Michel Chamillart

Michel Chamillart, né le à Paris où il est mort le , est un homme d'État français. À la fois ministre des finances et de la guerre, il dut faire face à la crise financière de 1709 et à la guerre de Succession d'Espagne.

Pour les autres membres de la famille, voir Famille de Chamillart.

Michel Chamillart
Fonctions
Secrétaire d'État de la Guerre
-
Contrôleur général des Finances
-
Intendant de la généralité de Rouen
-
Biographie
Naissance
Décès
(à 69 ans)
Paris
Activité
Famille
Père
Mère
Catherine Compaing (d)
Enfants
Michel Chamillart (d)
Geneviève Thérèse Chamillart (d)
Autres informations
Maître
Distinctions

Biographie

Débuts

Il est issu de la famille Chamillart, une famille de robe originaire de Sens, fils de Guy Chamillart, procureur puis intendant et de Catherine Compaing.

Pierre Bureau est dans sa jeunesse son précepteur ecclésiastique. Comme beaucoup de ses contemporains ambitieux, il commence sa carrière comme conseiller au Parlement de Paris en 1676. Il fait la rencontre du Roi vers 1684, lors d'une partie de billard. Sa réputation de joueur hors pair l'avait fait connaître de Louis-Joseph de Vendôme et de Louis de Lorraine, qui le prennent en affection et le font admettre à une partie auprès de Louis XIV, grand amateur de ce jeu et qui apprécia, outre ses talents au billard, sa modestie[1].

Sa carrière prend par la suite un tournant de plus en plus favorable : le roi le fait maître des requêtes en 1686, puis intendant de Rouen en 1689, et il revient à Paris en 1690 pour devenir intendant des finances[2].

Ascension

Dans la capitale, il sait se faire apprécier du monde des financiers, mais surtout gagne l'amitié de Madame de Maintenon, qui va lui confier une partie de l'administration de son école pour filles Saint-Cyr[3]. Il se fait connaître pour son affabilité, sa facilité d'accès et sa disposition à servir, en plus de se faire des amis tels les ducs de Chevreuse ou de Beauvilliers[1].

Louis XIV apprécie chez lui sa probité et même une certaine délicatesse[4].

Une fois les portes de l'administration publique ouvertes, on le verra occuper la fonction de contrôleur général des finances à la suite de la démission de Louis de Pontchartrain en 1699, puis, en parallèle, celle de secrétaire d'État à la Guerre dès 1701, en dépit de son inexpérience complète de la chose militaire. Il devient ainsi, à la stupéfaction générale, « Colbert et Louvois tout ensemble », la plus importante charge jamais confiée au sein du gouvernement, et le principal collaborateur du Roi[5], qui a subi auparavant les désaccords entre ses deux principaux ministres.

Il est l'un des rares ministres de son époque à ne devoir son élévation qu'au bon vouloir du monarque, sans l'aide de clientélisme ou d'un réseau d'amis ou de parents influents. En effet, il était dépeint comme solitaire, ne se reconnaissait pas dans la mondanité des courtisans et semblait manquer de confiance en lui[3]. Pour l'historien Thierry Sarmant, c'est l'effacement, la commodité et l'obéissance de Chamillart (tout comme la discrétion de ministres tels d'Aligre, Boucherat ou Pontchartrain) qui l'auraient favorisé auprès de Louis XIV, lui-même de nature timide et préférant éviter d'avoir à imposer sa volonté auprès de personnalités trop affirmées[6].

Apprécié par Louis XIV, qui le rencontre plusieurs fois par jour et avec qui il joue au billard, les deux hommes entretiennent également une amitié, voire au point de s'échanger des confidences[3]. Chamillart se sent d'ailleurs bien plus à l'aise lors des séances de travail en privé avec le souverain où il peut entre autres lui rapporter ce qu'il a vu et entendu — au grand plaisir de ce dernier — que lors des réunions où tous les ministres sont présents et surenchérissent afin de se mettre en valeur[7].

Il s'efforce de renflouer les finances royales en créant des offices et des anoblissements, en améliorant le rendement des impôts, en faisant refondre les monnaies, en émettant des emprunts.

En matière militaire, il s'efforce de reconstituer les armées françaises après les défaites de Hochstedt (1704) et de Ramillies (1706).

En 1702, sa fille épouse le duc de Lorges, beau-frère de Saint-Simon, avec qui il se lie et dont il restera l'ami après sa disgrâce, jusqu'à sa mort[8].

En 1706, il succède à Gilbert Colbert de Saint-Pouange comme Grand Trésorier de l'ordre du Saint-Esprit. En novembre 1713, il se démet de cette charge, où lui succède Nicolas Desmarest, marquis de Maillebois.

En 1708, le mariage de son fils froisse la marquise de Maintenon, qui lui devient hostile.

Chute

Restitution de la façade du côté de l'entrée du château de l'Etang, vers 1705. Ce château a été achevé par Chamillart, puis démoli peu après sa disgrâce.

Il reconnaît lui-même postérieurement que son étoile cesse de briller à partir de , c'est-à-dire jusqu'à son accession à la tête du département de la guerre[9], alors qu'il était toujours contrôleur des finances.

Occupés avant lui séparément par d'importantes personnalités, ces deux postes sont cependant trop lourds pour un seul homme, pour ses compétences et sa santé, eu égard à la période difficile que le royaume traverse à la fin du règne de Louis XIV et au fait aussi qu'il portait sur ses épaules les revers militaires subis durant la guerre de Succession d'Espagne.

Voltaire résume cela en écrivant qu'il n'était « ni politique, ni guerrier, ni même homme de finance »[10].

Chamillart peine à imposer son autorité devant ses généraux d'armée, mais le roi persiste à défendre son ministre favori. Épuisé et conscient de sa réprobation, il va proposer sa démission des finances, ce qui est accepté par Louis XIV le .

Sa santé demeure chancelante et son travail critiqué. Les nouvelles du front continuent d'être mauvaises et le , le roi cède aux pressions de son entourage et se résigne à démettre Chamillart du ministère de la guerre, donc du gouvernement, en lui concédant malgré tout une pension de 60 000 livres (de 12 000 à son fils et de 10 000 pour son épouse)[11].

Sa chute est si brutale que ses détracteurs ont fait circuler ce quatrain :

Ci-gît le fameux Chamillart
De son roi le protonotaire,
Qui fut un héros au billard,
Un zéro dans le ministère.

Demeures successives

Au début de sa carrière ministérielle, il est seigneur de Montfermeil, à l'Est de Paris, seigneurie qu'il achète en 1695. Il y poursuit la construction du château commencé par Antoine Pélissier, secrétaire du Roi, et resté inachevé.

En 1701, il revend aux frères François et Michel Bégon le domaine de Montfermeil, pour acquérir des héritiers du secrétaire d'Etat Le Tellier de Barbezieux, le château de l'Etang, à Marnes la Coquette, dont il fait terminer la construction.

Construit par Jacques Hardouin Mansart à proximité de Versailles, le château de l'Etang, entouré d'un parc magnifique, est la demeure de l'apogée de sa carrière. Il le revend en 1710.

En octobre 1709, après sa chute, il acquiert dans le Maine, de l'héritier de la famille de Champlais, le château de Courcelles, qui sera la demeure de sa retraite[12].

Par lettres patentes du mois de mai 1720, il obtient l'érection en comté de la Suze des terres et seigneuries de Courcelles, Château-Sénéchal, Saint Germain du Val, Verron, La Suze, avec désignation du château de Courcelles comme chef lieu du comté, sous le nom de La Suze[13].

L'année suivante, il meurt en son hôtel à Paris, rue Coq-Héron. il est inhumé avec ses parents dans la chapelle Notre-Dame de la Pitié de l'église Saint Nicolas du Chardonnet[14].

Iconographie

Famille

Michel Chamillart épouse le 28 novembre 1680 Élisabeth-Thérèse Le Rebours (1657- château de Courcelles, 26 juillet 1731), sa cousine germaine, fille de Jean Le Rebours, seigneur de Prunelay, maître des comptes, et de Isabelle Anne Compaing. Dont quatre enfants :

  • Catherine Angélique Chamillart (1er mars 1683 - Paris, 19 mars 1739), mariée le avec Thomas de Dreux-Brézé, marquis de Dreux-Brézé, grand-maître des cérémonies de France (1677-1749), dont postérité[15] (les Dreux, branche de Brézé, entre autres branches, sont une famille de robe assez semblable aux Chamillart d'où l'amitié entre le ministre, conseiller au Parlement de Paris avant son élévation, et le père de son gendre, également conseiller au Parlement de Paris. Néanmoins, sans la densité de la parentèle de grands commis que Michel Chamillart possédait)
  • Marie-Thérèse Chamillart (22 septembre 1684 - Paris, 3 septembre 1716), mariée le 24 novembre 1701 avec Louis d'Aubusson, duc de La Feuillade, duc de Roannais, maréchal de France, gouverneur du Dauphiné, veuf de Charlotte Thérèse Phélypeaux, sans postérité[16] (les d'Aubusson sont une très ancienne maison féodale) ;

Michel Chamillart a quatre frères et une sœur :

Annexes

Sources et bibliographie

  • Gustave Esnault, Michel Chamillart, contrôleur général des finances et secrétaire d'État de la guerre (1699-1709) : Correspondance et papiers inédits, Le Mans, Monnoyer, , VIII + 416 p.  + 352 (lire en ligne) t. 1 ; t. 2 ; contient la correspondance de Chamillart de 1693 à 1719
  • Emmanuel Pénicaut, « Michel Chamillart, ministre et secrétaire d’État de la guerre de Louis XIV (1654-1721) »[22]
  • Emmanuel Pénicaut, Faveur et pouvoir au tournant du Grand Siècle : Michel Chamillart, ministre et secrétaire d’État de la guerre de Louis XIV, Paris, École des Chartes, , , 518 p. (ISBN 2-900791-74-X, lire en ligne).
  • Thierry Sarmant et Mathieu Stoll, Régner et gouverner : Louis XIV et ses ministres, Paris, Perrin, 2010 (ISBN 978-2-262-02560-1), notamment p. 120-129.
  • Thierry Sarmant, Louis XIV. Homme et roi, Tallendier, , p. 551.

Notes

  1. Louis XIV et sa cour : portraits, jugements et anecdotes : Extraits des mémoires authentiques du Duc de Saint-Simon (1694-1715), L. Hachette, (lire en ligne), p. 297-299
  2. Anette Smedley-Weill, Les Intendants de Louis XIV, Paris, Fayard, , 369 p., 24 cm (ISBN 978-2-21359-4903)., p. 42.
  3. Emmanuel Pénicaut, « Michel Chamillart, ministre et secrétaire d’État de la guerre de Louis XIV (1654-1721) (thèse de doctorat - résumé) », sur École des Chartes - La Sorbonne, (consulté le )
  4. M. Prévost, Dictionnaire de Biographie française, tome 8, Paris, Letouzey & Ané, , col. 280-281
  5. Sarmant 2012, p. 392
  6. Sarmant 2012, p. 551
  7. Pénicaut 2004, p. 166-168
  8. Fabienne Seillan, « Le Château de l'Etang du temps de Saint-Simon », Cahiers Saint-Simon, , p. 39-48 (lire en ligne)
  9. Pénicaut 2004, p. 107
  10. Œuvres complètes de Voltaire, volume 10, Garnier frères, (lire en ligne), p. 355
  11. Sarmant 2012, p. 460-462
  12. Paul Cordonnier-Détrie, Le Château de Courcelles au Maine - Notes et croquis, Guécélard, l'auteur, , 102 p., p. 80-92
  13. Raoul de Linière, Armorial de la Sarthe (2e série), tome premier, Le Mans, imprimerie M. Vilaire, , 726 p., p. 138-141
  14. Michel de Dreux-Brézé, Les Dreux-Brézé, Paris, Editions Christian, , 612 p. (ISBN 2-86496-059-1), p. 194
  15. Michel de Dreux-Brézé, Les Dreux-Brézé, Paris, Editions Christian, , 612 p. (ISBN 2-86496-059-1), p. 181-208
  16. Christophe Levantal, Ducs et pairs et duchés-pairies laïques à l'époque moderne (1519-1790), Paris, Maisonneuve & Larose, , 1218 p. (ISBN 2-7068-1219-2), p. 670-671
  17. Guy-Nicolas de Durfort est le petit-neveu du célèbre vicomte de Turenne, maréchal de France.
  18. « Seigneurs de Cany-Caniel < Nicolas-Balthazar Le Marinier de Cany », sur La seigneurie et les seigneurs de Cany en Normandie, par Louis Sandret, 1880
  19. Portrait.
  20. Fille de Jean-Baptiste Colbert.
  21. Alain Noël, Trois levrettes de sable au champ d'argent, Dixmont, 1984.
  22. Rémi Mathis, Compte rendu du livre, 14/02/2005.

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