Milan (missile)
Le Missile d’infanterie léger antichar NATO[1] ou Milan est un missile antichar filoguidé développé conjointement par la France (Nord-Aviation) et l'Allemagne de l'Ouest (MBB), à la suite d’un accord de coopération de 1962 dans le cadre du GIE Euromissile, intégré plus tard dans MBDA. Il est construit sous licence en Espagne, Inde et Royaume-Uni. Son nom de Milan renvoie en français au nom vernaculaire désignant certains rapaces.
Pour les articles homonymes, voir Milan (homonymie).
Milan | |
Missile Milan de l’armée française exposé en 2005 | |
Présentation | |
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Type de missile | Missile antichar transportable |
Constructeur | Euromissile |
Déploiement | 1972 |
Caractéristiques | |
Moteurs | À base de propergols qui sont sous forme solide et non liquides - lancement par générateur de gaz à partir du tube |
Masse au lancement | Masse en vol :
Poste de tir et trépied :
|
Longueur | 0,75 m[1] |
Diamètre | 115 mm[1] |
Vitesse | 75 m/s début de croisière et 210 m/s fin de croisière |
Portée |
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Charge utile | A charge creuse |
Guidage |
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Précision | 0,1 millième (mil angulaire) |
Plateforme de lancement | Homme à pied ou véhicule |
Historique
Après des essais opérationnels à partir de 1971, le missile Milan a commencé à être déployé dans l’armée française à partir de 1973 en remplacement du missile ENTAC et du Nord SS.11. Les premiers stages pour les tireurs de missiles antichars dans l’armée de terre française commencent en 1974, chaque tireur a une allocation de deux tirs de missiles par an[2].
La première utilisation au combat a lieu le lorsque l'armée libanaise équipée de quelques postes de tir tente de stopper l'intervention de l'armée syrienne dans la région de Beyrouth durant la guerre du Liban. Elle réussit à détruire plusieurs T-55 et T-62 avant d’être submergée par le nombre. Ce missile montre ainsi sa capacité à être utilisé en combat urbain et alors qu'il était considéré à l'origine comme exclusivement antichar et utilisé en rase campagne, sa polyvalence est démontrée lorsque les Phalanges libanaises l'utilisent contre les tireurs isolés s'abritant dans des immeubles le long de la ligne verte et l'armée syrienne contre des fortifications chrétiennes dans le Mont Liban. Il joue le rôle d'une « artillerie portable de fantassin » depuis dans les opérations où il est utilisé[3].
Pendant la guerre des Malouines, l'infanterie britannique a fait usage de missiles Milan pour détruire des bunkers notamment fin mai 1982 lors de la bataille de Goose Green[4]. Un bataillon d'infanterie mécanisée de la British Army avait en dotation 24 postes de tirs et 200 missiles.
Durant la guerre Iran-Irak, les forces irakiennes l'utilisent avec succès contre les percées des unités blindées iraniennes équipées de chars de combat principaux M60 américains, Chieftain britanniques et de chars moyens chinois. Durant l'offensive irakienne de 1988 nommée l'Opération En Dieu nous croyons, moins de la moitié des tirs sont effectués contre des véhicules, il est utilisé en soutien d'infanterie contre toutes les formes de résistance rencontrées : positions retranchées, bunkers, nids de mitrailleuses... Durant ce conflit, il est utilisé pour gêner les hélicoptères iraniens à basse altitude et réussit à abattre au moins deux AH-1 Cobra. Dans les zones marécageuses du Chatt-el-Arab, il est utilisé contre les embarcations légères iraniennes.
Au , sur 51 425 tirs, on note un bon fonctionnement de 95 % et un pourcentage d'impact de 92,5 % soit une efficacité globale de 87 %. Ce missile est considéré comme le plus performant dans sa catégorie au niveau mondial jusqu'aux années 1990[5].
En 2006, plus de 10 000 lanceurs et 350 000 missiles avaient été produits. En 2021, plus de 360 000 missiles ont été produits pour une quarantaine d’armées. Ils commencent à être remplacés par des missiles de conception plus récente de 4e et 5e génération mais son prix plus abordable fait qu'il continue à être fabriqué pour quelques clients[6].
Durant l'opération Serval au Mali entre et , il y eut une sortie de champ et une rupture de fil sur 12 missiles tirés[7].
En 2004, un régiment d'infanterie français dispose de 14 postes de tir Milan et de 24 postes de tir Eryx[8]. En 2011, l'Armée de terre française dispose de 540 postes de tir[9], 350 en 2018[10], 435 au [11], 457 en juillet 2020.
Description
Le missile Milan est un engin à système de guidage semi-automatique filoguidé. Stabilisé par rotation lente (12 tours par seconde), le Milan est guidé par infrarouge et est utilisable de jour comme de nuit.
Il est utilisé par l'infanterie par une équipe de tir comprenant théoriquement trois personnes.
Le support de tir pour l'infanterie consiste en un trépied à hauteur réglable (de 25 à 50 cm) lorsque le missile est utilisé à terre. Ce trépied est remplacé par un affût monopode formant griffe de fixation du Milan lorsqu’il est embarqué. L’affût supporte un viseur optique et un système de contrôle de tir (commandes de tir et de réglages en site et azimut). Le missile est tiré à partir d’un tube de lancement formant en même temps emballage de stockage et de transport. Le missile est guidé sur toute sa trajectoire par un dispositif utilisant le rayonnement infrarouge émis par un traceur ou une balise électronique. Les ordres sont transmis par le fil de guidage.
Le tir de nuit est possible depuis 1980 grâce à une lunette infra-rouge MIRA à refroidissement cryogénique ajoutée au poste de tir, ou MILIS qui possède une unité interne de refroidissement.
- Pénétration : cible triple OTAN à 65° : 352 mm – probabilité d’atteinte de 95 % - 600 mm de blindage (missile milan 1 et 2), 800 mm de blindage (missile milan F2A et 3) ou 2,50 m de béton, 1 000 mm de blindage MILAN ER
- Durée du vol : 7 secondes (1 000 m) – 12,4 s (2 000 m)
- Cadence de tir : 2 ou 3 coups par minute
Variantes
- Milan F1 : 1 charge, charge creuse (1972) calibre 103 mm, traceur pyrotechnique.
- Milan F2 : 1 charge, charge creuse (1984) calibre 115 mm, traceur pyrotechnique.
- Milan F2A : 2 charges creuses en tandem (1993), traceur pyrotechnique.
- Milan F3 : 2 charges creuses en tandem, lampe à éclats.
- Milan ER : missile à portée allongée à 3 000 m (2014), létalité renforcée.
Radioactivité
Les premières générations de missile MILAN contiennent environ 2,7 grammes de thorium radioactif (10 kBq) qui est libéré tout au long du vol ainsi qu'à l'explosion du missile. Le thorium sert à produire la signature infra-rouge qui permet au poste de tir de localiser la position du missile après son lancement. La radiation produite par le missile Milan a motivé en 2001 l'armée allemande à prendre des précautions de sécurité après le tir d'un missile ainsi que d'interdire une éventuelle exploitation agricole dans les zones où un missile a été tiré. Néanmoins, il faudrait environ 100 tirs pour que le tireur soit irradié de manière à dépasser la limite légale de radiation en Allemagne[réf. nécessaire].
Au Canada, une étude des eaux entourant la base militaire de Shilo à Manitoba, base sur laquelle des missiles Milan ont été tirés, a mis en évidence des quantités faibles de thorium 232. Depuis 1999, les nouvelles versions du missile n'emportent pas de thorium.
Utilisateurs
Le Milan a été utilisé pendant des années par l’armée de terre française avec le HOT et l’Eryx ; la version ER est toutefois recalée en 2009. Le missile moyenne portée est alors développé afin de succéder au Milan, il dispose de nouvelles fonctions, dont la capacité « tire et oublie ».
Le Milan a été exporté dans de nombreux pays, 23 en 1984 en incluant la Chine, 41 en 2021[12], dont : Afrique du Sud, Allemagne, Australie, Belgique (retiré en 2010), Égypte, Estonie, Grèce, Royaume-Uni (Milan 2 construit sous licence par BAe Dynamics (en) pour 12 000 £ l'unité)[13], Syrie, Inde (construction sous licence par Bharat Dynamics Limited (en)), Irlande, Italie, Kenya, Liban, Maroc, Mexique, Sénégal, Turquie, et l'Uruguay.
En 1977, la Syrie commande à la France 200 lanceurs et 4 400 missiles Milan[14]. Leur livraison est effectuée en 1978 et 1979[14].
La guérilla du commandant Massoud en reçoit au moins 140 vers 1988 lors de l'intervention soviétique en Afghanistan provenant d'un pays non-identifié, ils seront utilisés essentiellement dans la vallée du Panshir. Le financement est assuré par l'Arabie Saoudite et les États-Unis et des instructeurs français se rendront sur place pour la formation[15]. la DGSE livrera une quarantaine de Milan à Massoud au début des années 1990 dans le cadre d'un plan visant à le soutenir politiquement.
La Libye sous le régime Kadhafi a affirmé son intention de passer un contrat d'un montant de 168 millions d'euros pour l'achat d'armement comportant ces missiles en , peu après la libération des soignants bulgares[16]. La livraison de 100 missiles Milan aurait eu lieu en 2009 d'après l'institut international pour les études stratégiques[17].
Lors de la guerre civile syrienne, des lance-missiles Milan sont employés par l'armée syrienne[14]. Certaines de ces armes sont capturées, puis utilisées par les rebelles et par les djihadistes de l'État islamique[14]. La coalition internationale en livre également aux Forces démocratiques syriennes et aux peshmergas[14].
En 2014 et 2015, l'Allemagne fournit plusieurs centaines de Milan aux forces kurdes d'Irak (Peshmerga) luttant contre DAESH[18] durant la guerre civile syrienne et la seconde guerre civile irakienne.
Fin février 2022, la France aurait fourni quelques dizaines de Milan aux forces ukrainiennes. L'Italie aurait également fourni des Milan[19].
Utilisateurs actuels
- Afghanistan
- Afrique du Sud
- Allemagne
- Arménie
- Brésil
- Chypre
- Estonie (depuis 2004, surplus allemand, livraison en 2015 de missiles français[20])
- Égypte
- France
- Grèce
- Inde (depuis le 20e siècle, contrat pour 4 100 Milan 2T en 2010[21], 3 000 en 2019[22])
- Irak
- Italie
- Kenya
- Liban (premier utilisateur au combat en 1976, 48 missiles livrés en 2015[23])
- Libye
- Macédoine du Nord
- Mauritanie
- Mexique
- Maroc
- Pakistan
- Portugal
- Qatar (Milan ER[24])
- Syrie (200 lanceurs et 4 400 missiles livrés en 1978-1979[25])
- Tchad
- Tunisie
- Turquie
- Ukraine (depuis 2022, fourni par l'Italie puis la France[26])
- Uruguay
- Yémen
Galerie
- Un véhicule de combat d'infanterie Marder 1A3 d'un bataillon de Panzergrenadier tirant un missile Milan en 2004.
- Poste de tir terrestre Milan.
- Milan ER.
- Un Royal Marine en 1995 avec un poste de tir Milan de face.
- Présentation d'un poste de tir Milan ER par l'Armée de terre française.
- Une Jeep Wrangler égyptienne avec un poste de tir Milan en 1990.
Notes et références
- « Missile d’infanterie léger antichar NATO - MILAN », sur www.defense.gouv.fr, .
- Lt-Colonel René Bon, « Tireurs missiles antichars de l’armée de terre », Symboles-et-traditions.fr.
- Mercillon 1997, p. 10-12.
- Falklands War Operations Manual. Haynes, Chris McNab, 2018, (ISBN 978 1 78521 185 0)
- René Carpentier, « Les missiles tactiques » [PDF], Eurosae, , p. 139-140.
- « En Grèce, le missile Milan fait de la résistance », sur FOB - Forces Operations Blog, (consulté le )
- Thibault Capdeville, « Le tir des unités d'infanterie durant l'opération SERVAL », Fantassins magazine, no 32, , p. 56 (lire en ligne, consulté le ).
- « Philippe Dettori-Campus », sur revuemilitairesuisse.ch (consulté le )
- « Principaux équipements de l'Armée de terre en 2011 », data.gouv.fr.
- « Chiffres clés de la Défense - 2018 », sur Ministère de la Défense, .
- Les chiffres clés de la défense édition 2019, Ministère des Armées français, , 36 p. (lire en ligne), p. 25.
- (en-US) « MILAN Anti-Tank Missile System », sur Army Technology (consulté le )
- « British Army - The Infantry - Milan 2 - Armed Forces - a5a14 », sur www.armedforces.co.uk (consulté le )
- Matteo Puxtton, Comment l'Etat islamique a récupéré des lance-missiles Milan français, France Soir, 7 décembre 2018.
- « Lignes de défense - Missiles, guérillas, et filières parallèles », sur RFI, (consulté le )
- Tripoli annonce un contrat d'armement avec la France, l'Elysée dans l'embarras - Le Monde/AFP/Reuters, 2 août 2007.
- (en) Bloomberg - Qaddafi Military Spending Below Sweden's Leaves Authority Gap - The International Institute For Strategic Studies (IISS), 2 mars 2011 (voir archive).
- (en) Campbell MacDiarmid, « Germany sends more MILAN rockets to thwart ISIS suicide bombers », Rudaw.net, .
- « La France livre des missiles antichars Milan à l’Ukraine », Le Monde.fr, (lire en ligne, consulté le )
- « Mistral F3 et Milan pour l’Estonie | Strategic Bureau of Information », sur www.strategic-bureau.com (consulté le )
- « Bharat Dynamics to supply Milan 2T anti-tank guided missile to the Indian Army », sur www.defenseworld.net (consulté le )
- (en) « Indian Army plans to buy 3000 Milan 2T anti tank guided missiles from France at Rs 1000 crore », sur www.timesnownews.com (consulté le )
- « Le don saoudien se concrétise enfin : 48 missiles livrés par la France à la troupe », sur L'Orient-Le Jour, (consulté le )
- Guillaume Steuer, « La succession du Milan est en marche », Air et Cosmos, no 2366, .
- Matteo Puxtton, « Comment l'Etat islamique a récupéré des lance-missiles Milan français », sur France-Soir, (consulté le ).
- « La France livre des missiles antichars Milan à l’Ukraine », Le Monde.fr, (lire en ligne, consulté le )
- Xavier Palson, La guerre de demain : Est/Ouest Les forces en présence, Taillandier, , 258 p. (ISBN 2235016006), p. 116.
- « Le Pentagone notifie la possible vente de missiles antichar Javelin à la Belgique », sur RTBF (consulté le )
Annexes
Bibliographie
- Patrick Mercillon, Le Milan au combat : La légende d'un missile, Éditions techniques pour l'automobile et l'industrie, , 176 p. (ISBN 978-2-7268-8365-5)
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