Ordre suprême de la Très Sainte Annonciade
L’ordre suprême de la Très Sainte Annonciade (dit communément ordre de l'Annonciade) est un ordre de chevalerie de Savoie, puis d’Italie, créé au cours de la seconde moitié du XIVe siècle. Depuis la déchéance de la maison de Savoie, en 1946, il en est le principal ordre dynastique.
Histoire
L’ordre de l'Annonciade fut créé probablement dans le courant du mois de par le comte Vert Amédée VI de Savoie, sous le nom d’Ordre du Collier. Il succédait ainsi à l’éphémère ordre du Cygne noir, institué par le même Amédée VI, en 1350, à l’occasion du mariage de sa sœur Blanche avec Galéas II Visconti. En 1374, Amédée VI fixe le chef-lieu de l’ordre à Pierre-Châtel. Les statuts de l’ordre du Collier furent codifiés par Amédée VIII, en 1409, puis profondément restructurés par le duc Charles III de Savoie, en 1518. C'est alors que l’ordre du Collier prit le nom d’ordre suprême de la Très Sainte Annonciade, plus que jamais consacré à la Vierge, à travers la prière du rosaire et ses trois mystères (mystères joyeux, mystères douloureux, mystères glorieux, chacun comprenant cinq prières) : il était donc composé de quinze chevaliers (chiffre correspondant aux mystères du rosaire), parmi lesquels le comte de Savoie, lui-même grand maître de l'ordre, puis vingt chevaliers (l'ajout évoquant les cinq plaies du Christ) appelés « cousins du duc » qui devaient tous être obligatoirement « de haute et bonne noblesse », princes de sang ou chefs d'État.
Amédée VII ajouta la devise FERT (« Fortitudo Eius Rhodium Tenuit, sa bravoure a défendu Rhodes ») faisant référence à la défense de Rhodes contre les Turcs, opérée en 1315 par le Amédée V de Savoie[1], pour indiquer que le chevalier portait le signe de la foi. Les statuts s'étant perdus avec sa mort, Amédée VIII les recomposa en 1409 ; enfin, en 1518, Charles III ajouta au collier l'image de l'Annonciation, d'où le nom de l'ordre[2].
L’ordre de l’Annonciade réunit les meilleures conditions pour mériter une place de choix parmi les plus illustres ordres chevaleresques d’Europe, tels que l’ordre de la Toison d'or (Bourgogne – 1430), l’ordre de la Jarretière (Angleterre - 1348) ou l’ordre du Saint-Esprit (France – 1578). Il a pour lui l’ancienneté de sa fondation et le rôle historique joué par le célèbre fondateur et ses successeurs ; le nombre très restreint des chevaliers de cet Ordre ; à cela s'ajoutait, autrefois, la double sanction accordée à la valeur des chevaliers et à leur mérite par le choix du souverain et la ratification de leurs frères d’armes. En 1601, le traité de Lyon amène le transfert du siège de l’Ordre de l’Annonciade.
Au début du XVIIe siècle, avant les destructions de la Révolution, il subsistait un exemplaire du collier de l'ordre dans l'abbaye d'Hautecombe, comme le rapporte Samuel Guichenon, principal historiographe de la maison de Savoie au Grand Siècle : « Il était d'or, large de trois doigts, avec ces lettres : FERT, et un lacs d'amour an bout de chaque FERT[3]. » L'insigne était un médaillon de l'Annonciation sur une chaîne d'or formée de quinze entrelacs (dits d'Amour) noués et émaillés de blanc et de rouge entrelacés de l'ancienne devise FERT — qu'il supporte (son sort) et de quinze roses blanches et rouges. À la mort du titulaire la famille rendait le collier au souverain.
À partir du XIXe siècle, l'esprit chevaleresque et religieux ayant disparu, l’ordre de l’Annonciade est conçu pour renforcer l’amitié entre les souverains régnants. Cette distinction est également réservée aux membres des familles royales et aux chefs d’État. Le nombre de décorés est toujours restreint à vingt personnalités, réparties, selon deux critères : le grand collier pour les nationaux italiens ; le petit collier pour les étrangers. Il n’existe toujours qu'une classe unique de chevalier.
Liste des chevaliers de l'Ordre
Chevaliers sous Amédée VI (1362-1383)
Les chevaliers sous le règne du comte Amédée VI (1362-1383), surnommé le Vert, fondateur et premier chef de l'ordre. Les premiers chevaliers sont[4],[5],[6] :
- comte Amédée (Aymon, Ame) III de Genève ;
- Antoine de Beaujeu, seigneur de Beaujeu et de Dombes ;
- Hugues II de Chalon-Arlay, sire et baron d'Arlay ;
- Aymon III de Genève, seigneur d'Anthon et de Varey ;
- Jean de Vienne, seigneur de Roulans (Rollans), Listenois et Bonencontre, maréchal de Bourgogne et général et amiral de France ;
- Guillaume de Grandson, seigneur d'Aubonne et de Sainte-Croix ;
- Guillaume de Chalamont, seigneur de Meximieux et de Montaney (Montanay) ;
- Rolland de Vayssi (Veyssi), gentilhomme Bourbonnais ;
- Étienne, bâtard de La Baume, seigneur de Saint-Denis (de Chausson) et de Chavannes, amiral et maréchal de Savoie ;
- Gaspard de Montmayeur, baron de Villarsalet (Villar-Sallet) ;
- Berlion ou Barle (Barthélémy) de Foras (ou de Foural), seigneur de Foras en Genevois ;
- Thennard de Menthon, seigneur de Menthon ;
- Aymon de Bonivard, châtelain d'Allinges et de Thonon ;
- Richard Musard, gentilhomme Anglais.
L'évêque de Turin, Thomas de Savoie-Achaïe, est, selon un auteur repris par Samuel Guichenon, le premier chancelier de l'Ordre[7].
Chevaliers sous Amédée VII (1380-1391)
Les chevaliers sous le règne du comte Amédée VII (1383-1391) sont[4],[5],[8] :
- Aymon II de Challant († 1388), seigneur de Fénis et d'Aymavilles (non mentionné par Foras), reçu en 1380 ;
- Jean de Cervens, dit du Vernay, seigneur de La Rochette, Maréchal de Savoie, reçu en 1383-1391 ;
- Thomas de Genève, seigneur de Lullin, reçu en 1383-1391.
Chevaliers sous Amédée VIII (1409-1438)
Les chevaliers sous le règne du comte puis duc Amédée VIII (1391-1440) sont[4],[5],[9] :
- Louis de Savoie-Achaïe, prince d'Achaïe, reçu en 1409 ;
- Odon (Odo, Eudes) de Villars, seigneur de Montellier, Gouverneur et capitaine général de Piémont ;
- Jean de La Baume, comte de Montrevel, maréchal de France, lieutenant-général de Bresse ;
- Humbert de Villersexel, comte de La Roche ;
- Boniface Ier de Challant, seigneur de Fénis et de Varey, maréchal de Savoie ;
- Antoine de Grolée, seigneur de Grolée ;
- Girard de Ternier, seigneur de Ternier ;
- Jean de La Chambre, seigneur de La Chambre, comte de Luille, vicomte de Maurienne, reçu en 1418 ;
- Jean de Lugny, seigneur de Lugny ;
- …
- Amédée de Savoie († ), Prince de Piémont, fils aîné d'Amédée VIII (1412-1431), reçu en 1413-1431 ;
- Jean Panserot de Serraval, reçu en 1413-1431 ;
- Jacques de Chevron Villette, seigneur de Chevron, reçu en 1413-1431 ;
- Gaspard de Montmayeur, maréchal de Savoie, reçu en 1413-1431 ;
- Jacques de Miolans, seigneur de Miolans, reçu vers 1431 ;
- Humbert, bâtard de Savoie, comte de Romont, reçu vers 1434 ;
- Richard de Montchenu, seigneur de Ternier, reçu vers 1434 ;
- Jean de Montluel), seigneur de Châtillon en Chautagne, reçu vers 1434 ;
- Louis de Savoie, bâtard d'Achaïe, seigneur de Racconis, maréchal de Savoie, reçu vers 1434 ;
- Philippe de Savoie, comte apanagiste de Genève, fils d'Amédée VIII, reçu en 1438.
Chevaliers sous Louis Ier (1440-1465)
Les chevaliers sous le règne du duc Louis Ier (1440-1465) sont[4],[5],[10] :
- Janus de Savoie, comte apanagiste de Genève ;
- Guillaume de Menthon, seigneur de Menthon ;
- Jean de Seyssel (famille de Seyssel), seigneur de Barjat, maréchal de Savoie ;
- Guillaume de Genève, seigneur de Lullin ;
- Jacques (I) de Montmayeur (famille de Montmayeur) ;
Chevaliers sous Amédée IX (1465)
Les chevaliers sous le règne du duc Amédée IX (1465) sont[4],[5],[10] :
- Claude de Seyssel, seigneur d'Aix, maréchal de Savoie ;
- Louis de Challant, comte de Challant ;
- Claude Bourgeois, seigneur de Very et de Fernay ;
- Janus de Genève, seigneur de Lullin.
Chevaliers sous Charles Ier (1482)
Les chevaliers sous le règne du duc Charles Ier sont[4],[5]
- Hugues (Hugonin) de La Palud, comte de Varax, gouverneur et maréchal de Savoie ;
- Philibert de Challant, comte de Challant, gouverneur du
Chevaliers suivants
- 1518 — Philippe de Savoie-Nemours, comte du Genevois ;
- 1518 — Claude de Savoie-Raconis (it), maréchal de Savoie ;
- 1518 — Jacques de Miolans, baron de Miolans ;
- 1527 — Bertolin de Montbel, comte de Frossasque ;
- 1527 — Charles de La Chambre-Seyssel, baron de Sermoyé/Sermoyer.
Le duc Emmanuel-Philibert réorganise, le , l'Ordre de l'Annonciade.
Charles-Albert : seconde création
En 1840, le roi Charles-Albert fixe le chef-lieu de l’ordre à la chartreuse de Turin.
Composition
Au nombre des membres actuels, l’on peut citer, parmi d’autres dignitaires du plus haut niveau :
- S.M. le roi d’Espagne
- Siméon II, ex-roi de Bulgarie
- Constantin II, ex-roi de Grèce
- Jean de Luxembourg
- Fra' Matthew Festing
L'insigne
Ruban |
---|
Voir aussi
Articles connexes
Liens externes
- Notices dans des dictionnaires ou encyclopédies généralistes :
- Site officiel du duc d'Aoste
- Site officiel du secrétariat du duc d'Aoste
- (it) Armes des chevaliers de l'Annonciade, appendix du Blasonario Subalpino de Federico Bona (1999-2014) Blasonario subalpino.
Bibliographie
- [Claudius Blanchard 1875] Claudius Blanchard, Histoire de l'abbaye d'Hautecombe en Savoie : avec pièces justificatives inédite, Chambéry, Puthod, , 741 p. (lire en ligne).
- [Dom Romain Clair 2010] Dom Romain Clair, Hautecombe, Aix-les-Bains, Société d’art et d’histoire d'Aix-les-Bains, , 320 p. (ISBN 978-2951969179)
- Amédée de Foras, Chevaliers de l'ordre du Collier de Savoie, dit de l'Annonciade, appartenant au duché de Savoie, de 1362 à 1860, Grenoble, Impr. de E. Allier, , 42 p. (lire en ligne).
- Samuel Guichenon, Histoire généalogique de la Maison royale de Savoie : Justifiée par titres, fondations de monastères, manuscrits, anciens monuments, histoires et autres preuves authentiques ; enrichie de plusieurs portraits, sceaux, monnaies, sculptures et armoiries, t. 1, Lyon, Guillaume Barbier, , 310 p. (BNF FOL-LM3-836, lire en ligne).
- Laurent Ripart, « Du Cygne noir au Collier de Savoie : genèse d’un ordre monarchique de chevalerie (milieu XIVe-début XVe siècle) », dans L. Gentile, P. Bianchi (dir.), L’affermarsi della corte sabauda. Dinastie, poteri, élites in Piemonte e Savoia fra tardo medioevo e prima età moderna, Torino, 2006, p. 93-113 (lire en ligne) ;
- Ordine supremo della Santissima Annunziata, Statuts et ordonnances du très-noble Ordre de l'Annonciade, Turin, Impr. royale, , 187 p. (lire en ligne).
Notes, sources et références
- Marie-Nicolas Bouillet et Alexis Chassang (dir.), « Ordre suprême de la Très Sainte Annonciade » dans Dictionnaire universel d’histoire et de géographie, (lire sur Wikisource)
- Arnaud Bunel, « Armorial des Chevaliers de l'Annonciade », sur http://www.heraldique-europeenne.org/Principal.htm, Héraldique européenne (consulté le ).
- Claudius Blanchard 1875, « Glorieux règne d'Amédée VI, le Comte-Vert », p. 247 et 248.
- Samuel Guichenon 1660, « Notice sur l'ordre de l'Annonciade », p. 112.
- Samuel Guichenon 1660, p. 413-414 (lire en ligne).
- Louis Moréri, Le grand dictionnaire historique (t.), Paris, Les libraires associés, (lire en ligne), p. 359-360.
- Amédée de Foras, Chevaliers de l'ordre du Collier de Savoie, dit de l'Annonciade, appartenant au duché de Savoie, de 1362 à 1860, Grenoble, Impr. de E. Allier, , 42 p. (lire en ligne), p. 8-10.
- Samuel Guichenon 1660, p. 323 (lire en ligne).
- Amédée de Foras, Chevaliers de l'ordre du Collier de Savoie, dit de l'Annonciade, appartenant au duché de Savoie, de 1362 à 1860, Grenoble, Impr. de E. Allier, , 42 p. (lire en ligne), p. 10.
- Amédée de Foras, Chevaliers de l'ordre du Collier de Savoie, dit de l'Annonciade, appartenant au duché de Savoie, de 1362 à 1860, Grenoble, Impr. de E. Allier, , 42 p. (lire en ligne), p. 10-12.
- Amédée de Foras, Chevaliers de l'ordre du Collier de Savoie, dit de l'Annonciade, appartenant au duché de Savoie, de 1362 à 1860, Grenoble, Impr. de E. Allier, , 42 p. (lire en ligne), p. 12-13.
- Portail des récompenses et distinctions
- Portail de l’Italie
- Portail de l'histoire de la Savoie