Supérieur général de la Compagnie de Jésus
La Compagnie de Jésus, plus connue sous le nom de ses membres, les jésuites, est dirigée par un Praepositus Generalis, mot latin qui désigne un préposé général ou supérieur général, communément appelé « père général » ou « général », élu à vie à la tête de l'ordre. Il a une grande autorité, de type exécutif, sur la Compagnie. L'autorité suprême de l'ordre — ou pouvoir législatif — est détenue par les congrégations générales. Le rôle du supérieur général, son mandat et ses pouvoirs sont définis par les « constitutions » de l'ordre (9e et 10e parties)[1] et les décrets ou instructions qui lui sont donnés par les congrégations générales. Les médias aiment qualifier de pape noir le supérieur général de la Compagnie de Jésus (un terme jamais utilisé par les jésuites eux-mêmes) en raison de son influence au sein de l'Église, et de la couleur de son habituel habit noir, par opposition à la soutane blanche du pape[alpha 1].
Le supérieur général des jésuites actuel, Arturo Sosa Abascal, a été élu le par la 36e congrégation générale.
L'élection du supérieur général
Pour saint Ignace une congrégation générale est la « Compagnie qui se rassemble » [Const. no 687, 689], et cela se fait rarement sauf s'il y a des questions importantes à traiter. Cependant elle doit être nécessairement convoquée pour l’élection d’un supérieur général. Ses membres sont des délégués ou électeurs, élus par les provinces (86 provinces à ce jour) suivant un système tenant compte de la démographie de l’ordre, les supérieurs provinciaux, et de quelques « officiels majeurs » de l’ordre (assistants, secrétaire, économe, etc). Le supérieur général peut également nommer un nombre limité de délégués supplémentaires pour autant que le nombre de délégués élus reste supérieur à celui de ceux qui entrent à la congrégation en vertu de leur office.
Les délégués ne représentent pas les intérêts d’un groupe particulier (apostolat, province, ou pays). Ils n’ont pas de mandat ou d’agenda particulier mais agissent et votent en conscience pour le bien de la Compagnie et de l’Église.
Dans les constitutions [Const. no 690-718] saint Ignace entre dans un très grand détail en ce qui concerne l’organisation d’une congrégation générale et l’élection d’un supérieur général. Il est particulièrement attentif à sanctionner et éliminer tout ce qui serait ambition personnelle lors d’une congrégation ad electionem. La procédure est restée sensiblement la même depuis l’époque du fondateur, combinant des aspects ressemblant à un conclave (isolement relatif des électeurs, prière et jeûne) et d’autres plus spécifiquement ignaciens : temps prolongé pour une meilleure connaissance mutuelle et quatre jours consacrés aux rencontres à deux pour demandes d’information sur d’éventuels candidats (la murmuratio).
Toujours dans l’esprit voulu par saint Ignace une congrégation ad electionem se dote toujours d’une commission De ambitu chargée de recevoir et examiner d’éventuelles plaintes sur des questions d’ambition ou des attitudes qui ressembleraient à une campagne en faveur ou contre un candidat.
L'autorité du supérieur général
Des « assistants » secondent le supérieur général dans son travail, sans avoir autorité décisionnelle. Leurs tâches sont réparties par zones géographiques (par exemple l'Amérique du Nord) ou par ministère (par exemple l'enseignement). Les assistants forment le conseil consultatif auprès du général.
Un « secrétaire de la Compagnie » est chargé de l'administration générale de la Compagnie. Il occupe une place importante. Au cours de l'histoire de la Compagnie, nombre d'entre eux devinrent supérieur général.
Le supérieur général a également un « admoniteur », dont le rôle est plus personnel et confidentiel.
Le général choisit le supérieur provincial de chaque « province » géographique.
Histoire des supérieurs généraux
Ignace de Loyola, fondateur de l'ordre, fut élu en « supérieur général » : il le resta jusqu'à sa mort en 1556. Peter Hans Kolvenbach, son 28e successeur, décida en de convoquer une congrégation générale — la 35e assemblée depuis la fondation de l'ordre en 1540 — pour lui demander d'être relevé de sa charge.
La congrégation générale s'est ouverte à Rome le . La demande du père Kolvenbach, âgé de 80 ans, fut acceptée le . Depuis la fondation de l'ordre, il est le premier général à voir sa démission acceptée. Le nouveau supérieur général Adolfo Nicolas a été élu le pour un mandat à vie, conformément aux constitutions de la Compagnie de Jésus. Trentième supérieur général, il démissionne à son tour, remplacé par Arturo Sosa le .
Liste des supérieurs généraux
Les dates entre parenthèses sont celles d’exercice du mandat de supérieur général de la Compagnie.
- Ignace de Loyola ( - )
- Jacques Lainez ( - )
- François Borgia ( - )
- Everard Mercurian ( - )
- Claudio Acquaviva ( - )
- Muzio Vitelleschi ( - )
- Vincenzo Caraffa ( - )
- Francesco Piccolomini ( - )
- Alessandro Gottifredi ( - )
- Goschwin Nickel ( - )
- Giovanni Paolo Oliva ( - )
- Charles de Noyelle ( - )
- Thyrsus González de Santalla ( - )
- Michelangelo Tamburini ( - )
- Franz Retz ( - )
- Ignacio Visconti ( - )
- Luigi Centurione ( - )
- Lorenzo Ricci ( - ) - En 1773, la Compagnie est universellement dissoute, Ricci n'a pas de successeur immédiat.
- Tadeusz Brzozowski ( - ) - Élu supérieur des jésuites en Russie en 1805, il est nommé « supérieur général » par Pie VII lorsque la Compagnie est universellement rétablie en 1814.
- Luigi Fortis ( - )
- Jean-Philippe Roothaan ( - )
- Pierre-Jean Beckx ( - )
- Anton Anderledy ( - )
- Luis Martín ( - )
- Franz Xaver Wernz ( - )
- Vladimir Ledochowski ( - )
- Jean-Baptiste Janssens ( - )
- Pedro Arrupe ( - )
- Peter Hans Kolvenbach ( - )
- Adolfo Nicolás ( - )
- Arturo Sosa Abascal (depuis le )
La Compagnie durant la période de suppression
La Compagnie de Jésus fut supprimée par le pape Clément XIV par le bref Dominus ac redemptor du , exécuté le . Il fut appliqué dans tous les pays catholiques et presque tous les diocèses. Cependant certains pays non-catholiques, essentiellement la Prusse, la Russie ou la Pologne sous domination russe, refusèrent la promulgation d'un bref pontifical dans leurs états. Un responsable dans ce pays fut élu supérieur des Jésuites locaux avec le titre de 'vicaire temporaire'.
Ce furent :
- Stanislaus Czerniewicz à partir du ;
- Gabriel Lenkiewicz du au ;
- Franciszek Kareu du au .
Le , Pie VII publia le bref Catholicae fidei, approuvant l'existence des jésuites en Russie et autorisant Franciszek Kareu à porter le titre de « supérieur général de la Compagnie de Jésus en Russie ». Ce fut la première étape vers la restauration de l'ordre.
Les « supérieurs généraux en Russie » furent :
- Franciszek Kareu à partir du jusqu'au ;
- Gabriel Gruber du au ;
- Tadeusz Brzozowski du au .
L'Ordre fut universellement restauré le par Pie VII par la bulle Sollicitudo omnium ecclesiarum.
Le supérieur général dans la fiction
Dans Le Vicomte de Bragelonne, troisième roman de la trilogie des mousquetaires d'Alexandre Dumas paru entre 1848 et 1850, Aramis devient « général des jésuites ».
Notes et références
Notes
- En fait les jésuites (y compris leur supérieur général), n'ont pas d'habit religieux réglementaire. Si on a pu voir le père Kolvenbach en soutane blanche en Inde, c'est que les prêtres portent habituellement là-bas une soutane blanche.
Références
Articles connexes
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