Jeffrey Epstein

Jeffrey Edward Epstein [ˈd͡ʒɛfɹi ˈɛpstiːn][1], né le à Brooklyn et mort le à Manhattan, est un homme d’affaires et criminel sexuel américain.

Pour les articles homonymes, voir Epstein.

Jeffrey Epstein
Photo d'identité judiciaire de Jeffrey Epstein en 2013.
Biographie
Naissance
Décès
Sépulture
Nom de naissance
Jeffrey Edward Epstein
Nationalité
Domiciles
Île Little Saint James, Palm Beach, Herbert N. Straus House (en)
Formation
Activités
Père
Seymour G. Epstein (d)
Mère
Pauline Epstein (d)
Fratrie
Mark Epstein (d)
Autres informations
A travaillé pour
Bear Stearns, Jeffrey Epstein VI Foundation (en)
Propriétaire de
Jeffrey Epstein's "little black book" (d)
Personne liée
Ghislaine Maxwell (maquerelle (d) et maîtresse)
Condamné pour
Abus sexuel sur mineur, solicitation (en) ()
Lieu de détention
Signature

Après une brève carrière d'enseignant de mathématiques et physique dans une école privée, il fait carrière dans la finance au sein de la banque Bear Stearns puis à son compte, faisant rapidement fortune. Il devient ensuite l'ami et le protégé du magnat du textile Les Wexner, qui lui aurait confié la gestion de sa fortune et dont il reste proche des années 1980 à 2007.

Il travaille ensuite pour Steven Hoffenberg (en) et son agence de recouvrement de créances Towers Financial Corporation (en), qui, ayant monté un système de Ponzi, mènent à la plus grande fraude financière de l'histoire américaine jusqu'à celle de Bernard Madoff. Steven Hoffenberg et plusieurs employés sont arrêtés et emprisonnés, mais Jeffrey Epstein n'est pas inquiété par la justice.

Au cours de sa carrière, Jeffrey Epstein devient une personnalité mondaine, développant un cercle de relations au sein de l'élite de la société américaine et internationale, dont les présidents américains Bill Clinton, Donald Trump, le premier ministre israélien Ehud Barak, le prince Andrew d'York de la famille royale britannique, et de nombreuses personnes fortunées, célébrités et académiques.

En 2008 et 2009, accusé d'avoir payé plusieurs filles mineures pour obtenir des rapports sexuels, il plaide non coupable et est condamné à une peine de treize mois de prison (sur une peine de dix-huit mois) pour avoir sollicité une prostituée mineure, se voyant également inscrit sur la liste américaine des délinquants sexuels.

À partir des années 2000, des dizaines de jeunes femmes témoignent devant la police du fait qu'elles auraient été abusées sexuellement, violées et prostituées, souvent alors qu'elles étaient mineures, par Jeffrey Epstein et d'autres personnes de son entourage dont Ghislaine Maxwell.

En 2019, incarcéré dans l’attente d’un procès pour trafic de mineurs, et alors qu’il risque la perpétuité, Jeffrey Epstein est retrouvé pendu dans sa cellule. À la suite de multiples dysfonctionnements dans la gestion de sa détention au moment de sa mort, deux enquêtes sont ouvertes dans le cadre de ce qui est décrit comme un « suicide apparent ».

Jeunesse et carrière

Enfance et éducation

Jeffrey Epstein est né dans une famille juive de classe moyenne à Brooklyn (New York), où son père travaillait pour les espaces verts de la ville[2].

Epstein a étudié au Lafayette High School de New York, puis à la Cooper Union (de 1969 à 1971), puis au Courant Institute of Mathematical Sciences à l'université de New York. Il en serait sorti sans diplôme[réf. nécessaire].

Carrière professionnelle

Epstein a enseigné l'analyse mathématique et la physique à la Dalton School de Manhattan (de 1973 à 1975[3]) où il a eu parmi ses élèves le fils du président de Bear Stearns, Alan C. Greenberg[2].

En 1976, Epstein entame une carrière de trader chez Bear Stearns[3], au sein de la division consacrée aux « produits spéciaux » et aux conseils de stratégie fiscale pour les clients les plus riches de la compagnie[3].

Jeffrey Epstein en 1980.

En 1980, Epstein devient l'un des associés de Bear Stearns[3]. En 1982, il fonde sa propre entreprise de gestion financière (J. Epstein & Co). Il se voit confier la gestion d'actifs de clients pour l'équivalent de plus d'un milliard de dollars en valeur nette. En 1987, Leslie Wexner, fondateur et président de The Limited (chaîne de magasins basée en Ohio commercialisant des vêtements pour femmes), se rapproche de lui[3]. Wexner achète Abercrombie & Fitch l'année suivante, et, en 1992, convertit une école privée en une énorme résidence, ensuite acquise par Epstein, dans l'un des quartiers les plus riches de Manhattan, l'Upper East Side. En 1996, Epstein rebaptise son entreprise The Financial Trust Company (Société de fiducie financière) et il la « délocalise » sur l'île de Saint-Thomas (un paradis fiscal), dans les Îles Vierges américaines[3].

En 2003, Epstein fait une offre publique d'achat du New York Magazine, face à d'autres soumissionnaires tels que l’entrepreneur du marketing et de la publicité Donny Deutsch, l'investisseur Nelson Peltz (magnat des médias et éditeur du New York Daily News), Mortimer Zuckerman, et le producteur de cinéma Harvey Weinstein. Ils ont finalement perdu l'affaire, en raison d'une surenchère faite par Bruce Wasserstein, investisseur bien implanté à Wall Street qui a versé 55 millions de dollars[4]. En 2004, Epstein et Zuckerman s'engagent à investir jusqu'à 25 millions de dollars pour financer (à parts égales) le magazine Radar, fondé par une célébrité de la pop culture américaine Maer Roshan (qui y a conservé quelques parts)[5].

La plupart des clients de son entreprise sont anonymes mais des commentateurs ont avancé que le mode de vie luxueux d'Epstein a notamment été financé par Wexner[3].

En , il a transporté Bill Clinton, Kevin Spacey et Chris Tucker en Afrique dans son jet privé (un Boeing 727) pour promouvoir l'ancien président dans ses efforts de lutte contre le SIDA[3],[6].

Il est également un ami de longue date du prince Andrew, duc d'York ; ils ont séjourné l'un chez l'autre et ont passé des vacances ensemble en Thaïlande. En , le prince était invité par Epstein pour quelques jours dans sa résidence de New York peu après qu'Epstein avait été poursuivi pour sollicitation de prostitution d'une mineure. Son hôtel particulier a notamment accueilli Katie Couric, George Stephanopoulos, Charlie Rose et Woody Allen[7]. Les 4 600 m2 de ses appartements sont situés juste à côté de la Cinquième Avenue et surplombent la Frick Collection. Il a la plus grande résidence privée du quartier de Manhattan (qui était autrefois l'école Birch Wathen School (en)).

Epstein a d'autres propriétés immobilières, dont, notamment, une grande villa à Palm Beach, en Floride, un appartement à Paris (22, avenue Foch[6]), un ranch de 4 000 hectares, incluant un manoir, à Stanley (en) (Nouveau-Mexique)[8],[9] et une maison avec des chambres d'hôtes sur son île privée près de Saint-Thomas, appelé « Petit Saint-James » (Little Saint-James).

Il entretient des relations avec de nombreuses personnalités riches et célèbres, dont Bill Clinton (il a donné des millions de dollars à sa fondation humanitaire et financé la campagne sénatoriale de sa femme Hillary[6]), le prince Andrew[10] ou l’ex-Premier ministre israélien Ehud Barak[11].

En 2002, Donald Trump déclare à un journaliste : « Je connais Jeff depuis quinze ans. C’est un mec génial. On s’amuse beaucoup avec lui. On dit qu’il aime les belles femmes autant que moi, et beaucoup entrent plutôt dans la catégorie « jeunes ». Il n’y a pas de doute, il aime sa vie sociale »[11]. Lorsqu'éclate l'affaire Epstein en 2019, Donald Trump, devenu président des États-Unis, prend ses distances avec celui-ci, indiquant qu'il « le connaissait comme tout le monde à Palm Beach le connaissait » et qu'il ne l'apprécie pas. Jeffrey Epstein considère d'ailleurs que Trump  qui aurait refusé plusieurs invitations sur son île privée hédoniste  est à l'origine de ses ennuis avec la police du comté de Palm Beach[12]. Les médias soulignent qu'il a en revanche été un très proche de Bill Clinton, qui est accusé par Trump d'être impliqué dans la mort de l'homme d'affaires afin d'éviter des révélations compromettantes à son endroit[13],[14].

Son penchant pour les jeunes filles est connu dès le début des années 2000. La presse à sensation surnomme alors son avion privé le « Lolita Express ».[réf. souhaitée]

En 2017, son nom apparaît dans les révélations des Paradise Papers[15].

Fondation pour la recherche scientifique

En 2000, il a créé une fondation qu'il baptise Jeffrey Epstein VI Foundation ; un fonds de recherche destiné à financer des activités dans certains domaines des sciences et de l'éducation. Avant 2003, cette fondation a financé la recherche de Martin Nowak (en) à l'Institute for Advanced Study à Princeton (NJ)[3],[16]. En , Epstein a établi un Programme d'étude de la dynamique évolutive à l'échelle de la biologie moléculaire à l'Université de Harvard en offrant 30 millions de dollars à l'université[17]. Sous la direction de Martin Nowak, avec comme mission l'utilisation des mathématiques en se concentrant sur des maladies comme le cancer, le Virus de l'immunodéficience humaine et d'autres virus.

La fondation Jeffrey Epstein VI a également financé la recherche en génétique menant à des progrès dans des domaines tels que la maladie d'Alzheimer, la sclérose en plaques, le cancer de l'ovaire, le cancer du sein, la colite ulcéreuse et la maladie de Crohn.[réf. à confirmer] Epstein a donné des fonds à la Société américaine du cancer, pour des projets technologiques sur la CCT, un test sanguin visant à détecter des mutations génétiques et la recherche de médicaments inhibiteurs du cancer[18].

Epstein, s'est approché dans le passé de beaucoup de personnalités scientifiques, comme Gerald Edelman, Murray Gell-Mann, Stephen Hawking, Kip Thorne, Lawrence Krauss, Lee Smolin et Gregory Benford[3],[19],[20]. En 2006, l'Epstein Fondation a parrainé une conférence sur Saint-Thomas, dans les Îles Vierges américaines, avec Hawking, Krauss, et les prix Nobel de physique, Gerard 't Hooft, David Gross et Frank Wilczek, couvrant des sujets tels que la théorie unifiée de la gravité, les neurosciences, l'origine du langage et des menaces globales pesant sur la planète Terre[20].

Par la suite, sa fondation soutient la recherche sur l'intelligence artificielle, soutenant Marvin Minsky au Massachusetts Institute of Technology/MIT (jusqu'à sa mort) et Ben Goertzel à Hong Kong[21],[22].

L'étendue du soutien apporté à d'autres par Epstein dans le cadre de ses actions philanthropiques est inconnue, car sa fondation ne communique pas les informations qui sont habituellement publiées par les organismes de bienfaisance. Ceci a soulevé des préoccupations qui ont conduit le procureur général de New York à tenter d'obtenir plus d'informations[23]. En avril 2020, une compilation exhaustive des donations scientifiques documentées provenant de Epstein a été publiée sous forme de ranking universitaire satirique, le JER (Jeffrey Epstein Ranking of University Funding)[24].

Implication dans des crimes sexuels

Premières accusations

En 1996, l'artiste Maria Farmer (en) alerte les autorités locales et fédérales au sujet d'une agression sexuelle qu'elle aurait subie aux mains de Jeffrey Epstein et de Ghislaine Maxwell lors de son travail comme artiste en résidence dans la propriété de Les Wexner dans l'État d'Ohio. Moins d'un an après cette plainte, l'actrice Alicia Arden signale à la police de Los Angeles que Jeffrey Epstein se serait fait passer pour un recruteur de la marque de lingerie Victoria's Secret, appartenant à Les Wexner, avant une autre agression sexuelle alléguée[25].

Procédure judiciaire à Palm Beach et emprisonnement en 2008-2009

Photo d'identité judiciaire de Jeffrey Epstein en 2006.

En , une femme a contacté la police de Palm Beach en affirmant que sa fille de 14 ans avait été emmenée au manoir de Jeffrey Epstein par une fille plus âgée et payée 300 $ après un déshabillage (en sous-vêtements) et avoir été massée[9],[26].

La police a entamé une enquête (11 mois) suivie d'une perquisition concluant qu'Epstein avait payé plusieurs « escorts » pour accomplir des actes sexuels avec lui. Sur la base des dires de cinq victimes présumées et dix-sept témoins sous serment, d'un relevé de notes et d'objets trouvés chez Epstein, les enquêteurs ont conclu que certaines des filles étaient mineures au moment des faits[27]. Un grand nombre de photos de jeunes filles ont été trouvées partout dans la maison (dont certaines avaient été auditionnées plus tôt par la police[26]). Selon les enquêteurs en 2006, Epstein avait caché des caméras dans de nombreux endroits de sa propriété pour enregistrer les rapports sexuels entre des personnalités et des prostituées, à des fins criminelles telles que le chantage[28].

Epstein avait mis en place un système pour recruter des jeunes femmes par d'autres femmes, pour ses services de massage[9]. Deux femmes de ménage ont déclaré à la police qu'Epstein recevait des « massages » chaque jour, quand il était à Palm Beach[26]. En , la police de Palm Beach a finalement émis une inculpation pour plusieurs chefs d'accusation dont relations sexuelles illégales avec des mineurs et atteinte à la pudeur[26]. À la demande de son équipe d'avocats (dont Gerald Lefcourt, Alan Dershowitz et, plus tard, Ken Starr[9]), Epstein a subi un test au détecteur de mensonge où il a été demandé s'il connaissait le statut de mineur des filles (bien qu'un détecteur de mensonge ne soit généralement pas recevable devant la cour d'un tribunal)[29],[30].

Au lieu de suivre les recommandations de la police, les procureurs ont examiné des éléments de preuve faible[29] et les ont présentés à un grand jury. L'ancien chef de la police de Palm Beach, Michael Reiter, a plus tard écrit au Procureur de l'État, Barry Krischer, en se plaignant de la manière « très inhabituelle » dont l'affaire était conduite et en lui demandant de s'en retirer[9]. Le grand jury n'a retenu qu'une seule accusation criminelle (sollicitation de prostitution[31]), pour laquelle Epstein n'a pas plaidé coupable, en [32].

Accusé d’avoir mis sur pied un système très élaboré de trafic de mineures, pour la plupart issues de milieux sociaux défavorisés, il encourt en 2008 la prison à perpétuité. Il conclut cependant un accord secret de non-poursuite avec les procureurs fédéraux de Floride lui permettant de faire face à des chefs d’accusation allégés. En 2008, Epstein plaide donc coupable pour racolage de mineures et négocie une peine de prison de dix-huit mois, ainsi que l’immunité judiciaire pour ses complices. Il effectue sa peine dans des conditions particulièrement favorables, obtenant notamment le droit de se rendre à son bureau six jours par semaine. Aucune de ses victimes ne fut informée de l’accord passé avec les procureurs, alors même qu’une loi l’impose[11].

Des courriels divulgués dans la presse en 2018 révèleront que les procureurs ont été dépassés et impressionnés par le pouvoir d’Epstein, manifestant une immense déférence à l’égard de ses avocats[11]. Le procureur Alexander Acosta, devenu secrétaire au Travail dans l'administration Trump, sera contraint à la démission en 2019 à la suite de ces révélations[11].

Il a été libéré après 13 mois et inscrit sur la liste des délinquants sexuels[33]. Il est visé par deux accusations criminelles à la suite de l'accord passé avec l’accusation, tandis qu'à l'époque les détectives fédéraux ont pu identifier 36 de ses victimes, dont certaines avaient moins de 14 ans[34]. Une controverse s’ensuit sur la manière dont cette affaire a été traitée[35].

Lorsque les accusations sont devenues publiques, plusieurs personnes ou entités ayant reçu des dons de la part du milliardaire lui ont renvoyé l’argent, dont Eliot Spitzer, Bill Richardson[16], et le département de la police de Palm Beach[27]. L'université Harvard a annoncé qu'elle ne lui retournerait pas l'argent[16]. Plusieurs dons de bienfaisance faits par Epstein au financement de l'éducation des enfants ont également été remis en question[36].

Le , l'ancien majordome d'Epstein, Alfredo Rodriguez, a été condamné à 18 mois de prison pour avoir tenté de vendre un enregistrement d'Epstein. L'agent spécial Christina Pryor a examiné l'enregistrement et a convenu qu'il « aurait été extrêmement utile dans les enquêtes et la poursuite des cas, y compris pour les noms et les coordonnées de témoins et pour la détection de victimes supplémentaires »[37],[38].

Nouvelles accusations de 2015-2016

En , une Américaine de 31 ans, Virginia Roberts Giuffre, a affirmé (sous serment) qu'à l'âge de 17 ans (et de 1999 à 2002), elle avait été utilisée par Epstein comme « esclave sexuelle » à son service et celui de ses amis puissants, dont le Prince Andrew et un professeur de droit de Harvard, Alan Dershowitz. Elle a affirmé avoir subi des abus physiques qui lui ont fait craindre pour sa vie[39].

Elle a allégué que le FBI pourrait avoir été impliqué dans une couverture[40], évoquant aussi le recrutement d'autres filles[41]. Le Prince Andrew, Epstein et Alan Dershowitz ont tous nié avoir eu des rapports sexuels avec elle, et Dershowitz a intenté une action judiciaire contre ses accusations[42],[43],[44]. Un journal censé appartenir à Virginia Roberts a été publié en ligne[45],[46].

Au sein de la BBC, l'émission Panorama a prévu une enquête sur le scandale[47]. Au début de 2015, aucune juridiction n'avait tranché sur ces affirmations[48].

Le , le juge Kenneth Marra a jugé que les allégations nouvelles formulées par Virginia Roberts contre le Prince Andrew n'avaient pas d'incidence sur l'accord de non-poursuite et devaient être retirées du dossier[49]. Le juge Marra n'a rendu aucune décision concernant la véracité ou non des affirmations faites par Virginia Roberts[50] ; elle a expressément déclaré que Roberts, plus tard, pourrait apporter ses preuves quand son affaire sera portée devant la cour[51].

Le , une femme (restée anonyme) de Virginie a déposé plainte contre Epstein, devant la cour fédérale, en réclamant 50 millions de dollars[52] alléguant que quand elle avait 16 ans, en 2004-2005, elle a été « recrutée » pour donner à Epstein un massage dans son manoir, où elle aurait obtenu 200 $ pour avoir des relations sexuelles avec lui[31]. Une plainte semblable (50 millions de dollars demandés) a été déposée par une autre femme en , représentée par le même avocat[53]. Plusieurs de ces poursuites ont été jugées non-recevables et d'autres réglées à l'amiable[54]. Epstein aurait jusqu'à présent réglé 17 cas à l'amiable et d'autres cas étaient en cours de négociation au moment de sa mort[55]. Le , une autre plainte (déposée en Floride) concerne une violation du « Crime Victims' Rights Act ». Dershowitz est accusé d'avoir abusé sexuellement d'une mineure « fournie » par Epstein[56]. Les allégations portées à l'encontre de Dershowitz ont été finalement éliminées après que son avocat a soutenu qu'elles étaient sans fondements[57]. Un document de la cour allègue qu'Epstein a procuré des jeunes filles mineures à « d'éminents politiciens américains, puissants dirigeants d'entreprises, des présidents étrangers, un Premier ministre bien connu, et d'autres dirigeants du monde »[58].

En , une autre femme a déposé plainte devant un tribunal civil, accusant Epstein et Donald Trump, alors candidat républicain à l'élection présidentielle, de l'avoir violée quand elle avait 13 ans, de manière répétée, en 1994, attachée à un lit, et battue alors qu'elle les suppliait d'arrêter, puis menacée de représailles physiques contre elle et sa famille si elle parlait[59],[60],[61].

Emprisonnement de 2019

Jeffrey Epstein est arrêté le à l'aéroport de Teterboro dans le New Jersey[62] et accusé de trafic sexuel et d'organisation de trafic sexuel par des procureurs de l'unité de corruption publique du district sud de New York[63]. Dans l'acte d'accusation, il est accusé d'avoir sollicité des massages à des filles mineures où les activités devenaient de plus en plus sexuelles, puis d'avoir enrôlé les filles pour recruter d'autres victimes mineures contre rémunération. Le procureur américain Geoffrey Berman du tribunal de district américain du district sud de New York appelle les autres victimes d'Epstein à se manifester. L'acte d'accusation fédéral énumère également le rôle clé des « employés et associés » rémunérés d'Epstein responsables de l'établissement du calendrier des victimes. Jeffrey Epstein est incarcéré à New York, au Metropolitan Correctional Center. Son procès est fixé par le procureur à juin 2020. Epstein encourt alors une peine allant jusqu'à 45 ans de prison.

Le 25 juillet 2019, il est retrouvé inconscient sur le sol de sa cellule avec des « marques sur le cou ». L'administration pénitentiaire pense alors que le milliardaire a tenté de mettre fin à ses jours, mais certains évoquent une possible agression de la part de son codétenu[64].

Accusations de chantage

Lors de l'enquête qui débute en 2005, des fouilles de la maison d'Epstein à Palm Beach mènent à la découverte de deux caméras cachées et d'un grand nombre de photos de filles, dont certaines avaient été interrogées par la police lors de l'enquête[65].

Plusieurs personnes accusent Jeffrey Epstein d'avoir installé un réseau de caméras partout dans ses résidences[66],[67], filmant des rapports sexuels compromettant des personnalités à qui il aurait procuré de jeunes femmes[68]. Un tel système aurait été utilisé pour leur faire du chantage, et pourrait potentiellement être l'une des sources de sa fortune[69],[70].

Sur le territoire français

Jeffrey Epstein possédait plusieurs appartements à Paris, où il aurait reçu de nombreux massages payés. Fin août 2019, le parquet de Paris ouvre une enquête préliminaire pour « viols » et « agressions sexuelles », notamment sur mineurs, impliquant des infractions sur territoire français, ou à l'étranger et impliquant des personnes françaises comme auteurs ou victimes. À Paris, Jeffrey Epstein a entretenu des liens avec Jean-Luc Brunel, l'agent de mannequins français[71], et accueilli divers ministres et ex-ministres français, le seul nom cité étant celui de Jack Lang[72],[73].

Mort en prison

Suicide d'Epstein

Dernière photo d'identité judiciaire de Jeffrey Epstein (datée de ).

Le , à 6 h 30 du matin, alors que les gardiens distribuaient le petit-déjeuner, Epstein a été retrouvé inanimé dans sa cellule de prison du Metropolitan Correctional Center à New York, agenouillé, avec une bande de drap enroulée autour du cou. Le drap était attaché au sommet de sa couchette. On pense qu'il était ainsi depuis environ deux heures. Les gardes ont pratiqué un massage cardiaque sur Epstein, et d'autres prisonniers les auraient entendus crier « Respire, Epstein, respire ! ». À 6 h 33, les gardiens ont donné l'alerte, avertissant leur supérieur à qui ils ont dit : « Epstein s'est pendu ». Transporté en urgence absolue vers l'hôpital new-yorkais le plus proche, Jeffrey Epstein est déclaré mort à 6 h 39. L'administration pénitentiaire fédérale américaine annonce officiellement quelques heures plus tard via les médias la mort du milliardaire, qui se serait donc suicidé, à l'âge de 66 ans[74],[75]. Le procureur de New York, Geoffrey Berman, évoque un suicide « apparent »[76]. Dans les jours qui suivent, le directeur de la prison est muté et deux employés sont suspendus[77].

Annonce et réactions

L'annonce de son décès déclenche un scandale aux États-Unis[78], sa mort étant vue comme un moyen pour de nombreuses personnalités d’échapper à des accusations ou poursuites. La surveillance spéciale dont bénéficiait Epstein depuis le , justement en raison d'une tentative de suicide, avait été rapidement levée[79]. Si les autorités américaines, sur le fondement d'une autopsie réalisée sur le corps de Jeffrey Epstein, ont conclu à une mort par pendaison, un autre médecin légiste, engagé par la famille Epstein, a conclu à un possible étranglement[80].

Après sa mort, deux enquêtes sont ouvertes : une par le FBI et une seconde par l'Inspecteur général du département de la Justice des États-Unis[81].

Le , les secrétaires d’État français Marlène Schiappa et Adrien Taquet réclament l’ouverture d’une enquête en France, des victimes et des complices d'Epstein pouvant être de nationalité française[82].

Onze jours plus tard, le parquet de Paris ouvre une enquête pour viols sur mineurs et agressions sexuelles[83].

Le , Jeffrey Epstein est inhumé aux côtés de ses parents, Seymour et Paula, à Palm Beach en Floride.

Enquête

La mort d'Epstein, que les autorités ont dans un premier temps qualifié de « suicide apparent », a déclenché de multiples enquêtes sur la façon dont un détenu de cette importance, qui était censé avoir fait l'objet d'une surveillance attentive, a pu mourir sous garde fédérale. La mort du suspect a également suscité l'indignation de ses victimes et de leurs représentants, qui espéraient que le procès d'Epstein l'année suivante permettrait de rendre justice[84].

Images de l'autopsie du corps d'Epstein, publiées par TMZ.

Parmi les points qui font polémique, il y a l'absence de surveillance du détenu. Au mois de , Epstein avait été retrouvé dans sa cellule avec des marques autour du cou, et les autorités avaient tenté de déterminer s'il avait été attaqué ou s'il avait tenté de se suicider. À la suite de cet incident, Epstein avait été placé sous « surveillance pour risque de suicide ». Malgré cela, le personnel de la prison n'a pas contrôlé la cellule d'Epstein pendant « plusieurs heures » avant sa mort, violant ainsi le protocole qui prévoit que toutes les 30 minutes quelqu'un vérifie la cellule[84]. En outre, Epstein n'aurait pas dû être seul dans sa cellule. Une personne partageait bien sa cellule mais a été transférée la veille, pour des raisons non encore élucidées, et il n'a pas reçu de nouveau compagnon de cellule[84]. Epstein, qui avait déjà été placé sous surveillance, est donc resté seul et sans surveillance. Les premiers résultats de l'autopsie n'ont fait que renforcer les interrogations concernant la mort d'Epstein. Le Dr Marc Siegel estime qu'il est maintenant « plus probable » que la mort de Jeffrey Epstein soit un homicide plutôt qu'un suicide, en raison de l'autopsie complète du corps d'Epstein, qui a trouvé des os cassés dans le cou, y compris l'os hyoïde. L'os hyoïde, qui se trouve près de la pomme d'Adam, peut être brisé lors d'un suicide par pendaison, mais sa fracture est statistiquement plus fréquente dans les cas de meurtres par strangulation, comme l'indique le Washington Post[85],[86].

Le , le rapport d'autopsie confirme que Jeffrey Epstein s'est suicidé par pendaison[87]. Selon des responsables anonymes cités par le New York Times, il aurait utilisé des draps pour se donner la mort[87].

D'après le New York Post, il aurait rédigé deux jours avant sa mort un testament confiant sa fortune à un trust dont les bénéficiaires sont inconnus[88].

Le , le New York Times publie un article remettant en question le premier rapport d’autopsie. Un autre médecin, le Dr Michael Baden, engagé par le frère d’Epstein, réfute la version du suicide, notamment parce qu'Epstein a eu plusieurs fractures de l’os hyoïde (os du cou), ce qui est inhabituel dans le cas d’une pendaison et serait plutôt un signe d’homicide par strangulation[89].

Dans la culture populaire

  • La phrase « Epstein ne s'est pas suicidé (en) » est devenue un mème populaire[90],[91].
  • HBO est en création d'une série limitée sur la vie et la mort d’Epstein qui sera réalisée et produite par Adam McKay[92],[93].
  • Sony Pictures Television développe également des miniséries basées sur la vie d’Epstein[94].
  • Dans la finale de la quatrième saison de la série CBS The Good Fight, l’intrigue tourne autour de la mort d’Epstein[95],[96].
  • La série documentaire Netflix, Jeffrey Epstein : Filthy Rich, a été créée en mai 2020[97].
  • Le documentaire de Lifetime, Surviving Jeffrey Epstein, a été présenté en première mondiale en août 2020[98].
  • Le 1er juillet 2020, une statue d’Epstein est apparue à Albuquerque, au Nouveau-Mexique[99],[100].

Notes et références

  1. Prononciation en anglais américain retranscrite selon la norme API.
  2. (en) « The Talented Mr. Epstein », sur Vanity Fair News, Condé Nast (consulté le ).
  3. (en) Landon Thomas Jr., « Jeffrey Epstein: International Money Man of Mystery », New York, (lire en ligne).
  4. (en) David Carr, « MEDIA; Post-Mortems for a Media Deal Undone », The New York Times, (lire en ligne).
  5. (en) David Carr, « Radar Magazine Lines Up Financing », The New York Times, (lire en ligne).
  6. Olivier O'Mahony, « Jeffrey Epstein, l'homme qui jonglait avec les milliards et les jeunes filles », Paris Match, semaine du 25 au 31 juillet 2019, p. 62-65 (lire en ligne).
  7. (en) « Prince Andrew talks of royal joy over Prince William’s wedding - Page Six », Page Six.
  8. (en) Trip Jennings, « Gov. to Give Away $50,000 Campaign Gift », Albuquerque Journal (en), (lire en ligne, consulté le ).
  9. (en) « The Fantasist », New York, (lire en ligne).
  10. « Jeffrey Epstein, milliardaire ami des puissants, arrêté pour trafic sexuel », sur parismatch.com, .
  11. Francis Pryer, « Ce que révèle l’affaire Epstein », sur Le Monde diplomatique,
  12. (en) « Jeffrey Epstein Was a ‘Terrific Guy,’ Donald Trump Once Said. Now He’s ‘Not a Fan.’ », sur nytimes.com, (consulté le ).
  13. (en) « Trump retweets conspiracy theory about Bill Clinton after Jeffrey Epstein’s death by suicide », sur cnbc.com, (consulté le ).
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