Pierre Dufau
Pierre Dufau, né le à Arras et mort le à Paris, est un architecte et urbaniste français. Il a été architecte des bâtiments civils et palais nationaux.
Pierre Dufau | |
Présentation | |
---|---|
Naissance | Arras |
Décès | Paris |
Nationalité | France |
Diplôme | DPLG en 1937 |
Formation | École nationale supérieure des beaux-arts, atelier Héraud |
Œuvre | |
Réalisations | centrale nucléaire de Chinon Tour UAP |
Distinctions | Premier second grand prix de Rome (1938) |
Pour les articles homonymes, voir Dufau.
Biographie
Jeunesse et formation
Pierre Dufau est le fils de l'architecte Albert-Joseph Dufau qui participa à la reconstruction dans le département de la Somme durant l'entre-deux-guerres. En 1928, il participa, avec son frère André, aux Jeux olympiques d'Amsterdam. Élève au lycée d'Amiens, il poursuivit, à partir de 1929, ses études d'architecte à l'École nationale supérieure des beaux-arts au sein de l'atelier de Gabriel Héraud. Architecte DPLG en 1937, il fut premier second grand prix de Rome en 1938.
Mobilisé le 27 août 1939, il fut affecté aux pompiers de Paris à Asnières et démobilisé en 1940[1].
La reconstruction d'Amiens
Le plan de reconstruction de la ville d'Amiens dont le centre ville avait été détruit par les bombardements de mai 1940, fut confié, après concours, à Pierre Dufau qui réalisa une première esquisse en octobre 1940.
Il modifia le viaire, en prévoyant l'élargissement et le redressement des voies, des places et en créant de nouvelles. Il élargit à 20 mètres la rue des Trois-Cailloux, principale artère du centre ville, pour en faire le contrepoint de l'axe historique Nord-Sud (rue Saint-Leu / Rue Saint-Fuscien). L'architecture allia la brique et la pierre, matériaux traditionnels de la Picardie. Il occupa le poste d'architecte en chef de la reconstruction d'Amiens jusqu'en 1954. Il fut architecte en chef du MRU puis architecte conseil du ministère de la construction de 1950 à 1976 pour les départements de la Somme, du Cantal et de la Lozère, de la Haute-Garonne puis des Hauts-de-Seine[1].
Un architecte international
Lancé après guerre grâce à sa réflexion particulière sur les immeubles de bureau destinés aux sièges sociaux, matérialisée dans l'immeuble de la rue Jean-Nicot, siège de la régie autonome des pétroles, aidé par un grand contrat pour la construction des bases de l'OTAN, lauréat de nombreux concours, il est à la tête d'une des plus grandes agences des Trente Glorieuses, avec plus de 600 réalisations à son actif. Le nombre d'affaires de tout genre enregistrées par l'agence dépasse le numéro étonnant de 1 500. Dans les années cinquante, une époque où les architectes français construisent encore assez peu à l'étranger, il réalise l'aérogare d'Accra puis l'ambassade de France à Phnom-Penh. Entre 1960 et 1962, il construit la Présidence de la République de Côte d'Ivoire. Le siège de la Royale Belge, réalisé en 1967 à Bruxelles avec René Stapels[2], est son œuvre majeure à l'étranger.
Il collabore à la construction de plusieurs centrales nucléaires, le radôme de la centrale de Chinon dont la photo sera reprise de très nombreuses fois pour illustrer le dynamisme de la Ve République.
En 1967, il est nommé architecte en chef du programme d'urbanisme Nouveau Créteil, à la suite de Jean Fayeton. Il dessine notamment les plans de l'Hôtel de ville (1972) et du centre hospitalier (1977). Ses associés sont, à partir de 1970, Jean-Pierre Dacbert, Michel Stenzel, Jean-Claude Moreau puis Olivier Dufau. Il réalise par ailleurs un très grand nombre de sièges sociaux et de tours dans le quartier de la Défense.
Un architecte engagé
Pierre Dufau est un architecte engagé. Grand Massier de l'École des beaux-arts de Paris, président de la fédération des étudiants de Paris en 38-39, il participe à l'élaboration de la loi Jean Zay sur la profession d'architecte dont il regrette qu'elle soit dénaturée par le gouvernement de Vichy. Celui-ci crée un Ordre des architectes qu'il combat souvent. De nombreux articles expliquent à la Libération les règles à promouvoir pour le logement social et l'élimination des taudis, travail qui le conduit à créer au Plessis-Trévise la cité d'urgence demandée par l'abbé Pierre. Il est l'auteur de plusieurs livres polémiques sur l'architecture de son temps, notamment Non à l'uburbanisme paru chez Flammarion en 1964 qui stigmatise les réglementations selon lui paralysantes qui génèrent une architecture débilitante et justement critiquée.
Pierre Dufau a défendu l'idée que l'architecte doit garder la plénitude de ses attributions, en privilégiant des « missions complètes », où l'architecte s'occupe d'un projet de la conception jusqu'à la réalisation, alors que les lois de Giscard d'Estaing sur le coût d'objectif et la tarification des missions nouvellement définies suggéraient à beaucoup d'architectes de se contenter des phases de conceptions (APS et APD, avant projet simplifié et détaillé). Il insiste sur la nécessité pour les architectes d'assurer le suivi des chantiers et de contrôler la technique. Il crée, avec l'OTAB, son propre bureau d'études.
Il pense qu'il appartient aux architectes d'associer les autres intervenants de la construction à la recherche de la meilleure architecture. Il crée en 1951 avec l'architecte Pierre Sonrel, Auguste Perret étant président fondateur et Walter Gropius et Wright membres d'honneur, le Cercle d'Études Architecturales pour rassembler des hommes de différentes disciplines autour d'une idée élevée de l'architecture. Dix huit ingénieurs des Ponts et chaussée rejoindront rapidement cette association, ainsi que des journalistes et des hommes politiques.
Architecte urbaniste
Il est non seulement architecte mais aussi urbaniste. Il a reconstruit une ville ancienne (Amiens) et construit une ville nouvelle (Créteil). Il est non seulement architecte pour la demande privée mais aussi Architecte en Chef des Bâtiments nationaux (nommé le 1er janvier 1967) et sera le concepteur de toutes les sortes de bâtiments publics : mairies, préfecture, palais présidentiel, ambassade, aérogare, abattoirs, caserne, palais des sports, hôpitaux, ministères, laboratoires, station de métro (Charles de Gaulle - Étoile) en émaux de Briare, pont (pont de Puteaux), etc. Son œuvre privée couvre l'ensemble des types de bâtiments possibles : logement social, logement de luxe, bureaux, usines, maisons particulières, maisons de campagne, restauration de patrimoine historique, hôtels, institut de thalasso-thérapie etc.
Il insiste constamment pour que la décoration soit intégrée dans les immeubles construits faisant travailler de nombreux artistes, peintres, sculpteurs et décorateurs. Devant l'immeuble de la rue Nelaton, actuellement Ministère de l'Intérieur et siège des grands services de la police nationale, il crée une fontaine, due à René Collamarini, qui est l'une des très rares construites à Paris intra-muros dans la seconde partie du XXe siècle. Il soigne la liaison avec les jardins et les pièces d'eau, comme en témoigne l'hôtel de ville de Créteil entouré d'une place en marbre figurant un effet de vagues ou le siège d'Axa (ex-Royale Belge) à Bruxelles, intégré dans un paysage de lac et de verdure ou encore la Préfecture de Bordeaux qu'il fait border d'une pièce d'eau.
Il donne beaucoup de temps aux institutions professionnelles qu'il considérait comme indispensables comme la Mutuelle des Architectes Français dont il dirige en particulier l'informatisation. Il participe, parfois jusqu'à la fin de sa vie à différentes instances nationale, Commission du Plan, Académie d'architecture ou internationale comme le Cercle d'études architecturales.
Distinctions honorifiques et décorations
- 1937 : diplôme d'honneur de l'exposition de 1937 ; Médaille d'argent de l'Académie d'art régional ;
- 1938 : premier second grand prix de Rome (il ne voulait pas du premier qui l'aurait forcé à aller dans la Rome de Mussolini) ;
- 1954 : chevalier de l'Ordre Royal de Saha Metrei du Cambodge ;
- 1957 : diplôme d'architecture de la Biennale de Milan ;
- 1959 : médaille d'or de la Société d'encouragement à l'art et à l'industrie ;
- 1960 : prix de la biennale de Venise pour le Centre des pilotes d'essai à Istres ;
- 1961 : officier de l'Ordre national du mérite de la République de Côte d’Ivoire ;
- 1962 : officier de la Légion d'honneur ;
- 1977 : grande médaille de vermeil de l'Académie d'architecture ;
- 1982 : diplôme du plus bel ouvrage de la construction métallique pour la centrale nucléaire de Paluel.
Principales réalisations
- 1944-1955 : reconstruction d'Amiens avec aménagement du parvis de la cathédrale.
- 1952-1956 : bases aériennes de l’USAFE (avec Grad Seelye) à Chaumont-Seymoutiers, Brienne-le-Château, Toul-Rosières, etc.
- 1952 : siège social de la Banque Louis Dreyfus, 6 rue Rabelais dans le 8e arrondissement de Paris.
- 1955 : centre d'essais en vol à Istres, dans les Bouches-du-Rhône.
- 1957 : Institut français du Pétrole, Rueil-Malmaison.
- 1957 : cité scolaire d'Amiens, Bd de Saint-Quentin.
- 1959 : immeuble Dunlop, 13 rue Murillo, dans le 1er arrondissement de Paris.
- 1959-1967 : centrale nucléaire de Chinon avec Jean Desmaret.
- 1959 : palais des sports de la porte de Versailles, dans le 15e arrondissement de Paris avec Parjadis de Larivière et Richard Buckminster Fuller.
- 1960 : immeuble Time and Life, avenue Matignon, dans le 8e arrondissement de Paris.
- 1960-1962 : siège de la société Elf, rue Nélaton, à l'emplacement de l'ancien Vel d'Hiv, actuellement locaux du ministère de l'intérieur.
- 1961 : Banque Stern, 8 rue de Penthièvre, dans le 8e arrondissement de Paris.
- 1962 : Palais de la Présidence de Côte d'Ivoire, hôtel du premier ministre et divers autres bâtiments, à Abidjan.
- 1962-1965 : siège du Commissariat à l'énergie atomique dans le 15e arrondissement de Paris.
- 1963 : Hôtel Hilton, en bordure de Seine, dans le 15e arrondissement de Paris.
- 1963 : Compagnie des compteurs, 100, route de Chartres, Massy-Palaiseau, en Essonne.
- 1964-1965 : ambassade de France à Phnom Penh (Cambodge).
- 1964 : petit immeuble mixte de bureaux et de logements au 4 rue Oudinot, dans le 7e arrondissement de Paris.
- 1964 : restauration du manoir de Beaumoulin, la Madeleine, près de Souppes-sur-Loing, en Seine-et-Marne
- 1966 : Palais des spectacles, Saint-Étienne.
- 1967 : centrale nucléaire de Chinon.
- 1967 : siège social de la société Royale belge, à Watermael-Boitsfort près de Bruxelles (Belgique).
- 1967 : siège social de la banque Rothschild, 21 rue Lafitte dans le 9e arrondissement de Paris.
- 1967 : Crédit national, 45 rue Saint-Dominique, dans le 7e arrondissement de Paris.
- 1966-1968 : aéroport d'Accra (Ghana).
- 1969 : Gare Charles de Gaulle - Étoile du RER A, 8e arrondissement de Paris.
- 1969-1974 : Tour Septentrion, La Défense, Courbevoie.
- 1970-1971 : usine Ducellier-Valéo à Étaples (Pas-de-Calais).
- 1971-1974 : Tour UAP, La Défense, Courbevoie.
- 1972-1974 : hôtel de ville de Créteil.
- 1972 : siège du groupe Total, 84 rue de Villiers à Levallois-Perret.
- 1972 : siège du groupe Pfizer, 86 rue de Paris à Orsay (Essonne).
- 1972 : siège de la banque Morin-Pons, avec J. L. Girodet, 177, rue Garibaldi, à Lyon.
- 1972-1975 : ilôt Vandamme comportant l'hôtel Sheraton devenu Montparnasse-Park, Meridien, puis Pullman, un immeuble de bureaux, un centre commercial, une bibliothèque et un immeuble de logements, rue du Commandant René Mouchotte, à Paris dans le 14e arrondissement de Paris. Pendant cet immense chantier, il utilise notamment les services du sculpteur et décorateur Yves Millecamps.
- 1972-1975 : centre commercial Créteil Soleil.
- 1973 : centrale nucléaire de Fessenheim.
- 1973-1975 : immeuble et drugstore Publicis, 133 avenue des Champs-Élysées dans le 8e arrondissement de Paris
- 1974-1975 : restauration de la Maison dorée et construction du siège de la direction internationale de la BNP, 16 bd des italiens dans le 9e arrondissement de Paris.
- 1974 : siège de la Compagnie Louis Dreyfus, dénommé le diamant bleu du fait de la couleur de sa façade en glace teintée, porte Maillot, dans le 16e arrondissement de Paris.
- 1975-1976 : siège social de la Snecma, aujourd'hui Safran, dans le 15e arrondissement de Paris
- 1975 : préfecture de la Gironde, Bordeaux.
- 1976 : laboratoire d'immunologie de l'hôpital Pasteur, 25 rue du docteur Roux, dans le 15e arrondissement de Paris.
- 1977 : pont de Puteaux, Hauts-de-Seine.
- 1977-1979 : centrale nucléaire de Paluel (Seine-Maritime).
- 1977-1980 : agrandissement de l'hôpital intercommunal de Créteil.
- 1977-1980 : hôtel Miramar, thalasso Louison Bobet à Biarritz.
Principaux ouvrages de l'architecte
- La France d’aujourd’hui : la profession d’architecte éd. Hatier, 1958-1964-1968
- Non à l’uburbanisme, éd. Flammarion, 1964 (coll. « Le Meilleur des Mondes »)
- (avec Albert Laprade), Pour ou contre la démolition de Paris, éd. Berger-Levrault, 1967
- Paris et la Province : L’urbanisation et le sens commun éd. La Table ronde, 1968
- (avec Yves Cazeaux), Programme et prospective dans la construction, éd. Berger-Levrault, 1969 (coll. « L’Administration nouvelle »).
- Un architecte qui voulait être architecte. Mémoires éditées posthumes par Londreys, 1989
Notes et références
- « Pierre DUFAU (1908-1985) Notice biographique », sur Cité de l'architecture et du patrimoine (consulté le ).
- Brochure des journées du patrimoine 2008 de la Région de Bruxelles-Capitale, p. 25.
Annexes
Bibliographie
- Joseph Abram, L'architecture moderne en France, du chaos à la croissance, 1940-1966, éd. Picard, 1999, p. 301
- Gilles Ragot dans Dictionnaire de l'architecture du XXe siècle, éd. Hazan/Ifa, 1996
- Notice de Gérard Gassiot-Talabot dans Dictionnaire de l'architecture moderne, éd. Hazan, 1964, p. 98
Articles connexes
Liens externes
- Ressources relatives aux beaux-arts :
- Site sur le centenaire de la naissance de Pierre Dufau
- « Fiche biographique, bibliographie, présentation et inventaire des archives », sur ArchiWebture, base de données de l'Institut français d'architecture, Cité de l'architecture et du patrimoine (consulté le ).
- Notice sur Structurae
- Portail de l’architecture et de l’urbanisme
- Portail du monde contemporain
- Portail de la France