs sporadiques ni ne dissipa les tensions militaires liées à la troisième armée égyptienne toujours prisonnière et isolée sans ravitaillement.
Israël reçut la menace de Kissinger de soutenir un retrait auprès de l'ONU, mais une proposition de Sadate auprès des États-Unis de négocier directement avec Israël le ravitaillement du contingent encerclé aboutit plus vite au cessez-le-feu définitif.
Les discussions eurent lieu le entre les majors généraux Aharon Yariv (Israélien) et Muhammad al-Ghani al-Gamasy (Égyptien). En dépit des positions fortes affirmées par le 6e sommet des chefs d'État arabes tenu à Alger du 26 au , ils s'accordèrent sur l'échange des prisonniers de guerre et les checkpoints israéliens ; un accord de paix fut trouvé au sommet qui suivit à Genève.
Le , Israël signa un accord de retrait de la partie ouest du canal de Suez et retira ses troupes le .
Un va-et-vient diplomatique de Henry Kissinger aboutit à un accord de désengagement le , fondé sur l'échange de prisonniers, le retrait israélien jusqu'à la Purple Line (en) et l'établissement d'une zone tampon contrôlée par l'ONU. Une troupe d'observateurs des Nations unies fut aussi établie dans le Golan pour garantir la paix.
Conséquences à long terme de la guerre
Les discussions de paix qui se déroulèrent à la fin de la guerre du Kippour furent les premières menées directement entre des dirigeants arabes et israéliens.
Pour les Arabes (Égyptiens en particulier), le traumatisme de la défaite de la guerre des Six Jours fut guéri, et cela leur permit d'une certaine façon de négocier avec les Israéliens sur un pied d'égalité. Toutefois, si le plan arabe pendant la guerre avait commencé exactement comme prévu, il avait finalement abouti à démontrer qu'Israël ne pouvait pas être vaincu militairement. La conviction largement partagée fut alors que des négociations de paix pourraient permettre d'obtenir ce qui n'avait pas pu être gagné sur le terrain.
La population israélienne, quant à elle, avait été choquée par le début difficile de la guerre et le manque de vigilance de ses militaires trop sûrs d'eux.
En réaction au soutien américain à Israël, les pays arabes décidèrent, le , d'un embargo sur le pétrole à destination des États occidentaux. Cela conduisit au choc pétrolier de 1973.
Crise politique en Israël
En Israël, cette guerre a constitué un véritable choc. De nombreux mythes de la société israélienne se sont effondrés : invincibilité de l'armée, infaillibilité des services de renseignement. La population israélienne n'avait jamais connu jusqu'alors de crise morale aussi grave. Il fallut attendre le marasme du conflit libanais, l'Intifada puis l'assassinat du Premier ministre Yitzhak Rabin pour assister à une remise en cause d'une telle importance. L'image de marque d'Israël s'est en outre dégradée à travers le monde, renforçant un peu plus l'isolement diplomatique de l'État hébreu. Ses relations privilégiées avec l'allié américain ont connu de réels soubresauts.
Quatre mois après la fin de la guerre, des protestations de colère ont commencé à s'élever contre le gouvernement israélien et contre Dayan en particulier. Une enquête sur les événements des premiers jours de la guerre et ceux l'ayant précédée fut demandée : la commission Shimon Agranat.
Les résultats furent publiés le et désignèrent six personnes ayant des responsabilités dans les erreurs ayant fragilisé Israël.
- le général David Elazar fut poussé à la démission par rapport aux hypothèses erronées de la situation et la préparation de la guerre ;
- Eli Zeira du Renseignement et le député Aryeh Shalev furent également poussés à la démission ;
- les lieutenants-colonels Bandman et Gedelia quittèrent les services secrets ;
- le commandant du front sud, Shmuel Gonen, fut démis de ses fonctions dans l'Armée pour avoir mis des troupes dans une situation dangereuse ayant amené leur capture, après le rapport final de la commission, remis le .
Les responsabilités de Dayan et Meir ne furent pas reconnues, ce qui continua à mécontenter l'opinion publique israélienne qui réclamait leur démission (surtout celle de Moshe Dayan).
Finalement, Golda Meir démissionna le , entraînant la fin de son gouvernement. Meir avait auparavant refusé la démission de Dayan par deux fois. Yitzhak Rabin, qui avait été le conseiller de Elazar, prit la tête du nouveau gouvernement en .
Un conflit riche en enseignements militaires
La guerre du Kippour apparaît en définitive comme un conflit plus équilibré et plus disputé que l'image qui en a souvent été présentée. Le rapport des forces en présence s'est avéré moins déséquilibré que ce que les autorités arabes et israéliennes ont longtemps laissé entendre. L'impact réel de l'aide matérielle fournie par les deux grandes puissances à leurs alliés respectifs ne fut pas aussi décisif que ce que les Américains et les Soviétiques ont longtemps prétendu.
Cette guerre a constitué le premier conflit mécanisé de haute intensité depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Elle a démontré l'importance du renseignement pour contrer l'effet de surprise. Elle a permis de valider, de nuancer ou de rejeter certains concepts opérationnels. Elle a servi de banc d'essai à de nombreuses armes récentes qui n'avaient pas eu l'occasion de subir l'épreuve réelle du feu. Elle a démontré une nouvelle fois que le facteur humain jouait toujours un rôle essentiel dans la conduite de la bataille.
La haute technologie a eu un impact considérable sur le déroulement des combats. La notion de C3I s'est imposée comme une donnée fondamentale du combat moderne. L'efficacité des missiles, bien que réelle, a cependant été exagérée. Le char et l'avion ont démontré qu'ils restaient les vecteurs essentiels du combat mécanisé à condition de s'intégrer dans un environnement interarmes leur assurant soutien et protection. Si l'aviation militaire a joué un rôle important pendant le conflit, celle-ci n'a pas été aussi décisive qu'en . À l'inverse de la guerre des Six Jours, ce sont en effet les chars qui ont cette fois-ci ouvert la voie aux avions. La puissance et l'efficacité de l'arme aérienne ont donc été surestimées, comme peu de temps auparavant lors de la guerre du Viêt Nam. Une fois de plus, les événements ont démontré que la guerre se perdait ou se gagnait au sol. De manière plus globale, la nécessité d'une approche interarmée voire interalliée s'est imposée comme l'un des enjeux majeurs pour la conduite efficace d'un conflit d'envergure[réf. nécessaire].
Accords de Camp David
Le gouvernement Rabin, mis en difficulté par des scandales, fut obligé de provoquer des élections anticipées en 1977. Le parti du Likoud remporta alors ces élections et forma un gouvernement avec pour premier ministre Menahem Begin.
Sadate, qui était entré en guerre pour récupérer le Sinaï, était contrarié par le rythme lent des négociations de paix. En , il fit un pas inattendu en faisant un voyage officiel en Israël durant lequel il tient un discours historique devant la Knesset[15], devenant ainsi le premier leader arabe à reconnaître de facto l'existence d'Israël[16].
Ce geste eut l'effet d'accélérer le processus de paix. Le président américain Jimmy Carter invita alors ensemble Sadate et Begin à un sommet à Camp David pour négocier une paix définitive. Les discussions se déroulèrent du au et aboutirent au traité de paix israélo-égyptien de 1979. Israël retira ses troupes et ses implantations de toute la péninsule du Sinaï en échange de relations normales avec l'Égypte et d'une paix durable.
Beaucoup dans la communauté arabe furent scandalisés par ce traité de paix signé par l'Égypte avec Israël. L'Égypte fut exclue de la Ligue arabe. Deux ans plus tard, Sadate fut assassiné le alors qu'il assistait à un défilé commémorant le huitième anniversaire du début de la guerre. Ses assassins étaient des éléments de l'Armée qui désapprouvaient les négociations qu'il avait menées avec Israël.
Notes et références
- Rabinovich. The Yom Kippur War. p. 54.
- « Repères chronologiques », Vingtième Siècle : revue d'histoire, no 103 (spécial) : « Proche-Orient : foyers, frontières et fractures », , art. no 14, p. 197-201 (DOI 10.3917/ving.103.0197, lire en ligne [html], consulté le ), p. 200, col. gauche, § 80 : « - [:] Quatrième guerre entre Israël et ses voisins arabes (« guerre du Kippour » en Israël, « guerre du Ramadan » ou « guerre d'Octobre » dans le monde arabe) ».
- « Declassified documents reveal failures of Yom Kippur War », Ynet
- « Mossad's tip-off ahead of Yom Kippur War did not reach prime minister, newly released papers show », Times of Israël
- Marius Schattner et Frédérique Schillo, La guerre du Kippour n'aura pas lieu : Comment Israël s'est fait surprendre, Waterloo, Belgique, André Versaille éditeur, , 320 p. (ISBN 978-2-874-95188-6)
- (en) Benny Morris, Righteous victims : a history of the Zionist-Arab conflict (présentation en ligne)
- Martin van Creveld, The sword and the olive: a critical history of the Israeli defense force, PublicAffairs, 2002, p. 220
- (en) Will Lyman (Actor), Dai Richards (Director) et David Ash (Director), The 50 Years War - Israel & The Arabs, 1998, Pbs Home Video, ASIN: B00004TX2W
- Mémoires du général Saad Eddine shazli
- Roumania Ougartchinska, « Khalifa Haftar, seul contre Al-Qaïda », Vanity Fair no 15, , p. 172-179 et 242-244.
- (en) Saad El Shazly : The Crossing of the Suez, édition revue (revised ed.), American Mideast Research, 2003, p. 278 (ISBN 0-9604562-2-8).
- Le fanatique de l'aviation, no 447,
- « Israeli F-4s Actually Fought North Korean MiGs During the Yom Kippur War »
- « La guerre du Kippour (6-25 octobre 1973) : Les pertes subies », sur net4war.com
- « Discours historique du président Anouar el-Sadate devant la Knesset », sur Perspective Monde.
- Caroline Hayek, « Le jour où... Sadate s’est rendu en Israël », L'Orient-Le Jour, (lire en ligne).
Voir aussi
Bibliographie
- Marius Schattner et Frédérique Schillo, La Guerre du Kippour n'aura pas lieu : Comment Israël s'est fait surprendre, Bruxelles, André Versaille éditeur, , 320 p..
- Pierre Razoux, La guerre du Kippour d'octobre 1973, Paris, Economica, coll. « Campagnes et stratégies », , 393 p..
- Sur l'aspect naval du conflit
- magazine Guerres et conflit d'aujourd'hui, no 2 : Israël-Syrie-Égypte, 1984
- Pierre Razoux, la marine écartelée entre projection et dissuasion, magazine Raid, hors-série 24,
- Pierre Razoux, la marine israélienne d'hier à aujourd'hui, magazine Marines et Forces navales, numéro 105, octobre-
- Frédéric Stahl, la marine israélienne 1948-2006, magazine Navires et Histoire numéro 38, octobre-
- Mémoires du général Saad Eddine Chadli, « Guerre d'octobre 73 » tome 1.
- Sur les batailles de chars de combat sur le Golan (du point de vue israélien)
- OZ 77 Les hauteurs du courage, Avigdor Kahalani (en), Biblieurope, 2008, traduit de l'hébreu, (ISBN 978-2-84828-108-7). L'auteur, commandant du 77e bataillon blindé, de la 7e brigade évoque les combats au Nord du plateau
- Un article dans le magazine Guerres et Histoire, numéro 10, . Témoignage du lieutenant Zvika Gringold (en) de la 188e brigade relate les combats au Sud et au centre du plateau.
- Sur la guerre aérienne
- magazine Aero journal hors-série no 11, mai-, Les phantom israéliens au combat 1969-1982, plus de la moitié du numéro est consacré à la guerre du Kippour (auteur Shlomo Aloni, point de vue israélien)
- magazine Avions hors-série no 37, , La guerre du Kippour les combats aériens (auteur Shlomo Aloni, point de vue israélien)
- Sur les prisonniers de guerre
- Arieh Segev, Le prisonnier du Kippour, la fêlure d'un mythe, Ginkgo éditeur, 2010.
Œuvres littéraires inspirées ou traitant de la guerre du Kippour
- Walter Laqueur, La vraie guerre du Kippour, Éditions Calmann-Lévy, 1974, traduit de l'anglais, titre original Confrontation, 1973
- Robert Chavanac, Kippour au canal, Fleuve noir, coll. « Feu »,
- Henry Kissinger, Sortie de crise : Kippour 1973 – Vietnam 1975, Fayard,
- Jacques Derogy, Jean-Noël Gurgand, Israël, la mort en face, Éditions Robert Laffont, 1974
Liens externes
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